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Intervention de Luc Chatel

Réunion du 12 mai 2009 à 17h15
Commission des affaires économiques

Luc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation :

Si nous travaillons sur un projet de reprise de Continental, monsieur Cinieri, c'est précisément pour maintenir le site de Clairoix.

Je confirme, madame Robin-Rodrigo, qu'il y a très peu de nouvelles commandes aéronautiques au premier trimestre, même si le carnet de commandes est rempli. Boeing sera touché sensiblement de la même manière qu'Airbus. Je me rendrai à Toulouse la semaine prochaine pour préparer notamment le salon du Bourget. Nous sommes en train de faire un point précis de la situation dans ce secteur.

Le Gouvernement a d'ores et déjà débloqué plusieurs milliards d'euros d'interventions pour permettre le financement des commandes passées par les compagnies aériennes et prévenir ainsi les annulations. C'est une bouffée d'oxygène pour EADS. Par ailleurs, les fonds Aerofund I et II sont disponibles pour aider les filières de la sous-traitance, notamment en fonds propres.

L'assurance-crédit est en effet, monsieur Piron, une des failles du dispositif. Pour y remédier, le Premier ministre a réuni récemment les assureurs crédit et nous avons mis en place un nouveau dispositif, Complément assurance-crédit plus (« CAP+ »), qui permettra d'intervenir là où l'assureur crédit s'est complètement retiré. Pour la couverture des risques, nous avons prévu une enveloppe de 5 milliards d'euros.

Pour ce qui est de l'évolution de la consommation des ménages, il faut souligner que la progression des parts de marché des hard discounters ne constitue pas une évolution récente : elle augmente en moyenne de 1 % par an depuis quinze ans. En outre, les populations défavorisées ne sont pas la seule clientèle de ces magasins. Les consommateurs « mixent » beaucoup leurs achats et des personnes favorisées peuvent répartir leurs achats entre les hypermarchés et les hard discounters. Du reste, une association de consommateurs publie ce mois-ci une enquête tendant à prouver que la qualité des produits proposés par les seconds n'est pas forcément inférieure à ce que l'on trouve dans les autres magasins.

M. Goua me demande ce que fait le Gouvernement pour les PMI. Mais toute notre politique vise à leur renforcement ! Si nous intervenons à 90 % dans les garanties OSEO, c'est pour les PMI. Et nous avons mis en place le pacte automobile précisément dans l'idée que les donneurs d'ordres ont une responsabilité envers toutes les PME sous-traitantes. C'est la première fois que les constructeurs intègrent cette notion dans leur réflexion. Au sein du comité stratégique pour l'avenir de l'automobile, que je réunis une fois par mois, les représentants des PMI ne manquent pas de signaler les problèmes qui peuvent intervenir dans l'application du code de bonnes pratiques signé par les acteurs.

De même, les CODEFI et la médiation du crédit concernent essentiellement les PMI.

M. Philippe Armand Martin m'a interrogé sur les friches industrielles qui pourraient résulter de fermetures d'usines. Lorsqu'il dispose d'un moyen d'intervention, le Gouvernement favorise bien entendu la reprise des sites par les collectivités locales. Encore faut-il que les industriels propriétaires l'acceptent. Le Gouvernement peut mettre cet élément dans la balance – et il l'a fait à plusieurs reprises – lors des négociations autour de la fermeture d'un site. On peut très bien envisager une intervention de cette sorte pour inciter le groupe Trèves à céder à la communauté de communes d'Aÿ le site qui vous est cher, monsieur Martin, s'il existe derrière un projet de réindustrialisation.

C'est un dossier très difficile et je comprends très bien l'émoi des salariés et des élus. Le fonds de modernisation des équipementiers automobiles était confronté à un choix : le groupe Trèves est-il stratégique pour la filière automobile en France ? Le fonds a estimé que c'était le cas, dans la mesure où ses activités dans le domaine de l'isolation des véhicules et du textile sont très importantes pour l'ensemble de la chaîne de valeur de la sous-traitance automobile. Nous avons donc décidé – ainsi que les constructeurs représentés dans le fonds – d'intervenir à hauteur de 55 millions d'euros. Malheureusement, le groupe allait mal depuis longtemps. Nous savions que des restructurations industrielles devraient intervenir et qu'elles impliqueraient des suppressions de postes. Nous essayons d'accompagner au mieux les salariés concernés, en concertation avec les élus.

