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Intervention de Michel Vaxès

Réunion du 6 mai 2008 à 21h30
Réforme de la prescription en matière civile — Article 1er, amendements 20 25

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vaxès :

Je reconnais, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, que mon premier amendement présentait le risque que vous avez souligné. Fort heureusement, j'ai un amendement de repli, l'amendement n° 20 , qui ne présente pas les mêmes inconvénients.

Cet amendement a pour objet de lever les imprécisions de l'amendement que vous proposez à l'article 8 et, situé à l'article 1er, il marquera la volonté de notre assemblée de protéger le droit du travail.

Les dispositions adoptées par le Sénat le 9 avril dernier sur la proposition du président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest, reprises par notre rapporteur à l'article 8, ne sont pas de nature à nous rassurer. La référence à la notion de révélation de la discrimination ne nous paraît pas suffisante, dès lors qu'on entend garantir non seulement la réparation de l'intégralité du préjudice subi par le salarié du fait de la discrimination exercée à son égard, mais aussi et surtout caractériser le préjudice et fixer le point de départ de celui-ci.

Ainsi, lorsque la discrimination porte sur un ralentissement de carrière du salarié pour des motifs prohibés, ce qui suppose des actes de discrimination répétés dans le temps – pas d'augmentation, pas de promotion, pas de formation professionnelle pendant plusieurs années –, un délai de cinq ans est manifestement insuffisant pour caractériser semblable discrimination. En effet, en cinq ans, l'entreprise peut n'avoir procédé qu'à un nombre restreint d'augmentations ou de promotions. La différence de traitement entre salariés aura, dans ce cas, peu de chances de pouvoir être démontrée de manière suffisamment probante pour que soit attribuée à l'entreprise la commission d'un acte discriminatoire.

Il n'est qu'à se rapporter aux décisions de la Cour de cassation pour mesurer l'importance de ces considérations. Je tiens à votre disposition un arrêt de la Cour de cassation du 10 avril 2008 qui rappelle, comme elle l'avait déjà fait en d'autres occasions, que les dommages et intérêts octroyés relèvent de la prescription trentenaire et que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se trouverait si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu. On ne saurait mieux affirmer l'étroitesse du lien qui noue la caractérisation du préjudice dans le temps à sa réparation intégrale. C'est la raison pour laquelle nous proposons de retenir comme point de départ de la prescription, non pas le moment où la personne discriminée aurait dû connaître sa situation ni la date de sa révélation – à supposer d'ailleurs qu'il soit possible de fixer une telle date –, mais le moment où le salarié a pu avoir connaissance de l'ensemble des éléments lui permettant de s'estimer victime d'actes de discrimination.

Cette formulation rigoureuse permettrait de répondre à de très nombreux cas de discrimination progressive ou durable dont les juges ont à connaître, sans porter préjudice au droit des salariés et en évitant toute une série de contentieux que l'on peut imaginer si l'on conserve la formulation de l'amendement du rapporteur à l'article 8. Dans la mesure où il n'y a pas, dans les arguments exposés jusqu'à présent, de différence dans l'esprit de la loi entre l'amendement que vous proposez, monsieur le rapporteur, et le mien, rien ne s'oppose à l'adoption de l'amendement n° 20 à l'article 1er.

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