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Commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi sur l'enfance délaissée et l'adoption

Séance du 10 janvier 2012 à 18h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • abandon
  • adoptabilité
  • enfance
  • parents
  • placé

La séance

Source

La séance est ouverte à dix-huit heures trente.

La commission spéciale procède d'abord à l'audition de M. Laurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes.

PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Mes chers collègues, nous débutons aujourd'hui les travaux de notre commission spéciale par l'audition de M. Laurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes.

Merci, Monsieur le procureur, d'avoir accepté d'être entendu cet après midi. Nous souhaitons recueillir, le cas échéant, vos remarques sur le dispositif de la proposition de loi relative à l'enfance délaissée et l'adoption. Je vous demanderai de limiter votre propos liminaire à une quinzaine de minutes, de manière à permettre ensuite à Mme la rapporteure et aux autres commissaires d'intervenir.

L'audition est prévue pour durer 45 minutes. Elle fera l'objet d'un compte rendu qui sera publié et mis en ligne sur le site de l'Assemblée nationale.

PermalienLaurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes

Mesdames, Messieurs, je n'aborderai pas l'article 3 de la proposition de loi, qui porte sur la réforme de l'agrément, dispositif mis en place par les départements et qui ne me concerne pas directement – encore que, en ma qualité de membre du Conseil supérieur de l'adoption, je pense qu'il serait pertinent de mieux uniformiser sur le plan national les opérations préalables à la délivrance des agréments, pour permettre à chaque candidat adoptant d'être avisé des attentes des autorités qui les délivrent.

Je dirai peu de chose de l'article 4 qui vise à améliorer l'information et la préparation des candidats à l'adoption, ce thème ne faisant pas débat. Dans le service que je dirige au parquet de Nantes, nous constatons tous les jours, par nos contacts téléphoniques avec les candidats à l'adoption, que des lacunes sérieuses existent sur le plan de l'information, notamment sur les aspects juridiques de l'adoption.

Enfin, je n'évoquerai ni l'article 6 ni l'article 7, qui n'appellent de ma part aucune remarque particulière.

Je concentrerai donc mon propos sur les domaines qui relèvent davantage de ma compétence, à savoir la déclaration judiciaire d'abandon et la réforme envisagée de l'adoption simple.

S'agissant du premier point, je pense, comme d'autres qui ont été entendus ici avant moi, qu'il serait pertinent de retirer l'article 350 du titre VIII « De la filiation adoptive » du code civil. Laisser la déclaration judiciaire d'abandon en perspective de l'adoption me semble en effet délicat et je suggère de l'insérer dans le titre IX relatif à l'autorité parentale où elle pourrait davantage trouver sa place.

Sur le principe même de la réécriture de l'article 350 du code civil, j'émets un avis réservé dans la mesure où le diagnostic partagé par les professionnels de la protection de l'enfance explique la sous-utilisation de la procédure de l'abandon judiciaire moins par les difficultés de mise en oeuvre du texte liées à la preuve de la notion de « désintérêt manifeste » que par la réticence des services gardiens à saisir la justice pour déclarer un enfant abandonné. Il me semble en effet que les tribunaux, s'ils étaient davantage saisis par les services gardiens et se voyaient remettre par l'Aide sociale à l'enfance un rapport solidement argumenté, ne verraient pas d'obstacle à prononcer l'abandon judiciaire, dès lors que les parents biologiques, convoqués à l'audition, après avoir vainement tenté de les faire entendre par les services de police, ne se manifestent pas. D'ailleurs, dans ce cas-là, le tribunal de grande instance de Nantes prononce généralement un abandon, au terme d'une procédure qui prend, en général, un an et demi à trois ans. En fait, le désintérêt manifeste est pour l'essentiel discuté devant les tribunaux lorsque les parents sont présents à l'audience et s'opposent au prononcé de la déclaration judiciaire d'abandon.

En tant que magistrat, je suis attaché à la notion de « désintérêt manifeste » car elle renvoie à un acte volontaire de rejet actif ou passif des parents à l'égard de l'enfant, dont il apparaît pertinent de tirer des conséquences juridiques. La notion de « délaissement parental », que la proposition de loi propose de lui substituer, renvoie plutôt à des causes externes à la volonté parentale, pour lesquelles il m'apparaît dangereux d'intervenir sans risquer de porter atteinte à l'intérêt de l'enfant, qui est prioritairement de vivre auprès de ses parents biologiques, comme le prévoit l'article 7 de Convention internationale des droits de l'enfant. Il ne faudrait pas que des circonstances accidentelles ou involontaires puissent servir de base au dépôt d'une requête. J'insiste sur le fait que s'il s'agit d'augmenter le nombre de jugements en abandon judiciaire, le remède réside moins dans une reformulation de la loi que dans la transmission à la justice de dossiers argumentés construits par le service de l'aide sociale à l'enfance.

