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Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Réunion du 20 juillet 2009 à 16h00
Évolution institutionnelle de la nouvelle-calédonie et de mayotte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

S'inscrivant dans le prolongement de ces dynamiques, ce projet de loi organique et le projet de loi ordinaire qui l'accompagne ont ainsi un objet double : d'une part, franchir une nouvelle étape dans l'application du processus défini par l'accord de Nouméa en organisant les nouveaux transferts de compétences devant intervenir en direction de la Nouvelle-Calédonie ainsi qu'en actualisant ses institutions ; d'autre part, il s'agira de donner une première traduction juridique à la volonté des Mahorais en inscrivant dans la loi organique l'existence du département de Mayotte.

Après les premiers transferts de compétences opérés dès 1998 et concernant des domaines tels que la gestion des ressources naturelles, le commerce extérieur ou encore l'élaboration des programmes de l'enseignement primaire, la Nouvelle-Calédonie s'apprête désormais à se voir transférer, aux termes de l'accord de Nouméa, de nouveaux domaines de compétences. Cette nouvelle série de transferts concernera ainsi des compétences déterminantes telles que les règles concernant l'état civil, l'élaboration des règles et la mise en oeuvre des mesures intéressant la sécurité civile ou encore l'enseignement du second degré. J'ajouterai que, conformément à l'article 77 de la Constitution, ces transferts ont une dimension définitive, quels que soient le moment et le résultat de la consultation d'autodétermination qui est prévue et dont, naturellement, les élus centristes nationaux et locaux souhaitent qu'elle permette le maintien dans la République dans le cadre d'une autonomie extrêmement large.

Aux termes de la loi du 19 mars 1999, ces transferts et leur échéancier doivent être décidés avant le 30 novembre de cette année. Il apparaît pourtant, aux yeux du comité des signataires de l'accord de Nouméa lui-même, que certains de ces transferts ne peuvent en l'état intervenir dans de bonnes conditions, notamment en ce qui concerne l'état civil, le droit civil et commercial, ainsi que la sécurité civile. C'est de manière pragmatique que ce projet de loi organique propose en premier lieu de permettre à ces transferts d'intervenir de manière plus progressive, dans l'intérêt de la Nouvelle-Calédonie elle-même.

De même, et afin que ces transferts s'opèrent dans les meilleures conditions possibles, il est également proposé de renforcer les garanties afférentes à leur accompagnement par l'État. Les modalités de calcul des compensations financières seront ainsi alignées sur celles déjà mises en oeuvre dans l'Hexagone depuis la loi du 13 août 2004 ; il sera d'autre part prévu que les services de l'État en charge de certaines missions amenées à être transférées seront mis à la disposition de la Nouvelle-Calédonie dès l'entrée en vigueur effective du transfert. Il ne s'agit donc pas, à la faveur de cette loi organique, de remettre en cause d'une quelconque manière le processus défini par l'accord de Nouméa, mais, bien au contraire, de le conforter en l'ajustant aux contraintes et aux difficultés qui se sont fait jour depuis dix ans.

Amener la Nouvelle-Calédonie vers l'autodétermination implique toutefois, outre la poursuite des transferts de compétences, de permettre la montée en puissance des institutions locales. L'accord de Nouméa a en effet permis dans le sillage de l'accord de Matignon, de mettre en place en Nouvelle-Calédonie une organisation institutionnelle originale et respectueuse des spécificités locales.

La loi référendaire de 1988 a ainsi créé trois provinces, Sud, Nord et îles Loyauté, librement administrées par des assemblées élues au suffrage universel direct tous les cinq ans et qui viennent d'être renouvelées il y a quelques mois. Le Congrès de Nouvelle-Calédonie, mis en place après l'accord de Nouméa est pour sa part composé d'élus de chacune des trois assemblées de province et l'existence de son pouvoir législatif autonome a été clairement posée dans la loi organique du 19 mars 1999. Dans plusieurs domaines tels que la fiscalité, le Congrès peut ainsi adopter des lois du pays qui acquièrent une valeur législative, une fois promulguées par le haut-commissaire de la République. Aux côtés du Congrès, un Sénat coutumier est pour sa part chargé d'examiner les projets de loi du pays intéressant le statut civil coutumier, les terres coutumières ou encore les signes identitaires. Le pouvoir exécutif, enfin, est pour sa part exercé par un gouvernement collégial, élu à la proportionnelle par le Congrès et responsable devant celui-ci. Ce n'est pas la moindre des caractéristiques calédoniennes que de voir ce système institutionnel original et jamais usité en métropole fonctionner par voie de consensus.

Aussi, afin de permettre à ces institutions d'assumer au mieux leur rôle, madame la secrétaire d'État, votre projet de loi organique vise-t-il également à modifier certaines dispositions du texte de 1999, notamment en ce qui concerne leur fonctionnement quotidien.

Le statut des élus calédoniens fait ainsi l'objet d'une large révision avec la création d'un régime de protection des élus ou encore par l'extension aux sénateurs coutumiers des règles d'inéligibilité et d'incompatibilité. Plusieurs dispositions sont également prises afin de lever certaines entraves au bon fonctionnement des exécutifs de la Nouvelle-Calédonie comme de ses provinces. Enfin, les modalités du contrôle de légalité par les autorités de l'État sont précisées et renforcées, et le tribunal administratif aura désormais la possibilité de saisir le Conseil d'État lorsque surviendra un doute sur le respect de la répartition des compétences entre l'État et les institutions locales.

Toujours afin d'améliorer le fonctionnement des institutions calédoniennes, ce texte permettra également de clarifier le droit applicable en termes de finances locales – ce à quoi notre collègue René Dosière devrait être sensible –, tout en renforçant le rôle de la chambre régionale des comptes, en étendant son champ de compétence, mais aussi en lui ouvrant la possibilité de formuler des propositions d'améliorations législatives au Congrès.

Enfin, et dans le but de maintenir à un rythme élevé le développement économique de la Nouvelle-Calédonie, les collectivités et établissements publics locaux se verront pour leur part dotés de nouveaux outils d'intervention dans le domaine économique tels que la société d'économie mixte ou encore le groupement d'intérêts publics.

Derrière l'ensemble de ces mesures, pourtant et malgré l'importance des travaux préparatoires menés par le Gouvernement, le Congrès de Nouvelle-Calédonie a, dans son avis du 12 juin dernier, émis plusieurs réserves à son approbation du texte de ce projet de loi.

Nombre de ses demandes ont d'ores et déjà pu être satisfaites lors de l'examen au Sénat et, je tiens à le dire, monsieur le rapporteur, en commission des lois de notre assemblée, qui a accepté certaines dispositions que le groupe Nouveau Centre souhaitait voir adopter et qui avaient été repoussées par la Haute assemblée. Alors que la Nouvelle-Calédonie s'apprête à franchir une nouvelle étape vers l'autodétermination, il apparaît essentiel que les recommandations de ceux-là mêmes à qui s'appliquera ce texte puissent être au mieux prises en compte.

Je voudrais à présent évoquer l'évolution de Mayotte vers le statut de département d'outre-mer, conformément à la volonté de plus de 95 % des Mahorais qui se sont rendus aux urnes le 29 mars dernier.

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