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Intervention de Aurélie Filippetti

Réunion du 29 septembre 2009 à 21h30
Application du cinquième alinéa de l'article 13 de la constitution — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélie Filippetti :

… et la nomination du président de France Télévisions non plus par le CSA, mais par lui-même en conseil des ministres. La politique de civilisation du Président trouvait donc là sa traduction audiovisuelle.

Rétablir des normes : le fait du prince ;

Rétablir des critères : la docilité ;

Rétablir des repères: la défunte ORTF, où le menu du journal télévisé se faisait à l'Élysée ou à Matignon.

La politique du Gouvernement pour France Télévisions est peut-être la plus belle illustration de ce que le Président de la République entendait alors faire de son pouvoir de nomination. Non un outil permettant de nommer ceux qui ont fait leurs preuves, mais plutôt un instrument au service d'un pouvoir qui ne supporte aucune contestation, aucune limite.

Il aura fallu l'acharnement de l'opposition et l'esprit rebelle de certains de nos collègues de la majorité sur la loi de l'audiovisuel public pour que le Gouvernement consente à encadrer ce pouvoir de nomination qui dérivait....Mais je crains que l'on ne se soit, à dessein ou non, arrêté à mi-chemin. Nous abordons ce soir la mise en oeuvre de l'un des points-clés de la réforme constitutionnelle, qui s'inspire lointainement de procédures analogues existant aux États-unis avec la consultation du Senate Judiciary Committee avant la nomination à certains emplois publics par le président des États-Unis.

C'est un exemple parmi d'autres du consensus qui peut régner entre la majorité et l'opposition sur les principes exposés, mais aussi du désaccord, malheureusement, qui existe entre nous quant à la mise en oeuvre de ces principes, surtout lorsque, comme nous pouvons le constater, la pratique tourne le dos aux intentions initiales.

Le comité Vedel avait déjà relevé que la compétence générale reconnue en matière de nomination au Président de la République présentait « le double défaut d'être largement nominale et de s'exercer en outre dans une certaine confusion ».

En toute sincérité, nous pensons que la modification apportée à l'article 13 constitue un progrès : un débat est toujours plus utile que l'absence de débat. Cela répond à une aspiration largement exprimée par nos concitoyens : plus de transparence. Les Français veulent avoir la garantie que les nominations aux plus hautes responsabilités ne relèvent pas seulement du fait du prince et du bal des courtisans. Les Français veulent avoir la garantie qu'elles reposent bien sur la seule compétence des personnes ainsi désignées. Et qui mieux que nous est à même d'évaluer cette compétence ?

Les auditions parlementaires présentent effectivement plusieurs avantages indéniables par rapport au système actuel de nomination. Elles interviendront en effet à l'issue d'un processus plus transparent et les personnes pressenties seront contraintes d'exposer leur conception de leur rôle futur et la manière dont elles envisagent de remplir leurs fonctions. Dont acte.

Hélas, trois fois hélas, les débats qui ont eu lieu lors de l'examen de la loi constitutionnelle ont démontré que vous n'étiez pas prêts à mener vos bonnes intentions jusqu'à leur terme. La majorité a verrouillé le dispositif au-delà du raisonnable, en imposant pour le veto la majorité des trois-cinquièmes. Nous le déplorons.

En effet, si une majorité simple est opposée à l'avis du Président, c'est le signe que la personne pressentie n'est pas crédible à ce poste et qu'elle ne doit donc pas être retenue.

L'objet de cette disposition est bien de contraindre l'exécutif à présenter des personnalités incontestables, de faire en sorte que le lobbying, les récompenses, les amitiés passent après le critère de compétence et que l'on ne puisse appliquer à notre République cette belle maxime qui remonte à nos ancêtres – en tout cas les miens – les Romains : promoveatur ut amoveatur. Qu'on le promeuve pour qu'il cède la place.

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