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Séance en hémicycle du 12 mai 2011 à 09:

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente, salle Lamartine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

L'ordre du jour appelle le débat sur la formation et l'emploi des jeunes organisé à la demande du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Je vous rappelle que la conférence des présidents du 3 mai 2011 a décidé que ce débat serait organisé sous forme de questions. La durée des questions et des réponses est de deux minutes. La réponse du Gouvernement sera donnée après chaque question et il n'y aura pas de droit de réplique.

Après l'introduction par un représentant du groupe SRC, nous prendrons successivement les trois premières questions du groupe SRC, les deux questions du groupe GDR, les deux questions du groupe Nouveau Centre, les trois premières questions du groupe UMP, ensuite les trois dernières questions du groupe SRC et nous terminerons par les trois dernières questions du groupe UMP.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, mes chers collègues, 660 000 jeunes de moins de vingt-cinq ans sont aujourd'hui au chômage. S'ajoute à ce chiffre le profond déclassement que subissent les jeunes. Aujourd'hui, une jeune femme sur trois et un jeune homme sur cinq acceptent un emploi en dessous de leur qualification.

En 1975, alors que les salariés âgés de cinquante ans gagnaient en moyenne 15 % de plus que les salariés âgés de trente ans, l'écart est aujourd'hui de 40 %. Selon l'OCDE, un jeune de France met entre huit et onze ans pour entrer durablement sur le marché de l'emploi, contre trois à cinq ans dans les autres pays membres.

Pourtant, le 18 mars 2007, lors de la campagne présidentielle, dans le cadre d'un grand discours sur la jeunesse, Nicolas Sarkozy, qui citait alors Baudelaire, Rimbaud, Martin Luther King ou encore Jean-Paul II et son célèbre « N'ayez pas peur », exhortait la jeunesse à faire de grands rêves et à voir la France en grand. Monsieur le ministre, la campagne s'est terminée et la jeunesse souffre depuis quatre ans de votre peu d'ambition pour l'emploi des jeunes.

Au cours de notre débat, vous aurez beau jeu de rappeler que l'emploi des jeunes est en augmentation et que cela est synonyme d'espoir. Si le chômage est en baisse, il reste néanmoins à un niveau bien trop élevé. Surtout, une étude approfondie montre que votre politique plonge la jeunesse dans une grande précarité. Que dire de l'explosion, cette année, des catégories B et C chez les jeunes de moins de vingt-cinq ans, soit une augmentation de 4,8 %.

Inutile, je pense, de vous rappeler les mouvements de la jeunesse contre certains projets de la droite : le SMIC jeunes, le CIP du gouvernement Balladur, ou encore le CPE du gouvernement Villepin. À ce titre, vous qui critiquez tant les emplois-jeunes ou les emplois d'avenir, vous n'avez jamais vu de manifestation des jeunes contre les emplois-jeunes. Les jeunes, eux, ne s'y sont pas trompés.

S'agissant des emplois d'avenir que nous proposons aujourd'hui, vous tentez, depuis des semaines, de leur opposer l'apprentissage. Pour vous, c'est soit l'un, soit l'autre. Monsieur le ministre, la jeunesse mérite beaucoup plus d'ambition que cela. Ce n'est pas l'apprentissage dans le secteur marchand ou les emplois d'avenir dans le secteur non marchand, c'est l'apprentissage et les emplois d'avenir.

Nous, socialistes, à défaut de faire de grands rêves, nous avons élaboré un grand plan pour l'emploi des jeunes qui comporte dix propositions et qui sera le coeur de notre politique en 2012 si nous obtenons la confiance des Français.

Dans l'urgence, et pour répondre à la gravité de la situation, nous créerons 300 000 emplois d'avenir, dont 150 000 dès l'été 2012. Il s'agira d'emplois à plein-temps pour une durée maximale de cinq ans et un salaire correspondant au minimum au SMIC, financé à 75 % par l'État. En particulier 150 000 de ces emplois d'avenir seront créés dans le secteur du développement durable et un nombre élevé de ces emplois d'avenir interviendra dans des territoires défavorisés, notamment dans les zones urbaines sensibles à hauteur de 150 000 emplois.

Nous mettrons également en place des dispositifs pour améliorer l'insertion professionnelle des jeunes. Nous proposons ainsi de développer toutes les formes d'alternance. Encore faut-il être conscient que l'alternance est souvent aussi dépendante de la situation économique. Il suffit de comparer le nombre de contrats d'apprentissage ou de professionnalisation entre les années 2008 et 2010.

Nous sommes très attachés à l'alternance. Il suffit d'ailleurs de voir l'engagement irréprochable des régions socialistes dans ce domaine. Dans chacune, il s'agit du premier poste budgétaire, représentant au moins 30 % du budget régional.

Nous mettrons en place un service public de proximité de l'information et de l'orientation tout au long de la vie, permettant d'ouvrir à tout jeune, qu'il soit scolarisé ou actif, l'éventail des choix. Nous généraliserons la pratique du CV anonyme.

Nous souhaitons prendre à bras-le-corps l'une des questions qui nous apparaît prioritaire, celle des jeunes décrocheurs, en leur offrant une nouvelle chance. Les 150 000 jeunes décrocheurs qui sortent chaque année du système scolaire sans emploi ni formation pourraient être affiliés à un pôle public. Ce pôle bénéficiera à la fois de la reconnaissance du rôle fondamental des missions locales, mais également d'un renforcement de ses moyens et d'un élargissement de ses compétences.

Nous mettrons en place des tutorats dans une logique de transmission des savoirs où les seniors permettront aux jeunes décrocheurs de mieux s'insérer dans l'entreprise.

Nous apporterons enfin une réponse forte à la précarité que vos politiques font subir à la jeunesse.

Les stages feront l'objet d'un strict encadrement. Vous aviez pris des engagements, mais force est de constater que le décret a finalement remis en cause les engagements prévus par la loi en ce sens.

Nous voulons également apporter une réponse aux jeunes de moins vingt-cinq ans en fin de droits et qui, aujourd'hui, n'ont pas accès au RSA. Nous pensons aussi qu'ils ont besoin de cette réponse.

Enfin, nous proposons la mise en place d'une allocation d'études.

Monsieur le ministre, il s'agit d'un plan précis, financé notamment par la suppression de l'encouragement aux heures supplémentaires. La mise en place de ce plan précis et déterminé sera pour nous une priorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Merci, monsieur Vidalies, d'avoir respecté votre temps de parole.

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur Vidalies, si nous nous trouvons dans la dernière ligne droite menant à l'élection présidentielle et que le temps approche de la confrontation des projets, je garde, en tant que ministre du Gouvernement, une obligation de résultats à moyen et long terme : faire reculer le chômage, celui des jeunes en particulier.

Je rappelle nos deux priorités constantes : les chômeurs de longue durée et le chômage des jeunes auquel nous allons consacrer ce débat. Il s'agit des deux catégories les plus fragiles car les plus touchées par la crise.

En ce qui concerne les chiffres, je ne pense pas que droite et gauche puissent se donner mutuellement des leçons. J'ai bien conscience que nous sommes au pouvoir depuis 2002 et que nous connaissons toujours une situation difficile. En 2010, le taux d'emploi des jeunes de quinze à vingt-neuf ans était inférieur en France à la moyenne de l'Union européenne de 1,2 point. Il atteignait en effet 46,6 % en France contre 47,8 % dans l'Union européenne. Ce taux est bien plus élevé dans certains pays comme l'Allemagne, le Royaume-Uni – que personne ici, j'en suis sûr, ne voudra ériger en exemple –, les Pays-Bas ou le Danemark, le Danemark d'hier. La France se situe donc dans la moyenne à l'exception de l'Allemagne, pour citer un pays auquel nous nous référons plus volontiers.

Les jeunes de quinze à vingt-quatre ans sont peu présents sur le marché du travail en France à cause d'une formation initiale assez longue et parce qu'une faible proportion de jeunes travaillent pendant leurs études. Le taux d'emploi pour eux est de 30,8 % contre 34,1 % pour l'Union européenne.

Le chômage des jeunes, qui atteint 22,3 % et, dans certains quartiers, 25 % voire 40 % – le maire de Saint-Quentin que je suis le sait bien –, n'est pas seulement une réalité statistique mais bien une réalité humaine. On a beaucoup parlé de fracture sociale, ces dernières années ; tâchons de faire en sorte que ne se développe pas une fracture générationnelle.

De nombreux discours évoquent les jeunes sans que soit concrètement défini, à ce jour, le meilleur moyen pour eux de s'en sortir afin d'obtenir un premier emploi et un premier logement. Nous en reparlerons sans doute au cours de ce débat.

En attendant, je ne pense pas que l'avenir des jeunes passe par le développement de l'emploi public payé avec de l'argent public que personne n'a. Si cet argent existait, les emplois-tremplin, dont il a beaucoup été question à l'échelon régional pendant des années, auraient été multipliés ; or les promesses en la matière n'ont pas été tenues. Nous savons bien que tout gouvernement devra faire face à une équation fort simple : il faudra baisser les déficits donc s'intéresser aux dépenses – qu'il s'agisse de celles de l'État, de la protection sociales ou des collectivités locales – et, dans le même temps, améliorer la compétitivité des entreprises en diminuant le coût du travail.

L'avenir des jeunes passe avant tout par l'entreprise, choix que j'assume. Nous avons eu l'occasion d'en débattre à la télévision, monsieur Vidalies. Je sais que, selon vous, les deux sont possibles mais il faut afficher une priorité. La vôtre, ce sont les emplois jeunes dont j'aimerais du reste connaître la durée ; j'ai en effet entendu parler de cinq ans alors qu'un autre leader de votre parti a évoqué trois ans. Je crois, pour ma part, en priorité, à la formation en alternance. Je ne crois pas en l'alternance en soi ; je le précise parce que je sais que vous êtes malicieux et que vous pourriez reprendre le mot au vol. Je crois donc à l'apprentissage et au contrat de professionnalisation.

