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Séance en hémicycle du 2 juillet 2010 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • agriculteurs
  • bretagne
  • mutualisation
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  • éleveur

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de l'agriculture et de la pêche (nos 2559, 2636, 2581).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est d'une heure quarante pour le groupe UMP, dont 234 amendements restent en discussion, quatre heures vingt-sept pour le groupe SRC, dont 176 amendements restent en discussion, une heure cinquante-quatre pour le groupe GDR, dont 110 amendements restent en discussion, une heure vingt-quatre pour le groupe Nouveau Centre, dont 54 amendements restent en discussion, et douze minutes pour les députés non inscrits, dont 14 amendements restent en discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l'article qui organise le temps programmé.

Vous venez d'indiquer les temps de parole qui restent pour les différents groupes ; nous mesurons aujourd'hui l'absurdité profonde du temps programmé.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Officiellement, cette procédure avait été instaurée pour lutter contre l'obstruction. Or depuis le début de ce débat, personne ne s'est jamais livré à la moindre manoeuvre d'obstruction ; on peut même dire qu'il est à cet égard exemplaire. La présidente de séance a fort bien conduit nos débats hier soir, ce qui nous a permis d'avancer rapidement. Mais par le jeu de temps de parole calculés selon des modalités pour le moins obscures, les députés non inscrits – ainsi Jean Lassalle, présent, comme moi, depuis le début de la discussion–, ne seront pas en mesure de défendre leurs amendements.

La semaine prochaine, nous allons examiner un projet de loi destiné à combattre le port de la burqa. En interdisant à des parlementaires de s'exprimer dans un débat, c'est la burqa qu'on instaure au sein même de l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Monsieur Garrigue, je vous donne acte de vos observations. Ce problème sera évoqué lors de la prochaine conférence des présidents.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 8.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Jean Auclair, inscrit sur l'article 8

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Auclair

Monsieur le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, vous avez dit hier soir que la loi était pérenne. Les organisations de producteurs commerciales et non commerciales – ont été reconnues dans la loi de 2006. Or l'article 8 tend à remettre en cause ce qui avait été alors avalisé : l'État se pose en tribunal, puisque c'est lui qui va décider, via son administration, de la reconnaissance ou non des OP.

Monsieur le ministre, on vous cache la vérité, comme on l'a cachée hier, dans l'Aveyron, au Président de la République : le syndicalisme et COOP de France ont mis un écran de fumée entre le terrain et vous, les décideurs ; Il n'y a qu'eux qui peuvent prendre la parole. Hier, à Mur-de-Barrez, eux seuls se sont exprimés. Je crois que mon ami Louis Cosyns vous a invités à venir visiter le marché au cadran de Châteaumeillant. Il serait bon que vous écoutiez de temps en temps un autre son de cloche !

Derrière les quatre dernières phases de l'article L. 555-1, se cache un but inavoué, que vous masquez par un discours rassurant : vous voulez supprimer en douceur les OPNC, et cela sous la pression de COOP de France, qui va encore plus loin en exigeant le transfert de propriété, le but final étant d'éradiquer le commerce privé pour être en situation de monopole. Il est vrai que leurs prouesses en matière porcine sont démonstratives, à voir l'excellent revenu qu'ils assurent à leurs éleveurs… Ils vont même jusqu'à un lobbying effréné : après nous avoir conviés autour d'une très bonne table, ils ont organisé la semaine dernière un cocktail dégustation, probablement pas pour goûter des produits coopératifs, mais pour conditionner les esprits et pour qu'ils en fassent autant auprès de leurs parlementaires – ce carton d'invitation le prouve. Bien évidemment, les OPNC auraient du mal à les imiter : elles n'en ont ni les moyens ni le savoir-faire.

Vraiment, monsieur le ministre, je suis déçu que vous puissiez tomber dans un tel panneau en allant jusqu'à avancer le bilan des modes de commercialisation au 1er janvier 2012.

Nous, nous ne voulons pas entrer dans ce jeu. Que les OPC vivent leur vie avec les moyens que l'État leur donne : j'entends parler de 2,5 milliards par an, toutes aides confondues, en direction de la coopération. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous confirmiez ce chiffre. Cela ne nous regarde pas, mais enfin ! Au moment où l'on parle de s'attaquer aux niches fiscales et de réduire les dépenses de l'État, y a là du grain à moudre… Il serait intéressant de savoir où passent ces aides que vous versez – en tout cas certainement pas dans la poche de leurs adhérents. Les OPC ont des moyens matériels et humains, un savoir-faire administratif que les OPNC n'ont sans doute pas et il y aura toujours un grain de sable qui fera échouer la reconnaissance de l'OPNC, même si, en termes de prix versé au producteur, elle est en mesure de démontrer son efficacité.

