Déposé le 21 novembre 2011 par : M. Tardy, M. Dionis du Séjour.
Supprimer l'alinéa 2.
L'article 5-II du projet de loi a pour objet de rendre applicable la Décision n° 11 modifiée de la Commission copie privée à toutes les actions contentieuses engagées avant le 18 juin 2011 et fondées sur l'illégalité de cette décision, à l'exception de celles ayant donné lieu à des jugements passés en force de chose jugée. Il a ainsi pour conséquence directe de censurer partiellement l'arrêt du Conseil d'Etat du 17 juin 2011 (CE, Canal + Distribution et autres) en le privant d'effet.
En effet, le dispositif de l'arrêt du Conseil d'Etat énonce en son article 4 que « l'annulation [de la Décision n° 11] prendra effet à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la date de sa notification au ministre de la culture et de la communication, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de la présente décision contre des actes pris sur le fondement des dispositions annulées ». La réserve des actions en cours à la date du jugement était précisément destinée à permettre aux auteurs de ces actions de bénéficier immédiatement, dans les procédures engagées, des effets d'une annulation rétroactive de la Décision n°11. Or cette réserve, garantie de manière expresse par l'arrêt du 17 juin 2010, est non seulement remise en cause mais complètement privée d'effet par l'article 5-II.
Le Conseil constitutionnel a déjà jugé qu'une disposition législative était contraire à la Constitution si elle avait « pour principal objet […] de priver d'effet […] [une] décision du Conseil d'Etat » (Décision n° 2005-531 DC du 29 décembre 2005, cons. 6).
L'article 5-II du projet de loi a pour principal objet de censurer une partie du dispositif de la décision du 17 juin 2011 du Conseil d'Etat, alors même que le Conseil d'Etat considère que la réserve à laquelle il procède concernant les actions contentieuses engagées est un impératif lié au respect du droit au recours effectif En effet, les annulations contentieuses prononcées par le juge administratif ont en principe un caractère "erga omnes" et rétroactif, dans l'intérêt supérieur de la légalité : elles bénéficient ainsi à tous et font disparaître intégralement l'acte annulé de l'ordre juridique.
Dans les rares cas, tel que celui de l'arrêt du 17 juin 2011, où le Conseil d'Etat limite les effets d'une annulation contentieuse, il s'attache à préserver en tout état de cause le droit à un recours effectif. Le Conseil d'Etat a ainsi expressément jugé que « lorsque le juge administratif décide de limiter dans le temps des effets de l'annulation de l'acte attaqué devant lui, il est tenu, au regard du droit des justiciables à un recours effectif, de réserver les actions contentieuses engagées contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause à la date de sa décision d'annulation » (CE, 17 décembre 2010, Syndicat de l'industrie des technologies de l'information, n°310195, aux tables du Lebon).
En censurant une partie essentielle de la décision du Conseil d'Etat du 17 juin 2011, l'article 5-II est donc clairement contraire à la Constitution et doit être supprimé.
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