Cela m'amène à formuler plusieurs propositions.

L'exposé des motifs de la proposition de loi indique que la notion de désintérêt manifeste figurant à l'article 350 apparaît floue. Je propose donc, soit de donner une définition légale plus précise de la notion de désintérêt manifeste pour faciliter la mise en oeuvre de la procédure, soit de fusionner les notions de désintérêt et de délaissement pour élargir la base des enfants susceptibles d'entrer dans la catégorie de ceux pouvant être judiciairement abandonnés, tout en sauvegardant l'intérêt supérieur de l'enfant quand aucun fait volontaire ne peut être retenu contre ses parents.

Ainsi, le 1° de l'article 1er de la proposition de loi pourrait être rédigé de la manière suivante : « L'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de l'aide sociale à l'enfance (ASE), volontairement délaissé par ses parents pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon, est déclaré abandonné par le tribunal de grande instance, à moins que ce délaissement ne soit dû à un cas de force majeure à caractère temporaire. » Cette rédaction permettrait de tenir compte des deux notions.

L'intervention d'office du ministère public, nouvelle disposition prévue par la proposition de loi, m'apparaît pertinente dans la mesure où celui-ci a déjà qualité pour intervenir d'office dans l'ensemble du champ du droit des personnes, notamment en matière d'assistance éducative, de majeurs protégés, d'autorité parentale, de filiation, d'adoption et de mariage. Il s'agit ainsi de corriger une anomalie pour permettre au ministère public, dans des cas particuliers, de saisir lui-même le tribunal. Cette mesure, qui me semble donc être une avancée significative, permettrait également au ministère public de « décentrer » les services de l'ASE, traditionnellement tournés vers le maintien des liens entre l'enfant et ses parents biologiques.

Cependant, en pratique et à moyens constants, il est parfaitement illusoire d'espérer de cette innovation un accroissement sensible des déclarations judiciaires d'abandon. En effet, les parquets des mineurs sont d'ores et déjà matériellement dans l'incapacité de suivre les dossiers d'assistance éducative.

Par contre, il me semble intéressant de faire intervenir à ce niveau le juge des enfants. En effet, dans la mesure où il révise les mesures de placement tous les deux ans, ce magistrat pourrait estimer souhaitable, dans l'intérêt de l'enfant, de saisir le tribunal de grande instance s'il considère que l'enfant concerné relève d'une déclaration judiciaire d'abandon, alors que cela n'a pas été envisagé par le service gardien.

Je suggère donc d'insérer à la fin du 1er alinéa proposé pour l'article 350 du code civil les termes : « , le cas échéant sur proposition du juge des enfants ». La fin de cet alinéa serait ainsi rédigée : « La demande peut également, à l'expiration du même délai, être présentée par le ministère public agissant d'office, le cas échéant sur proposition du juge des enfants. » Cette rédaction me semble utile en cas de divergence de vues entre le juge des enfants et les services gardiens au moment du réexamen de la situation d'un mineur.

Je suis tout à fait favorable à la modification de l'article L. 223-5 du code de l'action sociale et des familles, introduite à l'article 2 de la proposition de loi. Un rapport annuel évaluant de façon systématique la situation de l'enfant au regard du désintérêt ou du délaissement parental serait une très bonne chose. En effet, ce sont les travailleurs sociaux qui sont les mieux à même de savoir s'il est pertinent, à un moment de l'histoire du mineur dont ils ont la charge au quotidien, de saisir la juridiction pour obtenir un abandon judiciaire.

Une autre de mes propositions vise à créer un livret individuel de l'enfant sur lequel les travailleurs sociaux consigneraient, de façon chronologique, chaque contact ou visite des parents, afin de pouvoir calculer avec précision le délai d'un an prévu par l'article 350 pour la demande de déclaration d'abandon. Cela permettrait de réduire les délais de saisine de la juridiction qui sont actuellement trop longs, en moyenne deux à trois ans après constatation du délaissement parental ou du désintérêt manifeste.

Enfin, mon avis est réservé sur l'article 5 de la proposition de loi, qui tend à réformer l'adoption simple en la rendant irrévocable durant la minorité de l'adopté. Cette modification entraînerait en effet une confusion entre les deux types d'adoption – simple et plénière – en les rendant très proches, et brouillerait encore plus le paysage de l'adoption.

En outre, cette modification va à contre-courant des systèmes juridiques de nombreux pays européens, des États-Unis et du Canada, où l'adoption ouverte repose sur un triangle adoptif – enfant, parents adoptifs et famille biologique – qui, lorsqu'il fonctionne bien, est un gage d'épanouissement pour l'enfant ainsi que de stabilité et d'intégration dans la famille adoptive.

