Déposé le 31 janvier 2011 par : M. Jean-Michel Clément, M. Goldberg, Mme Mazetier, M. Vuilque, M. Vidalies, Mme Karamanli, M. Blisko, Mme Pau-Langevin, M. Urvoas, M. Raimbourg, M. Derosier, M. Caresche, M. Terrasse, M. Le Bouillonnec, les membres du groupe Socialiste, radical, citoyen, divers gauche.
Substituer à l'alinéa 54 les treize alinéas suivants :
« III. - L'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
« 1° Les quatre premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger en France ou le transit irrégulier d'un étranger par la France, sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30 000 €.
« Sera puni des mêmes peines celui qui, quelle que soit sa nationalité, aura commis le délit défini au premier alinéa du présent article alors qu'il se trouvait sur le territoire d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 autre que la France.
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un autre État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ou le transit irrégulier d'un étranger par le territoire d'un tel État.
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un État partie au protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, signée à Palerme le 12 décembre 2000, ou le transit irrégulier d'un étranger par le territoire d'un tel État. »
« 2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas lorsque l'acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger, sauf s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. »
« IV. - L'article L. 622-4 du même code est ainsi modifié :
« 1° Après le mot : « morale », la fin du 3° est ainsi rédigée : « qui aura contribué à préserver la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger, sauf si cette aide a été réalisée à titre onéreux. ».
« 2° Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° De tout établissement et service visé à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que de leurs salariés et bénévoles lorsqu'ils agissent dans le cadre de ces établissements et services. ». »
La première qualité du droit est d'être juste. C'est pourquoi cet amendement vise à supprimer le « délit de solidarité » dans le cadre de la proposition de loi visant à améliorer la qualité du droit.
Le principe de sécurité juridique impose par ailleurs que le droit soit d'une application précise, alors que ce délit de solidarité est caractérisé par le flou et l'incertitude.
Au demeurant, dans la logique de cette proposition il s'agit de supprimer une incrimination délictuelle qui, selon les termes du Ministre de l'immigration, n'a jamais été appliqué et apparaît ainsi totalement inutile.
La circulaire du 20 novembre 2009 du ministère de la justice et des libertés indique, au sujet de l'article L622-4 3° du CESEDA, que "Les notions de "danger actuel ou imminent" et de "sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique et de l'intéressé" doivent s'interpréter largement sans se limiter au seul péril immédiat stricto sensu encouru par l'étranger. Elles doivent permettre de prendre également en compte les situations de fragilité particulière voire de détresse dans lesquelles se retrouvent très fréquemment les étrangers en situation irrégulière. (...) Plus généralement, l'immunité prévue à l'article L622-4 3° devra être considérée comme acquise lorsque l'acte visé n'a d'autre objectif que d'assurer des conditions de vie dignes et décentes à l'étranger en situation irrégulière." Ce faisant, la circulaire du 20 novembre 2009 du Ministère de la Justice et des Libertés vise à modifier le domaine de l'article L622-4 3° du CESEDA tel que la loi le définit sans se borner, comme sa fonction l'exige, à en préciser le sens. C'est pourquoi, la suppression du cadre légal de tout délit de solidarité doit se faire par une modification de la loi et non par une circulaire.
Le présent amendement comprend deux parties. La première modifie l'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant les sanctions en cas d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger. La seconde est relative à l'article L. 622-4 du même code qui ne traite que de l'aide au séjour.
Cinq objectifs sont visés par le présent amendement :
- Dépénaliser toute aide (entrée, séjour, transit) lorsque la sauvegarde de la vie ou l'intégrité physique de l'étranger est en jeu (sauf si cette aide a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte). Ainsi, est prise en compte la directive du 28 novembre 2002 qui permet d'exonérer de sanctions une aide au transit ou à l'entrée irréguliers d'un étranger si le « but est d'apporter une aide humanitaire à la personne concernée ». Il est ici choisi de ne viser que les cas où la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de la personne est en jeu afin de parer à d'éventuelles utilisations de fins prétendument humanitaires pour organiser des réseaux clandestins.
- Remplacer le terme trop général de « circulation » par celui de « transit ». La législation française a retenu la notion de « circulation » alors que la directive européenne du 28 novembre 2002 parle de « transit par le territoire d'un État membre ». En choisissant le terme de « transit » dans cet amendement, le choix est fait de sanctionner uniquement les actes de passeurs qui tentent de faire traverser les frontières aux migrants. Est ainsi dépénalisé le simple fait de prendre dans son véhicule un étranger pour un trajet quelconque.
- Ne sanctionner l'aide au séjour irrégulier que dans le cas où cette aide se ferait à titre onéreux. Cette proposition ne fait que reprendre l'idée de la directive européenne du 28 novembre 2002 qui précise que les sanctions d'aide au séjour sont prévues si l'aide est réalisée dans un but lucratif. Le terme choisi ici est celui de « à titre onéreux » qui est plus large que la recherche d'un profit. Le but est de différencier dans notre cadre législatif les passeurs qui doivent être sanctionné des citoyens qui agissent par solidarité et uniquement cela.
- Dépénaliser l'aide au séjour qui serait le fait de personne physique ou morale agissant dans le but de préserver soit l'intégrité physique de l'étranger soit sa dignité (sauf si cette aide a été réalisée à titre onéreux). Cela permettra d'exempter de sanctions des personnes morales ou physiques qui auraient aidé au séjour irrégulier d'un étranger si cette aide avait pour objectif légitime de préserver la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger. Cette disposition se distingue de celle prévue à l'article L. 622-1 dans la mesure où la protection de la dignité est ici prise en compte. Offrir un toit à un étranger en situation irrégulière, sans contrepartie, ne pourra plus faire l'objet de poursuites pénales.
- Soustraire de toutes sanctions pénales pour aide au séjour les établissements et services visés à l'article L. 312-1 du Code de l'action sociale et des familles, ainsi que leurs salariés et bénévoles lorsqu'ils agissent dans le cadre de ces établissements et services. Les salariés ou bénévoles des établissements et services sociaux et médico-sociaux définis à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles devraient être exclus de sanction. Ainsi, ne pourraient plus être sanctionnées, dans leur activité, les personnes agissant par exemple dans les foyers d'hébergement, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale, les SAMU sociaux, les foyers de jeunes travailleurs, les centres d'accueil pour demandeurs d'asile, les lieux de vie et d'accueil ou encore dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance.
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