Vous souhaitez la concentration des OP en les soumettant à une obligation d'activité suffisante, mais ce n'est pas ce qui compte ; l'important, c'est le prix versé aux éleveurs.

Ce concept, qui voudrait que plus une structure est importante, meilleur est le service rendu aux producteurs, est battu en brèche par une réalité bien différente ; je pense à toutes ces grosses structures coopératives qui, la fin de semaine arrivant, cassent les prix des broutards, par exemple, en organisant des braderies en Italie pour se débarrasser de leur stock, alors qu'en face, des structures privées, plus légères, gèrent leurs « appros » d'une manière plus fine pour rémunérer au mieux leurs producteurs.

« Non nous ne voulons pas supprimer les OPNC », assurez-vous. Mais je relis vos propos tenus au Sénat : « Nous voulons procéder par étapes. Nous voulons trouver un équilibre entre la suppression totale et immédiate des OPNC et la nécessité de réorganiser les OP. » Il faudrait vous expliquer là-dessus ! Le rapporteur, Gérard César, ajoute : « Désireuse d'avancer sur la question du transfert de propriété, la commission a fixé cette date au 1er janvier 2012, ce qui constitue une avancée importante ».

Je crains que les conclusions du bilan ne soient orientées à l'avance. Nous ne voulons pas d'un modèle uniforme d'OP. Vous devez tenir compte des 75 % d'éleveurs libres qui veulent assurer eux-mêmes la vente de leur production. Le libre choix doit rester possible, car seule la diversité des formes de commercialisation favorise la concurrence et stimule la compétitivité. En tout état de cause, l'appartenance à une OP ne doit pas être un élément de conditionnalité des aides et d'accès aux outils de régulation. Dans le secteur bovin, 70 % des transactions sont réalisées par le secteur privé, via les OPNC ou en direct, et ce, malgré une politique incitative de l'État en faveur du secteur coopératif. Il convient de rappeler que les groupements représentent seulement 25 à 30 % des débouchés des éleveurs. On ne peut en conséquence imposer à la majorité, par la loi, un modèle minoritaire. Cette obligation est d'autant plus contestable qu'il n'est pas démontré que les éleveurs en groupement disposent d'un revenu supérieur aux autres éleveurs, C'est même probablement l'inverse qui apparaîtrait en cas de comparaison.

Les parlementaires prendraient une lourde responsabilité envers les éleveurs en adoptant une telle mesure qui nuirait à terme à la compétitivité de l'agriculture française.

Nous demandons un jugement sur les résultats, certainement pas «en général ou par secteur » mais par structure individuelle. Nous ne voulons pas qu'il y ait d'un côté, le secteur privé et de l'autre le secteur coopératif. Nous voulons, si cet article est adopté, que les OP soient jugées individuellement.

Sur les organisations de producteurs, monsieur le ministre, vous m'avez répondu pendant les débats préparatoires à cet examen, que d'autres pays avaient fait le choix de ne garder que des organisations de producteurs commerciales, en citant l'Allemagne.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Non, le Danemark !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Auclair

Pour commencer, ce n'est pas la réalité, à moins que vous ne parliez des structures de l'ex-RDA aux résultats catastrophiques. Ensuite, ces fameuses organisations allemandes ont un statut quelque peu différent, puisqu'elles payent des impôts sur le bénéfice et que les distorsions de concurrence n'existent pas dans ce pays.

Je me suis adressé à la fédération allemande du commerce, du bétail et de la viande. Voici ce qu'elle m'a répondu : « L'affirmation selon laquelle il y aurait en République fédérale d'Allemagne une loi ou un règlement qui interdit les groupements de producteurs qui ne sont pas organisés en coopératives est erronée.

« Dans le domaine des abattages, il a été démontré en Allemagne que les établissements organisés en coopératives ne sont pas compétitifs.