Par ailleurs, l'irrévocabilité induirait une fausse sécurité juridique ou psychologique car, n'étant pas un rempart contre les échecs de l'adoption, elle ne servirait pas l'intérêt de l'enfant. Elle pourrait même être, au contraire, un obstacle pour concevoir un nouveau projet pour l'enfant en cas de non-intégration de celui-ci dans sa famille adoptive.

De plus, l'irrévocabilité me semble être un mauvais signal à l'adresse des pays d'origine qui ne connaissent que l'adoption simple, puisque l'enfant ne pourrait pas retrouver sa famille naturelle en cas d'échec. Cette situation serait susceptible de freiner l'adoption internationale.

Enfin, l'irrévocabilité, en créant une fausse sécurité psychologique des adoptants, entraînerait une mise à distance trop importante de la famille naturelle, ce qui n'est pas la meilleure des choses pour la construction identitaire de l'enfant.

PermalienPhoto de Simon Renucci

Dans les années 1970, celles qu'on appelait les gardiennes avaient tendance à ne pas faire savoir à l'aide sociale à l'enfance que les parents ne rendaient pas visite aux enfants. Ce problème reste patent.

L'introduction du juge des enfants dans le dispositif me semble une bonne idée ; son rôle est effectivement majeur.

Enfin, la notion du triangle adoptif est intéressante. La loi doit en effet favoriser les relations susceptibles de s'établir entre les adoptants et les parents biologiques.

PermalienPhoto de Véronique Besse

Le nombre de dossiers d'adoption après déclaration judiciaire d'abandon est-il connu ? Et si oui, tous les dossiers aboutissent-ils favorablement ?

PermalienLaurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes

Je ne dispose pas des chiffres exacts.

Le parquet de Nantes, principalement chargé de transcrire des jugements étrangers d'adoption plénière sur les registres du service central de l'état civil, constate un certain nombre d'échecs qui s'expliquent peut-être par les nouvelles particularités des enfants adoptés – plus âgés ou présentant une particularité médicale – ou par une forme d'impréparation des parents adoptifs. Parfois, il arrive donc, quelques mois après l'arrivée de l'enfant, que la greffe ne prenne pas et que les parents soient contraints, surtout si l'enfant est assez grand, de le remettre à l'aide sociale à l'enfance, d'où la nécessité de concevoir un nouveau projet pour l'enfant.

Il est important d'examiner la situation de l'enfant au regard de celle de ses parents biologiques dans les toutes premières années. En cas d'absence quasi-totale des parents dans la vie de l'enfant placé, le texte actuel prévoit déjà une saisine obligatoire de la part du service gardien. J'entends bien que les familles d'accueil sont attachées aux enfants qui leur sont confiés et sont réticentes à saisir la justice, mais elles le sont encore plus lorsque la saisine intervient quand l'enfant a six ou sept ans. Dans deux cas que j'ai examinés récemment, les enfants avaient entre cinq ans et demi et six ans lorsque le tribunal a été saisi, alors qu'ils avaient été placés dès la naissance dans des familles d'accueil. La procédure durant en moyenne un an et demi à deux ans, c'est seulement vers huit ans – soit à un âge relativement avancé – que le jugement a été prononcé et qu'ils sont devenus pupilles de l'État, autrement dit adoptables. Mais, encore une fois, la rédaction actuelle de l'article 350 du code civil me semble permettre d'accroître le nombre d'enfants potentiellement adoptables, sans qu'il soit utile d'en revoir la formulation, sachant que c'est le service gardien qui a les éléments en main pour pouvoir saisir le tribunal.

L'introduction du ministère public est une excellente idée sur le plan du principe. Mais je suis dubitatif sur l'efficacité réelle de cette mesure puisque, comme je l'ai dit, les parquets des mineurs sont déjà dans l'incapacité de suivre les dossiers d'assistance éducative. Quant à ma proposition consistant à permette au juge des enfants de saisir le cas échéant le parquet pour mettre en place une éventuelle requête devant le tribunal, il me semble qu'elle pourrait se révéler utile pour faire « décoller » le nombre de jugements d'abandon judiciaire en France.

PermalienPhoto de Patricia Adam

Vous nous expliquez qu'il n'est pas nécessaire de faire évoluer la loi au motif qu'elle permet d'ores et déjà aux services d'aide sociale à l'enfance des conseils généraux de saisir la justice. Certes. Mais les faits démontrent que cela ne se fait pas. C'est pourquoi nous jugeons nécessaire de faire évoluer la loi, de l'imposer par la loi. Peut-être considérez-vous qu'il faut passer, non pas par la loi, mais par l'évolution des pratiques dans la gestion des dossiers.

De même, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance impose la mise en place d'un projet de vie pour chaque enfant : or tous les départements ne le font pas. Je pense d'ailleurs qu'il faudra aller au-delà de la loi en prévoyant, comme le proposent judicieusement les inspecteurs généraux des affaires sociales que nous avons entendus, une conférence de consensus – celle-ci nécessitera cependant un travail préparatoire très important.

