Surtout, la complexité des procédures, l'enchevêtrement des compétences, la part presque inexistante faite aux citoyens entravent l'action et creusent le fossé qui sépare l'Europe de ses peuples.
Dans le traité de Lisbonne, il y a des réponses durables à chacun de ces défauts. Je pense d'abord à la nouvelle règle de majorité au sein du Conseil des ministres, une règle assouplie, puisque l'on passe d'un seuil de décision de 74 % des votes pondérés à 65 % de la population. Dans les faits, cela revient à diviser par deux, en moyenne, la capacité de blocage des États. Cette règle est aussi objectivement favorable à la France, dont l'influence est renforcée, puisqu'elle fait partie des grands pays.
Ensuite, la majorité qualifiée, le vrai curseur des progrès de l'intégration, est étendue à cinquante nouveaux domaines. La perspective d'un espace commun de liberté, de sécurité et de justice, est désormais crédible. La voie d'une défense commune est tracée, grâce au futur Schengen de la défense. Pour permettre aux plus enthousiastes d'avancer sans être freinés par les plus réticents, le nouveau traité facilite les coopérations renforcées et les rend même presque automatiques pour la justice et les affaires intérieures. C'est là d'ailleurs l'une des différences du traité avec la Constitution européenne. Voilà pour l'efficacité : les progrès sont manifestes. Ils le sont tout autant du côté de la démocratie. Nous serons sans doute tous d'accord pour dire que l'Europe souffre aujourd'hui de ne pas être incarnée. Or, sans incarnation, pas de responsabilité claire et identifiable.