« L'agriculture allemande profite de l'existence de formes d'entreprises différentes. Le commerce non coopératif en Allemagne est estimé à environ 60 % et, pour les abattages, le pourcentage est même plus élevé. Nous ne pouvons que mettre en garde contre un changement de la situation concurrentielle des différentes formes de commercialisation et soulignons l'exemple négatif du Danemark où le prix payé au producteur est bas et le prix à la consommation élevé. »

Par ailleurs, monsieur le ministre, vous l'avez reconnu lors de nos débats, vos services vous ont indiqué que les résultats de ce type de structures en France étaient loin d'avoir atteint les objectifs fixés, et c'est un euphémisme dans le secteur bétail et viande. Si je comprends parfaitement que vous ne souhaitiez pas en faire un modèle, je comprends encore moins que vous mainteniez l'approche de l'article 8…

La LMA doit s'appuyer sur des critères objectifs, connus et déterminés préalablement pour éviter tout sectarisme et orientation des bilans devant être réalisés et dont aucune modalité n'a été définie à ce jour. À ce titre, il n'est pas acceptable que le bilan sur l'organisation des producteurs ne puisse se traduire que par la disparition possible des OPNC par simple décret et suite à une instruction uniquement à charge d'un des modes d'organisation de la commercialisation.

Enfin, monsieur le ministre, je dois vous faire part de mes profondes inquiétudes sur les dérives administratives que va amener la loi : des papiers, des papiers et encore des papiers ! Des papiers pour passer des contrats, d'autres papiers pour justifier que l'on a bien essayé de passer des contrats ; et des contrôles et encore des contrôles…

Dans tout cela, qui va vérifier, arbitrer, sanctionner ? Allez-vous doubler, tripler les services juridiques du ministère ou encore charger la barque d'une interprofession qui serait, en plus, juge et partie, et dont ce n'est surtout pas le rôle ?

Monsieur le ministre, vous vous êtes défendu d'être le ministre qui aura soviétisé l'agriculture. Je veux bien l'entendre, mais, au regard de l'obligation de contrat écrit et de l'avantage accordé aux organisations avec transfert de propriété, ça va finir quand même par y ressembler. Disons-le tout net : ce n'est pas ce que nous attendions de ce Gouvernement, des promesses énoncées et des valeurs que nous croyions partagées : celles du travail, de la liberté du commerce et d'une compétitivité issue d'une concurrence loyale et juste.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 et 577 .

Je suppose, monsieur Auclair, que vous avez défendu votre amendement de suppression ?

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. André Chassaigne, pour présenter l'amendement n° 3 .

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

L'intervention de M. Auclair correspond tout à fait à la question qui se pose aujourd'hui.

D'une façon générale, on retrouve dans cet article 8 une des lignes directrices de votre projet de loi : essayer de trouver des outils, quels qu'ils soient, pour résoudre la question des prix et de l'organisation des marchés. Partant de là, vous présentez ce qui vous paraît être des éléments de solution, à commencer par la remise en cause des organisations de producteurs à vos yeux trop petites – et, en sous-entendu, sans le désigner explicitement, du négoce privé qui travaille avec les producteurs agricoles de notre pays.

Un pays comme le nôtre, monsieur le ministre, a une histoire marquée par des évolutions territoriales et par les liens qui ont pu se créer entre les producteurs, générations après générations, et négociants privés. Dans certains endroits, on trouve de grosses coopératives, qui parfois ont pu perdre leur âme en grandissant. Dans d'autres endroits, ainsi dans le Cantal, vingt ou trente producteurs laitiers sont associés et négocient le prix de leur lait, ont pu contractualiser et vendre ainsi leur lait à un prix peut-être supérieur à ce qu'aurait un producteur de lait isolé. Ailleurs, dans l'Allier par exemple, des organisations de producteurs de races à viande notamment, ont opté pour des négociations et des ventes groupées. Dans d'autres territoires du Massif Central, des négociants traitent directement avec un paysan ; le paysan fait quelquefois appel à un négociant, à moins qu'il ne traite dans le cadre d'une filière qualité.

Il y a là une richesse, une diversité et un héritage qu'il ne faut pas casser. Or derrière ce texte de loi se cache une volonté de tout uniformiser, partant du principe que le remède miracle serait dans les grandes organisations de producteurs ; elles seules seraient capables de garantir des prix plus intéressants et d'améliorer la rémunération des agriculteurs.

