Cela s'explique d'abord par une balkanisation du système, beaucoup trop émietté. Il y a beaucoup trop d'OPCA, beaucoup trop éparpillés, ce qui ne permet d'avoir ni une véritable offre de proximité sur chacun des départements ni un contrôle véritablement efficace.
Le projet de loi prévoit de réformer les OPCA. Il s'agit de passer d'une centaine d'organismes différents à une quinzaine d'OPCA de branches au maximum. Cela nécessite de fixer le seuil d'agrément de ces organismes à 100 millions d'euros, agrément qui sera accordé au regard d'autres critères de qualité, parmi lesquels la transparence de gestion et la bonne gouvernance. Les OPCA seront contrôlés et évalués tous les trois ans.
Par ailleurs, il faut s'attaquer à divers points relevant du bon sens, sur lesquels, faute de courage et du fait de corporatismes redoutables, les réformes calaient depuis trop longtemps. Il sera mis fin à la confusion des rôles entre les responsables d'OPCA et les organismes de formation. On ne peut pas avoir des jetons à la fois dans une OPCA et dans un organisme de formation. Cette confusion des rôles, on l'imagine assez bien, donne lieu à toutes les dérives possibles.
Il faut plus de transparence sur les frais de gestion des OPCA. L'argent de la formation doit aller aux entreprises et aux salariés qui en ont besoin. Il faut éviter trop d'évaporation avec les frais de gestion.
Il faut enfin faire en sorte que les OPCA soient soumis, lorsque l'on achète de la formation, à un certain nombre de règles, comme le respect des délais de paiement ou des règles de la concurrence.
Enfin, il faut s'attaquer aux organismes de formation, minoritaires, qui ternissent l'image de la profession. Il faut rendre plus strictes les règles d'enregistrement des organismes de formation et – c'est un point auquel j'attache beaucoup d'importance – mieux contrôler afin d'éviter certaines dérives sectaires que nous avons pu constater sur le terrain. Je peux en témoigner sur mon propre territoire où, faute de transparence, certaines sectes ont instrumentalisé des organismes de formation professionnelle, s'en servant d'outil de financement. Ce n'est pas tolérable. Le projet de loi permettra de contrôler ces dérives sectaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Enfin, la qualité de l'information doit être améliorée vis-à-vis des salariés qui s'engagent dans une formation. Aujourd'hui, une personne n'est pas toujours informée du contenu de la formation qu'elle entame, et celle-ci n'est pas toujours sanctionnée par un diplôme. Là encore, cette absence de transparence n'est pas tolérable.
Reste la question de la gouvernance. Le projet de loi a pris l'option de passer d'un travail dans lequel chacun est dans son couloir, l'un à côté de l'autre, à un travail d'équipe, où chacun est dans son rôle, mais avec une bien meilleure concertation.
En matière de formation professionnelle, je le rappelle, personne n'a d'exclusivité. D'abord, parce que les montants sont répartis entre les partenaires sociaux, l'État et les régions, avec une nette dominante pour les partenaires sociaux et des fonds très massivement investis à la fois par l'État et les régions.
Ensuite, chacun est dans son rôle : les partenaires sociaux, auxquels il revient de faire en sorte que la formation colle le plus possible aux réalités de l'emploi ; les régions, qui veillent à ce que les formations professionnelles se déclinent en fonction des réalités territoriales ; l'État – je suis très attaché à la vocation de l'État –, qui doit assurer la solidarité républicaine et l'équité sur l'ensemble du territoire.
Le but est de faire en sorte d'avoir une gouvernance bien articulée à deux niveaux. D'abord au niveau national, puisque, dans le cadre de la gestion du fonds paritaire – le fonds de sécurisation des parcours professionnels –, une convention est passée avec l'État afin d'assurer la bonne déclinaison et la bonne concertation entre les politiques de l'État et les politiques des partenaires sociaux. Ensuite au niveau régional, avec une contractualisation du plan régional de développement des formations, pour éviter ce que nous constatons aujourd'hui : l'État d'un côté et les conseils régionaux de l'autre. Il ne s'agit nullement de mettre sous tutelle, mais de sortir simplement d'une logique où chacun travaille dans son coin, pour aller vers un travail en équipe.
N'oublions pas ce qu'attendent de nous les salariés et les demandeurs d'emplois : un système de formation professionnelle plus efficace, plus juste qui réponde à leur besoin. Ils n'ont aucune envie d'un débat où chacun s'enfermerait dans une posture, veillant à préserver son petit pré carré. Ce ne serait pas digne des enjeux de la formation professionnelle.
Le projet cible donc trois priorités claires : plus de justice et d'équité, promotion de la formation professionnelle en arme anti-crise, et transparence et meilleure évaluation du système.
Avant que le débat ne s'ouvre, je voudrais lancer un appel très solennel. Ce projet de loi, je le répète, repose sur un accord approuvé par tous les partenaires sociaux : les représentants des employeurs comme les représentants des salariés, depuis le MEDEF, la CGPME, l'UPA jusqu'à la CGT, la CFDT, FO, la CGC ou encore la CFTC. Bien entendu, chacun aurait préféré que tel ou tel point du projet soit amélioré. Je le comprends parfaitement. Mais ils ont tous été capables de faire preuve d'un esprit de responsabilité pour dire : « Dans cette période de crise, il faut que nous avancions. Il n'y a pas de place pour les postures d'acteurs, pour les invectives ou les jeux de ping-pong ! »