Déposé le 10 octobre 2011 par : M. Pancher, M. Paternotte.
L'article L. 480-3 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces peines sont également applicables en cas de continuation des travaux nonobstant la décision de la juridiction administrative prononçant la suspension ou le sursis à exécution de l'autorisation d'urbanisme. ».
Jean-Luc WARSMANN, président de la commission des lois à l'Assemblée nationale en expose les motifs :
« Dans son rapport annuel pour 2009, la Cour de cassation a soulevé une lacune dans la législation pénale en matière d'urbanisme, révélée par un arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme en date du 10 octobre 2006 (Pessino contre France) puis par un arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation en date du 13 février 2009.
Dans cette affaire, une personne bénéficiaire d'un permis de construire avait poursuivi des travaux malgré une décision du tribunal administratif ordonnant qu'il soit sursis à l'exécution du permis de construire. Des poursuites avaient été engagées sur le fondement de l'article L. 480-3 du code de l'urbanisme, qui punit de 75 000 euros d'amende le fait de continuer des travaux nonobstant une décision judiciaire ou un arrêté en ordonnant l'interruption. Après avoir été condamnée en première instance sur ce fondement, la personne avait été à nouveau condamnée, mais sur le fondement de l'article L. 480-4, qui punit l'exécution de travaux sans permis de construire. Après que son pourvoi en cassation eut été rejeté, la personne avait saisi la Cour européenne des droits de l'Homme, qui jugea que l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'Homme avait été violé, en considérant que si cet article « interdit en particulier d'étendre le champ d'application des infractions existantes à des faits qui, antérieurement, ne constituaient pas des infractions, il commande en outre de ne pas appliquer la loi pénale de manière extensive au détriment de l'accusé, par exemple par analogie » (§ 28). La continuation de travaux malgré une décision administrative ordonnant la suspension du permis de construire n'étant pas expressément visée dans les textes d'incrimination, les poursuites furent donc considérées par la Cour de Strasbourg comme irrégulières.
Cette décision de la Cour de Strasbourg a été relayée par l'arrêt de la Cour de cassation du 13 février 2009, qui, au visa des articles 111-4 du code pénal et L. 480-4 du code de l'urbanisme, a relevé : « Attendu que la loi pénale est d'interprétation stricte ; qu'il s'ensuit que la poursuite de travaux malgré une décision de la juridiction administrative prononçant le sursis à exécution du permis de construire n'est pas constitutive de l'infraction de construction sans permis prévue par le second de ces textes ».
Ces deux arrêts ont mis en évidence une faille de la législation pénale en matière d'urbanisme qu'il convient de combler. En effet, comme l'a relevé le rapport de la Cour de cassation pour 2009, « il apparaît nécessaire de pénaliser ce comportement qui procède du même esprit que la poursuite de travaux malgré interruption et devrait être sanctionné de la même manière ».
Aux pertinents motifs du député Warsmann, il y a lieu d'ajouter qu'en l'absence de délit né de la poursuite des travaux après la suspension d'une autorisation d'urbanisme, aucun procès-verbal d'infraction ne peut être établi et qu'en conséquence, faute de remplir cette condition préalable, l'interruption des travaux ne peut pas être ordonnée par le maire ou par le préfet. L'incrimination de cette poursuite de travaux permettra à l'autorité administrative de prendre les mesures de sécurité et d'exécution nécessaires à l'arrêt des travaux.
Le présent amendement procède donc à la correction nécessaire, en complétant l'article L. 480-3 du code de l'urbanisme pour pénaliser, outre les hypothèses de continuation de travaux nonobstant une décision judiciaire ou un arrêté en ordonnant l'interruption, la poursuite de travaux malgré une décision du juge administratif des référés ordonnant la suspension du permis de construire ou de la cour administrative d'appel en ordonnant le sursis à exécution.
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