Ce raisonnement peut être par moments valable – mon propos ne se veut pas manichéen – mais je crois qu'il n'y a là-dedans rien de mécanique. Au final, j'y vois une forme sinon de lâcheté, en tout cas de capitulation devant les schémas d'organisation créés par la loi de modernisation de l'économie. En cassant la négociation telle qu'elle existait auparavant, tout le pouvoir a été donné à la grande distribution ; et comme vous ne voulez pas vous attaquer à cette toute-puissance, vous croyez pouvoir rétablir l'équilibre grâce à quelques grands majors jugés plus capable de répondre aux demandes de producteurs. Je pense que c'est une erreur. Il faut rééquilibrer les choses, remettre en cause la loi de modernisation de l'économie et s'attaquer à tous ses effets pervers que nous connaissons parfaitement, pour avoir suivi les nombreuses auditions organisées par les présidents de commission de la commission du développement durable ou de la commission des affaires économiques. Attaquons-nous à cette perversité, attaquons-nous notamment aux grands ténors de la grande distribution. Regardons dans le CAC 40 où sont ceux qui accumulent le plus de profit. Regardons chez quels grands patrons, quels grands chefs d'entreprise on trouve les plus grands profits, les salaires les plus élevés. Mais si nous tapons sur le tissu rural, dans sa richesse et sa diversité, tel qu'il a pu se constituer au fil des générations, on obtiendra des effets plus négatifs que positifs. Voilà pourquoi je propose la suppression de l'article 8.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l'avis de la commission sur ces deux amendements de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Avis défavorable, mais j'aimerais clarifier les choses sur la commercialisation des produits agricoles. On a parlé unification pour tout ce qui était biologique, circuit court ou vente directe : c'est une partie de la commercialisation qui est ainsi confortée dans la loi, et qui n'est absolument pas remise en cause. La diversité est encouragée. Mais on aurait tort de s'égarer dans le débat sur la vente directe ou les circuits courts en oubliant comment se vend la grosse masse de la production Il faut savoir comment s'attaquer à la grande distribution. Il faudra certainement modifier la LME. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Sans doute devrons-nous édicter d'autres règles.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Mais nous aurions tort de venir en ordre dispersé face à la grande distribution, comme de chercher à l'écarter de la commercialisation des produits de masse. C'est aussi l'objectif de ce projet de loi.

Je tiens également à rassurer Jean Auclair : il n'est pas question, dans l'article 8, de remettre en cause cette diversité de commercialisation pour peu que les revenus soient assurés aux producteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

Je ferai, comme le rapporteur, un certain nombre de commentaires.

Je répondrai tout d'abord à Jean Auclair avec beaucoup de fermeté que le ministre n'est sous la pression de personne, que ce soit les coopératives, les syndicats ou les entreprises privées. Le ministre sert l'intérêt général. Et il se veut par ailleurs un esprit indépendant – je vous le précise au cas où vous ne l'auriez pas encore remarqué.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Cette mise au point étant faite, je tiens à préciser que tout l'esprit de ce projet est de maintenir la diversité de l'agriculture française, comme l'a parfaitement expliqué le rapporteur.

Nous essayons de donner de la force économique à notre agriculture, en développant parallèlement les circuits courts, le biologique et la valorisation des produits.

Nous tentons d'améliorer le fonctionnement des organisations de producteurs commerciales. Je suis suffisamment au contact de l'agriculture pour savoir ce qui se passe réellement sur le terrain. Les discussions que j'ai eues m'ont amené à ne pas supprimer les organisations de producteurs non commerciales, contrairement à d'autres pays tels que le Danemark auquel je me suis référé – et non l'Allemagne, comme vous l'avez dit. Nous maintenons les organisations de producteurs non commerciales et nous en dresserons un bilan économique. Vous souhaitez que ce bilan soit individuel ; je m'engage effectivement à ce que l'on ne se contente pas de faire un bilan par grande filière, mais que l'on sache, en se rendant sur le terrain, si des organisations de producteurs non commerciales très spécifiques – dans votre région ou ailleurs – parviennent à proposer des prix décents pour les producteurs parce qu'elles valorisent leurs bestiaux mieux que d'autres ou s'organisent d'une certaine façon. Dans ce cas, il n'y a bien entendu aucune raison de les supprimer. Je vous rassure sur ce point.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Sur l'une comme sur l'autre de ces deux formes d'organisation de producteurs, nous ne ferons pas une analyse à la serpe, mais une analyse très précise. C'est essentiel.

