Il aurait été tout indiqué de s'inspirer en l'espèce de l'exemple proposé par la démocratie américaine: selon l'article II section 2 de la Constitution, le Sénat doit donner « son avis et son consentement » sur les nominations effectuées par le Président, le droit de veto du Sénat relevant d'une majorité simple.
Le constat est sans appel, il n'y a dans le dispositif proposé ni veto sur le plan juridique ni effectivité du contrôle parlementaire sur le plan politique.
Autant dire que, compte tenu des conditions qui sont ainsi posées, l'objectif ne pourra être atteint. Tout ce dispositif est en fait un leurre et participe au marché de dupes qu'a pu constituer sur de nombreux points cette révision constitutionnelle, très en retrait des intentions affichées.
Toujours au regard de la distance que l'on peut parfois constater dans le passage du discours aux actes, je voudrais appeler votre attention sur un point contestable des textes que nous allons examiner ce soir.
Le texte du Gouvernement proposait en effet que le président de l'Autorité de sûreté nucléaire voie sa nomination avalisée par la commission de l'Assemblée chargée du développement durable, créée à la suite de la réforme constitutionnelle entraînant une réforme du règlement de notre assemblée. La création de cette commission est une très bonne chose, mais nous ne lui donnons pas le pouvoir qui devrait lui être conféré.
Or la commission des lois, sur proposition du rapporteur, a modifié le texte initial du Gouvernement – ce qui me paraît contraire aux missions de l'Autorité de sûreté nucléaire. Notre rapporteur veut faire passer le contrôle de la nomination du président de l'Autorité de sûreté nucléaire de la commission chargée du développement durable à la commission chargée des affaires économiques. Or la loi du 13 juin 2006 qui a modifié le statut de l'Autorité de sûreté nucléaire en lui conférant le statut d'autorité administrative indépendante est très claire quant aux missions de l'Autorité de sûreté nucléaire. Ces missions sont la transparence et l'information du public concernant les risques nucléaires, la protection de l'environnement, le contrôle du respect des règles générales et des prescriptions particulières en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection auxquelles sont soumises les installations nucléaires de base ou encore les transports de substances radioactives et les activités radiologiques. C'est donc tout à fait du ressort de la commission chargée du développement durable, dont le Président de la République nous dit qu'elle est le fruit des engagements pris lors du Grenelle de l'environnement et de sa politique qui donne prétendument la priorité à la question écologique. La nécessité d'une information transparente sur les risques environnementaux devrait nous amener à considérer, d'un côté, les opérations de production d'électricité, qui peuvent relever du domaine de la commission chargée des affaires économiques et, de l'autre, les opérations de contrôle de la sécurité de nos concitoyens, qui relèvent de la commission chargée du développement durable. Il est regrettable que notre rapporteur entretienne volontairement une confusion entre la production en amont et le contrôle de la sûreté de nos concitoyens en aval. Il rétablit ainsi une sorte de fausse tutelle de la commission chargée des affaires économiques sur la commission du développement durable, tutelle qui ne s'inscrit pas dans l'esprit de la réforme du règlement de notre assemblée lorsqu'elle a créé cette commission chargée du développement durable. Nous voyons là la contradiction entre l'affichage médiatique et la réalité du faible pouvoir qui sera conféré à cette nouvelle commission chargée du développement durable à l'Assemblée nationale. Je ne saurais trop, mes chers collègues, vous engager à revenir à plus de cohérence et, en l'occurrence, à revenir au texte initial présenté par le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)