Vous avez ensuite évoqué le tutorat, mais quelle réalité recouvre-t-il selon vous ? S'agit-il du fameux contrat générationnel défendu notamment par l'un de vos leaders ? Je décèle une erreur de fond dans ce dispositif particulièrement coûteux : si vous voulez maintenir des salariés âgés en activité, il est plus intéressant de réduire leur charge de travail que de diminuer les charges sociales pour l'employeur. Si vous voulez garder des salariés âgés au sein de l'entreprise, il est plus intelligent de développer le temps partiel en fin d'activité que de donner à l'entreprise un avantage qui coûtera cher compte tenu du salaire et du niveau des charges. Mon propos n'est bien entendu pas destiné à vous inciter à critiquer le leader auquel je fais allusion.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

À propos des stages, nous avons pris nos responsabilités. Aujourd'hui, ce sont les partenaires sociaux qui ont décidé d'avancer dans le cadre de la discussion.

J'ignore si nous aborderons la question du CV anonyme, mais vous savez que les expérimentations menées n'ont pas été très concluantes ; est-ce parce qu'il s'agissait précisément d'expérimentations ? Comme vous, j'estime qu'il convient de faire montre de prudence en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous en arrivons aux questions des groupes.

Nous commençons par la première série de questions du groupe SRC.

La parole est à Mme Monique Iborra.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Monsieur le ministre, les emplois-tremplin que vous avez évoqué ont largement atteint les objectifs fixés et, par là même, contribué à notre victoire aux dernières élections régionales.

Doit-on vous rappeler que la loi du 13 août 2004 a confié aux régions l'entière responsabilité de la coordination de la politique de l'apprentissage, de la formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d'un emploi ? Grâce à l'effort consenti par les régions, aujourd'hui premiers financeurs de l'apprentissage, le nombre d'apprentis a crû de 15 à 20 % en France ces dernières années. En revanche, le nombre de contrats de professionnalisation qui sont, eux, de la responsabilité de l'État et des partenaires sociaux, n'a cessé de diminuer.

L'image de l'apprentissage s'est profondément modifiée. Néanmoins, l'augmentation quantitative, vous le savez, ne se décrète pas. Que constate-t-on aujourd'hui, au-delà des effets d'annonce habituels ? Votre conception de l'apprentissage nous ramène dix ans en arrière. J'en veux pour preuve le retour de l'apprentissage à quatorze ans, archaïsme s'il en est.

Vous brandissez l'alternance comme une solution au problème de l'emploi alors qu'il s'agit avant tout d'une voie de formation initiale complémentaire des autres voies de formation, en particulier de la formation initiale. Là où il s'agirait d'abord de créer de véritables filières devant permettre une progression du premier niveau de formation jusqu'au niveau supérieur, vous envisagez l'apprentissage comme un appoint de main-d'oeuvre pour les entreprises. Là où une vraie réforme de la taxe d'apprentissage aurait été nécessaire, vous vous contentez de rétablir des exonérations de charges après, d'ailleurs, que la dernière loi de finances les a supprimées.

Sérieusement, monsieur le ministre, pensez-vous que les mesures que vous prévoyez sont de nature à promouvoir l'alternance en France ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Oui, madame la députée, je le pense sincèrement. La proposition de loi de Gérard Cherpion sera présentée à l'Assemblée dès que la discussion avec les partenaires sociaux aura eu lieu, dans un cadre parlementaire, ainsi qu'y tenait Pierre Méhaignerie. Ce texte important est très attendu.

Nous avons tâché de repérer quels étaient les freins à l'apprentissage à propos duquel nous discourons beaucoup, les uns et les autres. De quoi l'apprentissage a-t-il besoin ? D'abord de simplification et d'une évolution des comportements. En relever progressivement le quota de 3 à 4 % répond à cette logique. Nous souhaitons que les entreprises consentent un effort supplémentaire en la matière.

Ensuite, le système de la contrainte, de la taxation me paraît stupide. Qu'une entreprise emploie 0,5 % d'alternants ou 2,95 %, elle est taxée de la même façon. Lisser cette taxe, prévoir un système de bonus-malus et poursuivre une logique vertueuse me paraît de nature à favoriser l'évolution des comportements et l'accroissement du nombre d'alternants.

Par ailleurs, un apprenti – qu'on peut considérer comme un étudiant des métiers – vous demandera pourquoi il ne jouit pas des mêmes droits que les étudiants. Nous avons par conséquent décidé que les apprentis auront accès aux CROUS, aux restaurants universitaires, de façon à être traités sur un pied d'égalité avec l'ensemble des étudiants. Je précise que ces mesures – qui représentent une enveloppe financière importante –, figureront non dans la proposition de loi de M. Cherpion mais dans le projet de loi de finances rectificative.

Je ne pense pas qu'on puisse être aussi manichéen que vous l'êtes. Chacun sait que le contrat de professionnalisation n'a pas la même histoire ni la même ancienneté que l'apprentissage. Il coûte plus cher car il touche également des publics plus âgés. J'ai proposé aux régions un principe simple : si l'État, en la matière, dépense aussi un euro, que la région dépense un euro. Globalement, la situation progresse dans certaines régions, comme la Lorraine où je vais me rendre aujourd'hui.

Nous devons établir le bilan de la première génération des contrats d'objectifs et de moyens pour fixer les objectifs de la seconde génération. J'ai même indiqué aux préfets de région, lors d'une conférence téléphonique, que les régions pourraient inscrire, dans leurs prévisions, la mention suivante : « …sous réserve que l'État engage tant de millions d'euros. » Vous constaterez que je suis accommodant. Dans la mesure où les régions ne sauraient être parées de toutes les vertus et l'État ne saurait être affecté de tous les vices, il convient de travailler ensemble afin de favoriser l'emploi des jeunes.

Que chacun fasse valoir ensuite que l'amélioration de la situation de l'emploi des jeunes dans sa région lui est due ne me dérange pas. Je note, madame la députée, que, dans votre département, le nombre de jeunes demandeurs d'emploi est en baisse continue depuis cinq mois passant de 11 300 à 8 800. Voilà une bonne nouvelle que vous n'avez pu nous donner puisque vous ne disposiez que de deux minutes pour vous exprimer. (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

En utilisant trois minutes, c'est mieux ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Issindou

Monsieur le président, monsieur le ministre, le sous-emploi chronique des jeunes est un véritable drame pour la cohésion sociale de notre pays. Comment expliquer aux 600 000 jeunes demandeurs d'emploi que la société est incapable de les intégrer au marché du travail, quel que soit leur niveau de qualification ?

Vous allez une nouvelle fois invoquer la crise, du reste vous l'avez fait dans votre intervention liminaire. Elle est réelle, certes, mais la crise n'explique pas tout. Vous allez brandir votre parade magique : l'apprentissage. Bien sûr, il s'agit d'un bon outil pour intégrer le milieu professionnel et nous vous suivons sur ce point même si l'on peut s'étonner que vous n'ayez découvert ce dispositif fort ancien que bien après le début de la crise.

Les mesures que vous avez prises ne produiront pas d'effets à court terme sur le volume des emplois offerts aux jeunes. Vous le savez mais, à défaut d'autres solutions, vous laissez miroiter des jours meilleurs, pour plus tard. En attendant, que fait-on pour ces 600 000 jeunes ? Pas grand-chose à vrai dire.

Eh bien, oui, monsieur le ministre, nous avons des propositions que vous êtes enclin à railler dans l'hémicycle plus, sans doute, que dans cette salle où le ton est plus courtois. Nous avons de vraies propositions sur l'alternance – on vient de le constater –, sur les décrocheurs, sur le plus grand respect des stagiaires, sur un recours moins systématique aux CDD, autant de dispositifs de nature à améliorer la situation pour les jeunes.

C'est dès à présent qu'il convient d'adresser un signe fort à la jeunesse. Cela passe par la création rapide de ces emplois d'avenir à temps plein, payés au SMIC et pour cinq ans ; je vous apporte la précision que vous avez souhaitée. Ces emplois concernent certes le secteur non marchand, mais nous voulons qu'en soient créés également dans le secteur marchand, car nous avons bien conscience que les deux secteurs doivent marcher de pair. Ces emplois s'inscrivent dans l'esprit des emplois jeunes qui, ne vous en déplaise, ont eu une utilité sociale en leur temps et ont permis à des jeunes d'espérer et, pour beaucoup, d'intégrer le monde du travail après cette expérience.

Les emplois en question seront utiles notamment dans le diagnostic énergétique du patrimoine de l'immobilier, dans le sillage du Grenelle de l'environnement. Une grande partie d'entre eux pourra être attribuée aux jeunes des zones urbaines sensibles, touchées par les problèmes réels que l'on sait. Ils seront financés par l'État qui réalisera par ailleurs des économies grâce à la suppression des exonérations de charges sociales pour les heures supplémentaires, soit plus de 3,5 milliards d'euros quand la création de ces emplois coûtera 3 milliards d'euros.

Ces propositions ne sont pas les vôtres, monsieur le ministre. Vous les raillez parfois un peu trop fortement mais elles sont précises, chiffrées et de nature à donner un véritable souffle à l'emploi des jeunes. Les chiffres mensuels – malgré ceux, bons, que vous venez de citer concernant la Haute-Garonne – sont implacables pour illustrer l'ampleur de votre échec.

Monsieur le ministre, quand allez-vous mettre en place une politique ambitieuse pour l'emploi des jeunes ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Dès que vous aurez voté la proposition de loi Cherpion !

