Votre budget était attendu avec impatience, madame la ministre. Vos déclarations sont très volontaristes et nous ne pouvons qu'adhérer aux objectifs affirmés.
Mais, dans le détail, on s'aperçoit que, comme j'en avais déjà fait la remarque l'année dernière, les crédits des laboratoires publics et des organismes publics sont en baisse, ce qui va placer la France en dix-huitième place – au lieu de la quatorzième il y a deux ans – pour la recherche publique, avec un taux de 2,08 % du PIB, en régression de deux dixièmes de point par rapport à l'année dernière. Cela nous éloigne encore des objectifs de Lisbonne.
Les raisons sont à rechercher dans un peu de passe-passe budgétaire, les autorisations d'engagement n'étant pas suivies de crédits de paiement réels – l'année dernière, un certain nombre de ces crédits de paiement n'avaient pas été engagés – et l'accent mis, comme cela a été souligné par mes collègues avec des appréciations différentes, sur le crédit d'impôt recherche, c'est-à-dire sur la recherche privée. Si tout le monde est d'accord pour soutenir la recherche privée, puisqu'elle est déficiente dans notre pays par rapport à d'autres pays européens, on peut s'interroger sur l'augmentation prévue du crédit d'impôt recherche – 44,6 % – alors que les crédits pour la recherche publique ne croissent que de 1,07 %, ce qui correspond en réalité à une diminution puisque l'inflation est à 1,9 et devrait même être un peu supérieure à la fin de l'année.
Après en avoir discuté au sein des pôles de compétitivité ainsi que des grands groupes et des PMI-PME, il semble y avoir une dérive dans l'utilisation du crédit d'impôt recherche. S'il existe des pôles de compétitivité vertueux où le taux d'implication des PMI-PME et des laboratoires publics est important et où les grands groupes jouent bien un rôle moteur, ce n'est pas le cas dans la majorité d'entre eux. Il serait urgent, madame la ministre, de mettre en place une mission d'évaluation de l'utilisation de ce crédit, afin de vérifier s'il poursuit bien ses missions d'entraînement des PMI-PME dans des projets coopératifs. Il semble, en effet, que ces crédits, placés en haut de bilan, servent à tout autre chose.
Cela a évidemment un impact sur le budget des organismes publics. Il a été décidé la suppression de 900 postes – dont près de 200 postes d'enseignant – dont la moitié concerne les organismes : on dénombre 296 suppressions de postes au CNRS, 86 à l'INRA et 59 à l'INSERM. L'INRIA échappe à cette diminution de postes parce qu'elle a une pyramide des âges beaucoup plus basse et parce que les termes du contrat conclu avec l'État prévoient des recrutements importants.
On ne peut que se féliciter de la revalorisation du statut de chercheur, qui devrait inciter les jeunes à se lancer dans le métier de chercheur, puisque l'on note aujourd'hui une désaffection des jeunes pour celui-ci. Mais le nombre des postes disponibles dans des organismes comme le CNRS diminue du fait non seulement des suppressions de postes prévues mais aussi de l'absence d'abondement budgétaire complémentaire. Les investissements du CNRS dans les laboratoires publics, qu'il s'agisse de projets mixtes ou de projets dans lesquels il est chef de file, baisseront d'autant, ce qui est ennuyeux pour les projets de recherche publique.
La réserve de précaution est un autre sujet de préoccupation. M. Lasbordes a exprimé le souhait de maintenir les taux au niveau existant en 2008. Les chiffres qu'il a cités concernaient plus le CEA que le CNRS, mais je partage son point de vue.