J'entends bien qu'à moyens constants, il serait illusoire d'imaginer que le ministère public étudie tous les dossiers. Les juges pour enfants ont déjà beaucoup de mal à les traiter, même s'ils ont davantage de temps puisqu'ils voient ces dossiers tous les deux ans.

Enfin, s'agissant de l'irrévocabilité de l'adoption simple, j'aimerais que vous nous apportiez des précisions. Avez-vous des exemples d'enfants venus de l'étranger qui seraient retournés dans leur famille d'origine ? Que je sache, la plupart des enfants pour lesquels l'adoption est un échec sont placés dans les services de l'aide sociale à l'enfance et ne retournent pas dans leur pays, même si la procédure d'adoption n'est pas allée jusqu'à son terme.

PermalienLaurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes

Dans mon département, à la suite d'une mésentente totale et d'un désinvestissement profond, une femme célibataire a finalement confié à l'ASE, peu de temps après son arrivée, un enfant qu'elle avait fait venir d'Haïti. Ces échecs, heureusement rares, s'expliquent du fait de l'âge des enfants adoptés, des difficultés qu'ils ont eu à vivre dans leur pays d'origine, et parfois d'une forme d'impréparation de certains candidats à l'adoption.

Je n'ai pas d'exemple en tête de retour d'un enfant dans son pays d'origine. Cela étant, il m'apparaît symboliquement très important, au regard de la violence du déracinement, que l'enfant sache qu'il a une famille dans son pays de naissance et que l'existence d'une forme de communication avec cette famille et le pays qui a autorisé l'adoption soit actée, sachant que la plupart des pays rendent obligatoire l'envoi de rapports périodiques sur l'évolution de l'enfant. Cet attachement des pays d'origine au devenir de ces enfants est très important : il est indispensable à la construction, à l'intégration, bref à la réussite de l'adoption en France. Il me semble donc positif pour la construction identitaire de l'enfant qu'il sache qu'il n'est pas totalement coupé de ses racines et qu'un nouveau projet de vie sera conçu pour lui en cas d'échec. La possibilité de révocation en cas d'échec d'une adoption simple permet de donner lieu ensuite à une nouvelle adoption.

Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à l'irrévocabilité de l'adoption simple.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

J'ai rencontré une mère célibataire qui a adopté, il y a six mois dans un orphelinat, un enfant russe, abandonné à la naissance, et âgé aujourd'hui de deux ans. La juge russe a inscrit sur les papiers qu'il s'agissait d'une adoption plénière. Or cette mère est très inquiète car elle est convoquée devant le procureur fin janvier en vue d'une éventuelle remise en cause de sa situation. Risque-t-elle de ne pas pouvoir garder cet enfant et pour quelles raisons ?

PermalienLaurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes

D'après la loi russe, une révocation est possible. L'adoption dont vous parlez n'est donc pas strictement équivalente à l'adoption plénière à la française.

Le parquet de Nantes, lorsqu'il est amené à examiner la demande de transcription d'un jugement d'adoption russe sur les registres du service central, vérifie si l'enfant a été abandonné, s'il est orphelin, ou si les parents biologiques ont été déchus de l'autorité parentale. Dans ce cas, et même si l'adoption est révocable en droit russe, il n'y a pas de renaissance du lien de filiation avec les parents biologiques et l'on considère que l'adoption est équivalente à l'adoption plénière. Ainsi, l'enfant devient français par le simple fait de la transcription du jugement.

En revanche, si les parents biologiques russes sont encore en vie ou s'ils n'ont pas été déchus de l'autorité parentale par jugement russe, nous refusons la transcription de l'adoption plénière. La personne peut alors soit demander l'exequatur du jugement russe devant le tribunal de son domicile, de façon à déposer ensuite une déclaration de nationalité française, soit nous assigner pour contester l'analyse juridique que nous avons faite du cas qui nous a été soumis.

Pour un certain nombre de pays, dont la Russie, on doit donc s'interroger sur les conditions de l'adoption de l'enfant.

Cela étant, je ne comprends pas pourquoi cette dame est convoquée.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

On lui demande des papiers sur la famille de l'enfant… Je n'en sais pas plus.

PermalienLaurent Fichot, procureur de la République adjoint près le Tribunal de grande instance de Nantes

Je pense que, dans le cadre de l'instruction du dossier, le parquet local va demander s'il existe encore des liens avec la mère russe, avant de se prononcer éventuellement sur l'adoption plénière.

PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Monsieur le procureur, je vous remercie pour tous ces éclaircissements.

La Commission spéciale procède ensuite à l'audition de M. Pierre-Yves Madignier, président d'ATD-Quart Monde, de Mme Maryvonne Caillaux, responsable du secrétariat famille et de Mme Marisol Nodé-Langlois, chargée des relations avec les parlementaires.

PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Je vous remercie, Mesdames, Monsieur, d'avoir accepté notre invitation.

PermalienPierre-Yves Madignier, président d'ATD-Quart Monde

Nous sommes persuadés que notre contribution sera utile à vos travaux. C'est pourquoi nous avons souhaité être entendus par votre commission spéciale sur un sujet particulièrement complexe et douloureux.

Complexe, parce qu'il n'existe pas de solution simple pour répondre à la souffrance d'un enfant. Douloureux, parce que l'adoption répond toujours à une situation faite de liens brisés, quelles qu'en soient les raisons. Complexe aussi parce que l'adoption concerne en premier lieu l'enfant, mais également sa famille naturelle et sa famille adoptive. Trois histoires sont en présence et chacune doit être respectée le mieux possible, dans l'intérêt supérieur de l'enfant.

Le Mouvement ATD-Quart Monde s'est construit dans une très grande proximité avec des familles fragilisées par la précarité et la misère qu'elle engendre souvent. C'est donc habités par la connaissance et l'expertise que nous nous sommes forgées avec ces familles, tout au long d'un compagnonnage de plus de cinquante ans, que nous nous adressons à vous.

PermalienMaryvonne Caillaux, responsable du secrétariat famille

Si nous avons demandé à être entendus, c'est que cette proposition de loi comporte des éléments qui nous inquiètent.

Mais j'évoquerai d'abord un élément très positif, à savoir le renforcement de l'adoption simple et son irrévocabilité jusqu'à la majorité de l'enfant. Cette mesure protégera l'enfant sans le couper de son histoire personnelle et lui permettra de maintenir, quand cela est possible, des liens avec sa famille d'origine – ses parents, ses frères et soeurs, s'il en a, ses grands-parents – tout en lui garantissant sécurité et stabilité.

J'en viens aux éléments de la proposition de loi qui nous inquiètent. Le texte propose de passer de la notion de « désintérêt manifeste » à celle de « délaissement parental ». Quelle sera la définition du délaissement parental ? Comment ce délaissement sera-t-il évalué ? Sur quels faits et dans quels délais ? Il faudra répondre à ces questions essentielles.

Le texte définit le délaissement parental comme une situation caractérisée par les carences des parents dans l'exercice de leurs responsabilités éducatives, carences qui compromettent le développement de l'enfant dans toutes ses dimensions.

Définir le délaissement à partir des carences parentales nous semble très abusif. Pour nous, les éventuelles carences parentales ne caractérisent pas du tout une situation de délaissement, mais des difficultés éducatives ou un manque de savoir-faire de la part des parents. Le délaissement doit être défini par l'absence totale de liens d'attachement entre l'enfant et ses parents.

Naturellement, si un enfant est réellement abandonné ou délaissé, sa situation doit être prise en compte et soigneusement évaluée. Une déclaration d'abandon doit être envisagée, suivie d'une évaluation d'adoptabilité psychologique et sociale. Mais si les parents – ou seulement l'un des parents – maintient le lien, même de manière maladroite, il est alors de la responsabilité de l'Aide sociale à l'enfance, l'ASE, de travailler à maintenir la relation afin que, malgré ces difficultés, l'enfant puisse grandir et se construire le mieux possible.

La définition envisagée nous paraît ouvrir la porte à toutes les dérives et faire fi des dispositions de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, laquelle vise avant tout à soutenir les parents dans leurs responsabilités éducatives. Cette définition comporte le risque de mettre les professionnels face à des injonctions contradictoires puisqu'ils devraient à la fois travailler au maintien du lien et procéder à l'évaluation du délaissement.

Comment évaluer le délaissement ?

Le délaissement ne peut être évalué que de manière très fine et délicate. Déclarer un enfant abandonné et par la suite adoptable est une décision radicale, une ingérence très importante dans la vie d'autrui. Aussi cette décision doit-elle être prise avec beaucoup de prudence et sans précipitation. C'est pourquoi raccourcir le délai ne nous paraît pas être une attitude juste. Une année nous semble une durée raisonnable, même si elle peut paraître longue au regard du temps de l'enfance.

Nous sommes témoins de la grande souffrance des parents et des enfants lorsqu'une décision de placement est prise, d'autant qu'elle leur est souvent imposée. Les parents sont désorientés. Ils ont le sentiment d'être punis pour leurs difficultés et ressentent un grand désarroi. Pour affronter ce moment crucial, les parents devraient être accompagnés. Or dans de très nombreux cas, ils ne le sont pas du tout. Il arrive même qu'on leur demande expressément de ne pas entretenir de liens avec leur enfant…

Nous ne devons pas opposer l'intérêt supérieur de l'enfant et la possibilité pour lui de vivre et de grandir dans sa famille naturelle. Le premier droit de l'enfant est de pouvoir grandir dans sa famille. Quand cela n'est pas possible, il faut que ses parents soient soutenus afin de surmonter leurs difficultés.