J'ai eu l'occasion de débattre, à Rennes, au Forum Libération, avec François Hollande. Je ne sais pas si je l'ai ébranlé, mais, en tout cas, je le lui ai proposé, parce que cette proposition de loi se situe dans le registre du pratico-pratique. Elle n'est absolument pas dogmatique.

Pour vous donner un exemple de ce qui favorise l'alternance j'évoque tout simplement les « développeurs de l'alternance ». Ce dispositif s'appuie notamment sur des salariés des chambres de commerce, qui vont voir les entreprises pour les inciter à avoir recours à l'alternance. Il n'y a pas besoin de dire à un chef d'entreprise de procéder à un recrutement. Il sait, il sent quand il doit le faire. Par contre, s'il n'est pas tourné vers l'alternance, cela a du sens d'aller à sa rencontre pour l'y inciter. Voilà une mesure pratico-pratique, que nous voulons développer, tout comme la campagne de communication qu'a lancée Nadine Morano à ma demande. Elle va aussi dans le même sens : expliquer exactement ce qu'est l'alternance, ce qu'est l'apprentissage. Tout cela joue et peut avoir un effet sur l'emploi des jeunes dès la rentrée prochaine.

Voilà pourquoi il est important que ce texte soit voté avant l'été afin que l'on puisse ensuite l'expliquer, avant l'été également. Chacun sait en effet que, en matière d'alternance, les principales décisions se prennent entre le mois de septembre et le mois de décembre : 70 % des recrutements en apprentissage se font durant cette période.

À la question « Quand ? », ma réponse est dès maintenant. Les objectifs sont ambitieux : 600 000, 800 000, 1 million.

Je vais vous citer, monsieur Vidalies, car, même si vous parlez fort, je vous écoute. Un jour, à l'Assemblée, évoquant l'emploi des jeunes et le plan Aubry, vous aviez estimé le taux d'insertion à 70 %. C'est bien cela ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Je citais Vidalies plutôt que la DARES, mais bon. J'avais entendu 70 %.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Toujours est-il que le taux d'insertion, dans l'alternance, est à 85 %. Vous voyez que le taux est comparable, et même supérieur, avec un coût inférieur.

Par ailleurs je reproche aux emplois jeunes qu'ils s'adressaient avant tout à des jeunes qui étaient qualifiés, et bien qualifiés. Or le problème que nous avons, c'est d'amener à l'emploi des jeunes qui, bien souvent, ne le sont pas. Les emplois jeunes, à chaque fois, se sont trompés de cible. Surtout, ils ne donnent pas suffisamment de visibilité de long terme.

J'espère que nos résultats seront encore meilleurs, monsieur Issindou. Tout de même, en Isère, depuis six mois, le chômage des jeunes a baissé de 25 %. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

Ma question me permettra peut-être d'avoir les chiffres du Val d'Oise. (Sourires.)

Je veux intervenir, non pas sur le problème de l'emploi des jeunes en général, mais, plus spécifiquement, sur celui des jeunes dans les quartiers. Là aussi, les chiffres sont redoutables, puisque, si 22 % des jeunes sont au chômage sur l'ensemble du territoire national, 42 % le sont dans ces quartiers. Il y a d'ailleurs une différence entre les jeunes hommes et les jeunes femmes : 43 % des jeunes hommes sont au chômage, 37 % des jeunes femmes le sont.

Il s'agit donc d'une situation particulière, due à l'enclavement, à des questions de formation, à des problèmes de discrimination – il faut en parler, parce que c'est une réalité – et à l'éloignement entre l'offre d'emploi et la demande.

Nous, nous essayons de formuler des propositions assez précises.

Il faut d'abord, bien entendu, poursuivre la mise en oeuvre des dispositifs de création d'emplois dans ces territoires. À cet égard, il conviendra de trouver, avant la fin de l'année, une solution à la suppression des zones franches. Nous sommes en mai et, dans quelques mois, les dispositifs qui ont permis la création d'emplois dans ces territoires et qui ont été une vraie réussite, vont disparaître. Il serait temps de proposer une solution de remplacement.

Il est également indispensable de trouver un moyen de permettre aux populations, notamment aux plus jeunes, d'avoir accès à l'emploi en dehors de leur territoire. Nous sommes tous d'accord pour reconnaître que le contrat d'autonomie, qui avait été proposé dans le cadre du plan Espoir banlieues, n'a pas donné les résultats escomptés. Beaucoup de contrats ont été signés, mais ils n'étaient pas forcément liés à l'emploi. Nous proposons donc une sécurisation de ces habitants auprès des employeurs. Cela correspond à une demande.

Vous avez parlé, monsieur le ministre, de l'alternance. Vos propositions, que nous critiquons, ne seront pas applicables dans ces territoires. Aujourd'hui, les jeunes qui veulent entrer en apprentissage ne trouvent pas d'employeurs qui les accompagnent. Les employeurs sont souvent trop loin. Il existe bien, dans ces quartiers, des micro-entreprises, mais elles ne sont pas en mesure de mettre en oeuvre l'apprentissage. Par conséquent, il faut trouver une solution.

Je ne prendrai qu'un exemple : l'IMA de Villiers-le-Bel compte trente apprentis dans le domaine de la mécanique qui ne trouvent pas d'employeurs. Les cours ont cessé. On est à quinze kilomètres de Paris. On voit bien qu'il faut mettre en place des dispositifs spécifiques. Ne jamais oublier qu'il y a des situations particulières, qui nécessitent des mesures particulières.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

C'est bien pour cela que les contrats d'autonomie ont été mis en place. Ils constituent aussi une réponse particulière. Je connais les critiques dont ils ont été l'objet. Ont-ils été suffisamment valorisés, suffisamment accompagnés ? Les missions locales nous disent qu'ils sont chers, pour un taux d'insertion qui, parfois, n'est pas supérieur.

J'ai étudié la situation dans le détail avec Maurice Leroy, avant de relancer le dispositif. Là où tout le monde y a cru, les taux d'insertion sont sans commune mesure avec ce que l'on constate ailleurs. Alors que le dispositif devait prendre fin en juin 2011 nous avons décidé de le prolonger. Il y a aura en tout 15 000 places pour l'année 2011, dont 7 000 sont considérées comme nouvelles.

Nous allons recentrer le dispositif sur les bassins qui sont à la fois les plus prioritaires et ceux où les performances sont les meilleures. Je l'assume. Pour le reste, je sais que les missions locales jouent leur rôle. Néanmoins vous savez que la question des taux d'insertion est compliquée. L'autre jour, j'étais en Ille-et-Vilaine. J'ai constaté que les taux d'insertion étaient très différents entre la mission locale de Vitré et celle de Rennes. Vous me direz que cela peut s'expliquer par la présence, en tel endroit, d'une zone urbaine sensible, ou de deux. Peut-être, mais il n'y a pas que cela.

Je dois certes continuer d'accompagner les missions locales – je parle sous le contrôle de M. Gille –, mais aussi veiller à ce que chacun entre dans une logique d'amélioration des résultats. Je ne peux pas demander à une mission locale qui a quatre ZUS sur son territoire – j'ai un exemple particulier en tête – d'avoir un taux d'insertion équivalent à celui d'une commune où il n'y a aucune zone urbaine sensible. Je pense cependant aussi qu'il faut des outils particuliers. Le contrat d'autonomie, avec un nouveau marché qui sera mis en oeuvre dans les prochaines semaines, concernera douze bassins considérés comme prioritaires. Le Val d'Oise en fait partie.

Cela étant, il faut répondre, dans le cadre de la politique de la ville, à toutes les autres questions, celle du transport, par exemple. Comment désenclaver des quartiers pour permettre à ceux qui y vivent d'aller travailler ailleurs ? Cela pose aussi le problème des horaires de transports. L'autre jour, dans l'un de mes quartiers, on m'a dit : « Tout cela, c'est bien gentil, mais quand on a un travail posté et que le jeune doit commencer à cinq heures et demi du matin alors que les premiers bus commencent à circuler une heure plus tard, comment fait-on ? »

Toutes ces questions peuvent sembler microscopiques. Elles ne le sont pas du tout. Ce sont des questions concrètes. Si je souhaite un nouveau recentrage de la politique de l'emploi par bassins d'emplois, c'est pour que l'on puisse répondre à ces questions.

Voilà ce que je voulais vous dire, en n'oubliant pas de souligner que, dans le Val d'Oise, depuis cinq mois, le chômage des jeunes a baissé de 25 %. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous en venons aux questions du groupe GDR.

La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour poser sa première question.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-George Buffet

Monsieur le ministre, je veux revenir – c'est l'inconvénient de l'exercice – à la question de l'apprentissage, que vous avez déjà abordée.

Les jeunes rencontrent – et nous, élus, sommes souvent confrontés à ce problème – de grandes difficultés pour trouver un maître de stage, une entreprise qui les accueille. Souvent, l'entreprise se trouve très éloignée de leur CFA, ce qui pose des problèmes de transports. Une enquête de la Jeunesse ouvrière chrétienne, qui a beaucoup travaillé sur cette question, montre que certains maîtres de stage ne sont pas assez formés ou ne sont pas assez disponibles pour les apprentis.

Souvent, ces jeunes représentent pour ces entreprises une main-d'oeuvre bon marché. Comme ils méconnaissent leurs droits, et sont aussi désireux de faire leurs preuves, certains jeunes travaillent au-delà des règles fixées par le droit du travail.

Il est possible, je pense, de rémunérer les apprentis à hauteur de la richesse qu'ils créent. On pourrait revaloriser leur rémunération pour que, dès la première année, elle se situe à un plancher équivalent à 50 % du SMIC. Il serait également nécessaire de dispenser aux apprentis des formations au droit du travail, pour qu'ils soient en mesure d'identifier d'éventuels abus d'employeurs peu scrupuleux, et d'y résister.

