Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Gaël Yanno

Réunion du 6 avril 2009 à 16h00
Développement économique des outre-mer — Discussion après déclaration d'urgence d'un projet de loi adopté par le sénat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaël Yanno, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, mes chers collègues, j'ai l'honneur d'être, depuis 1958, le premier député chargé de présenter dans cet hémicycle, en tant que rapporteur, un projet de loi dans sa rédaction adoptée par la commission saisie au fond.

Pour parvenir à cette rédaction, la commission des finances a adopté 198 amendements sur les 453 dont elle a été saisie. Je vous propose donc, en son nom, un texte substantiellement modifié par rapport à celui que nous a transmis le Sénat.

Avant de vous présenter l'essentiel de ces modifications, je souhaite vous dire un mot des conditions dans lesquelles la commission des finances a mis en oeuvre la nouvelle procédure issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Tout d'abord, la commission a travaillé selon un calendrier difficile – le texte a été adopté par le Sénat le 12 mars dernier et nous avons tenu notre première réunion un peu plus de quinze jours après, le 31 mars – mais dans un climat ouvert et apaisé, qui aura permis un débat approfondi. Elle s'est réunie pour examiner ce texte pendant près de onze heures, et tous les amendements de fond ont fait l'objet d'une véritable discussion.

Le résultat de nos travaux est notamment le fruit de l'ouverture de la commission non seulement au Gouvernement, et, lors de l'examen des textes, au secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, mais également aux commissions saisies pour avis – la commission des lois et la commission des affaires économiques – et à nos collègues qui n'en sont pas membres.

Nos travaux ont été d'abord ouverts, et c'est une nouveauté, au Gouvernement. Outre la traditionnelle audition de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et de M. le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, ce dernier a participé à notre réunion d'examen des articles. Il nous a, à cette occasion, présenté les nombreux amendements déposés par le Gouvernement et a donné son avis sur les principaux amendements déposés par les députés. Il a ensuite laissé la commission délibérer au fond sur ces amendements.

Cette organisation du débat – une première – a été, je crois, pleinement satisfaisante pour tous et je tiens, monsieur le secrétaire d'État, à vous remercier pour la souplesse et la disponibilité constantes dont vous avez fait preuve.

Nos débats ont également été éclairés, en amont, par le travail des commissions des affaires économiques et des lois, saisies pour avis de ce texte. Je veux leur dire à nouveau que leur apport nous a été extrêmement précieux, notamment sur des sujets relevant plus précisément de leur domaine de compétence.

Je sais aussi que ces deux commissions ont dû travailler dans des délais très courts pour pouvoir se réunir avant la commission des finances et nous permettre d'examiner leurs amendements. Je tiens à les en remercier et à remercier tout particulièrement mes collègues rapporteurs, M. Alfred Almont pour la commission des affaires économiques et M. Didier Quentin pour la commission des lois, les commissaires des affaires économiques et des lois qui les ont représentés en commission des finances, Mme Françoise Branget, M. Jérôme Bignon et M. Guénhaël Huet, ainsi bien évidemment que les deux présidents.

Enfin, nos débats ont été ouverts grâce à la présence, aux côtés des commissaires des finances, qui les animent traditionnellement, de collègues qui ont activement participé à nos travaux sans être membres de la commission des finances, ce qui est relativement inhabituel. Pour que des amendements soient examinés, il fallait venir les défendre. Je tiens en particulier à rendre hommage à l'implication de mes vingt et un collègues d'outre-mer. Nous avons essayé de travailler ensemble, parfois au-delà des clivages politiques, pour améliorer ce texte, en concertation avec le Gouvernement.

Des esprits sceptiques auraient pu craindre que ces nouvelles modalités d'examen ne rendent plus difficile le travail de la commission des finances. Certes, il n'était pas acquis d'avance de parvenir à réunir dans un débat constructif des parlementaires de tous les outre-mer, de tous les groupes, de toutes les commissions, mais je pense que nous y sommes parvenus, et la présence de nombreux collègues a été pour beaucoup dans la qualité des discussions et dans les grandes améliorations que nous avons apportées au texte.

Qu'il me soit permis de rendre hommage à cette occasion au président de notre commission des finances pour son écoute et sa disponibilité pendant les nombreuses heures de débat.

L'organisation de notre discussion générale me conduit à vous présenter de manière assez succincte les modifications que nous avons apportées. Il ne me semblerait pas incohérent qu'à l'avenir, elle tienne mieux compte de la nouvelle procédure.