Oui, monsieur Chassaigne, un rééquilibrage est nécessaire. Je n'anticiperai pas la discussion que nous aurons tout à l'heure sur la filière porcine, mais il est essentiel que nous comprenions très vite les raisons pour lesquelles les agriculteurs français rencontrent des difficultés. Nous avons, à leur égard, un devoir de vérité et de lucidité. Il ne faut pas se payer de mots, mais connaître le mieux possible la réalité économique et ce que vivent les producteurs ou les éleveurs de porcs. Il existe effectivement cinq centrales d'achats face auxquelles des producteurs ne sont pas suffisamment organisés – et cela vaut pour toutes les filières.

Je vous recommande la lecture d'une étude remarquable faite par Agreste Conjoncture. Cet organisme, indépendant dans ses analyses, essaie de comprendre pourquoi la production de porcs a baissé en France depuis 2001 alors qu'elle a explosé en Allemagne, et de mesurer les écarts de compétitivité entre les deux pays. Dans les explications figurent évidemment le coût des intrants de l'alimentation et l'abattage, dont j'ai suffisamment parlé hier. Mais je ne résiste pas à la tentation de reprendre la dernière phrase du dernier paragraphe de cette analyse : la concentration des groupements d'éleveurs et de producteurs n'a pas encore abouti, malgré la diminution de moitié du nombre de groupements, et interdit aux éleveurs de peser suffisamment sur les prix à la hausse. C'est une réalité à laquelle nous voulons remédier. Nous pouvons le faire de deux façons : la première, quelque peu technocratique, consisterait à tout concentrer et à décider, par la loi, de ne reconnaître que les organisations de producteurs commerciales et, donc, à contraindre tout le monde à se regrouper. Ce n'est pas la voie que nous avons suivie, même si nous avons envisagé cette hypothèse, je le reconnais. La seconde solution, plus pragmatique, serait d'aller au plus près du terrain pour savoir ce qui marche et ce qui ne marche pas et d'en tirer les conséquences, donc d'inciter au regroupement, là où c'est possible, car ce n'est pas forcément pertinent partout. Nous tirerons, une fois encore, un bilan très précis des analyses auxquelles nous procéderons. Nous avons retenu une approche pragmatique, mais on ne peut pas, sous prétexte de ne pas accepter telle ou telle solution, refuser toute évolution.

Je demande donc que cet article soit maintenu.

(Les amendements identiques nos 3 et 577 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 955 .

La parole est à Mme Corinne Erhel.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

L'article 8 précise qu'un décret définira les conditions dans lesquelles l'activité d'une organisation de producteurs sera reconnue comme étant suffisante. Nous considérons pour notre part qu'il incombe au législateur de préciser quelle doit être la taille minimale d'une organisation de producteurs pour leur donner un poids suffisant sur les marchés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Avis défavorable : alors que venons d'avoir un débat sur la souplesse de la reconnaissance des organisations de producteurs, cet amendement contraindrait au transfert de propriété – j'espère que Jean Auclair m'écoute attentivement.

De plus, pourquoi exiger que, pour être reconnues, les organisations de producteurs doivent regrouper plus de vingt producteurs ? Non seulement des critères sont prévus dans le texte, mais il y a tout lieu de conserver une certaine souplesse en fonction des situations, des régions et des productions.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable.

(L'amendement n° 955 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 124 .

La parole est à M. Germinal Peiro.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Le troisième alinéa de l'article L. 551-2 du code rural et de la pêche maritime dispose qu'une organisation de producteurs adhère à une association d'organisations de producteurs pour un produit, un groupe de produits, une catégorie de produits. Il nous paraît opportun que cette adhésion puisse aussi se faire sur la base d'une zone de production ou d'un grand bassin de production, qui constituent un échelon territorial pertinent pour le fonctionnement d'une association d'organisations de producteurs.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Dans la mesure où cet amendement est satisfait, avis défavorable.

(L'amendement n° 124 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement de coordination, n° 1266, présenté par la commission.

(L'amendement n° 1266 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'amendement n° 1267 de la commission est également de coordination.

(L'amendement n° 1267 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 295 .

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Cet amendement prévoit que le bilan doit notamment prendre en compte l'objectif de l'article 33 du Traité de Rome : assurer un niveau de vie équitable à la population agricole. On retrouve le débat sur la vente à perte et l'évolution de la rémunération du producteur.

Il prévoit ensuite que ce bilan doit analyser les moyens mis en oeuvre par l'OCM fruits et légumes dans l'objectif visé.

