Cet article, introduit par le Sénat, prévoit des dispositions exceptionnelles qui me laissent pour le moins dubitatif. Je ne suis d'ailleurs pas le seul, si j'en crois le rapport de la commission : l'opposition y est tout aussi défavorable, et M. Sandras défendra dans un instant un amendement de suppression.
Il s'agit en effet de permettre au haut-commissaire de se substituer à tout moment aux différentes institutions de la Polynésie française s'il estime qu'elles ne font pas bien leur travail, afin de rétablir le fonctionnement normal des institutions et des services publics ou d'assurer la sécurité de la population, la sauvegarde des intérêts nationaux ou de ceux de la Polynésie, ainsi que le respect des engagements internationaux de la France.
À mon avis, le Sénat a commis une erreur, ne serait-ce que parce qu'une telle disposition risque d'être très mal reçue en Polynésie française. Vous indiquez, monsieur le rapporteur, qu'il ne s'agit pas d'une innovation juridique. Cela existe en effet dans les collectivités qui ne disposent pas de l'autonomie, mais aussi dans deux collectivités qui en ont été dotées très récemment, Saint-Barthélemy et Saint-Martin. La situation y est toutefois radicalement différente, puisqu'une seule collectivité y détient les compétences de la région, du département et des communes. Or tel n'est pas le cas en Polynésie française.
Je m'interroge sur les intentions du Sénat, et j'aimerais que le Gouvernement nous explique pour quelle raison il juge nécessaire de maintenir un article qui, dans un contexte de renouvellement électoral, risque d'être interprété comme une manifestation d'hostilité de la part de la métropole, voire le signe qu'elle souhaite reprendre le contrôle. En outre, il pourrait alimenter les faux débats, qui ont trop souvent pollué la vie politique polynésienne. À défaut d'explication claire, je voterai donc pour la suppression de cette disposition, qui ne se justifie aucunement. À Saint-Martin et Saint-Barthélemy, où la collectivité est unique, il est indispensable que l'État reprenne la main en cas d'errance. Mais en Polynésie, où cohabitent gouvernement, assemblée du territoire et conseils municipaux, un tel risque n'existe pas.