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Intervention de Éric Woerth

Réunion du 7 octobre 2009 à 15h00
Ouverture à la concurrence des jeux d'argent en ligne — Discussion d'un projet de loi

Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état :

Prenez le cas des États-Unis : le jeu en ligne y est interdit, mais l'échec de cette politique est tel que les revenus du marché illégal des jeux en ligne sont évalués à environ 9 milliards d'euros !

Tout fermer, tout bloquer : cela ne marche pas. Ce serait la stratégie de l'échec ; le gouvernement français n'empruntera pas cette voie.

Notre stratégie consiste à permettre l'émergence d'une offre légale structurée autour d'acteurs visibles et connus des joueurs. Les sites illégaux seront alors non seulement menacés par des outils techniques et juridiques, mais ils verront surtout leurs perspectives de développement réduites par la présence d'acteurs légaux dont la notoriété dépassera très rapidement la leur.

L'Italie, qui dispose d'un marché aussi attractif que le nôtre en matière de jeux, a déjà opté pour cette politique. Cela se révèle de plus en plus être un choix gagnant, puisque les mises sur les sites légaux ont quasiment doublé entre 2008 et 2009 pour atteindre plus de 2 milliards d'euros, au détriment des sites illégaux.

Le Gouvernement vous propose donc de mettre cette stratégie en oeuvre. L'objectif de ce projet de loi est de regagner le terrain perdu en créant une offre légale qui imposera la qualité et la sécurité, en complément des outils de lutte qui visent à accumuler les obstacles sur le chemin des sites illégaux. Les deux vont ensemble, et l'un ne peut pas aller sans l'autre.

Ouvrir et réguler : voilà notre projet. Ouvrir, mais de manière maîtrisée, avec un projet qui corresponde à nos objectifs, à nos principes, à nos conditions.

Si l'on veut bien prendre le temps de le lire et de l'analyser, le récent arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes conforte d'ailleurs notre position. Il indique très clairement qu'il revient à chaque État de définir ses propres règles en la matière, dans la mesure où les jeux en ligne concernent l'ordre public et social, ce que nous affirmons depuis le début.

Ainsi, ce projet de loi se fonde précisément sur le principe sur lequel est fondé l'arrêt Santa Casa : en matière de jeux, il appartient au législateur national de définir ses propres règles, parce que la définition de l'ordre public et de l'ordre social peut varier d'un pays à l'autre. N'opposons pas, comme l'ont fait certains, Santa Casa et le projet du Gouvernement. Ils sont bâtis sur le même socle : un État qui régule et qui encadre, et non pas un État qui regarde passer les licences de la reconnaissance mutuelle.

Cette ouverture doit être maîtrisée pour prévenir les risques liés aux jeux, et tout particulièrement aux jeux en ligne.

J'ai pu constater ce qu'il en était du risque d'addiction des joueurs en visitant à plusieurs reprises des centres spécialisés dans la lutte contre la dépendance aux jeux. Le risque concerne aussi les mineurs qui pourraient plus facilement accéder à ce type de jeux. Il y a aussi un risque de fraude et de blanchiment d'argent, et enfin un risque pour le monde des sports si les paris sont encadrés. Chacun de ces risques fait l'objet de mesures spécifiques de prévention dans le projet de loi.

Une ouverture maîtrisée est d'abord une ouverture avec un périmètre respectueux de nos objectifs d'ordre public et d'ordre social. Trois catégories de jeux sont concernées : les paris sportifs, les paris hippiques et le poker. Ils correspondent à la fois aux types de jeu et aux paris sur lesquels se concentre aujourd'hui l'essentiel de la demande des joueurs sur internet, et pour lesquels les risques d'addiction sont les plus faibles.

Les paris sportifs seront autorisés, sous la forme du pari mutuel ou du pari à cote – pari qui permet à l'opérateur de jeux de parier contre le joueur. Je l'ai dit, nous voulons assécher l'offre illégale. Or cette dernière forme de pari, qui existe en France et dans tous les pays d'Europe depuis 2001, représente aujourd'hui l'essentiel du marché.

Nous devons donc ouvrir les paris à cote, mais cette ouverture doit, elle aussi, être encadrée pour prévenir tout excès et tout conflit d'intérêts. Ainsi, les sportifs ne pourront pas parier sur les événements auxquels ils participent, et les paris ne seront autorisés qu'après qu'aura été recueilli l'avis des fédérations sportives concernées sur les catégories d'épreuves à retenir et sur les types de résultats pertinents comme supports de paris – elles sont les plus compétentes en la matière. Nous savons que tout type de pari, notamment le pari à cote, comporte des risques, en particulier des risques de fraude. Mais notre texte prévoit des dispositifs pour répondre à chacun de ces risques.

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