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Intervention de Jean-Luc Darlix

Réunion du 17 décembre 2008 à 10h30
Commission des affaires économiques

Jean-Luc Darlix :

Mesdames, Messieurs les députés, je vais tout d'abord me présenter, vous exposer mon parcours professionnel et évoquer ensuite quelques considérations générales sur les manipulations génétiques au niveau moléculaire et la création d'organismes génétiquement modifiés. Marié, père de quatre enfants, de nationalité franco-suisse, je possède des diplômes en chimie générale, chimie organique, physique expérimentale, biochimie, physiologie animale, biologie, microbiologie et physiologie. Je suis titulaire d'un DEA en microbiologie et clinique et d'un doctorat ès sciences naturelles. J'ai tout d'abord travaillé comme ingénieur au commissariat à l'énergie atomique avant d'être chargé de recherches à l'Université de Genève en biologie moléculaire. Plus récemment, j'ai fondé et dirigé l'unité de virologie humaine de l'INSERM et de l'Ecole Normale Supérieure de Lyon qui travaille notamment sur les virus HIV et EBOLA. Depuis janvier 2003, je suis directeur de recherches à l'INSERM, responsable du Laboratoire des Rétrovirus.

Suite à la levée du moratoire sur les manipulations génétiques et la création d'organismes génétiquement modifiés instaurée par la Conférence d'Asilomar en 1975, j'ai commencé en 1982 à créer des micro-organismes génétiquement modifiés. J'ai notamment travaillé sur le développement des premiers vecteurs lentiviraux : il s'agit de nanosphères très stables que l'on retrouve chez l'homme et chez l'animal mais également chez les plantes et qui sont à la base de la transgénèse moléculaire. Les vecteurs rétroviraux ont notamment été utilisés dans la recherche du fonctionnement neuronal chez la souris. J'ai ainsi à mon actif un grand nombre de publications parues dans des revues de renommée internationale et je suis membre de l'editorial board de « Retrovirology ».

J'ai par ailleurs été membre de la Commission du génie génétique (CGG), présidée par Roland Rosset, à qui je tiens à rendre hommage, qui était chargée de rendre des avis sur l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés. A ce titre, j'ai pu examiner un nombre très important de dossiers ayant trait aussi bien aux plantes qu'aux animaux ou aux bactéries. La mission de la CGG était de proposer à l'autorité administrative les mesures de confinement appropriées pour prévenir les risques liés à l'utilisation des organismes génétiquement modifiés et de délivrer les agréments aux installations utilisant des OGM en milieu confiné. Dans le cadre de l'examen des dossiers soumis à la commission, le rôle de ses membres était plus spécifiquement d'étudier :

– le trinôme transgène-donneur-receveur correspondant au vecteur ;

– les buts de l'utilisation du ou des vecteurs, ainsi que les conditions expérimentales ;

– les buts de l'utilisation de l'OGM ;

– les risques spécifiques afférents à la manipulation de MGM hautement ou extrêmement pathogènes pour l'homme et les animaux (HIV, EBOLA, Influenza H5N1…) ;

– les classements préconisés en fonction dudes gènes vectorisés, du type de vecteur et des éventuels dysfonctionnements physiopathologiques connus ou supposés causés par ces OGM-MGM ;

– la possibilité de dissémination dans le milieu confiné, chez l'utilisateur et dans l'environnement ;

– la possibilité de mobilisation du vecteur par un autre agent pathogène ;

– l'éventualité de modifications de l'expression génique par mutagenèse insertionnelle, recombinaison ou autre.

Précision importante, la CGG émettait également des recommandations de portée générale pouvant être rendues publiques (guide et normes par exemple) et pouvait se saisir ou être consultée par toute personne publique ou privée sur toute question qui se rapporte au génie génétique. J'ai par ailleurs été amené à apporter mon expertise dans le cadre des travaux de la Commission du génie biomoléculaire qui, elle, intervenait dans le cadre des autorisations de dissémination d'OGM au champ à des fins de recherche et de développement ou de mise sur le marché.

S'agissant du Haut conseil des biotechnologies, l'organisation du travail doit être axée autour des échanges entre chaque comité et la présidence ainsi qu'entre les deux comités. Pour assurer le bon fonctionnement du Haut conseil, des moyens humains et matériels suffisants sont indispensables : des salles de réunion, un secrétariat, un budget récurrent et un budget exceptionnel notamment afin de permettre l'organisation de réunions publiques et le recours à des experts extérieurs en particulier étrangers. La question du règlement intérieur est également très importante. Celui-ci devra en effet définir les modalités de nomination et de rémunération des experts ainsi que leur statut. A cet égard, un devoir de réserve sera imposé aux experts sur tous les dossiers examinés. Le règlement intérieur devra également arrêter les procédures d'examen détaillé ou rapide des dossiers qui sont soumis au Haut conseil en fonction des utilisations projetées.

Il me semble par ailleurs que le Haut conseil devra se fixer pour objectif de répondre à un certain nombre de questions pour l'avenir. J'en vois plusieurs :

– la première concerne la multiplication du nombre de vecteurs : à terme on prévoit la production et la commercialisation de 100 000 lentivecteurs ayant un large spectre d'hôtes potentiels ;

– la deuxième porte sur les nouveaux protocoles de transgénèse facilitant la création d'OGM utilisés en milieu confiné. Je pense aux lentivecteurs, aux adénovecteurs, aux AAV, aux baculovecteurs, aux vecteurs mixtes, qui sont tous des vecteurs stables facilement utilisables et en partie commercialisés. Je pense également aux co-cultures de bactéries recombinantes avec les plantes pour générer des plantes génétiquement modifiées avec une grande efficacité. Enfin, je pense aux nanoparticules vectorisant des ADN, des peptides ou de simples molécules pénétrant de façon efficace dans les cellules et les animaux ;

– la troisième est la multiplication des OGM utilisables en milieu non confiné ;

– la quatrième a trait aux modalités de suivi des autorisations délivrées et notamment des agréments délivrés dans le cadre des utilisations confinées d'OGM et de leur respect. Elle implique également la mise en place d'un suivi médical des personnels manipulant des organismes et des micro-organismes génétiquement modifiés ainsi que l'organisation de visites de contrôles sur les sites concernés ;

– enfin, en dernier lieu, la question de l'information du citoyen me paraît cruciale.

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