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Intervention de René Dosière

Réunion du 25 mars 2009 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRené Dosière :

La crise qui a atteint l'outre-mer ces dernières semaines a au moins eu le mérite de faire prendre conscience aux Métropolitains que la France dispose d'un outre-mer. Jusque-là, les débats au sein même de la représentation nationale n'intéressaient, sauf quelques exceptions, que les députés de l'outre-mer, et le souci d'un consensus entre eux n'aboutissait d'ailleurs qu'à des textes bien insipides et ne réglant pas les vrais problèmes.

Je souhaite donc que les députés prennent conscience des problèmes de l'outre mer et j'en profite pour regretter que vous refusiez, Monsieur le Président, d'envoyer une mission d'information restreinte en Nouvelle-Calédonie, où la Commission des lois n'a pas mis les pieds depuis près de cinq ans. La pire des choses serait de laisser aux seuls députés calédoniens le soin de régler le dossier : si l'on veut sortir la Nouvelle-Calédonie de ses rivalités politiques, il faut que la représentation métropolitaine s'en préoccupe un peu.

Je regrette que les autorités françaises aient mis tant de temps à réagir à cette crise. Lorsque plusieurs dizaines de milliers d'habitants manifestent, ce qui a été le cas au tout début du conflit, cela mérite un peu d'intérêt. C'est pour cela qu'elles se sont retrouvées dans une situation dont il était très difficile de sortir. Si le tiers de la population avait manifesté dans un département métropolitain, le ministre de l'intérieur, qui se trouve également être le ministre de l'outre-mer, s'en serait certainement préoccupé plus rapidement.

Quant aux protocoles d'accord, notamment celui de la Guadeloupe, on voit bien qu'ils ne règlent rien. Certes, ils prévoient une diminution des prix, loyers ou impôts et une augmentation des salaires, mais rien sur le plan de l'économie endogène. Or ces collectivités insulaires ont des problèmes particuliers.

Étant des départements – et très attachées d'ailleurs à la France –, elles ont revendiqué l'égalité sociale : le niveau des prestations s'y est donc progressivement rapproché de celui de la métropole. L'emploi public y représente plus de la moitié des emplois et le niveau des salaires et rémunérations est considérablement supérieur à celui de leur environnement, ce qui crée des effets d'appel considérables, surtout à Mayotte ou en Guyane. Le secteur privé n'est pas concurrentiel mais monopolistique. Il existe des rentes de situation, qui créent des prix hors de proportion. Il est donc très difficile de faire émerger un véritable secteur privé avec des rémunérations attractives – d'autant que les rémunérations du secteur public sont majorées. C'était sans doute nécessaire dans les années 1950, mais aujourd'hui la plupart des fonctionnaires métropolitains qui vont en poste outre-mer le font non par intérêt pour la région, mais pour profiter au maximum des avantages prévus en termes de rémunération, vacances, déménagements et primes diverses. Les fonctionnaires locaux étant traités de la même façon, cela a une répercussion sur l'ensemble des salaires.

Par ailleurs, compte tenu de liens économiques forts et anciens, la quasi-totalité des produits de l'économie sont importés de métropole. On distribue dans les rares cantines des pommes venues de métropole ! Entre la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie, les relations sont rares, mais elles sont fréquentes entre chacune des deux et Paris. L'ancien système des relations coloniales a donc été maintenu dans les flux économiques, et crée un véritable problème : l'économie de ces territoires est aujourd'hui anormale – à côté de la normale. Les jeunes, qui sont de plus en plus formés, ne peuvent guère trouver un emploi en dehors du service public.

Je me réjouis que, depuis cette crise, le Gouvernement envisage un changement d'optique. Les problèmes qui se posent ne pourront pas être résolus rapidement mais ce projet de loi peut être intéressant. Reste à voir dans quelles conditions il sera mis en application. Toutefois, il a été élaboré avant la crise dans les Antilles et même si de nouvelles dispositions ont été ajoutées, il faudra après les États généraux revoir l'ensemble de notre politique de développement économique outre-mer.

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