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Amendement N° 189 (Rejeté)

Immigration intégration et nationalité

Discuté en séance le 5 octobre 2010 ( amendements identiques : 129 550 )

Déposé le 24 septembre 2010 par : M. Mamère, M. Braouezec, les membres du groupe de la Gauche démocrate, républicaine.

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Supprimer cet article.

Exposé Sommaire :

Avec ces dispositions, l'obligation de quitter le territoire français (OQTF) ne frappe plus seulement les étrangers qui ayant demandé la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour se sont vu opposé un refus ou ceux dont le titre de séjour aura été retiré, il frappe cinq catégories de situations.

La mesure d'éloignement (OQTF) qui accompagne le refus de délivrance ou le retrait d'un titre de séjour, d'un récépissé de demande de titre ou d'une autorisation provisoire de séjour ne sont pas motivés, seule la décision énonçant le refus de délivrance ou de renouvellement ou le retrait d'un titre de séjour devant l'être. Dès lors, le dispositif ne serait pas conforme à la directive « Retour », dont l'article 12 prévoit que « les décisions de retour (…) indiquent leurs motifs de fait et de droit ».

De plus, le délai de trente jours à compter de la notification pour mettre spontanément à exécution la mesure subsiste, il est désormais appelé « délai de départ volontaire » et l'administration peut même le porter, à titre exceptionnel, à soixante jours. Cette décision de prolonger le délai est totalement discrétionnaire, le projet de loi se bornant à évoquer « la situation personnelle de l'étranger » sans plus de précision et ce au mépris de l'article 7 paragraphe 2 de la directive « Retour ».

Par ailleurs, certaines hypothèses prévues par le projet de loi justifiant d'une OQTF sans délai de départ volontaire sont contraires à la directive « Retour ». L'article 7 paragraphe 4 de la directive est très précis : il liste 3 hypothèses dans lesquelles l'État peut s'abstenir d'accorder un délai. Or, cet article, de par sa rédaction doit être interprété comme manifestant la volonté du législateur communautaire d'encadrer étroitement les cas dans lesquels l'État peut supprimer le délai accordé pour quitter le territoire. Le projet de loi prévoit 8 hypothèses qui permettent à l'administration de refuser le délai de départ volontaire !

Enfin, l'interdiction de retour sur le territoire français (IRTF), dont l'administration peut assortir l'OQTF. Il s'agit de l'introduction en droit français d'une des dispositions les plus graves de la directive « Retour ». Avec cette « double peine administrative », il s'agit d'instituer un véritable bannissement des étrangers de l'ensemble du territoire européen : tout étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est susceptible d'être frappé par une interdiction de retour (allant de 2 à 5 ans).

Cette mesure est laissée à la discrétion des préfectures. Il y a donc fort à craindre qu'elle ne devienne en réalité systématique alors que ses conséquences sont très graves pour les étrangers concernés. Il n'y a pas de cadre législatif suffisant permettant de protéger effectivement les étrangers ayant vocation à recevoir de plein droit un titre de séjour. En pratique il sera très difficile de contester une telle interdiction de retour sur le territoire.

De plus, la directive « Retour » exclut, sous certaines conditions, la possibilité de prononcer une interdiction de retour contre des personnes victimes de la traite des êtres humains ou qui ont fait l'objet d'une aide à l'immigration clandestine et qui coopèrent avec les autorités (art. 11, paragraphe 3, 2ème alinéa). Cette limitation n'est pas reprise par le projet de loi traduisant une transposition insuffisante.

Le projet de loi prévoit que l'étranger qui a respecté l'obligation de quitter le territoire avec délai de départ volontaire et qui en justifie dans les deux mois de son départ peut voir abroger l'IRTF dont il est frappé. En imposant que la demande d'abrogation soit déposée dans ce délai « raisonnable » de deux mois, le projet excède le cadre de la directive qui, elle, ne prévoit aucune limite, et diminue les droits des étrangers frappés de bannissement.

Le projet de loi prévoit également, que l'étranger qui s'est maintenu au-delà du délai de départ volontaire peut être frappé d'une IRTF, sans que cette possibilité soit tempérée s'il a saisi une juridiction d'une contestation de l'OQTF. Cette absence de prise en compte de l'introduction d'un recours est contraire à l'esprit de la directive « Retour » qui prévoit que l'exécution de l'éloignement est suspendue pendant la procédure de recours (art. 9 paragraphe 1b et 13 de la directive).

Enfin, le projet ne prévoit pas de mécanisme d'annulation de l'inscription de l'étranger frappé d'une IRTF au système d'information Schengen (SIS) lorsque celle-ci aura été abrogée ou annulée.

Le projet de loi, censé transposer le dispositif qu'organise la directive « Retour », est loin d'en respecter les aspects qui vont dans le sens d'une meilleure garantie des droits des étrangers.

La directive définit de manière exhaustive les motifs du placement en rétention (art. 15). Contrairement à ce qui est soutenu dans l'exposé des motifs du projet de loi, le placement en rétention ne peut être justifié par une « menace pour l'ordre public ». Ainsi la directive stipule que lorsque des mesures moins coercitives sont possibles, ou s'il n'existe plus de risque de fuite, ou si l'étranger coopère pleinement avec les autorités, la personne doit être remise en liberté (cf. Arrêt CEDH Kadzoev 30/11/2009). Or, le projet de loi ne comporte aucune disposition en vue de transposer cette obligation de remise en liberté stipulée à l'art. 15 paragraphe 4.

Par application du considérant 12 de la directive « Retour », une autorisation provisoire de séjour devrait alors être remise aux étrangers dont il n'existe pas de perspective raisonnable d'éloignement.

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