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L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale (n°s 951, 2517, 1828). La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur le président, madame la ministre d'État, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, notre assemblée est aujourd'hui saisie du projet de loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale, projet voté par le Sénat à l'unanimité il y a près de deux ans, le 10 juin 2008, et adopté sans modification par notre commission des lois, le mercredi 19 mai dernier.
... 1999. Un nouvel article 53-2, non modifié par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, a été introduit, aux termes duquel « la République peut reconnaître la juridiction de la Cour pénale internationale dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998 ». Cette révision a ouvert la voie à la ratification du traité par la France, intervenue le 9 juin 2000. Seconde étape de l'adaptation de notre droit, la loi procédurale du 26 février 2002 a été adoptée avant même l'entrée en fonction de la CPI, car les dispositions de cette loi étaient indispensables au fonctionnement même de la Cour. Cette loi a défini les conditions de la coopération de la France avec la Cour pénale internationale, non seulement s'agissant de l'arrestation et de la remise des personnes réclamées par la Cour, ...
L'adaptation autorise une certaine souplesse d'interprétation du statut, d'autant que la terminologie anglo-saxonne est parfois bien éloignée de la nôtre et que certains concepts juridiques contenus dans le statut sont même inconnus de notre droit. (Mouvements sur les bancs du groupe SRC.) Mes chers collègues, j'insiste sur ce point : il n'est nullement demandé au législateur d'adopter un texte en conformité ...
... raisons que j'ai évoquées et sachant que c'est un sujet d'importance pour la France, de ne pas faire adopter un texte incomplet. Nous ne sommes pas à trois mois près. Avant de conclure, j'aimerais connaître les intentions du Gouvernement en ce qui concerne les dispositions relatives au crime d'agression, adoptées il y a quelques semaines à kampala. J'appelle votre attention sur les conditions d'adaptation de notre constitution à ces dispositions car notre loi fondamentale nous paraît restrictive à cet égard. Je termine en soulignant que la commission des affaires étrangères a fait preuve de responsabilité dans les amendements qu'elle a adoptés. Vous avez salué ceux du Sénat, j'aurais souhaité que nous ayons aussi votre approbation sur un certain nombre des nôtres. Il s'agit de trouver un équilibr...
...ar le rapporteur de se plier aux voeux du Gouvernement de ne pas amender le texte a tué tout véritable dialogue. C'est pourquoi je vais essayer ce soir de vous convaincre, mes chers collègues, de renvoyer ce texte en commission. Pour y parvenir, il faut d'abord isoler les enjeux. Le premier est relatif à la vocation même du projet de loi. Son intitulé en fixe la portée : « Projet de loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale. ». Le mot à retenir est évidemment : « adaptation ». Le rapporteur écrit à ce sujet dans son rapport : « Aucune disposition du statut de Rome n'oblige les États parties à procéder à une harmonisation de la définition en droit interne des crimes relevant de la compétence de la Cour. Cependant l'adaptation de notre droit pénal interne...
mais ce n'est qu'une interprétation parmi d'autres. J'ai ainsi relevé que Mme la ministre d'État n'a utilisé devant la commission que rarement le terme : « adaptation » ; elle a dit qu'il s'agissait d'« articuler l'intervention de la justice française et celle de la CPI », ce qui imposait « de compléter notre législation ». Comme chacun de nous sait ici que le droit est affaire de précision, il aura constaté que « compléter» n'équivaut pas à « s'adapter». En effet, qui veut bien se donner la peine de lire le statut découvrira que ce texte n'a nul besoin d'êtr...
Cela signifie que l'oeuvre d'adaptation à laquelle nous convie ce texte est pratiquement inutile. Demain, rien n'empêchera un juge de se référer aux exigences du statut de Rome si celles-ci ne figurent pas en droit interne, même si le droit interne est contradictoire avec elles ! En cette matière, le droit international, dès lors qu'il est sans équivoque, prime. Ultime précision : la décision du Conseil constitutionnel du 22 janvier 19...