Vous déplorez, madame Massat, que le montant du fonds de revitalisation des territoires – 50 millions d'euros – soit insuffisant. Or le fonds est abondé et, par effet de levier, il s'élève à 150 millions d'euros. De plus, il est très peu utilisé alors qu'il est précisément destiné à compenser les suppressions de postes dans les plus petites entreprises, ce qui n'était pas prévu jusqu'à présent.

Par ailleurs, le Gouvernement s'est montré très vigilant quant aux contreparties de la part des constructeurs automobiles. Nous n'avons fait aucun cadeau, aucun don : nous avons emprunté sur les marchés l'argent qu'ils ne pouvaient plus emprunter eux-mêmes et nous le leur avons prêté. Ils ont signé les contreparties que nous leur avons demandées ; d'abord des garanties en matière de gouvernance (rémunération et versement des dividendes) ; ensuite des engagements vis-à-vis des sous-traitants (participation au fonds de modernisation des équipementiers automobiles) ; enfin, la non-fermeture de sites industriels en France.

Monsieur Priou, c'est le Président de la République lui-même qui a décidé, l'été dernier, d'augmenter la participation de l'État au capital de STX France – la filiale française du groupe coréen – afin de disposer d'une minorité de blocage. Nous aurons donc notre mot à dire au sujet d'éventuels choix stratégiques des chantiers de l'Atlantique. Le projet de porte-hélicoptère, sur lequel j'ai travaillé avec Hervé Morin, est de nature à pérenniser l'activité du site.

Nous soutenons fortement le projet ULCOS, madame Filippetti. Nous avons obtenu d'Arcelor-Mittal qu'il choisisse le site de Florange parmi plusieurs autres en Europe. Cette expérience de captage de CO2 est fondamentale. Il va de soi que le projet sera accompagné par des fonds européens et par des investissements nationaux, mais nous n'avons aujourd'hui procédé à aucun tour de table car le montant global n'est pas encore défini. Quoi qu'il en soit, le Gouvernement s'est battu pour le choix du site, il se battra pour le financement.

L'avenir de la sidérurgie en France mériterait de plus amples développements. Quelques chiffres seulement : la baisse d'activité d'Arcelor-Mittal est de 40 à 80 %. Le choc est donc d'une violence extrême. Pour autant, je ne pense pas que la sidérurgie n'ait plus d'avenir. La crise rendra nécessaires des adaptations et des reconversions qu'il faudra accompagner. Le Gouvernement s'y emploie. Le préfet de la région Lorraine a organisé récemment deux réunions consacrées à la mise en place de la convention de revitalisation des territoires pour ce qui est de la fermeture du site de Florange. L'avenir de la sidérurgie en Lorraine passe par des investissements dirigés vers l'innovation.

La dotation totale du FSI est de 20 milliards d'euros, avec une partie d'apports en nature – les participations de l'État dans certaines entreprises – mais avec aussi de nouveaux engagements qui s'élèvent à 6 milliards d'euros. À ce jour, le FSI a engagé quelque 115 millions d'euros dans cinq entreprises ; 18 dossiers sont très avancés et devraient rapidement se concrétiser ; une quarantaine d'autres sont en début d'instruction. Le FSI a également investi dans le fonds de modernisation des équipementiers automobiles – c'est la part des 200 millions d'euros de l'État. Nous avons un potentiel d'investissement dans le secteur de la santé. Nous nous sommes également engagés à investir dans le capital d'Heuliez.

Nous avons scrupuleusement veillé, monsieur Tardy, à ce que le fonds soit dirigé par des professionnels du capital-investissement et du capital-risque. Le comité d'engagement est très vigilant quant à la nature des dossiers traités et au bien-fondé de l'investissement en fonds propres de l'État dans telle ou telle entreprise. Il ne s'agit pas de faire des « coups » à court terme, mais de permettre un développement industriel soutenu par une vraie stratégie à moyen et long terme, ainsi que la reconstitution de tours de table permettant des prises de participations nouvelles. Certains fonds internationaux sont vendeurs : c'est l'occasion de ramener en France les centres de décision de certaines belles industries.