Enfin, je crois qu'il est nécessaire de faire un effort sur la formation des maîtres de stage. Il est indispensable de renforcer les moyens de l'inspection du travail, pour garantir que ces nouveaux droits accordés aux apprentis seront bien respectés par les employeurs.

Monsieur le ministre, vous engagez-vous à améliorer les droits des apprentis, leur assurant de meilleures conditions de vie et de formation ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Madame la députée, j'ai évoqué la question du transport en répondant à M. Pupponi. Il faut également se pencher sur celle de l'hébergement, qui ne se pose pas seulement en Seine-Saint-Denis et en Île-de-France.

J'ai le souvenir d'un déplacement dans l'Orne : le CFA était dans une ville moyenne, et les jeunes qui venaient de la campagne, s'ils n'avaient pas de famille sur place, ne pouvaient pas se loger et leur niveau de rémunération ne facilite pas les choses. Un jeune de moins de dix-huit ans, en première année, touche 341 euros net par mois. Même si vous avez l'APL, vous n'allez pas loin, avec çà, pour vous loger.

C'est pourquoi, dans le cadre du grand emprunt, 500 millions d'euros sont destinés à financer des investissements qui ne visent pas seulement à construire ou à moderniser les CFA, mais aussi à favoriser l'hébergement. Dans le choix que nous serons amenés à faire, avec Nadine Morano, nous veillerons à ce qu'il y ait un bon maillage du territoire.

Aujourd'hui, quatre régions concentrent 42 % de la formation des apprentis : Île-de-France, Rhône-Alpes, PACA, Pays de la Loire. Or, moi, je veux un maillage sur l'ensemble du territoire et la question de l'hébergement n'est pas du tout secondaire.

Quand on décide d'exonérer de charges des apprentis, ce n'est pas un cadeau que l'on fait aux employeurs. Il faut bien voir que le maître de stage va consacrer du temps à la formation du jeune, ce qui est normal. En revanche ce dernier n'a pas la même capacité de travail pour l'entreprise. L'exonération est destinée à compenser cela, et non à favoriser l'entreprise ou l'entrepreneur.

Par ailleurs, vous dites qu'il faut une bonne formation. C'est vrai. Je pense que l'on doit assurer une meilleure valorisation du maître de stage. L'une des pistes possibles serait de reconnaître aux maîtres de stage des atouts pour la VAE. On ne se contenterait pas de les féliciter à l'occasion de la visite d'un ministre ou d'un élu ; on leur donnerait un plus dans leur cursus professionnel.

Vous parlez de « main-d'oeuvre bon marché ». Pourtant les jeunes s'y retrouvent aussi ; ils le reconnaissent. Bien sûr, ils seraient contents si leur rémunération était plus élevée. Toutefois ils ne sont pas non plus tout le temps dans l'entreprise. Parfois, ils le sont une semaine sur deux. Et même si cela revient à un coût très inférieur au SMIC pour l'employeur, celui-ci n'a pas non plus la même présence du jeune dans l'entreprise, ni le même résultat en termes de travail. Par conséquent, chacun s'y retrouve. Ce n'est pas du pré-apprentissage, mais ce n'est pas de la main-d'oeuvre bon marché. Ce n'est vraiment pas ma conviction.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour poser sa deuxième question.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-George Buffet

Monsieur le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que les jeunes issus de familles populaires sont particulièrement frappés par les inégalités sociales : trop faibles montants des bourses, développement des contrats précaires, politiques de bas salaires, discriminations liées à l'origine, mais aussi – nous le savons bien, en Seine-Saint-Denis – au territoire. Lorsque vous énoncez la ville où vous habitez ou la ligne de transport utilisée, les employeurs, parfois, refusent votre CV.

Cela ne permet pas aux jeunes d'entrer dans la vie dans de bonnes conditions. Ils méritent mieux que la précarité et les bas niveaux de vie qui leur sont imposés. Ils aspirent, tout simplement, à se former et à travailler. À cet égard, le recul qu'ils ont imposé sur le CPE est exemplaire.

Les jeunes doivent bénéficier des mêmes droits que les adultes. Cela implique de mener une politique de développement des services publics.

En matière de logement, vous avez parlé de celui des apprentis, mais je tiens à évoquer le développement des cités universitaires publiques, des foyers pour jeunes travailleurs.

Cela implique aussi l'amélioration des transports, et des tarifs de transport adaptés aux revenus des jeunes.

Cela nécessite, aussi, de leur donner les moyens de leur autonomie.

Le montant des bourses ne permet pas d'atteindre ces objectifs, et force les étudiants à cumuler études et petits boulots. Quant au RSA jeunes, les conditions mises à son attribution limitent, jusqu'à la caricature, le nombre des bénéficiaires.

N'est-il pas temps, monsieur le ministre, de mettre en place une véritable allocation de recherche d'emploi, financée par une nouvelle cotisation, qui permettrait aux jeunes de rechercher sereinement un emploi adapté à leur niveau de formation et de qualification ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Votre le ton est modéré, mais le fond ne l'est pas, madame la députée.

En ce qui concerne le chômage des jeunes, de la précarité qui les frappe, c'est entre 1980 et 1984 que la situation a dérapé. On peut accorder que cela est lié aux conséquences de la seconde crise, mais le fait est que c'est à ce moment-là que l'on a pris le pli. Le taux de chômage des jeunes a explosé, à l'époque, passant de 12 à 20 % et aucun gouvernement, de gauche ou de droite, n'a réussi à le ramener à son niveau antérieur. Je le précise simplement pour nous ramener, nous tous, face à nos responsabilités. C'est à cette époque que la situation a basculé, et personne, ensuite, n'a pu revenir en arrière.

Vous évoquez ensuite les inégalités sociales. S'agissant des bourses, un point doit être soulevé. En tant que conseiller général, face à un président de conseil général, je me suis retrouvé dans une situation comparable à celle d'aujourd'hui. Il y a certes le problème du niveau de l'attribution, mais ce qui me marque le plus est le fait que quand vous dépassez le barème de très peu, vous n'avez plus droit à rien. Rien n'est lissé dans les effets de seuil. C'est un sujet qui me préoccupe.

On évoque souvent les classes moyennes ; le lissage pour éviter les effets de seuil me paraît être important, et j'y travaille pour la partie qui relève de mon ministère. La question se pose également concernant l'accès à la santé, la complémentaire santé, par rapport à la CMU.

Je voudrais aborder un dernier point : les inégalités géographiques, auxquelles vous faites allusion. C'est d'ailleurs pour cela que j'indiquais que le taux de chômage est en baisse dans de nombreux départements. Dans le vôtre, il est en diminution de 15 %, alors qu'il baisse de 25 % dans les autres départements que j'ai évoqués. Voilà pourquoi les contrats d'autonomie vont être poursuivis en Seine-Saint-Denis, c'est la seule façon de donner des atouts supplémentaires à ces jeunes. Je crois dans les autres dispositifs, mais je crois également dans les dispositifs renforcés.

Par ailleurs, tout ce qui doit être encouragé pour les jeunes, c'est l'accès à l'emploi. Et si nous avons des moyens à mettre en oeuvre, c'est sur ce point. Toutes les allocations dont a parlé le Parti socialiste, et que vous revendiquez également, seront toujours moins utiles et moins performantes pour les jeunes que les initiatives leur permettant de rentrer directement dans l'entreprise. Je crois foncièrement à cela, et c'est aussi ce qui nous sépare.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous passons au groupe Nouveau Centre.

La parole est à M. Pascal Brindeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Brindeau

Nous sommes au coeur d'un débat fondamental pour la jeunesse, et nous voyons bien au travers de toutes les interventions, dont celles de nos collègues des groupes SRC ou GDR, que le taux de chômage des jeunes est un problème structurel. Bien sûr, la crise a touché plus fortement des catégories en difficulté par rapport à l'emploi, telles que les jeunes ou les seniors, mais ce problème existait avant 2007, ou 2002, il existe depuis les années 1980, et toutes les mesures mises en place jusqu'ici n'ont pas réussi à inverser durablement ou fortement les tendances.

Ce débat est l'occasion pour nos collègues socialistes d'étalonner un certain nombre de propositions ou de promesses électorales. On nous ressort les emplois jeunes, certes de façon plus modeste : 300 000 au lieu de 700 000.

Je voudrais insister sur le vice initial de ces emplois jeunes, et qui marque leur échec : ces emplois ont été avant tout occupés par des jeunes surdiplômés pour les postes qui leur étaient offerts. On s'est trompé de cible : ils étaient occupés par des jeunes de niveau Bac +2, Bac +3, Bac +4, j'ai même vu des jeunes de niveau Bac +5 occuper des emplois jeunes. Tous se retrouvent à terme dans des situations d'emploi sous qualifiés. Aujourd'hui, nos collègues socialistes proposent des emplois au SMIC pour la même cible.

Ma question porte sur les mesures annoncées depuis le 1er mars par le Président de la République : quelles sont leurs perspectives de mise en oeuvre ? Vous avez abordé le contrat d'autonomie, ou les contrats de professionnalisation, quelle approche globale peut-on faire de ce train de mesures ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Nous travaillons sur le développement des contrats d'autonomie, notamment avec le ministre de la ville, Maurice Leroy. Sur toutes ces questions, je fonde d'importants espoirs d'évolution. Évoquer la baisse du nombre des chômeurs n'est pas un slogan, c'est une réalité. Quand la situation s'améliore, il est difficile de le faire entendre. Cela étant, il n'est pas question pour moi de crier victoire.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Concernant la précarité, je préfère quelqu'un qui commence à reprendre une activité, plutôt qu'une personne sans aucune activité.

