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Intervention de Gaëtan Gorce

Réunion du 8 octobre 2009 à 15h00
Ouverture à la concurrence des jeux d'argent en ligne — Article 16, amendement 867

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaëtan Gorce :

Pardonnez-moi de revenir à la charge sur ce sujet. Si nous étions les seuls à défendre ce point de vue, nous pourrions finir par douter. Néanmoins, il ne suffit pas que le rapporteur s'escrime – c'est bien son talent – à nous convaincre, pour aboutir à ce résultat.

Pourquoi ? Nous observons d'abord que vous avez changé de point de vue, monsieur le rapporteur. Lors des débats en commission, nous avions présenté un premier amendement – sans doute mal formulé et mal écrit – qui posait ce problème de cumul de la détention de droits exclusifs de retransmission avec l'organisation de paris ou le contrôle d'un organisateur et avec la participation dans un club. Vous étiez alors vous-même convenu que ce cumul posait un véritable problème et que, si la rédaction de l'amendement était différente, il serait envisageable de l'adopter.

Vous aviez donc reconnu qu'il y avait un problème ; aujourd'hui vous dites qu'il n'y en a pas et que vous ne voyez pas l'intérêt de poser la question. S'il y a un problème, il faut trouver une réponse. Si notre amendement ne permet pas d'y parvenir, il faut que nous en cherchions une.

Ma seconde observation se fonde sur un élément nouveau : l'un des responsables de l'un des groupes les plus concernés, en l'occurrence Canal Plus, soulève lui-même le problème. Pour le coup, nous ne sommes pas dans le virtuel, mais totalement dans le réel. Si quelqu'un est bien concerné et possède une compétence et un savoir-faire sur le sujet, c'est bien le responsable de Canal Plus, son président, qui dit : il y a un risque et, d'un point de vue éthique, il n'est pas normal que nous puissions avoir le bénéfice de ces différents droits. Par conséquent, aidons-les – lui et ses concurrents – à respecter une meilleure éthique encore : adoptons une disposition qui écarte tout risque.

D'ailleurs, vous ne pouvez pas comparer la situation future avec celle qui prévalait avant quand n'existaient que deux interlocuteurs : un opérateur de télévision et un club. Entre les deux se situe maintenant un organisateur de paris sur lesquels viennent se greffer des enjeux financiers. La donne n'est plus du tout la même. Ce matin, à ma grande surprise, vous m'avez dit que vous ne voyiez pas où était le problème, monsieur le ministre. À l'évidence, il y a un problème et je ne suis plus le seul à le dire : le rapporteur, M. Méheut reconnaissent cette situation.

Reportons-nous à ce qui est devenu la bible de ce débat, si vous me permettez cette expression : l'arrêt Santa Casa du 8 septembre 2009 de la CJCE, auquel tout le monde se réfère depuis hier soir. La disposition 71 de cet arrêt ne vise pas explicitement la question du contrôle du capital, mais en pose une finalement assez voisine sur un sujet à la limite moins sensible que celui que j'évoque. L'arrêt indique en effet : « Par ailleurs, ne saurait être exclue la possibilité qu'un opérateur qui parraine certaines des compétitions sportives sur lesquelles il prend des paris ainsi que certaines des équipes participant à ces compétitions se trouve dans une situation qui lui permette d'influencer directement ou indirectement le résultat de celles-ci et ainsi d'augmenter ses profits. » C'est donc bien la question de l'augmentation du profit.

L'arrêt Santa Casa nous met en garde sur le parrainage, un sujet en retrait par rapport à celui que nous soulevons quant à nous sur le contrôle du capital et la propriété des sociétés concernées. Même lorsqu'il se pose de manière plus marginale, plus périphérique, ce problème est néanmoins soulevé, y compris par les autorités judiciaires européennes.

Je souhaiterais donc que le Gouvernement et le rapporteur prennent en compte ce grave et important problème qui va fausser la concurrence entre les différents opérateurs et créer des situations où les conflits d'intérêts risquent d'être permanents.

Vous souhaitez une clarification ; vous devez aller au bout de cette clarification. Je comprends bien que cela va mettre en colère certains grands groupes qui ont déjà décidé d'investir dans des sociétés de paris. Mais l'intérêt général prévaut face à la pression exercée par ces grands groupes et face aux demandes qu'ils expriment. Nous devons d'abord prendre en compte ce qui va d'abord avoir des conséquences sur notre intérêt public, notre ordre public.

Nous insistons sur cette question parce qu'elle est essentielle, et que la manière dont vous y répondrez – acceptation ou refus du cumul – traduit un état d'esprit. Nous ne sommes pas les seuls à la poser. Nous voudrions être sûrs que cette loi répond bien à l'objectif que vous voulez lui fixer : ne pas trop céder aux opérateurs privés et à des gens qui veulent faire des profits, et donc mettre les protections nécessaires.

Depuis le début de l'après-midi, ceux qui se sont le plus exprimés en la matière sont des députés de votre majorité. Je n'ai pas besoin de les citer, nombre d'entre eux sont encore présents dans l'hémicycle. À plusieurs reprises, ils se sont levés pour demander des garanties supplémentaires. Ils l'ont fait hier à propos des paris à cote fixe ; ils vous ont fait bouger – avec notre soutien – sur les bourses d'échanges ou sur d'autres aspects, telle l'implantation des équipements.

Autrement dit, l'inquiétude existe, et pas seulement dans l'opposition ; elle est partagée sur tous ces bancs. À ce stade, nous touchons à un point éminemment symbolique. J'insiste : nous ne souhaitons pas voir des situations où un même groupe financier pourra contrôler à la fois une équipe, les droits de retransmission d'un match, un opérateur de paris. Je pense que cette situation n'est pas saine.

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