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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 12 mars 2009 à 10h00
Protection de la création sur internet — Reprise de la discussion, amendements 336 401

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Il en va de la responsabilité de chaque citoyen pour que le rapport de forces dans l'hémicycle soit à l'image du pays réel, et qu'on ne soit pas dans ce monde improbable que nos collègues de l'UMP représentent.

Madame la ministre, aucune restriction ne peut être imposée aux droits et libertés fondamentaux des utilisateurs titulaires d'un accès à des services de communication au public en ligne sans décision préalable des autorités judiciaires, conformément à l'article 11 de la charte droits fondamentaux de l'Union européenne concernant la liberté d'expression et d'information.

Nous condamnons, à plusieurs titres, le système de la riposte graduée opéré par la Haute autorité à laquelle vous donnez le pouvoir de juger et de sanctionner, ce qui doit rester une prérogative exclusive de l'institution judiciaire indépendante du pouvoir exécutif. Par cet amendement, nous voulons réintroduire des principes essentiels du droit des personnes.

En effet, votre loi entre en totale contradiction avec la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui prévoit :« Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir d'ingérence d'autorités publiques et sans considérations de frontières. » C'est dans cet esprit que l'amendement 138 au « paquet télécoms », que nous reproduisons ici, a été adopté par le Parlement européen le 24 septembre 2008, par 88 % des eurodéputés, tous groupes confondus.

En matière de déni de droit, permettez-moi tout d'abord de rappeler que la coupure de l'accès à Internet représente, dans la société moderne, une sanction très lourde de conséquences. Cela instituerait une forme d'exclusion qui peut avoir de graves répercussions sur le plan professionnel et personnel. Il semble impensable qu'une Haute autorité ait un tel pouvoir, sans que la décision soit motivée par des considérations plus impérieuses que celles du « respect du droit d'auteur » que vous invoquez et auquel vous sacrifiez une possibilité pour chacun de s'informer et de se cultiver. En revanche, vous ne voulez pas sauvegarder ces droits d'auteur d'une façon sonnante et trébuchante.

Les prérogatives de l'HADOPI entrent également en contradiction avec le principe de proportionnalité. La Cour de justice des communautés européennes a rendu un arrêt du 29 janvier 2008, «Promusicae contre Telefonica », stipulant que les droits de propriété intellectuelle ne pouvaient être placés au-dessus des droits fondamentaux de respect de la vie privée, qui seront bafoués par le fonctionnement de la Haute autorité.

Madame la ministre, vous vous improvisez ainsi gendarme des communications. Dans quel but ? Pour protéger les intérêts financiers des grands groupes ! Votre gouvernement privilégie encore une fois l'application des droits relatifs à la propriété privée, exploités ici au premier chef par les majors du disque, au détriment de la liberté de citoyens et du droit des auteurs.

Il devient nécessaire dans ce pays que les parlementaires se mobilisent pour protéger la vie privée des citoyens contre ces dérives autoritaires. En se passant de la justice, votre gouvernement se détourne des fondements constitutionnels qui font – faut-il parler à l'imparfait ? – de notre pays un État de droit, et que nous défendrons ici farouchement.

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