J'assume complètement le choix de prévoir davantage de contrats aidés, parce que je préfère une charge horaire de vingt heures hebdomadaires, avec l'obligation de ponctualité, des collègues, une charge de travail et des habitudes professionnelles, plutôt qu'une allocation sans activité en contrepartie. D'ailleurs, le Loir-et-Cher, votre département, est en train de développer de façon importante le nombre de contrats aidés cofinancés avec l'État. En effet, un chômeur en fin de droit touchant le RSA représente un coût résiduel de 467 euros pour le département, contre 411 euros dans le cadre d'un contrat aidé cofinancé avec l'État. Cette deuxième formule coûte moins cher au département, et remet le pied à l'étrier au demandeur d'emploi.

Votre département avance beaucoup, pourtant j'ai demandé hier au président du Conseil général d'en faire davantage encore. Non seulement le coût du contrat aidé cofinancé est moindre, mais il ramène à l'emploi des personnes qui en sont très éloignées. Personne ne croira qu'une personne au chômage depuis trois ans retrouvera du travail aussi facilement qu'une personne sans emploi depuis trois semaines ou trois mois. Ce n'est pas vrai.

Pour les jeunes, il est vrai que le problème est un peu différent, car nous avons décidé de mettre l'accent sur l'apprentissage. La deuxième génération des contrats d'objectifs et de moyens est vraiment essentielle à nos yeux. Précédemment, quand l'État investissait un euro dans l'apprentissage, les régions investissaient vingt centimes. Il faut que nous soyons à parité.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Madame la députée, ces chiffres sont issus du rapport de l'IGAS, pas du rapport de Xavier Bertrand publié pour faire plaisir à Xavier Bertrand. Ils sont disponibles sur internet. Je veux que pour un euro investi par l'État, un euro soit investi par les régions, rien de plus, rien de moins. Voilà les perspectives pour l'État, en collaboration avec les collectivités locales, départements, mais aussi les régions. La campagne présidentielle viendra en son temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

La campagne a déjà commencé, et elle dérape !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Dans l'attente, si chacun y met du sien, nous pourrons faire reculer le chômage des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Pascal Brindeau, pour poser une deuxième question.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Brindeau

Ma deuxième question s'appuie sur l'intervention de notre collègue François Pupponi, qui faisait état de difficultés particulières, tant dans la capacité des jeunes à entrer en apprentissage que dans leur mobilité ou les problèmes d'hébergement. Dressons le parallèle avec les zones rurales : on y retrouve ces problèmes avec autant d'acuité que dans les quartiers sensibles.

Je souhaite que nous menions la même réflexion sur les politiques adaptées aux zones rurales que celle menée sur les quartiers sensibles. Je peux vous citer de nombreux exemples dans lesquels des entreprises sont situées dans des communes d'une centaine d'habitants. Ce sont des micro-entreprises, des artisans individuels, qui ont beaucoup de difficultés à accueillir un apprenti. Pourtant, ils le souhaitent, mais les problèmes d'hébergement et de transports sont des freins importants.

Les collectivités territoriales, région et département, se saisissent de ces questions, et essaient de travailler sur le transport à la demande et ce type de solutions. Y a-t-il des réflexions en cours sur la coordination des moyens de l'État et des collectivités territoriales sur ces questions ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Cette coordination, c'est ce que nos concitoyens attendent sur cette cause essentielle. Si l'emploi est une cause nationale, il vaut la peine que chacun s'y mette.

Aujourd'hui, nous voulons demander aux entreprises qui ont recours à l'apprentissage d'en faire davantage. Pour cela, deux éléments sont requis : la reprise économique, qui favorise évidemment les choses.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Oui, mais cela s'impose à tout le monde. Ceux qui créent les emplois dans notre pays, ce sont les entrepreneurs, plus qu'un ministre ou qu'un président de conseil général, de conseil régional, ou un maire. Nous pouvons créer de l'emploi public, mais c'est sans commune mesure. Nous devons donc créer les conditions pour que les entrepreneurs puissent créer des emplois. J'y crois profondément, et mon discours ne varie pas selon que je m'exprime en qualité de maire ou de ministre.

Il existe un réservoir important dans les petites ou très petites entreprises. Mais se pose alors la question de la charge de travail et de la culture. Le rôle des développeurs de l'apprentissage est d'aller voir quels sont les gisements d'emploi. Vous ne pouvez pas aller dans une entreprise en demandant de recruter quelqu'un. Mais proposer de faire le choix de l'apprentissage est tout à fait possible, j'y crois énormément.

N'oublions pas, puisque nous parlions de l'espace rural, la question de l'hébergement. Nous avons décidé que 250 millions d'euros seraient investis sur l'hébergement et nous avons aujourd'hui dix projets en gestation qui pourraient être prêts pour un lancement avant la fin de l'année 2011. Vous le voyez : sur les 500 millions du Grand emprunt, nous voulons pouvoir en flécher 250 millions sur la question de l'hébergement, car c'est une donnée qui n'est pas secondaire. C'est essentiel pour beaucoup de pouvoir se loger pour aller vers l'apprentissage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous passons au groupe UMP.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Le taux d'insertion professionnelle des jeunes est certainement l'une des faiblesses du modèle social français.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Améliorer l'insertion professionnelle des jeunes est donc un objectif largement partagé. La question qui peut nous diviser est : « comment y parvenir ? »

J'ai un peu étudié le problème des emplois d'avenir, et je les ai testés dans un bassin d'emploi. Sur une communauté d'agglomération de 65 000 habitants, on compte 300 emplois jeunes. Je mesure une grande résistance des collectivités locales, parce qu'il existe une usure, et que les chefs de service préfèrent aujourd'hui la voie de l'apprentissage pour encadrer. Enfin, les emplois dans le cadre du service civique attirent beaucoup plus les collectivités locales, parce que le niveau de compétence est plus élevé ou la motivation est plus forte. Je pense donc que la réussite de cette opération est très contestable.

L'autre solution est le développement de l'alternance et de l'apprentissage, et j'y crois plus, comme Gérard Cherpion. Mais comment supprimer les blocages ? Vous en avez cité un, la simplification. Certes, il y a des efforts à réaliser, mais les orientations sont prévues. Deux autres blocages existent : celui des familles et celui des enseignants. Ces blocages sont justifiés, car on se demande si l'on ne risque pas de bloquer l'avenir d'un jeune en l'orientant trop tôt vers l'apprentissage.

Il importe donc de créer des ponts entre l'apprentissage et les apprentis d'une part, et les universités d'autre part. Ainsi, un jeune qui a suivi la voie de l'apprentissage aura toujours la possibilité, plus tard, d'aller à l'université, ou dans une école. Monsieur le ministre, est-il possible de voir quelques universités ou écoles d'ingénieurs préparer des ponts avec l'apprentissage de façon à donner des perspectives aux jeunes qui s'y engageront ?

En tant que président du conseil général d'Ille-et-Vilaine, je voulais partager avec vous une expérience : nous avons regroupé les centres de formation d'apprentis dans un ensemble situé au milieu de l'université, que nous avons appelé « faculté des métiers ». La situation est devenue totalement différente, parce qu'un jeune a besoin de considération et de perspectives. Comment créer ces ponts ?

Je vous livre en même temps ma deuxième réflexion : comment trouver des maîtres de stage ? Mme Buffet vient d'en parler. Il existe un levier puissant à développer, monsieur le ministre. Lorsque nous avons réformé les retraites, nous avons créé un fonds de mutualisation de vingt millions d'euros. Dans l'agroalimentaire ou des métiers pénibles, lorsqu'un salarié arrive à cinquante-sept ou cinquante-huit ans, il peut très bien devenir tuteur. Existe-t-il une possibilité de cofinancement entre l'entreprise et le fonds de mutualisation, permettant à ces salariés, dans des métiers difficiles, de pouvoir passer à mi-temps ou devenir des tuteurs dans l'entreprise ? Je suis sûr qu'il y a là un levier pour surmonter les blocages des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Monsieur Méhaignerie, vous avez un peu triché, il y avait deux questions. (Sourires)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Je ne suis pas président, mais en posant deux questions en trois minutes quarante, M. Méhaignerie a laissé du temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

C'était pour vous faciliter le travail, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Je l'avais bien entendu ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je connais votre esprit de synthèse : vous avez la parole, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

J'ai bien compris qu'il y avait deux questions.

Monsieur Méhaignerie, il y a aujourd'hui 25 % d'apprentis dans le supérieur. Nous voulons voir, avec le cabinet de Valérie Pécresse, comment nous pourrions améliorer les choses, tout en n'oubliant pas qu'il existe tout un débat sur le quota et le hors quota. Nous voulons que la taxe d'apprentissage finance directement l'apprentissage. Si vous voulez des ponts, moi je ne veux pas non plus couper ce qui peut exister aujourd'hui.

Nous avons décidé de geler le montant actuel. Rien n'est retiré aux grandes écoles, qui se tournent vers la formation en alternance. Mais le développement futur se fera notamment pour financer les CFA. C'est là que se situent les besoins les plus importants.

Les facultés qui ouvrent des sections d'apprentissage, monsieur Méhaignerie, ne perdent pas d'argent. Il est très important de le dire.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Certes. Mais la question du quota et du hors quota n'est pas subalterne, j'ai rarement vu question susciter autant de passion.

Vous affirmez que des ponts sont nécessaires, mais ce que nous sommes en train de faire ne casse pas les ponts – je sais que beaucoup d'entre vous avaient cela en tête, même si ce n'est pas votre cas.

Le deuxième sujet concerne les blocages. Ils existent, c'est vrai. La campagne de communication actuelle se situe à deux niveaux. D'abord, en direction des jeunes et des familles et elle sera ensuite menée à la rentrée en direction des entrepreneurs, lorsque la décision finale de prendre un apprenti est prise.

