Monsieur le président du Congrès, monsieur le président du Sénat, monsieur le Premier ministre, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, il faut attacher à un article de presse la même valeur juridique qu'à un article de la Constitution. C'est à cette étonnante affirmation que l'on nous demande de croire, monsieur le Premier ministre, depuis la parution, dans le journal Le Monde, des propos du Président de la République. Le Président a parlé : inclinez-vous devant ces nouvelles tables de la loi élyséenne ! Réjouissez-vous de ces promesses ultimes faites en réponse à un appel dérisoire et pathétique !
Quelle inconvenance a donc été la nôtre de présenter, au même moment, au vote du Sénat, des amendements correspondant à certaines des déclarations présidentielles ! Nous n'avions rien compris. Il fallait adopter sans en changer une virgule le projet de révision voté par l'Assemblée nationale mais, dans le même temps, nous féliciter de lire des engagements différents gravés dans un marbre un peu tendre : le papier journal.
Les sénateurs UMP refusaient un amendement reprenant la proposition du comité Balladur favorable à une évolution du collège électoral sénatorial, et nous étions invités à nous satisfaire de la très modeste proposition de loi du sénateur de Raincourt, texte dont on nous annonçait, après dix ans de sommeil, la possible exhumation. De qui se moque-t-on ? Du Parlement, sans aucun doute ! C'est une curieuse manière de revaloriser les travaux parlementaires que d'attendre l'achèvement du débat pour promettre ce que, par ailleurs, l'on refuse d'inscrire dans la Constitution.
Laissons donc de côté ce qui n'est qu'une opération de communication montée selon le procédé bien connu du teasing – d'abord l'expression du désir, ensuite la réponse tant attendue, enfin le remerciement enthousiaste – pour en venir aux nombreuses raisons, monsieur le Premier ministre, qui conduisent les sénateurs socialistes à voter contre votre projet de révision constitutionnelle.
Nous sommes opposés à tout renforcement des pouvoirs du Président de la République.