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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 3 février 2009 à 15h00
Nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Alors, oui, nous avons défendu nos positions et nos propositions, durant près de quatre semaines, dans cet hémicycle. Quatre semaines, rendez-vous compte ! Le Président ne l'a pas supporté.

Le Parlement n'entérine-t-il pas assez vite ? Qu'à cela ne tienne, on va faire appel au président de France Télévisions pour qu'il supprime lui-même la publicité à partir de vingt heures sur les chaînes du service public à compter du 5 janvier, puisque tel est le bon vouloir du Président de la République !

Il faut bien du vice, chers collègues, pour contraindre celui qui n'avait pas montré un enthousiasme fou pour cette réforme – c'est un euphémisme – à l'appliquer, en un mot à se faire hara-kiri. Combiné avec le légitime mécontentement des sénateurs de voir un texte mis en oeuvre avant même qu'ils en soient saisis, le doublé est tellement révélateur de la manière dont nous sommes gouvernés depuis le printemps 2007. In fine, une loi n'était donc manifestement pas nécessaire pour supprimer la publicité sur France Télévisions.

En revanche, l'urgence de détenir le pouvoir de nommer et de révoquer à sa guise et sans contrôle réel, l'urgence d'offrir des cadeaux de fin d'année à ceux qui ont cheminé si allègrement aux côtés de Nicolas Sarkozy du Fouquet's à l'Élysée, oui, ces urgences-là étaient bien réelles.

Le 7 janvier, les sénateurs ont commencé l'examen du texte. Le 15 janvier, ils ont notamment adopté, contre l'avis du Gouvernement, la pose d'un verrou parlementaire à la révocation des présidents des sociétés de l'audiovisuel public, l'exclusion de RFO de la suppression de la publicité, une hausse de 4 euros de la redevance, et ce malgré les conséquences annoncées – et, semble-t-il, alors assumées – de ce choix sur la personne même – entendez bien – du président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, qui avait bien imprudemment déclaré : « Moi vivant, il n'y aura pas d'augmentation de la redevance télé. » Ainsi, la vie ne tient parfois, chers collègues, qu'à un amendement sénatorial... (Sourires.) Le 16 janvier, le Sénat a adopté le texte après un scrutin très serré ; adopté certes, mais dans une version modifiée.

Il n'a pas été possible de convaincre les sénateurs ? Soit, il faudra les contraindre ! Et, là encore, comment ne pas s'alarmer de la façon dont le Parlement est désormais appelé à légiférer, non seulement dans l'urgence, mais la main – la main même qui écrit les lois – fermement tenue par l'exécutif. Tous les arbitrages ont été ainsi rendus la veille de la réunion de la commission mixte paritaire, lors d'une rencontre à Matignon, en suivant pas à pas les instructions de l'Élysée.

Dès lors, la CMP n'a été qu'une formalité, un habillage un peu laborieux, une étape supplémentaire, en tout cas, du passage du rouleau compresseur présidentiel.

Évacué, le maintien de la publicité sur RFO ; supprimé, l'encadrement plus strict du pouvoir de révocation des présidents des sociétés de l'audiovisuel public ; éliminée, l'obligation pour France Télévisions de maintenir des rédactions propres dans ses chaînes diffusant des journaux télévisés ; écartée, la demande d'un rapport sur l'opportunité de supprimer la publicité destinée aux enfants durant la diffusion des programmes qui leur sont consacrés ; laissée de côté, la reprise de la convention collective garantissant aux journalistes le droit de ne pas céder aux pressions et de protéger leurs sources.

Une seule, je dis bien une seule proposition sénatoriale aura finalement été retenue au plus haut sommet de l'État : l'augmentation de la redevance, qui fait aujourd'hui de M. Copé un mort vivant.

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