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Intervention de Marc-Philippe Daubresse

Réunion du 29 janvier 2008 à 15h00
Renforcement de la coopération transfrontalière — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc-Philippe Daubresse, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Il s'agit d'un réseau européen d'autorités locales transfrontalières – réseau de villes frontalières, impliquant en particulier le Portugal et l'Espagne, et de villes jumelles, impliquant notamment l'Allemagne, la Pologne, l'Estonie, la Lettonie, la Suède, la Finlande et la Russie.

Dans le cadre de l'appel à coopération métropolitaine lancé à l'initiative de Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, en 2004, huit des quinze projets métropolitains retenus ont une composante frontalière ou transfrontalière. Tous les sites frontaliers ont été sélectionnés, ce qui témoigne de la reconnaissance, par les plus hautes instances nationales de l'aménagement du territoire, de la réalité transfrontalière des bassins de vie concernés.

Enfin, dernier exemple, tout récent, du dynamisme de la coopération transfrontalière – qui me tient particulièrement à coeur : l'eurométropole Lille-Kortrijk- Tournai. Cette eurométropole, bilingue et triculturelle, imaginée par Pierre Mauroy, constituera le premier groupement européen de coopération territoriale d'Europe, dont la première assemblée a eu lieu hier, 28 janvier 2008. Réunissant des représentants des gouvernements, des régions et des intercommunalités, elle sert de modèle au dispositif qui vous est présenté aujourd'hui, et préfigure ce qui pourra être réalisé aux frontières luxembourgeoise, belge, espagnole ou italienne.

Le législateur français a récemment amélioré, à plusieurs reprises, les dispositions relatives à la coopération en matière d'aide au développement, par une loi du 9 février 2005, ainsi que par une loi du 2 février 2007, qui a ouvert aux collectivités la possibilité de conclure des conventions d'aide au développement sans être limitées par leurs domaines de compétences. Pour autant, les dispositions relatives à la coopération transfrontalière n'ont pas été modifiées depuis la loi de décentralisation du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui a créé le district européen.

L'entrée en vigueur, le 1er août 2007, d'un règlement communautaire relatif au groupement européen de coopération territoriale impose au législateur français d'adapter rapidement les dispositions relatives à la coopération transfrontalière.

Ce règlement, qui a pour objet de permettre l'existence d'une structure uniforme et facilement identifiable d'association entre collectivités de différents États, sans passer par des traités, devrait répondre à l'une des principales difficultés de la coopération entre collectivités territoriales, à savoir l'articulation entre des ordres juridiques différents, régis par des règles distinctes, dont la mise en oeuvre est toujours difficile. Le groupement européen de coopération territoriale, qui aura la personnalité juridique et sera soumis aux règles de droit de l'État dans lequel il aura son siège, offrira une structure propice à l'émergence de nouveaux projets de coopération entre collectivités territoriales et au développement des coopérations existantes. Ainsi, l'exemple de l'agglomération lilloise, l'eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai, qui va prendre la forme d'un GECT, permettra d'associer plus de cent quarante communes, dix intercommunalités, trois régions et deux États, pour aboutir à un bassin de vie de deux millions d'habitants.

L'objet et le texte de la proposition de loi sont identiques à un article qui avait été adopté par le Sénat en janvier 2007, dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à l'expérimentation du transfert de la gestion des fonds structurels européens, sur proposition de Mme Catherine Troendle, rapporteure. L'absence d'inscription ultérieure de ce projet de loi à l'Assemblée nationale explique que la disposition proposée soit aujourd'hui reprise sous la forme d'une proposition de loi.

L'article unique de la proposition procède à l'adaptation du droit français au règlement du 5 juillet 2006 relatif au GECT. Pour cela, il introduit, dans le chapitre du code général des collectivités territoriales relatif à la coopération décentralisée, une nouvelle disposition prévoyant les modalités de création et le droit applicable à un GECT ayant son siège en France, ainsi que les conditions d'adhésion des collectivités françaises à des GECT de droit étranger. Les règles applicables au GECT de droit français s'apparenteront à celles applicables au district européen, que nous avions imaginé en 2004 avec le sénateur et ancien Premier ministre Pierre Mauroy. Les différences concerneront, d'une part, la composition du GECT et, d'autre part, son extension territoriale.

Un GECT de droit français pourra comprendre un ou plusieurs États membres de l'Union européenne, par dérogation à l'interdiction d'association entre des collectivités territoriales françaises et des États étrangers. En outre, lors de l'examen de la proposition de loi en commission, il a été proposé d'étendre à l'ensemble des organismes de droit public au sens de la directive communautaire « marchés publics » du 31 mars 2004 la possibilité d'adhérer à un GECT. Un amendement de notre collègue Jean-Claude Guibal propose d'étendre le dispositif aux États membres du Conseil de l'Europe, frontaliers, ce qui permettrait, en particulier, d'associer Andorre et Monaco ; votre commission y est favorable.

Un GECT pourra, d'autre part, être conclu dans un cadre interrégional ou transnational, alors qu'un district européen peut seulement être conclu dans un cadre transfrontalier.

Par ailleurs, dans un souci de simplification, l'article unique propose de supprimer la possibilité de recourir à la formule du groupement d'intérêt public pour associer des collectivités territoriales étrangères à certaines missions exercées par des collectivités territoriales françaises, sous réserve du maintien jusqu'à leur terme des GIP existants. Au regard de la lourdeur du dispositif et du faible nombre de GIP qui ont été créés sur ce fondement, cette suppression, allant dans le sens de la simplification et de l'efficacité, est pleinement justifiée.

L'article unique prévoit enfin, conformément au second protocole additionnel à la convention de Madrid, récemment ratifié par la France, la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d'adhérer à un organisme public de droit étranger ou de participer au capital d'une société étrangère, non seulement dans un cadre transfrontalier, mais également dans un cadre plus large, interrégional.

L'adoption de la proposition de loi est une nécessité au regard du droit communautaire et des engagements internationaux de la France et une démarche s'inscrivant pleinement dans le programme de simplification du droit, engagé par la commission des lois depuis le début de la législature.

C'est pourquoi la commission des lois a adopté cette proposition de loi à l'unanimité avec quelques amendements rédactionnels ou de précision. Je vous invite par conséquent à en faire de même et j'émets le voeu que le Sénat puisse rapidement en débattre à son tour, afin que le droit français consacre pleinement l'existence du groupement européen de coopération territoriale.

Nous sommes nombreux ici, sur tous les bancs, à être convaincus que le vingt et unième siècle sera le siècle des villes et des agglomérations, qui, avec leur intelligence propre, contribueront à développer un nouveau modèle altruiste de démocratie citoyenne.

L'Europe a besoin d'une renaissance de civilisation. Ce nouveau modèle passe par des eurométropoles puissantes et structurées. Le Président de la République en a dessiné les contours. Pierre Mauroy l'a fait. Et je ne doute pas que notre Assemblée puisse l'adopter très largement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre, ainsi que sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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