C'est pourquoi nous demandons que, parallèlement à l'évaluation du délaissement parental, un bilan qualitatif des soutiens qui ont réellement été apportés aux parents dans l'exercice de leurs responsabilités parentales soit réalisé. Vérifier que tout a été fait pour soutenir la relation parent-enfant est une exigence éthique préalable à tout projet de déclaration judiciaire d'abandon. Nous rejoignons ici l'une des préconisations de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF. Cette disposition serait de nature à améliorer la situation existante en mettant en confiance tous les acteurs concernés.

Ne serait-il pas juste que les professionnels disposent d'une évaluation indépendante lorsqu'ils prennent une décision de déclaration judiciaire d'abandon ? Quelle part les parents naturels et la famille élargie prendront-ils dans cette décision ?

Les parents de milieux très précaires vivent dans l'angoisse permanente d'une décision de placement de leurs enfants. Une part très importante des enfants placés à l'ASE – plusieurs sources évoquent le chiffre de 80 % – sont des enfants dont les familles vivent dans une grande précarité sociale et financière. Cette angoisse du placement entraîne une méfiance à l'égard de toute intervention sociale. À tel point qu'il n'est pas rare que des parents préfèrent se passer des aides qui pourraient leur être proposées pour ne pas « entrer dans un engrenage » qui pourrait conduire à les séparer de leurs enfants.

Une loi réformant l'adoption qui serait centrée sur les enfants placés à l'ASE ne risque-t-elle pas d'accentuer la méfiance des familles face à des services normalement mis en place pour les soutenir ? Cela irait à l'encontre du but recherché.

Ne pensez-vous pas que cette proposition de loi devrait être centrée sur les situations d'abandon, de désintérêt manifeste ou de délaissement parental avéré, et non sur les carences parentales vis-à-vis des enfants pris en charge par l'ASE ?

Enfin, en quoi la loi actuellement en vigueur empêche-t-elle le prononcé de déclarations judiciaires d'abandon, dès lors que la situation d'abandon est avérée ?

Mme Michèle Tabarot, rapporteure, remplace M. Jean-Marc Roubaud à la présidence de la Commission spéciale.

PermalienPhoto de Georges Colombier

Avez-vous connaissance de décisions arbitraires en matière d'adoptabilité ? Pouvez-vous citer des exemples d'enfants retirés abusivement à leurs parents en situation difficile ?

PermalienMaryvonne Caillaux, responsable du secrétariat famille

Je ne connais pas d'exemple récent mais nous avons rencontré des adultes en grande difficulté qui ont perdu la trace de toute leur famille. C'est une véritable blessure. Depuis que nous avons pris conscience de l'importance des liens familiaux, les travailleurs sociaux travaillent de façon soutenue au maintien de ces liens.

PermalienPierre-Yves Madignier, président d'ATD-Quart Monde

Depuis la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance.

PermalienMaryvonne Caillaux, responsable du secrétariat famille

Peu de familles en difficulté demandent le placement de leurs enfants : le plus souvent, il leur est imposé. Nous souhaitons que le nombre des placements judiciaires soit réduit car les familles n'adhèrent pas à cette décision. Dans de nombreux cas, les parents ont du mal à maintenir les liens avec leurs enfants. Pour des raisons, tout d'abord psychologiques, car ils ont été humiliés, ce qui nuit à la relation avec leur enfant, qui ne comprend pas ce qui arrive. Lorsque les enfants sont petits, on demande aux parents de ne pas trop venir les voir pour leur permettre de s'attacher à d'autres personnes. De surcroît, en dépit des dispositions de la loi de 2007 précitée, il n'est pas rare que les fratries soient séparées.

Les parents ont du mal à assumer leur droit de visite. Parfois les enfants sont placés loin de chez eux, ce qui pose des problèmes d'ordre organisationnel et financier, sachant qu'un grand nombre de familles ne perçoivent plus les allocations familiales et ne sont pas toujours aidées par l'ASE. Mais surtout, lorsqu'on leur demande de rencontrer leur enfant pendant une heure, dans un lieu neutre, où la seule chose à faire est de parler, les parents sont démunis. Sans intervention des travailleurs sociaux, beaucoup renoncent à leur droit de visite.

PermalienPhoto de Simon Renucci

Je vous remercie pour ce témoignage émouvant. Cette proposition de loi a le mérite de mettre le focus sur des situations que nous connaissons mal. L'action menée par les travailleurs sociaux est très importante. Nous devons réfléchir à la place de l'enfant sachant que notre pays compte 6 millions d'enfants vivant dans la pauvreté.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

Vous êtes favorables au renforcement de l'adoption simple. Cela me surprend car le précédent intervenant, procureur près le tribunal de Nantes, considère qu'il faut préserver la réversibilité de l'adoption simple car elle permet de régler les cas de mésentente entre la famille et l'enfant. Pouvez-vous expliciter votre position ?