Nous avons une agriculture à deux vitesses : une agriculture qui s'exerce dans le cadre de la PAC et globalement soutenue par elle, et une agriculture qui n'en bénéficie pas. C'est le cas notamment des fruits et légumes. Cette agriculture hors PAC mériterait un coup de projecteur : elle est concernée au premier chef par tous les problèmes de compétitivité, notamment intra-européens, sur lesquels nous reviendrons longuement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Défavorable. Le premier alinéa est satisfait et le second peut être considéré comme hors sujet.

(L'amendement n° 295 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'amendement n° 1268 de la commission est de coordination.

(L'amendement n° 1268 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 1206 .

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

L'amendement est défendu.

(L'amendement n° 1206 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 395 rectifié .

La parole est à M. Jean Auclair.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Auclair

Excusez-moi de revenir encore sur ce problème, monsieur le ministre, mais vous ne m'avez pas répondu tout à l'heure.

Tous les producteurs doivent être traités de la même manière, qu'ils soient en OPC ou en OPNC. Y aura-t-il des éleveurs à deux vitesses selon qu'ils sont dans une OP reconnue ou dans une OP non reconnue, qu'elle soit OPC ou OPNC ? L'OPC va être systématiquement reconnue. Vous avez parlé tout à l'heure d'un bilan pour les OPNC, vous n'avez pas précisé qu'il y en aura aussi un pour les OPC, structure par structure.

Ce bilan devra prendre en considération un élément essentiel, le prix versé aux éleveurs, mais également prendre en considération les fameux 2,5 milliards d'aides dont je vous ai parlé – le chiffre est à vérifier –, qui vont directement aux structures concernées et non dans la poche des éleveurs. Il faut impérativement clarifier tout cela.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Défavorable parce que cet amendement est déjà satisfait : le bilan concerne bien toutes les organisations de producteurs.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable. Le bilan, monsieur Auclair, concernera les organisations de producteurs commerciales et non commerciales, et ce sera un bilan structure par structure et non pas grande filière par grande filière, parce qu'il faut effectivement regarder à la sortie quel est le prix payé au producteur. Tel est bien notre objectif : améliorer le revenu des paysans.

(L'amendement n° 395 rectifié n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 335 .

La parole est à M. Lionel Tardy.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

La reconnaissance d'une organisation de producteurs et surtout sa non-reconnaissance doivent se faire au cas par cas après étude de son efficacité économique. Les situations sont si différentes entre les filières, voire entre les modes de production au sein d'une même filière, qu'il faut faire dans la dentelle si l'on veut être juste.

(L'amendement n° 335 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'amendement n° 1269 de la commission est de précision.

(L'amendement n° 1269 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 322 .

La parole est à M. Daniel Fasquelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Fasquelle

L'article 8 du projet de LMA prévoit qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis du Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire, pourra écarter, de façon générale ou pour certains secteurs, la reconnaissance d'organisations de producteurs non commerciales.

Or la suppression pure et simple des organisations de producteurs non commerciales couplée à celle des comités économiques agricoles aura nécessairement des conséquences préjudiciables sur certaines filières : ainsi en est-il celle des plants de pomme de terre, que je connais bien dans la région Nord-Pas-de-Calais, dont l'organisation est particulièrement satisfaisante sur le plan national, en l'absence de toute organisation commune de marché la concernant.

(L'amendement n° 322 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 641 .

La parole est à M. Louis Cosyns.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Cosyns

L'amendement est défendu.

(L'amendement n° 641 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 399 .

La parole est à M. Jean Auclair.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Auclair

L'amendement est défendu.

(L'amendement n° 399 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 588 .

La parole est à M. André Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je voudrais revenir sur le contenu de cet article, parce des amendements venant de divers bancs – parfois du groupe socialiste – étaient en totale opposition avec les arguments que j'ai développés dans mon intervention pour essayer d'expliquer pourquoi j'en demandais la suppression.

Il est question d'un décret qui déterminerait les critères de reconnaissance permettant d'apprécier si l'activité d'une organisation de producteurs peut être considérée comme suffisante. Il est aussi question, dans l'alinéa 4, d'un bilan de l'organisation économique et de la sécurité juridique vis-à-vis des règles de concurrence et, dans l'alinéa 5, de la possibilité d'écarter certaines organisations de producteurs si elles ne sont pas suffisamment efficientes.

Certains amendements auraient durci cet article, notamment celui qui exigeait un minimum de vingt producteurs pour mettre en place une organisation de producteurs. Une telle rédaction aurait deux conséquences.

