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Intervention de Jean-François Lamour

Réunion du 7 octobre 2009 à 15h00
Ouverture à la concurrence des jeux d'argent en ligne — Discussion d'un projet de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-François Lamour, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

On estime en effet à 3 millions le nombre de Français qui jouent ou parient sur internet, pour la plupart illégalement – et ce nombre est en rapide augmentation.

Face à un phénomène d'une telle ampleur, il faut reconnaître que la prohibition totale est vouée à l'échec. Ma conviction est que seule la maîtrise de l'ouverture permettra d'encadrer et de réguler le développement des jeux et paris en ligne.

Je tiens également à saluer la qualité des travaux conduits par les deux rapporteurs pour avis, Étienne Blanc, au nom de la commission des lois, et Daniel Fasquelle, au nom de la commission des affaires économiques, qui, chacun sous un angle différent, ont éclairé notre compréhension du présent texte.

Comme le permet désormais le règlement de l'Assemblée, le texte dont nous sommes saisis est celui qui résulte des travaux de la commission des finances. Réunie fin juillet, celle-ci a examiné près de 300 amendements et a substantiellement modifié le texte initial. Je rappelle à cet égard la qualité, la transparence et le caractère constructif des débats en commission, qui ont permis l'adoption de 140 amendements, de la majorité comme de l'opposition.

L'examen en commission a renforcé la partie du projet consacrée à la prévention du jeu pathologique et de l'addiction. Le texte initial interdisait déjà les formes les plus addictives de jeux et de paris en ligne, comme les machines à sous virtuelles ou les paris à fourchette – spread betting en anglais –, jeu où l'on ne connaît pas ses pertes. Il était également prévu que les opérateurs agréés soient tenus d'empêcher les publics fragiles – mineurs et interdits de jeu – de jouer ou de parier en ligne. Les opérateurs devront enfin participer à la lutte contre l'addiction.

J'insiste sur le fait que le texte a pour but de protéger les publics les plus fragiles. Pour atteindre cet objectif, la commission des finances a donc ajouté plusieurs dispositions : l'interdiction du jeu à crédit, l'agrément des services publics ou privés d'assistance aux joueurs pathologiques et la mise en place d'un numéro de téléphone pour informer les joueurs des risques d'addiction, comme il en existe déjà pour le tabac, l'alcool ou les drogues – ADALIS, ex-DATIS.

Sur la proposition de notre collègue Gaëtan Gorce, le parrainage par des opérateurs de jeux en ligne des événements destinés aux mineurs a été interdit.

En accord avec le Gouvernement, un régime d'encadrement de la publicité a été introduit dans le souci, là aussi, de protéger les mineurs. Plusieurs amendements auxquels j'apporterai mon soutien ont été déposés afin d'étendre ces interdictions, notamment aux sites internet et aux projections de cinéma destinés aux enfants et aux adolescents.

Attention, néanmoins, à ne pas tomber dans une prohibition sans discernement. Le succès de l'offre légale de jeux et de paris en ligne dépendra étroitement de la capacité des opérateurs agréés à se faire connaître par la publicité et à évincer les sites illégaux.

Le deuxième point sur lequel je souhaite insister est le corollaire du premier. Les opérateurs agréés de jeux et paris en ligne seront soumis à de fortes contraintes et à une fiscalité moins favorable que celle en vigueur dans les autres pays européens. Il est donc essentiel, pour la viabilité même de l'offre légale, que celle-ci soit aussi protégée que possible contre la concurrence déloyale des opérateurs qui auront choisi l'illégalité.

Si l'offre illégale restait facilement accessible pour les joueurs français, la rentabilité de l'offre légale serait ruinée et par là même l'ambition du présent projet d'une ouverture régulée du secteur des jeux et paris.

C'est pourquoi les travaux en commission ont substantiellement renforcé les moyens de lutte contre les sites illégaux en faisant notamment de l'Autorité de régulation des jeux en ligne, l'acteur principal de cette lutte. Désormais, c'est l'ARJEL qui demandera aux fournisseurs d'accès à internet et aux hébergeurs de bloquer l'accès à ces sites illégaux. C'est également sur sa proposition que le ministre du budget demandera aux banques de bloquer les mouvements de fonds en provenance ou à destination de ces sites.

Alors que la discussion du projet de loi HADOPI 2 avait suscité beaucoup de craintes parmi nous, je tiens à souligner avec force que c'est l'accès aux sites illégaux – et seulement lui – qui sera bloqué. Il ne s'agira ni de couper l'accès à internet de nos concitoyens, ni de collecter leurs adresses IP, ni de restreindre leur liberté constitutionnelle de communication et d'expression. Ce sera probablement difficile tant l'inventivité des gérants de sites illégaux est grande pour contourner toute tentative de blocage ; reste que je suis convaincu que les FAI sauront trouver des techniques efficaces pour faire respecter la loi française.

De plus, des cyberpoliciers du ministère de l'intérieur et des cyberdouaniers du ministère des finances, spécialement habilités pour lutter contre les sites illégaux, pourront être mis à disposition de l'ARJEL qui centralisera ainsi l'ensemble des ressources humaines et matérielles afin de mieux lutter contre les sites illégaux. Qui mieux que cette autorité indépendante, monsieur le ministre, mes chers collègues, peut définir une politique de lutte contre ces sites, y affecter des moyens et en contrôler l'usage ?

Lutter contre les sites illégaux et assurer la viabilité de l'offre légale passe aussi par le renforcement de l'attractivité de celle-ci, mise à mal par une fiscalité parfois mal adaptée.

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