PermalienMaryvonne Caillaux, responsable du secrétariat famille

Nous considérons que l'essentiel pour un enfant est de connaître et de comprendre son histoire et, lorsque c'est possible, de rester en relation avec les personnes avec lesquelles il entretient des liens, ses parents et, surtout, ses frères et soeurs. Il nous semble que l'adoption simple permet cette double filiation. Mais les nombreux parents adoptifs que compte notre mouvement insistent sur l'importance de la stabilité, donc de l'irrévocabilité de l'adoption. Pour eux, la révocabilité de l'adoption simple mettrait les familles et les enfants dans une situation d'insécurité.

PermalienPierre-Yves Madignier, président d'ATD-Quart Monde

Monsieur le député, les questions d'adoption sont toujours extrêmement complexes. Notre position est le fruit d'expériences que nous avons vécues tandis que le magistrat aborde ces questions sur le plan juridique. Notre mouvement compte aussi des juges pour enfants. Nous savons donc que, si de nombreux magistrats éprouvent quelque réticence à prononcer l'adoptabilité d'un enfant, c'est qu'ils perçoivent les difficultés que cela engendre.

Si nous ne donnons pas toutes ses chances au soutien à la parentalité, nous risquons de vicier le processus d'adoption, au détriment des familles et des enfants. La République se doit de garantir que le processus d'adoption est bien entouré d'un maximum de précautions. Dès lors qu'elle déclenche l'adoptabilité, il nous paraît nécessaire, comme le proposent nos amis de l'UNAF, de subordonner le prononcé de la déclaration judiciaire d'abandon à l'effectivité d'un soutien parental préalable. Or, la proposition de loi comporte le risque de placer les travailleurs sociaux devant une contradiction car ils devront à la fois soutenir la parentalité et faciliter les raccourcis vers l'adoptabilité.

Notre expérience nous amène à vous mettre en garde contre le risque que, dans quelques années, on reproche à la législation de faciliter les adoptions. Or de tels dysfonctionnements ne sont pas souhaités par le législateur.

PermalienPhoto de Bernard Lesterlin

Il n'y a pas de corrélation entre la précarité et la maltraitance. Ce qui doit nous guider, c'est l'intérêt de l'enfant. Il est bon de rappeler que la procréation crée essentiellement des devoirs et très peu de droits… La solution consiste à accompagner les familles en difficulté en faisant intervenir des familles-relais qui se trouvent dans des situations moins difficiles.

Notre société se doit d'offrir aux familles en difficulté, qui peuvent être tentées par l'abandon, des solutions non définitives. Mais si les difficultés persistent malgré l'intervention de la famille-relais, c'est que le problème de la famille n'est pas uniquement lié à sa situation sociale. C'est à ce moment-là qu'il convient de faire prévaloir l'intérêt de l'enfant par rapport à sa famille.

PermalienMarisol Nodé-Langlois, chargée des relations avec les parlementaires

Mon mari et moi-même sommes engagés aux côtés d'ATD-Quart Monde depuis 25 ans. Dans une université populaire Quart Monde, dont le mouvement ATD est l'instigateur, et où les familles en grande difficulté sont les enseignants, un juge pour enfants avait été invité pour évoquer le placement des enfants. Je me souviens de cette mère dont les enfants étaient placés. Elle nous avait bouleversés en nous disant : « Nous voudrions juste que l'on nous aide ». C'est exactement ce que vous venez de dire, monsieur le député. Il faut, dans le cadre d'une proposition de loi, mettre l'accent sur le soutien aux familles. Cela étant, jamais ATD-Quart Monde n'a dit que des enfants victimes de maltraitances ne devaient pas être amenés à bénéficier du statut de pupille de l'État.

PermalienPhoto de Patricia Adam

Nous saluons tous le travail accompli par ATD-Quart Monde.

Il nous appartient, en tant que législateurs, de trouver le bon équilibre. Il n'est pas dans notre intention de faire en sorte que les enfants soient plus facilement adoptables. Cela dit, un certain nombre de statistiques démontrent qu'il y a de plus en plus d'enfants placés et de moins en moins d'adoptions. Il nous faut accompagner au mieux les familles, ce que prévoit clairement la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, et poser la question de l'adoption au moment le plus opportun pour l'enfant.

La loi de 2007 contient tous les éléments permettant aux travailleurs sociaux de déposer une demande de déclaration judiciaire d'abandon, mais ceux-ci ne le font pas, et pour beaucoup d'enfants, la déclaration d'abandon intervient alors qu'ils ont déjà sept, huit, neuf ans, voire plus. Ces enfants sont pourtant placés depuis leur petite enfance, les liens avec leur famille naturelle sont distendus, voire inexistants depuis très longtemps. Lorsque la décision intervient, il est trop tard pour les confier à l'adoption, car, en matière d'adoption, l'âge tardif des enfants est l'une des causes d'échec. C'est la raison pour laquelle le législateur tient à ce que la question de l'adoptabilité soit posée systématiquement.