La campagne est menée en direction des jeunes et des familles, car pour beaucoup de jeunes l'apprentissage a encore l'image d'un travail technique, alors que nous savons que la palette est immense. Pour certains, l'apprentissage est synonyme d'échec. Certains jeunes m'ont dit que leur premier regard et celui de leurs parents sur l'apprentissage n'était pas simple. Mais ils reconnaissent que finalement cela leur a apporté un métier, une qualification, un avenir. De fait, le taux d'insertion dans l'emploi est de 82 à 85 % pour les apprentis diplômés sur une période de moins d'un an, trois sur quatre bénéficient d'un emploi en CDI à plein temps. Lorsque l'entreprise garde le jeune, il ne doit pas accomplir de période d'essai, lorsqu'il signe son contrat, car il connaît l'entreprise et la réciproque est vraie. C'est un avantage. Ils ont déjà une première expérience, ce qui est leur enlève un grand poids compte tenu du besoin quasi obsessionnel de « la première expérience requise », que l'on peut lire dans les petites annonces.

Le pont avec l'université permet de casser les blocages. J'assume l'image de l'apprenti dans les métiers de bouche, les métiers manuels. De plus, nous avons besoin de ces emplois non délocalisables. Mais il est vrai que le pont vers l'université est indispensable, afin de montrer que la palette est très large.

En 2003 déjà, vous évoquiez la question de la pénibilité. Vos idées vont jusqu'au bout. D'ailleurs, le fonds de mutualisation est en lien, si je ne me trompe, avec la pénibilité. On l'appelle d'ailleurs « fonds Méhaignerie » au ministère, même s'il n'était pas appelé ainsi dans la loi. Je vous en déjà fait part lors d'un déplacement à Vitré avec M. le Premier ministre. Les décrets vont sortir, afin que les projets puissent émerger et être financés. Je trouve, si je puis me permettre, ces idées plus intéressantes que le contrat intergénérationel dont je parlais tout à l'heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cherpion

Tout le monde s'accorde à reconnaître que, depuis les années soixante-dix, le taux de chômage a augmenté de façon structurelle pour l'ensemble des catégories de populations. La catégorie la plus touchée est celle des jeunes, si l'on prend comme critère le taux de chômage. Un récent rapport du COE indique qu'un jeune de moins de vingt-cinq ans sur dix est au chômage. Parmi les jeunes actifs, un sur quatre est au chômage. Le taux de chômage des jeunes est ainsi passé de 6,1 % en 1975 à 22,3 % aujourd'hui, malgré les systèmes mis en place. Depuis 1981, on n'est jamais repassé en dessous de la barre 15 % – notre responsabilité est collective car il y a eu des alternances. Et cela quels que soient les systèmes mis en place.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cherpion

Et cela, monsieur Vidalies, malgré les emplois jeunes.

Monsieur le ministre, jusqu'à présent, ni les uns ni les autres sommes parvenus à ramener le chômage en dessous de 15 %. Ne nous sommes-nous pas trompés collectivement par rapport à la formation initiale ? Vouloir 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat, c'est très bien, en effet plus le niveau sera important, mieux cela vaudra. Mais cela signifie aussi que 20 % des jeunes n'ont pas de réponse et on ne peut pas les laisser ainsi. Faut-il continuer à maintenir cet objectif de 80 % ou ne vaudrait-il pas mieux avoir un objectif plus ambitieux en matière d'orientation et de qualification ? Nous voyons que ce sont les jeunes les moins qualifiés qui accèdent le plus lentement et le plus difficilement à un emploi. Quelle évolution devrions-nous adopter en matière d'orientation et de qualification des jeunes avant l'entrée dans le monde du travail ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Peut-on y voir une corrélation ? Je ne sais pas si je dois être affirmatif. Mais il faut reconnaître que la montée du niveau s'est accompagnée d'une hausse du chômage. Je suis à peu près sûr que le regard des employeurs sur le bac général a complètement changé. Le bac est le premier niveau d'exigence et je pense que les choses sont plus compliquées pour ceux qui ne l'ont pas obtenu.

Voilà pourquoi je reviens sur la notion d'apprentissage, ce n'est pas une marotte. Il permet d'avoir des jeunes en formation, dont les emplois correspondent aux besoins et d'éviter cette approche : « Vous n'avez pas le bac ! Tant pis pour vous ! » Je pense donc que l'apprentissage apporte une vraie solution à cette situation.

J'ai parlé de ce sujet avec Luc Chatel et il y travaille déjà. Je suis ministre du travail, de l'emploi et de la santé, ce qui est déjà beaucoup aux yeux de certains qui pensent que je suis ambitieux et je ne veux pas ajouter à cela la question de l'éducation, mais je pense qu'il faudra aller plus loin. Il ne faut pas oublier que 150 000 jeunes sortent chaque année du système éducatif sans rien. C'est pour eux le parcours du combattant. Je ne connais pas le nombre de jeunes ayant une qualification qui sortent et qui ensuite ne trouvent pas d'emplois. Toute la question de l'orientation est posée. Là aussi, droite ou gauche, nous ne devons pas faire les malins. Nous essayons de trouver sur ces sujets des solutions au niveau local, pour les construire ensuite au niveau national. L'école doit apprendre à lire, à écrire, à compter, la citoyenneté. Mais à un moment donné le fait de poser la question d'aller vers l'emploi n'est pas incongrue. On n'en discute pas à tous les âges, mais il faut y songer. Le fait que 80 % d'une classe d'âge aient le bac n'apporte pas la garantie d'un non-chômage des jeunes. Ce n'est pas cela qui pousse certains dans une trappe à chômage ou vers un non-emploi, mais cela signifie que nous devons trouver des réponses adaptées. L'apprentissage part de ce constat et apporte une réponse adaptée, même si je pense que l'orientation est primordiale.

Je voudrais sur ce point raconter une anecdote. Cela ne peut s'écrire dans une loi. J'ai rencontré en Savoie des jeunes dans un CFA. J'ai abordé le thème de la découverte des métiers, qui a lieu aujourd'hui en quatrième ou troisième. Un jeune m'a demandé pourquoi on ne commençait pas un peu plus tôt à découvrir les métiers, car il pensait que l'on n'avait pas tout de suite un coup de foudre pour un métier, il fallait le découvrir, l'aimer. Si l'on pouvait visiter dès la cinquième une entreprise ou si un chef d'entreprise venait dans les classes, cela permettrait déjà de se faire une idée et de prendre une décision ensuite. Il ne s'agit pas d'amener les jeunes vers l'emploi, comme je l'entends parfois, à peine sortis du cours moyen ! Plus tôt ils découvrent les entreprises, mieux cela vaut, car ils sont capables de faire le meilleur jugement avec tout leur bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous en revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

L'abondement en 2010 des missions locales dans le cadre du plan d'urgence a permis d'embaucher près d'un millier de conseillers supplémentaires. En quelques mois, nous avons pu mesurer l'amélioration de leur taux de placement en emploi. J'en profite, monsieur le ministre, pour rappeler quelques chiffres, car j'ai été un peu perdu dans ceux que vous avez annoncés. Selon la DARES, sur un an, le chômage des jeunes a baissé de 6,6 % sur les catégories A, mais a malheureusement augmenté et continue de progresser sur les catégories B et C de 4,8 %. Je ne voudrais pas polémiquer, mais le taux d'insertion des apprentis de 85 % s'entend pour les jeunes qui ont fini leur parcours. Le taux de rupture de l'apprentissage est un problème et les jeunes reviennent alors vers les missions locales. Leur budget pour 2 011 a baissé par l'arrêt des 50 millions supplémentaires apporté par le plan d'urgence, arrêt qui se manifestera par la sortie des conseillers recrutés.

Pourtant, en 2010 un rapport de l'IGF avait montré l'importance et la nécessité de l'accompagnement des jeunes vers et dans l'emploi. Un autre rapport de l'IGAS, centré sur l'insertion professionnelle des jeunes des quartiers, a préconisé le renforcement des moyens d'accompagnement dans ces quartiers. Un rapport récent de l'IGF atteste la faiblesse du taux d'accompagnement en France des demandeurs d'emplois par rapport aux pays voisins.

Ces trois rapports, commandés par votre ministère auraient dû logiquement vous conduire à renforcer les dispositifs d'accompagnement des jeunes.

Les entreprises que nous avons auditionnées avec mon collègue François Pupponi dans le cadre de la préparation de la proposition de loi sur la politique de la ville que nous examinerons cet après-midi, nous ont confirmé que la meilleure incitation pour l'embauche de jeunes des quartiers n'était pas tant la multiplication des exonérations qu'un accompagnement renforcé jusque dans l'entreprise. Le succès des Écoles de la deuxième chance conforte ma réflexion.

Le Gouvernement souhaite mener une politique de lutte contre les décrochages à destination des 150 000 jeunes qui, chaque année, sortent du système éducatif sans diplôme ni qualification. Quels moyens envisagez-vous pour les plates-formes d'accompagnement ?

Vous avez objecté les 8 000 contrats d'autonomie et les 7 000 supplémentaires annoncés en début d'année. C'est peu sur la masse à traiter. Le contrat d'autonomie, confié à des opérateurs privés de placement – j'ai tendance à penser que c'est surtout pour cette raison que vous voulez le maintenir –, malgré son coût élevé n'a pas fait la preuve de son efficacité, comme l'attestent une étude de la DARES et notre collègue Chantal Brunel.

