La politique du Gouvernement en matière d'emploi des forces mobiles consiste à territorialiser ces dernières afin de lutter contre la délinquance urbaine. Nous devrions, me semble-t-il, mener une action de plus long terme. Nous pourrions disposer d'un peu moins de forces mobiles – une réduction d'un quart des effectifs semble raisonnable – et transférer des personnels, qui pour certains d'entre eux le demandent, dans les commissariats ou les gendarmeries territoriales. J'ai rencontré récemment, en Isère, d'anciens gendarmes mobiles qui travaillaient dans ma commune : il s'agit de leur carrière naturelle. De la même façon, de nombreux CRS seraient plus utiles dans un commissariat que dans certaines unités adaptées à la banlieue.
La répartition des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance doit être revue – je crois que vous en avez vous-même convenu, madame la ministre. Ces crédits devraient être recentrés sur quelques missions plutôt que saupoudrés, comme actuellement, sur d'innombrables objectifs, ce qui nuit à l'efficacité et à la crédibilité du fonds. Il faut aussi revoir la répartition des crédits par département : alors que la moitié de la délinquance se trouve actuellement concentrée dans 20 % des départements, ces derniers ne recueillent que 32 % des crédits de ce fonds.
D'autres retards constatés sur le terrain sont à combler. Aujourd'hui, à ma connaissance, les Alpes-Maritimes, les Bouches-du-Rhône ou le Rhône, qui connaissent une délinquance forte, n'ont toujours pas de plan départemental de prévention de la délinquance ! L'élaboration d'un tel plan serait pourtant une occasion de rationaliser les moyens engagés. Vous avez d'ailleurs entrepris un tel effort dans tout votre budget, madame la ministre.
Force est de constater qu'en la matière, la solution réside en grande partie dans le rapprochement entre police et gendarmerie nationale, rapprochement qui franchit à l'occasion de cette discussion budgétaire un nouveau pas décisif et positif. L'inscription, à la faveur de la mise en place de la nouvelle architecture budgétaire, des budgets de la police et de la gendarmerie nationale dans une mission interministérielle commune aux ministères de l'intérieur et de la défense, constituait un premier pas. Vous en franchissez un second, madame la ministre, puisque, à partir du 1er janvier prochain, nous obtiendrons enfin satisfaction : vous aurez sous votre responsabilité à la fois la police et la gendarmerie. Permettez-moi de rappeler que, depuis longtemps, nous demandons aussi le rattachement des services des douanes à votre ministère, de sorte que l'administration en charge de lutter contre la délinquance ait toutes les cordes à son arc pour le faire. Même si, je le sais, Bercy n'accueille pas cette idée avec enthousiasme (Sourires), je la réitérerai, année après année.
Le groupe Nouveau Centre se réjouit donc du rapprochement entre la police et la gendarmerie qui se déroule dans des conditions satisfaisantes, notamment sur le plan des garanties apportées quant au maintien du statut militaire des gendarmes, auquel nous tenons particulièrement. La poursuite de ce rapprochement n'aura toutefois de sens que si les larges perspectives de mutualisation qu'il offre se traduisent dans les faits. Des pistes prometteuses ont, d'ores et déjà, pu être identifiées par votre ministère, notamment en ce qui concerne la logistique, les systèmes d'information et de communication ou encore les fonctions de police technique et scientifique. Toutefois, ce rapprochement ne peut pas se limiter à une simple recherche de synergies, qui, si elle reste fondamentale, doit s'accompagner de bénéfices en termes opérationnels, en permettant à chacune des deux forces d'en tirer pleinement parti dans l'exercice quotidien de ses missions.
Avec des objectifs tels que la réduction de 5 % de la délinquance de proximité, cette mission conserve, après les bons résultats obtenus ces dernières années, un haut niveau d'ambition. Toutefois, la réponse à l'insécurité ne peut passer uniquement par une meilleure organisation ou un meilleur budget des services de police et de gendarmerie, pas plus que par un durcissement des peines – le développement des peines alternatives ainsi que des centres éducatifs doit d'ailleurs être poursuivi.
Madame la ministre, il nous faudra également revoir notre politique en matière d'urbanisme et logement social. La lutte contre la délinquance ne peut être l'apanage exclusif du ministère de l'intérieur et de celui de la justice, car les racines de ce mal sont bien connues. Le chômage, l'exclusion ou encore les problèmes d'éducation amplifient les phénomènes de délinquance et accroissent les missions auxquelles vos services ont à faire face. Pour que ce combat puisse porter tous ses fruits, nous nous devons de repenser la ville de sorte que l'action de l'État soit partout possible et que les partenaires sociaux puissent intervenir dans les zones les plus sensibles du territoire de notre République.
L'engagement de l'État à garantir la sécurité de ses citoyens compte parmi les fondements mêmes de notre pacte républicain. Madame la ministre, dans le contexte actuel économique et budgétaire, votre budget est équilibré, et le Nouveau Centre le votera. Mais, au-delà du vote du budget, qui ne fait que programmer l'action, nous souhaitons que vous soyez réceptive aux propositions que nous vous ferons en cours d'année, notamment lors de la discussion de la LLOPSI.
Jean-Jacques Candelier vantait les mérites de la police de proximité. S'il est absurde de vouloir l'instaurer uniformément sur tout le territoire, vous avez rétabli, madame la ministre une forme de police adaptée au terrain en créant les unités territoriales de quartier, les UTEQ, qui sont déjà un succès – je peux en témoigner comme élu de la Seine-Saint-Denis. Elles ont ainsi permis d'enregistrer une réduction de la délinquance de 19 % à Saint-Denis – ville qui a connu autrefois une explosion de cette statistique, en particulier chez les plus jeunes – et de 35 % à Clichy-sous-Bois, ville symbole s'il en est. Puisque les UTEQ sont efficaces, je souhaite que les parlementaires puissent être associés à leur développement sur tel ou tel territoire. Je vous donnerai l'exemple du quartier des Beaudottes à Sevran, entièrement mis en coupe réglée, où la République n'a plus cours, et où même les gardiens d'immeuble ne peuvent plus intervenir. Il y a urgence, et il faudrait faire appel à la fois aux UTEQ et aux GIR.
Madame la ministre, lorsque vous devez prendre la décision politique de créer une UTEQ, vous comptabilisez, commissariat par commissariat, les crimes et délits commis sur un territoire alors que le territoire administratif de la circonscription de police est différent du territoire réel. Ainsi, un territoire de vie peut regrouper plusieurs commissariats, et la situation paraître supportable alors qu'elle est déjà très grave. À Pantin, Bobigny ou Drancy, des territoires qui concentrent de nombreuses difficultés ne sont pas encore en mesure, pour cette raison administrative, de bénéficier d'une UTEQ ! La réalité compte pourtant plus que la statistique : si vous la preniez en compte, madame la ministre, vous pourriez dans le cadre de votre politique de développement des UTEQ, faire encore progresser la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)