La première serait que l'on n'attribue pas d'aides nationales ou communautaires à des producteurs non regroupés dans une organisation de producteurs, qui seraient donc considérés comme étant un peu en dehors du circuit économique, ce qui reviendrait à écarter des petits producteurs qui voudraient rester indépendants. Le risque est réel, et grave.

La seconde, et c'est l'objet de mon amendement n° 588 , serait de voir des petits producteurs, considérés comme insuffisamment rentables, un peu en dehors du schéma de performance que l'on se croit en droit exiger de l'agriculture aujourd'hui, courir le risque d'être refusés par une organisation de producteurs et donc totalement écartés du milieu économique. Ne peut-on prévoir que tous les producteurs qui en font la demande, quelles que soient leurs contraintes économiques, géographiques, appartiennent de plein droit à l'organisation de producteurs de leur choix ?

Enfin, nous avons parlé cette nuit des sensibilités syndicales : il est permis de penser que, dans certains territoires, des paysans jugés quelque peu marginaux soient écartés pour des raisons liées à l'intérêt économique de leur exploitation, mais aussi des sensibilités dont ils auraient fait état.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable. Soyons bien clairs, monsieur Chassaigne : le producteur a totale liberté pour choisir son organisation de producteurs, et une organisation de producteurs ne peut refuser un producteur.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je vous remercie, monsieur le ministre, de m'apporter une réponse claire et précise. Cela n'a pas été le cas du rapporteur mais il est vrai que c'est plus dans votre rôle. Dans la mesure où j'ai eu une réponse sans ambiguïté, je retire bien évidemment mon amendement.

(L'amendement n° 588 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi de deux amendements, nos 613 et 923 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour défendre l'amendement n° 613 .

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

La création d'un fonds de mutualisation permettant de financer des mesures de prévention et de gestion des aléas économiques répond à une double exigence, économique et sociale. C'est un outil d'aide à la décision des exploitations ; c'est également un outil supplémentaire de consolidation du secteur de la production agricole.

Monsieur le ministre, vous avez expliqué en commission que l'adoption de cet amendement compliquerait vos négociations dans la mesure où la création d'un tel fonds n'est pas possible au regard des règles communautaires.

Nous parlerons tout à l'heure, en examinant un amendement soutenu par M. Le Fur, sur la nécessité d'une harmonisation européenne, notamment sur les seuils d'autorisation pour la création d'élevages. Mais pour l'instant, c'est sur la création d'un fonds de mutualisation que nous souhaiterions connaître votre position. C'est un outil positif très attendu par les agriculteurs. La prise en charge et la prévention des aléas économiques sont une condition indispensable à la survie des exploitations agricoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à le M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement n° 923 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous avons tous le sentiment que, dans le marché de l'agriculture et de l'agroalimentaire, il faut renforcer l'amont par rapport à l'aval, faire en sorte que les producteurs ne soient pas défavorisés.

Il existe déjà des organisations de producteurs. Donnons-leur les moyens de se fédérer, pour peser sur le marché. Le marché doit être respecté. On ne peut pas y échapper, nous le savons, quelles que soient nos sensibilités. Encore faut-il pouvoir le réguler d'une manière ou d'une autre.

C'est la raison pour laquelle je propose que les organisations de producteurs puissent se regrouper sous forme d'associations d'organisations de producteurs, que ce regroupement ne donne pas lieu à un transfert de propriété mais permette de réaliser un certain nombre de choses, dont la mutualisation.

Contrairement à ce que l'on s'imagine, nos organisations de producteurs sont chez nous de petite taille par comparaison avec leurs homologues européennes. Au Danemark, vous avez une organisation de producteurs par filière : ils n'ont donc pas besoin de se regrouper. Nous, nous en avons besoin.

Je comprends bien, monsieur le ministre, que vous devez respecter la contrainte européenne, mais il faut faire le maximum. Nous devons progresser dans ce sens, de façon à fédérer les énergies, sans nécessairement obliger les organisations de producteurs à fusionner mais en leur permettant au moins de travailler ensemble.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

C'est un sujet extrêmement important. Je suis défavorable aux amendements tels qu'ils sont rédigés, mais j'approuve tout à fait ce qui est proposé, car nous avons besoin de fonds de mutualisation. L'objectif de cette loi – car il y a des objectifs politiques derrière, ce n'est pas, comme je l'ai entendu dire, une simple boîte à outils, mais une véritable construction politique – est de responsabiliser les producteurs et de leur donner les moyens de faire face aux crises par eux-mêmes, avec des subventions de l'État et de la Commission européenne, bien sûr, mais davantage par eux-mêmes, pour qu'ils ne se retrouvent plus dans des situations intenables.