Ne serait-il pas plus pertinent de fusionner ces divers dispositifs, notamment le contrat d'autonomie et le CIVIS pour permettre d'orienter les jeunes les plus éloignés de l'emploi vers une sorte de dispositif « nouvelle chance » confié aux missions locales – cela ne vous surprendra pas de ma part – consistant, sous réserve d'un engagement du jeune, à le faire bénéficier d'un accompagnement renforcé, d'un parcours de formation et d'une allocation jusqu'à l'obtention d'un premier emploi et pour les autres, ceux qui sont dans une sorte d'intermittence avec l'emploi, de bénéficier d'un suivi qui peut aller jusque dans l'entreprise ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Deux minutes, c'est bien court, monsieur Gille ! Ainsi, vous n'avez pas eu le temps de mentionner que, dans le rapport 2010 de l'IGF, les résultats des missions locales en termes d'insertion vont de 13 à 62 %. S'il y en a qui connaissent ce sujet sur le bout des doigts, c'est vous, ainsi que Bernard Perrut. Vous le saviez, mais vous n'avez pas eu le temps de le dire…

Parlementaires ne manquant aucune minute des débats sur les financements et les budgets. vous savez tous qu'il n'y a pas de baisse des crédits programmés pour 2011. Les notifications sont identiques à celles de 2010.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Le plan d'urgence c'était au coeur de la crise. Compte tenu des impératifs que tout le monde connaît, si demain, vous étiez à ma place – ce que je ne souhaite pas pour des raisons politiques et quant aux choix que vous proposeriez –, vous verriez que les discours ne dureraient qu'un temps. Lorsqu'il y a un dispositif exceptionnel au coeur de la crise, vous ne pouvez pas le prolonger lorsque vous approchez de la sortie de crise. Pour nos concitoyens, la sortie de crise sera clairement caractérisée par la baisse du chômage, mois après mois, de façon conséquente. La meilleure réponse aux problèmes de pouvoir d'achat est d'abord l'emploi. Je ne me tromperai pas sur la notion de sortie de crise. Derrière tout cela les crédits sont les mêmes. Cela dit, j'ai indiqué devant l'assemblée plénière du Conseil national des missions locales que l'on pouvait vérifier dans les négociations, les conventions par région et parfois au sein d'une même région.

Vous m'avez demandé quels moyens supplémentaires avaient été apportés. En 2011, 30 millions d'euros supplémentaires l'ont été, grâce à une décision des partenaires sociaux pour l'accompagnement de 20 000 jeunes « décrocheurs » sortis du système éducatif sans qualification professionnelle ou sans diplôme. Voilà ce qui est mis en place et qui permet d'aller dans le sens de l'accord des partenaires sociaux, que je tiens à saluer, parce que 65 000 jeunes sont concernés. Je crois aux missions locales – pas seulement parce que j'en ai une dans ma ville – mais parce que nous avons décidé que la prescription des contrats aidés se ferait aussi par les missions locales, ce qui montre qu'on leur fait confiance.

Pour l'instant, cela se passe par bassin d'emploi autour du sous-préfet. Mais dans la mesure où les missions locales pourront prescrire des contrats aidés, c'est bien la preuve que j'y crois.

En conclusion, je citerai trois chiffres. Je ne souhaite pas vous compromettre, monsieur Gille, mais il me semble que nous ayons raison tous les deux. (Sourires.) Entre le mois de mars 2010 et le mois de mars 2011, la DARES indique que le nombre de jeunes au chômage a baissé de 6,6 % contre 9% selon l'INSEE. Pourquoi ces différences de chiffres ? Je mettrai tout le monde d'accord en disant qu'en Indre-et-Loire, le pourcentage est de moins 20 % depuis quatre mois !

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Ma question porte sur les contrats aidés. Bien qu'ils ne leur soient pas réservés, les contrats aidés constituent un mode d'accès privilégié à l'emploi pour de nombreux jeunes.

Dans le secteur marchand, la moitié des bénéficiaires du contrat initiative emploi sont des jeunes. Ils représentent 20 % des bénéficiaires du contrat d'accompagnement à l'emploi.

Les contrats aidés jouent un rôle crucial au service de la vie associative, en particulier dans les quartiers défavorisés, mais aussi dans la bonne marche des services publics assurés par les collectivités locales ou l'éducation nationale.

À la fin de l'année 2010, votre politique erratique de stop and go concernant le nombre de postes disponibles pour de nouvelles embauches ou des renouvellements a eu des conséquences très déstabilisantes pour les structures employant des contrats aidés.

En 2011, vous avez fait le choix de sacrifier les contrats aidés en prenant trois décisions incompréhensibles.

Premièrement, par rapport à l'an dernier, vous avez décidé de diminuer de 25 % le nombre de contrats aidés,…

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

…de 400 000 à 340 000 pour les CAE et de 120 000 à 50 000 pour les CIE. D'ici à 2013, la baisse programmée dans vos projets de loi de finances est de 50 %.

En février, le Président de la République a annoncé 60 000 contrats aidés supplémentaires, mais il a oublié de préciser que ces contrats sont ciblés à destination des bénéficiaires du RSA socle sous la responsabilité des conseils généraux et que ce sont ces derniers qui devront assurer l'essentiel de la prise en charge.

Deuxièmement, vous avez décidé de faire passer l'aide de l'État pour la prise en charge des contrats aidés de 90 % à un taux moyen de 70 % : les contrats aidés sont donc moins attractifs sur le plan financier.

Troisièmement, vous avez décidé de réduire la durée des contrats aidés qui, pour l'essentiel aujourd'hui, sont ramenés à vingt heures par semaine pour une période de six mois souvent non renouvelable,..

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

…ce qui est un non-sens par rapport aux objectifs de formation et d'accompagnement pour les bénéficiaires, mais aussi une aberration pour le fonctionnement au quotidien des structures qui accueillent ces contrats aidés, sans visibilité suffisante pour l'avenir.

Monsieur le ministre, je peux le constater chaque jour dans le département de la Loire : du fait de vos décisions, de nombreuses associations, clubs sportifs, centres sociaux, structures d'éducation populaire ou amicales laïques, dont la survie dépend des contrats aidés auxquels ils ont de moins en moins accès aujourd'hui, font face à des difficultés insurmontables. Qu'allez-vous faire pour répondre au cri d'alarme de ces acteurs associatifs de terrain ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Ce n'est pas tout à faux, ni tout à fait vrai, monsieur Juanico. (Sourires.)

Vous connaissez les chiffres par coeur et le sujet sur le bout des doigts, monsieur le député, mais, dans ces conditions, il faut tout dire. Vous n'ignorez pas qu'en 2010, il s'agissait d'un dispositif de coeur de crise. Dans mon département, l'Aisne, on comptait 6 100 contrats aidés pour l'année. Au 15 octobre, les compteurs ont été arrêtés à 5 950 ; il en restait 150 jusqu'à la fin de l'année. La gestion de l'année dernière ne représente donc pas pour moi le modèle à suivre, je le reconnais.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

C'est pourquoi j'ai voulu donner de la visibilité. Certains, qui n'aiment pas le Gouvernement, ont eu beau jeu de déclarer que c'était la fin des contrats aidés, d'autant que des élections approchaient.

En vérité, la gestion de stop and go a été désastreuse. Aussi, ai-je voulu, en ce début d'année, donner davantage de visibilité. Nous avons aujourd'hui plus de contrats aidés qu'avant la crise. Deux enveloppes complémentaires ont été votées : 50 000 contrats aidés voulus par l'État – le Président de la République l'a annoncé au mois de mars – dont le financement est assuré par 500 millions d'euros. J'ai en outre proposé 60 000 contrats aux conseils généraux, qui sont des contrats cofinancés par l'État et le conseil général – mes fameux 467 euros pour un chômeur de longue durée au RSA par rapport aux 400 euros en cas de cofinancement.

S'agissant du coût moyen, il est vrai que pendant la crise, tout était quasiment couvert parce que les associations ne pouvaient pas faire face. Aujourd'hui, le taux moyen est de 70 %.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

La durée moyenne n'est pas de six mois, mais de huit mois et demi.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Je connais les durées, monsieur Juanico. Je ne gère pas les affaires seulement depuis mon bureau de ministre, je suis aussi sur le terrain. On arrive à une durée moyenne de huit mois et demi en tenant compte des prolongations possibles. Nombreuses sont celles qui font l'objet d'une prolongation de six mois.

En revanche, j'admets qu'il y a un recentrage sur les chômeurs de longue durée. J'ai à assumer à la fois le chômage des jeunes et celui des chômeurs de longue durée, mais les contrats aidés ne sont pas exclusivement réservés aux chômeurs de longue durée ou alors j'aurais fait une erreur en répondant à M. Gille que les missions locales pouvaient en prescrire. Les contrats aidés sont également destinés aux jeunes.

Au demeurant, je souhaiterais que les conseils généraux – dont je connais, au moins pour la moitié d'entre eux, l'orientation politique – jouent le jeu. Cela en vaudrait la peine.

Le département de Seine-Saint-Denis par exemple, madame Buffet, n'en finançait aucun. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, mais s'il en cofinançait plus, je serais content. Et si le Val-de-Marne s'y mettait, cela ne me déplairait pas non plus. Il est indispensable que tous les départements y participent. Le cofinancement aide les chômeurs de longue durée au niveau du RSA et rend service à l'ensemble de l'emploi dans notre pays. Lorsqu'une association ne peut pas financer un différentiel de 5 ou 10 % du montant d'un contrat aidé, quel avenir propose-t-on aux personnes recrutées ? Elles ne vont pas rester quarante-deux ans en contrat aidé ou avec des emplois à vingt heures.

Les collectivités locales et les associations doivent leur tenir un langage de vérité. Elles doivent être guidées par le souci de leur mettre le pied à l'étrier par le biais de la formation.

On ne peut que se réjouir de l'existence des contrats aidés, mais l'on peut aussi se dire qu'en raison d'une participation moindre de l'État, on peut en couvrir davantage. En tout état cause, les contrats aidés permettent de ramener les chômeurs de longue durée vers l'emploi.

