L'amendement vise à supprimer les alinéas 53 à 56, qui portent sur les prérogatives de la commission de protection des droits. Cette structure, constituée de trois membres seulement, a des objectifs qui semblent irréalistes : même si un chiffre maximal de 1 000 a maintenant été fixé, ce seront tout de même plusieurs centaines d'avertissements qui devront être envoyés chaque jour. À ce sujet, j'ai une question très précise à vous poser, madame la ministre : le premier mail d'avertissement sera-t-il envoyé par les fournisseurs d'accès Internet ou par la commission de protection des droits ? Ce n'est absolument pas la même chose. Or, pour le moment, nous n'en savons rien.
Par ailleurs, je rappelle que, jusqu'à maintenant, les données des internautes ne pouvaient être obtenues que sur réquisition judiciaire. Dorénavant, une autorité administrative, la commission de protection des droits, pourra aussi les transmettre. Dans le projet de loi, vous précisez, à l'alinéa 53, que ses membres « procèdent à l'examen des faits et constatent la matérialité des manquements à l'obligation définie à l'article L. 336-3 [du code de la propriété intellectuelle] ». Au passage, je signale que cet article rend obligatoire le logiciel de sécurisation des ordinateurs alors que personne n'est en mesure, à ce jour, de promettre la réalisation d'un tel logiciel. Comment cette commission procèdera-t-elle à l'examen des faits et constatera-t-elle la matérialité des manquements ? Vous nous avez dit que les internautes contestant sa décision pourront lui faire parvenir leur disque dur, mais nous en avons déjà discuté, et une telle éventualité semble impossible en pratique.
En effet, lorsque l'internaute dispose d'une Live Box, l'adresse IP est celle de la Live Box et non celle de l'ordinateur. Dès lors, s'il y a quatre ou cinq ordinateurs derrière la Live Box, quel sera le disque dur que devront faire parvenir à la commission les internautes de bonne foi ? De plus, s'ils n'utilisent pas un ordinateur mais un système Live CD, comment feront-ils ? Je pourrais encore citer beaucoup d'autres exemples de ce genre. Ensuite, comment la commission pourra-t-elle prouver qu'elle a bien reçu le bon disque dur, celui sur lequel l'internaute est soupçonné d'avoir procédé à un téléchargement abusif, et non un autre ? Cet alinéa 53 qui porte sur la matérialité des manquements apparaît donc quelque peu ubuesque.
Quant à l'alinéa 54, il précise que les membres de la commission peuvent « obtenir tous documents, quel qu'en soit le support, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques ». Or c'est en contradiction avec la LCEN – la loi pour la confiance dans l'économie numérique. J'y reviendrai.