Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la libéralisation du marché de l'énergie est effective pour les particuliers depuis le 1er juillet 2007 dans toute l'Union européenne. Chaque citoyen peut donc théoriquement choisir son fournisseur d'électricité parmi les offres proposées par les nouveaux opérateurs du marché. Cependant, l'ouverture totale du marché n'est pas sans poser de nouvelles difficultés : certaines dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel. La loi du 7 décembre 2006 autorisant tout consommateur à choisir son fournisseur à partir du 1er juillet 2007 présente aujourd'hui des imperfections, voire des incohérences, qui ont rendu la situation inintelligible pour le consommateur, de telle sorte que peu d'entre eux ont choisi de s'alimenter sur le marché libre.
De surcroît, lorsqu'un occupant a exercé l'éligibilité pour un logement, les occupants suivants n'ont plus la possibilité de choisir entre des offres aux tarifs réglementés et des offres de marché, et ce quels que soient les choix qu'ils avaient effectués en tant que consommateurs.
Les propriétaires sont eux aussi inquiets sur les conséquences que pourrait avoir l'exercice de l'éligibilité par leur locataire. Ce choix irréversible serait clairement pénalisant pour les occupants suivants.
Cette situation serait tout aussi pénalisante en cas de vente du bien, celui-ci risquant d'être déprécié dans la mesure où il ne bénéficie plus du tarif réglementé. Conséquence à craindre : l'apparition d'un double marché de l'immobilier : le marché des logements bénéficiant des tarifs réglementés et celui des logements n'en bénéficiant plus – vous l'avez d'ailleurs évoqué tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'État.
Cette proposition de loi va donc dans la bonne direction et répond à toutes les difficultés posées par la loi du 7 décembre 2006.
Le texte initial avait franchi une première étape importante en prévoyant que le consommateur pourrait revenir aux tarifs réglementés de gaz et d'électricité en cas de déménagement, autrement dit une réversibilité partielle. Notre assemblée a cependant souhaité aller encore plus loin dans cette démarche en votant, à l'unanimité, la réversibilité totale des droits dans l'électricité. Les consommateurs pourront ainsi revenir aux tarifs réglementés six mois après avoir souscrit un contrat de fourniture à un prix de marché.
La réversibilité totale sera un garde-fou contre le risque de hausse de prix et permettra aux consommateurs qui le souhaitent de tester le marché sans être obligés de déménager pour revenir ensuite aux tarifs réglementés. En outre, cette réversibilité nous permet à la fois de respecter notre tradition énergétique et nos engagements européens. C'est une avancée considérable dont nous pouvons nous féliciter.
Enfin, mes chers collègues, cette proposition de loi nous amène à réfléchir sur la question plus globale de l'avenir des tarifs réglementés.
Soyons clairs : en aucun cas, l'Europe n'empêche le concept de « tarif réglementé ». Le commissaire européen Andris Piebalgs a rappelé, lors de son audition par la Délégation pour l'Union européenne, que la Commission ne demandait pas la suppression des tarifs réglementés pour les ménages. Quel est donc l'intérêt de la France ?
Pour l'heure, nous avons trois points de vue contradictoires.
Premièrement, les consommateurs ont tout intérêt à ce que le tarif réglementé perdure. Le contribuable français a financé le nucléaire et attend un juste retour avec un tarif proche du prix de revient du nucléaire.
Deuxièmement, L'État a un intérêt objectif à ce que l'on aille vers la suppression des tarifs et la libéralisation des marchés dans la mesure où il y a là un potentiel de profits extrêmement important, d'autant plus que les besoins en matière d'investissement et de renouvellement des installations sont énormes. En outre, l'actionnaire principal d'EDF, à savoir l'État, pourra utiliser les résultats d'EDF pour assainir ses finances publiques.