S'agissant du secteur non marchand, c'est plus facile. Je pense aussi au secteur marchand lorsque je parle d'aider à mettre le pied à l'étrier, et il n'y a pas d'effet d'aubaine. Dans le secteur privé, cela a aussi du sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Marc

Dans les départements d'outre-mer, le taux de chômage des jeunes de seize à vingt-cinq ans est particulièrement inquiétant. Il touche en moyenne 55 % des jeunes actifs. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cet important phénomène de chômage : une rigidité structurelle du marché du travail ; une offre de formation professionnelle inadaptée et insuffisante ; des problématiques autour du « déclassement » ou de la « sous-qualification » des jeunes diplômés ; une gouvernance complexe du pilotage des politiques d'emploi et de formation ; enfin, un taux d'échec scolaire très important et un taux d'illettrisme cinq fois supérieur à la moyenne nationale.

Derrière ce constat, il existe des possibilités d'insertion professionnelle durables, notamment dans les métiers de l'artisanat, de la culture, de l'environnement, du tourisme, des services aux particuliers ou encore pour les ouvriers qualifiés des secteurs primaire et secondaire.

Nous avons également pu constater que les contrats jeunes, certains contrats aidés et les formations en alternance permettent ou ont permis une meilleure insertion dans l'emploi.

En ce qui concerne les contrats aidés, la politique de rigueur imposée au budget de l'outre-mer et les suites du mouvement de 2009 obèrent les possibilités de cet important levier.

Pour ce qui est de la formation en alternance, et plus singulièrement en Guadeloupe, les importants retards accumulés au niveau des pouvoirs publics en matière de mise en oeuvre et de versement des mesures incitatives qui y sont dédiées, ont définitivement découragé les employeurs d'avoir recours à ces contrats.

Pour remédier aux problématiques que je viens de vous évoquer, il est aujourd'hui possible de lancer deux expérimentations.

La première est une mesure conjoncturelle pour répondre aux difficultés d'ordre matériel – en matière de logement et de transports – des jeunes en situation de précarité. Elle consisterait à verser le « RSA jeunes » par la voie d'une charte avec l'entreprise accueillante aux publics ayant choisi de s'insérer par le biais de la formation en alternance.

La seconde consisterait à mettre en oeuvre un dispositif de type « Leonardo Mobilité » chargé d'organiser des stages dans les entreprises présentes dans l'environnement régional des DOM.

Seriez-vous prêt, monsieur le ministre, à vous engager pour redonner espoir à tous ces jeunes de pouvoir s'insérer un jour dans la vie professionnelle ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

D'ici au mois de septembre, j'aurai, madame la députée, l'occasion de me rendre en Guadeloupe et en Martinique. De nombreux parlementaires, de droite comme de gauche, sont venus me voir au ministère pour me parler de ces questions, notamment les présidents d'exécutif.

Nous consentons un effort tout particulier en direction des habitants d'outre-mer et nous consacrons des moyens plus importants aux contrats aidés. Marie-Luce Penchard est très attentive à cette question.

Vous avez parlé du dispositif « Leonardo Mobilité ». J'en profite pour rappeler qu'Erasmus a été une réussite sans pareille. Je ne vois pas pour quelle raison on ne pousserait pas les feux sur ces questions de mobilité au niveau européen. J'ai du reste fait cette proposition à mes homologues au dernier sommet européen et auprès des commissaires européens. Cela concerne bien évidemment l'outre-mer et j'y crois beaucoup. Nous parlions tout à l'heure, avec M. Méhaignerie notamment, d'une réelle valorisation des apprentis et des étudiants. Après Erasmus, il faut poursuivre davantage au niveau européen.

Par ailleurs, j'ai l'intention d'évoquer ce point avec les chambres de métiers. Le président Griset va s'engager sur des chiffres impressionnants en matière d'apprentissage et d'emploi des jeunes. Je voudrais également voir avec les entreprises de quelle façon cela se traduira outre-mer.

J'ai conscience du niveau du chômage des jeunes en outre-mer et du fait que cela pèse, comme en métropole, sur leur confiance en l'avenir. C'est pourquoi les dispositifs sont un peu plus importants dans ces collectivités.

Madame la députée, je n'ai pas l'intention de me contenter d'une simple visite de courtoisie. Je compte tenir des réunions de travail avec les partenaires économiques et politiques qui, toutes sensibilités confondues, ont l'intention d'avancer dans cette direction.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous en revenons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Si nous voulons que la proposition de loi soit examinée avant la loi de finances rectificative, pourrait-elle être inscrite à l'ordre du jour de la semaine du 14 juin, de préférence le mardi ou le mercredi ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Je ne suis pas le ministre chargé des relations avec le Parlement, mais pour ma part, je souhaite qu'elle soit examinée le plus rapidement possible. Le fait que le texte émane d'un parlementaire, M. Cherpion, lui confère d'emblée un caractère plus sympathique. Aux yeux de certains, en tout cas. (Sourires.) Il s'agit d'un texte pragmatique qui ne donne pas matière à un débat idéologique.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Il faut vraiment chercher, monsieur le député !

Nous sommes en train de travailler sur les mesures d'accompagnement. Sans vouloir sous-estimer le travail parlementaire, je sais d'expérience que les amendements les plus importants ne portent que sur une partie réduite d'un texte – disons les choses telles qu'elles sont –, souvent emblématique, parfois médiatique. En tout état de cause, cela ne nous empêche pas de travailler en amont. Plus tôt le texte viendra en discussion, mieux cela sera et peu importe le jour. J'aviserai avec Patrick Ollier, mais en tout cas, j'y suis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cherpion

En matière de développement des formations en alternance, le Président de la République a fixé un objectif ambitieux, que nous partageons bien évidemment.

Se pose le problème du nouveau baccalauréat pro. Le bac pro se préparait autrefois en quatre ans. Depuis 2009, en trois ans. Or, selon certains professionnels, cette évolution a entraîné une baisse d'effectifs. On constaterait une chute d'environ 10 %.

Qu'en est-il vraiment, monsieur le ministre ? Cette réforme a-t-elle réellement entraîné une chute des effectifs des apprentis de niveau pré-bac ? Si c'est le cas, comment y remédier ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

C'est un vrai sujet, monsieur Cherpion. Depuis la rentrée scolaire 2009, le bac professionnel se prépare désormais en trois ans après la fin de la troisième et le passage de quatre à trois ans a fait chuter massivement les effectifs des élèves formés en alternance au niveau V. C'est une réalité, que ceux qui ne sont pas spécialistes de ce domaine méconnaissent.

Le nombre de jeunes préparant un diplôme de niveau V par apprentissage est resté relativement stable jusqu'en 2008, passant de 164 000 en 2001 à 166 500 en 2008. En 2009, il a chuté de 16 %, soit 26 500 jeunes de moins. Cette hémorragie – je parle bien d'hémorragie et non de baisse – s'est poursuivie en 2010 et si cette évolution se confirme, cela menacera l'apprentissage au niveau pré-bac et bac, qui concerne, excusez du peu, 75 % des apprentis.

Quatre facteurs sont en cause.

Premièrement, certains employeurs hésitent à s'engager sur trois ans, au lieu de deux, pour former un jeune.

Deuxièmement, les parents ont tendance à pousser leurs enfants à tenter le bac professionnel au lycée sur trois ans plutôt que sur quatre ans en apprentissage, avec deux ans pour le CAP et deux ans pour le bac professionnel.

Troisièmement, – et il faut dire les choses très franchement – la réduction d'une année scolaire dans le cursus du bac professionnel a conduit à une diminution du nombre d'enseignants requis dans l'enseignement professionnel. C'est une évidence. Les élèves en fin de troisième sont incités à aller en lycée professionnel plutôt qu'en centre de formation d'apprentis. Voilà la réalité, appelons un chat un chat.

Quatrièmement, – et je le dis prudemment afin de n'énerver personne –, les régions, qui travaillent beaucoup avec l'éducation nationale, valorisent de manière quasi-automatique le lycée professionnel au détriment des CFA.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

C'est faux, venez donc voir dans les régions !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

On ne peut rien dire à ce sujet sans susciter aussitôt des réactions. C'est pourtant une réalité et je le dis sans aucune passion et sans aucune idéologie car je pense qu'il y a des enceintes où l'on peut arriver à dialoguer. Le question est bien là : il est considéré que si telle est la volonté de l'éducation nationale, il faut la respecter et l'accompagner. J'ai un exemple très précis à ce propos dans ma région mais je ne le citerai pas. C'est la raison – pas la seule, certes, mais elle n'a rien d'anecdotique – pour laquelle les classes de CFA ne se remplissent pas.

Dans ces conditions, il faut absolument adapter le bac professionnel en trois ans aux réalités de l'apprentissage sinon nous aurons des difficultés pour le faire progresser et surtout les effectifs des jeunes qui ne sont pas les plus qualifiés risquent de diminuer. La position de fond que nous avons par rapport aux contrats d'avenir et aux contrats jeunes, c'est que nous devons absolument réfléchir à des solutions pour les jeunes non qualifiés.

Essayer de dire les choses sans passion n'empêche pas, me semble-t-il, de dire les choses avec raison.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Le débat est clos.

L'initiative de la présidence de l'Assemblée et du bureau d'organiser des débats en salle Lamartine me semble intéressante, comme la qualité des questions et des réponses et le caractère direct du dialogue le montrent. Certes, des améliorations sont possibles et c'est bien volontiers que M. le président, qui s'est battu pour mettre en oeuvre ce type d'échanges, et le bureau de notre assemblée recueilleront des suggestions en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

D'ores et déjà, je vous indique qu'il serait bon que le groupe initiateur puisse dire un mot de conclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Avec M. Bertrand, il est difficile d'avoir le dernier mot !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Bien sûr, nous essaierons d'aller en ce sens mais la qualité des débats tient aussi aux interventions des ministres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Discussion d'une proposition de loi visant à prendre des mesures d'urgence en faveur des villes et quartiers en difficulté ;

Discussion d'une proposition de loi visant à prendre des mesures urgentes et d'application immédiate en faveur du logement.

La séance est levée.

(La séance est levée à onze heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma