Autre artifice, il s'agirait de préserver l'ordre social et la santé publique. Permettez-nous de douter de cette volonté.
Il y a en effet un curieux paradoxe, pour des décideurs politiques, à vouloir, sous couvert de leur protection, exposer les joueurs à une publicité massive, pour, paraît-il, écraser une offre pléthorique de jeux en ligne drapée dans la légalité.
S'agirait-il alors de renforcer la lutte contre la fraude ? Là encore, le rapporteur a, par anticipation, procédé à un constat d'échec de la lutte contre l'offre illégale : la compétence territoriale des juges entrave les poursuites, l'évolution rapide des techniques ou des opérateurs rend difficile leur identification. Alors que la lutte contre les opérateurs illégaux n'a jusqu'alors donné aucun résultat probant en dépit d'un arsenal juridique existant, comment pouvez-vous marteler que la pub légale asséchera l'offre illégale ?
L'espoir qu'affiche votre gouvernement est une manière bien peu orthodoxe de faire de la politique. En matière de lutte contre la fraude, vous ne le savez que trop bien, monsieur le ministre, tout est affaire de volonté politique et de moyens au niveau national, et de priorités au niveau international.
Le fait que pas un des arguments massues développés par le Gouvernement ne puisse raisonnablement justifier l'ouverture à la concurrence ne peut que susciter notre inquiétude. Il dénote un manque flagrant de courage politique, à moins que ce ne soit tout simplement votre croyance au libéralisme qui vous aveugle.
Depuis le XIXe siècle, les gouvernements ont considéré que l'ordre public et social justifiait le maintien du régime général de l'interdiction des jeux et des paris. Avec ce projet, la concurrence devient la règle, dans la limite bien évidemment du respect de l'ordre public et social. Dès lors, la préservation de l'ordre social, la protection de l'ordre public et les enjeux de santé publique sont relégués du rang de garde-fous d'ordre public à celui de simples filets de sécurité aux mains d'une autorité administrative dont nous doutons qu'elle aura les moyens de mener à bien l'ensemble de ses missions.
Nous en sommes désormais convaincus, seuls les intérêts économiques et financiers ont présidé à l'élaboration de cette réforme, car la croissance des profits du secteur exprimés en milliards pèse à vos yeux beaucoup plus que les risques qu'elle comporte pour les citoyens.
Illustration est faite, s'il en était besoin, que ce gouvernement ne connaît qu'une valeur, celle du fric, et qu'il ne recule devant aucune hypocrisie pour satisfaire aux sacro-saints dogmes libéraux.
La protection du marché ou la création des conditions favorables à son développement semblent depuis longtemps précéder, en valeur politique, les préoccupations de santé publique. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)