Le Sénat a apporté des aménagements, des modifications pour améliorer le projet de loi initial du Gouvernement, déposé le 23 juillet 2008, et nous en apportons également pour améliorer le texte qu'il a voté le 12 mars dernier. Il ne faut pas s'en étonner car, depuis le mois de juillet, sont intervenus plusieurs événements : la crise financière, devenue crise économique, le plafonnement des niches fiscales et la grave crise sociale qu'ont traversée les Antilles et La Réunion ces dernières semaines.

S'agissant du titre Ier A, la principale modification que nous avons apportée au texte du Sénat est l'extension du bonus exceptionnel exonéré de charges sociales aux collectivités où le système d'assurance sociale est de la compétence de l'État.

Ce titre n'a par ailleurs fait l'objet que de modifications de portée limitée, ce qui est logique puisqu'il comprend des mesures de soutien au pouvoir d'achat tirant les conséquences des accords conclus dans les départements des Antilles. Il ne nous a paru ni possible ni souhaitable d'aller au-delà de ces accords signés localement.

Sur le premier chapitre du titre Ier, consacré aux zones franches d'activités, deux modifications ont été apportées par la commission des finances.

La première est l'extension du bénéfice du dispositif aux entreprises qui ne sont pas imposées selon un régime réel. Cette modification, qui nous a été proposée par nos collègues Gabrielle Louis-Carabin et Didier Robert, permet d'ouvrir l'avantage aux micro-entreprises et d'éviter d'aboutir à une situation paradoxale dans laquelle les entreprises les plus petites auraient été davantage imposées que les plus importantes.

La seconde modification, qui a fait l'objet d'un large consensus et répond à une demande forte de la commission des affaires économiques, notamment de son président, M. Patrick Ollier, a été de fixer des critères objectifs pour définir la liste des communes de Guadeloupe et de Martinique ouvrant droit, à titre géographique, à la zone franche bonifiée. Sur ce sujet, il est important, je crois, de rappeler qu'en proposant, sur les conseils de la commission des affaires économiques, de fixer dans la loi des critères précis et renvoyant à un décret, notre commission n'a remis en cause, sur le fond, l'éligibilité d'aucune zone définie par le Sénat et complétée, en ce qui concerne la Martinique, par la commission des affaires économiques.

S'agissant des mesures relatives à la défiscalisation, nous avons été particulièrement attentifs au soutien de la défiscalisation de l'investissement productif ainsi que du logement, et plus particulièrement au maintien d'une défiscalisation pour les logements intermédiaires. Nous avons également souhaité renforcer le soutien au logement social et accentuer l'effort de moralisation de ce dispositif important de développement économique en outre-mer.

Outre des mesures ponctuelles mais importantes, comme le renforcement de l'obligation de coopération fiscale entre l'État et les collectivités ultramarines fiscalement autonomes, et la limitation de la défiscalisation de véhicules particuliers aux seuls véhicules « strictement indispensables » à l'activité de l'exploitant, nous avons concilié ces objectifs en limitant l'abaissement du seuil d'agrément des investissements tout en généralisant, en contrepartie, l'obligation de déclaration dès le premier euro et en sanctionnant l'absence d'une telle déclaration de façon beaucoup plus forte.

Ainsi, nous n'imposons pas aux exploitants l'accomplissement de formalités lourdes dans des délais qui ne sont pas compatibles avec les réalités économiques, mais nous donnons tout de même à l'administration tous les moyens nécessaires pour lutter efficacement contre les abus.

En outre, compte tenu de la crise économique, il nous a paru nécessaire de limiter le risque pour les investisseurs, notamment dans le cadre d'investissements productifs, en cas de défaillance de l'exploitant. Nous avons donc décidé, d'une part, de maintenir 1'avantage fiscal en cas de reprise de l'exploitation par un autre exploitant et, d'autre part, de ne pas reprendre le contribuable au titre des avantages qu'il a lui-même rétrocédés à l'exploitant ultramarin.

S'agissant des exonérations de charges sociales prévues à l'article 11, la commission s'est bornée à accepter un amendement du Gouvernement qui étend de 2,2 à 2,5 SMIC le « plateau de rémunération » pour lequel l'exonération reste constante pour les entreprises des zones franches bonifiées, et qui supprime la condition réservant cet avantage aux seules entreprises de moins de onze salariés.