La loi de 2007 prévoit en outre l'élaboration d'un projet de vie pour chaque enfant placé. Or ce n'est pas systématiquement fait en pratique car, généralement, les personnes et les services concernés n'ont pas réussi à s'accorder.

L'obligation de se poser la question de l'adoptabilité de l'enfant doit naturellement s'accompagner de la garantie que sa famille a reçu un soutien. Il ne me semble cependant pas nécessaire d'inscrire cette obligation dans le texte car elle figure déjà dans la loi réformant la protection de l'enfance.

Qui prend la décision concernant l'adoptabilité de l'enfant ? Des professionnels – juges, procureurs, travailleurs sociaux – mais aucun membre de la société civile. Le conseil de famille, au sein du conseil général, examine la situation de l'enfant mais seulement lorsque celui-ci est remis à une famille. Il faudrait que le conseil de famille, qui représente la société civile puisse intervenir pour décider de l'adoptabilité d'un enfant, mais je ne sais pas si nous pouvons inscrire une telle disposition dans la loi car cela aurait un impact certain sur les moyens des départements et je ne suis pas certaine que le Gouvernement nous suivrait sur ce point. Il est évident que nous serons amenés à nous poser ces questions.

Il n'y a pas de désaccord entre nous, législateurs, et votre mouvement sur les objectifs à atteindre, mais nous observons des éléments objectifs : la loi de 2007 n'est pas appliquée dans sa totalité et l'intérêt supérieur de l'enfant n'est pas pris en considération comme il le devrait.

En ce qui concerne l'adoptabilité, nous voulons aller plus loin. Nous attendons du ministère qu'il établisse un référentiel, en lien avec les départements et les organisations oeuvrant dans le domaine de la protection de l'enfance.

L'Observatoire national sur l'enfance en danger, l'ONED, a fait des préconisations en ce qui concerne le concept de l'attachement, qui malheureusement n'est pas encore reconnu par les professionnels. Pierre Naves, inspecteur général des affaires sociales, propose l'organisation d'une conférence de consensus : cela me paraît effectivement une bonne solution.

PermalienPierre-Yves Madignier, président d'ATD-Quart Monde

Il faut en effet commencer par appliquer la loi de 2007. Cela étant, si la proposition de loi est adoptée, les familles concernées vivront dans la crainte permanente que leurs enfants ne leur soient retirés pour être adoptés.

PermalienMaryvonne Caillaux, responsable du secrétariat famille

Il faut rester vigilants sur la définition du délaissement pour que ne soient déclarés abandonnés que les enfants réellement délaissés. L'adoption n'est pas une réponse aux difficultés éducatives des parents mais aux situations d'abandon.

S'il y a peu d'enfants adoptables, c'est qu'il y a peu d'enfants réellement abandonnés. Lorsqu'ils sont soutenus, les parents expriment leur volonté de maintenir le lien avec leurs enfants. La loi de 2007 n'est pas appliquée, c'est vrai, puisque nous investissons très peu dans la prévention et l'accompagnement des familles.

PermalienPhoto de Michèle Tabarot

Je voudrais vous rassurer quant à l'esprit de ce texte, élaboré avec les membres du Conseil supérieur de l'adoption, un certain nombre de commissions et les parlementaires qui connaissent parfaitement le sujet.

Nous nous sommes exprimés en faveur du soutien parental, nous ne le remettrons pas en cause. Il est effectivement essentiel de rappeler tout ce qui a été fait en matière d'aide à la parentalité au moment de décider de l'adoptabilité de l'enfant.

Nous déplorons en revanche de nombreux exemples de décisions prises trop tardivement par les travailleurs sociaux et les magistrats. ATD-Quart Monde a d'ailleurs évoqué, elle aussi, la situation choquante d'enfants qui, placés à titre provisoire, le sont restés jusqu'à leur majorité. Face à cela, le législateur se doit de réagir. Le présent texte nous obligera à évaluer de façon régulière la situation de l'enfant.

À l'évidence, la situation idéale pour l'enfant est de rester proche de sa famille. C'est la solution qu'il convient de privilégier à chaque fois que c'est possible et si la société peut apporter un soutien aux parents. Mais lorsque ce n'est pas possible et que les parents n'ont pas la volonté de préserver le lien avec leur enfant, nous devons donner une autre chance à celui-ci.

Pour conclure, notre objectif est de servir l'intérêt supérieur de l'enfant. Notre démarche n'est en rien de faciliter les adoptions, mais d'encourager les professionnels à se poser régulièrement la question de l'adoptabilité des enfants placés.

La séance est levée à vingt heures vingt.