Vous soulevez à juste titre le paradoxe des délais de livraison dans l'automobile, monsieur Nicolas. Le phénomène s'explique d'abord par l'inadéquation de l'offre et de la demande : la situation est tendue pour les véhicules qui se vendent bien alors qu'il existe des stocks pour des véhicules moins vendus. Mais un autre phénomène tend à se répandre : les conflits sociaux chez certains sous-traitants ont provoqué le blocage de sites de production pendant plusieurs jours. Les conséquences commencent à être sensibles, notamment pour le groupe Renault.

En ce qui concerne l'industrie pharmaceutique, le Gouvernement réunira prochainement le comité stratégique des industries de santé (CSIS). Il a beaucoup travaillé avec les acteurs pour mettre en place une politique de filières. Il faut assumer la mutation d'un secteur stratégique où la France est bien placée. Des emplois vont disparaître – ceux des visiteurs médicaux, par exemple –, d'autres vont se créer, notamment en recherche et développement.

Les commissaires à la réindustrialisation, madame Marcel, ont précisément pour rôle de coordonner les moyens et les actions de l'État dans les départements concernés. Ce n'est pas au niveau des petites entreprises qu'ils interviendront, mais à celui des restructurations affectant tout un bassin d'emploi – sachant que, dans une petite ville, la suppression de 100 emplois représente un drame économique. Sous l'autorité des préfets, ils mettront en oeuvre la politique de l'État et assureront la coordination avec les collectivités locales.

Nous poursuivons notre travail sur le dossier Heuliez, monsieur Morisset. Nous avons rencontré beaucoup d'investisseurs potentiels. Le Gouvernement a pour objectif de trouver un repreneur de l'activité traditionnelle de l'entreprise – l'emboutissage – et de réaliser un tour de table pour une nouvelle entreprise organisée autour de l'activité électrique. L'engagement du FSI sera d'au moins 10 millions d'euros. Je recevrai prochainement les représentants du personnel pour les informer de l'état d'avancement des discussions.

L'action des commissaires à la réindustrialisation sera, je le répète, de coordonner les moyens de l'État dans les régions en difficulté, en faisant appel au CIRI lorsqu'une entreprise affronte de graves difficultés, au FSI pour des participations en fonds propres, ou au médiateur du crédit le cas échéant.

Cela dit, monsieur Saint-Léger, il n'est pas nécessaire qu'il y ait un commissaire pour activer ces outils. Les commissaires apportent des moyens supplémentaires de coordinations dans les régions victimes de grosses restructurations, où les préfets sont quelque peu débordés.

Je précise, monsieur Garot, que les petites et moyennes industries – décolletage, plasturgie, etc. – sont bien la cible du pacte automobile. Je me suis déplacé dans les régions principalement concernées pour présenter ces mesures dont la mise en oeuvre est assurée par les préfets de région. Les contreparties existent. Ainsi, nous exigeons au moins 10 jours de formation pour les salariés en contrepartie de l'extension du dispositif de chômage partiel.

Le souci de compétitivité, monsieur Benoit, est ce qui guide notre action depuis deux ans. Les mesures structurelles que nous avons prises sont destinées à notre industrie. Faire passer le crédit d'impôt recherche de 10 à 30 % de dépenses de R & D, c'est une mesure de compétitivité, sans laquelle, par exemple, Sanofi-Aventis n'aurait pas réalisé une grande unité de biotechnologies en France. La suppression de la part « investissements » de la taxe professionnelle cette année, puis la suppression totale de cette taxe l'année prochaine, est également une mesure de compétitivité, tout comme la suppression de l'impôt forfaitaire annuel.

Nous poursuivons notre réflexion au sujet d'autres mesures mais sans aller jusqu'à celle que vous évoquez : on imagine mal une augmentation de la TVA sur la restauration quinze jours après son abaissement !

Pour ce qui est de l'approvisionnement en gaz naturel, madame Got, je vous renvoie à M. Jean-Louis Borloo, qui est le ministre compétent en matière d'énergie.

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