...mission. J'avoue avoir été surpris par le premier point traité par Jean-Jacques Urvoas et ce qui me semble être, en apparence, un contresens dans la présentation de son argumentaire. L'objet de ce texte et d'adapter notre droit pénal au statut de Rome. Or, à plusieurs reprises, M. Urvoas a dit l'inverse, tout en notant d'ailleurs que Mme la garde des sceaux avait parlé d'articulation plus que d'adaptation. Il a dit qu'il n'était pas nécessaire d'adapter le statut de Rome à notre droit pénal alors qu'il s'agit précisément de l'inverse !
...e qui ne donne d'ailleurs que plus de valeur à notre approbation de ce texte, d'une grande qualité. Vous n'allez quand même pas regretter que, de temps en temps, le Sénat et l'Assemblée s'entendent ! Ce n'est au demeurant ni systématique, ni signe de soumission. Vos arguments, habiles mais spécieux, ne nous convainquent pas du tout, monsieur Urvoas. La Convention de Rome, très explicite, parle d'adaptation de la loi pénale nationale ; or vous avez insensiblement glissé de l'adaptation à l'articulation, et de l'articulation à la soumission. Mais la Convention dit exactement l'inverse ! N'allez pas en déduire que la France est contre l'universalité. Notre pays a signé toutes les conventions universelles, sans exception mais sous réserve qu'elles soient déterminées du point de vue matériel. La compét...
...ur pénale internationale dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998. » La ratification du traité est intervenue le 9 juin 2000. Après l'adoption, le 26 février 2002, de la proposition de loi relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, l'attente fut bien longue et les hésitations manifestes avant que l'on parvienne enfin à l'examen du projet de loi portant adaptation du droit pénal à l'intervention de la Cour pénale internationale. Ce texte a été adopté par le Sénat voici deux ans, et le fait qu'il ne soit inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée qu'un lundi soir 12 juillet est déjà, en soi, un signe regrettable. Le rapporteur et la majorité de la commission des lois souhaitent un vote conforme, ce qui est révélateur d'une démarche tendant à faire de cet...
Convenez que cette restriction majeure à l'efficacité des poursuites dénature l'objectif même de la Cour pénale internationale. Cette logique d'une adaptation minimaliste trouve son aboutissement dans l'inversion du principe de complémentarité. Alors que le statut de Rome ratifié par la France prévoit exactement le contraire, vous proposez que la France n'engage des poursuites que si la Cour décline sa compétence.
... débats au Sénat en 2008, puis lors des discussions sur ce projet en commission des lois et en commission des affaires étrangères, laquelle, dans un avis adopté à l'unanimité, a souhaité revoir le dispositif mis en place par le Sénat, sans oublier les appels de la Commission nationale consultative des droits des l'homme qui, par quatre fois, a interpellé le Premier ministre sur l'urgence de cette adaptation, ou ceux de la coalition française pour la Cour pénale internationale , le Gouvernement n'a cessé de tergiverser, prétextant que l'agenda parlementaire était trop chargé. Il avait pourtant une excellente occasion d'agir avant le 31 mai dernier, mais rien n'y a fait. La France s'est rendue à Kampala, pour la première conférence de révision du statut de la CPI, sans s'être mise en conformité avec...
...bats, ainsi que l'autorise la Constitution ? Cette position est pour le moins curieuse. D'un côté, le Gouvernement affirme vouloir lutter contre l'impunité, pièce maîtresse du statut de Rome ; de l'autre, il se protège en s'arrangeant avec ses obligations. Malgré cela, il participe pleinement, en tant qu'État membre, au financement de la CPI à hauteur de 10 % : autre contradiction. À ce refus d'adaptation, le Gouvernement ajoute son refus partiel d'intégrer dans son droit interne la répression des violations des conventions de Genève de 1949 et des deux protocoles additionnels de 1977. Dès lors, pour l'instant, une stricte conformité entre les définitions des incriminations du droit français et les définitions du droit international n'existant toujours pas, elle prend le risque de tomber sous le c...
Madame le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, l'adaptation que vous nous proposez par ce texte n'est à la hauteur ni des enjeux de la CPI ni du rôle de la France sur la scène internationale. Aucun autre système juridique en Europe n'accumule autant d'obstacles à la poursuite des criminels internationaux que celui inventé par nos collègues sénateurs. Ce n'est faire honneur ni au processus de négociation qui a créé il y a dix ans cette nouvelle juridiction...