La question des heures supplémentaires n'est pas anodine. C'est, avec le bouclier fiscal, l'un des deux sujets que nos concitoyens ont aujourd'hui à l'esprit et sur lesquels ils s'interrogent. Sur le bouclier fiscal, ils se sont déjà fait une opinion, c'est évident. Sur la question des heures supplémentaires, des débats comme celui-ci peuvent permettre à chacun de prendre conscience des implications que peut avoir votre dispositif.
Monsieur le ministre, les heures supplémentaires existaient avant votre loi – vous avez cité le chiffre de 4 millions –, il en existe aujourd'hui et il en existera demain, car cela peut être utile, en effet, au bon fonctionnement de l'économie. Ce qui fait débat, aujourd'hui, c'est que, par un mécanisme d'exonération de cotisations patronales, les heures supplémentaires sont plus avantageuses pour l'entreprise que les heures normales. Nous ne mettons pas en cause la souplesse que permettent les heures supplémentaires – même s'il faut aussi savoir se fixer des limites, à moins de vouloir supprimer toute référence à une durée légale du travail – mais la compatibilité du dispositif avec la situation économique du pays.
Toutes les organisations syndicales sont opposées à ce dispositif, dont vous prétendez pourtant qu'il est bénéfique au pouvoir d'achat. Cela devrait vous inciter à réfléchir. Je ne connais pas de situation dans laquelle toutes les organisations syndicales, qui, par nature, sont chargées de défendre les intérêts des salariés, tout particulièrement en termes de pouvoir d'achat, pourraient s'opposer à un dispositif favorable à ceux qu'elles représentent. Vous avez beau répéter, jour après jour, que c'est une mesure de pouvoir d'achat, si toutes les organisations syndicales demandent la fin du dispositif, c'est que quelque chose doit clocher – et ce n'est peut-être pas du côté des syndicats, mais plutôt dans l'argumentation du Gouvernement et de la majorité.
D'autre part, M. Vidalies a très justement décrit le mécanisme d'ajustement qui, dans tous les pays du monde, en temps de crise économique, concerne d'abord l'heure supplémentaire pour, in fine, toucher au coeur de l'emploi stable – le contrat à durée indéterminée. Ainsi, toute entreprise s'adapte aux circonstances de crise en diminuant d'abord le volant d'heures supplémentaires – et c'est bien normal. Ensuite, le cas échéant, elle procède à la réduction du nombre de contrats d'intérim, puis au non renouvellement des contrats à durée déterminée, pour, en fin de compte et par la force des choses – ou parfois sous prétexte de la crise – se résoudre à des licenciements purs et durs. Or, seule la France se trouve dans cette situation incroyable où les entreprises ont d'ores et déjà atteint ce dernier stade – le licenciement des personnes en CDI – alors même que le niveau d'heures supplémentaires est maintenu. Chacun devrait y réfléchir : la crise économique que nous traversons est telle qu'elle doit nous inciter à remettre en cause nos dogmes, nos principes et même les promesses électorales, faites dans un contexte bien différent. Le temps est venu de remettre en cause ces certitudes – et cela vaut à droite comme à gauche – plutôt que de se crisper sur de tels dispositifs, qui sont tout à fait dommageables pour l'économie et la situation sociale de la France ! (Applaudissements sur certains bancs du groupe SRC.)
(L'amendement n° 70 n'est pas adopté.)