En matière de téléphonie, reprenant l'objectif de plusieurs amendements, notamment d'un amendement de la commission des affaires économiques, notre commission a décidé de garantir effectivement la continuité du territoire en interdisant la surtaxation des appels de la métropole vers l'outre-mer, que ce soit en téléphonie mobile ou en téléphonie fixe.

Enfin, la commission a décidé de supprimer l'article 16 bis introduit contre la volonté du Gouvernement au Sénat et qui instaurait dans les DOM un prélèvement sur les jeux. Nous avons estimé que ce sujet pouvait être étudié soit dans le cadre du projet de loi sur les jeux, qui vient d'être déposé, soit à l'occasion de la réforme des finances locales, qui sera organisée dans le projet de loi de finances pour 2010, mais qu'en tout état de cause, il ne trouvait pas sa place dans le présent projet de loi.

En ce qui concerne le logement, le premier pilier du texte adopté par notre commission a été la suppression du dispositif Girardin, selon des modalités transitoires afin de préserver la sécurité des opérations engagées et éviter ainsi tout choc brutal pour les économies locales, dans un secteur – le bâtiment – fortement créateur d'emplois.

Le deuxième pilier a consisté à modifier le nouveau dispositif de défiscalisation en faveur du logement social voulu par le Gouvernement : premièrement, pour en étendre le champ aux opérations d'accession à la propriété et aux opérations de réhabilitation de logements anciens ; deuxièmement, pour accroître l'avantage rétrocédé aux bailleurs sociaux ou aux accédants à la propriété ; troisièmement, pour le bonifier dans certaines zones ou territoires connaissant des difficultés particulières ou ne bénéficiant pas de financements au titre de la ligne budgétaire unique.

Le troisième et dernier pilier de notre texte en matière de logement est la création d'un dispositif efficace de défiscalisation en faveur du logement intermédiaire, par la bonification outre-mer du dispositif Scellier-Carrez et l'adaptation aux réalités locales de la durée de l'engagement de location.

S'agissant des dispositions finales du texte, la commission des finances s'en est principalement remise aux initiatives des deux commissions saisies pour avis.

À l'initiative de la commission des affaires économiques, nous avons ainsi intégralement réécrit l'article 27 A relatif aux conditions de rachat de l'électricité produite à partir de la bagasse.

La commission des lois, ensuite, a jugé souhaitable de modifier profondément l'article 28 ter relatif à l'évolution des règles de détermination des noms et prénoms des personnes de statut civil de droit local à Mayotte. La commission des finances a suivi cet avis.

Enfin, notre commission a bien voulu, à ma demande, étendre à Wallis-et-Futuna et à la Nouvelle-Calédonie les dispositions du code civil relatives au pacte civil de solidarité, mieux connu sous le nom de PACS.

Mer chers collègues, voici résumée en quelques points principaux la grande richesse de nos travaux en commission ces dernières semaines, qui ont conduit à l'adoption du texte qui vous est soumis.

Ce texte a été diffusé vendredi en fin d'après-midi. Je sais que vous avez eu moins de temps qu'à l'accoutumée pour l'étudier et préparer vos amendements, mais je tiens à préciser que la commission ne peut être tenue responsable de cette contrainte de calendrier.

Je rappelle que le projet de loi a été adopté par le Sénat le 12 mars et qu'il fait l'objet d'une déclaration d'urgence de la part du Gouvernement. Notre commission des finances s'est réunie moins de deux semaines et demie après l'adoption du texte par le Sénat ; elle ne pouvait pas se réunir plus tôt puisqu'il était nécessaire que les deux commissions saisies pour avis se réunissent auparavant.

Je pense qu'il importera, pour l'avenir, de tirer parti de cette première expérience et, comme le propose le président Accoyer, de préserver un délai minimal entre la publication du texte de la commission et la séance publique.

Je crois savoir que le président Accoyer vous a accordé un délai supplémentaire pour déposer vos amendements, et que vous avez jusqu'au début de la discussion générale pour ce faire.

Enfin, je ne peux conclure, au sujet de cette grande première pour l'Assemblée nationale, sans remercier tout particulièrement le rapporteur général de la commission des finances qui m'a fait bénéficier, dans mon travail de rapporteur novice, de son expérience et m'a soutenu et accompagné lors de ces semaines mouvementées. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. Sur les bancs du groupe SRC, M. Albert Likuvaku applaudit également.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion