Un mode de scrutin uninominal pour l'élection des députés m'a toujours paru consubstantiel à nos institutions. Les députés sont les représentants personnels de leurs électeurs. Je refuse la proportionnelle parce que je refuse qu'ils soient désignés par un parti et qu'ils en deviennent les outils. Ce qui est en cause ici, c'est le respect porté aux parlementaires, lesquels ne sont pas des sémaphores condamnés à lever la main quand on le leur demande : ils doivent exprimer les opinions et les sentiments qu'ils pensent être ceux de leurs électeurs. C'est ainsi qu'on doit élaborer la loi ! Il y a eu, certes, des excès pour retarder au maximum les débats au moyen d'un nombre absurde d'amendements, mais, pour y remédier, on tombe dans l'excès inverse.
Vous rendez-vous compte qu'on est en train de tuer notre racine même, cette fameuse fonction tribunicienne qui consiste à parler pour défendre les sans-voix ? Deux exemples récents montrent qu'il ne faut pas s'engager sur ce chemin. Hier, un de nos collègues non-inscrits n'a pas pu prendre la parole lors des questions au Gouvernement parce qu'il arrivait en dernière position sur la liste – c'est un signe qu'il n'y a déjà guère de place dans le système actuel pour eux, qui ont pourtant la même légitimité que les autres députés. Et à propos de la loi HADOPI – à laquelle au moins un député socialiste est favorable et des membres de la majorité hostiles – M. Tardy ne s'est pas vu accorder le temps de parole qu'il avait demandé dans la discussion générale. Dans le système du temps programmé, les auteurs d'amendements dissidents seront mis hors course par la commission et le Gouvernement sans avoir pu défendre leur point de vue. Cela touche à ce qu'il y a de plus essentiel dans notre fonction.