Le fonds de mutualisation est une bonne réponse à cette problématique et je suis persuadé que de telles structures sont appelées à se développer. Malheureusement – vous allez me trouver un peu répétitif –, cette formule se heurte à des contraintes communautaires strictes. Nous ne pouvons créer des fonds de mutualisation pour gérer les risques économiques ; c'est rigoureusement interdit. Le texte communautaire – je vous en épargne la lecture fastidieuse – est très explicite sur ce point.

Nous pouvons cependant essayer de mettre le pied dans la porte, en offrant la capacité de se réunir, en créant ces fonds de mutualisation, mais uniquement pour adapter la production au marché, ce qui n'est pas assimilable au financement de mesures de prévention, action totalement anticommunautaire.

Je vous propose donc de rectifier vos amendements en réécrivant ainsi leur troisième alinéa : « Les associations d'organisations de producteurs ont compétence pour mettre en oeuvre les mesures d'adaptation de la production au marché. » Avec cette rédaction, nous restons dans le cadre communautaire, nous allons le plus loin que nous pouvons tout en mettant le pied dans la porte sur le sujet des fonds de mutualisation.

Cela permettrait également d'associer les auteurs des deux amendements, puisqu'ils partagent la même philosophie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Un point de procédure, monsieur le président : si je comprends bien, l'amendement n° 923 , originellement après l'article 8, est désormais rattaché à l'article 8 et discuté avec l'amendement n° 613 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Soit. L'essentiel, c'est que nous nous y retrouvions…

Sur le fond, monsieur le ministre, nous notons l'avancée que vous proposez. Il faut, comme je le répète souvent, autoriser la possibilité de regrouper l'offre. Marc Le Fur a évoqué la situation au Danemark et aux Pays-Bas. Dans ce dernier pays, 60 % à 70 % de l'offre de lait est regroupée dans les mains d'un même opérateur. Au Danemark, c'est le cas de plus de 80 % de la production porcine. L'étonnant, c'est que l'Union européenne n'y ait jamais rien trouvé à redire ! Nous devons donc nous y mettre nous aussi. D'autant plus que nous connaissons chez nous un phénomène particulier : la concentration de la demande. Nous ne pouvons pas nous permettre une offre aussi éclatée face à une demande aussi resserrée et concentrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Monsieur Le Fur, acceptez-vous la proposition de rectification du ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Tout à fait, monsieur le président. Nous progressons très sensiblement, car des organisations de producteurs pourront désormais se fédérer. Je sais que nous devons tangenter la réglementation communautaire et, en l'espèce, il me semble que le Gouvernement va au maximum de ce qui est possible au regard de ces règles. Je connais par ailleurs les efforts qu'il déploie pour les faire évoluer.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Oui, monsieur le président. Mon amendement n° 614 n'aura ainsi plus lieu d'être. Je le retire.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Nous passons au vote sur les amendements, devenus nos 613 rectifié et 923 deuxième rectification.

(Les amendements nos 613 rectifié et 923 deuxième rectification, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L'article 8, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Jean Lassalle, inscrit sur l'article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Lassalle

Monsieur le président, ce sera ma dernière intervention car, malheureusement, aux termes du règlement, je ne disposerai plus d'aucun temps de parole. Je me suis pourtant impliqué dans cette loi qui me tient très à coeur, comme je l'ai rappelé dans la discussion générale – M. le ministre peut en attester. Comme je ne prendrai plus la parole, j'espère au moins que l'on me laissera aller au bout de mon propos, même si je viens à déborder de trente secondes…

L'histoire de France m'a appris que les députés – c'est ce qui faisait pour moi la grandeur de l'Assemblée nationale et m'a tant donné envie d'y siéger – représentent la nation, et qu'un député est égal à un autre. Il n'était pas imaginable pour moi qu'un député ne puisse s'exprimer et défendre des amendements au prétexte qu'il appartient à un groupe peu nombreux. Si l'on disait cela à l'opinion publique, personne d'ailleurs ne voudrait le croire.

Je vous demande, quant à moi, de me croire quand je vous dis que je me suis beaucoup impliqué dans la préparation de ce texte. J'ai organisé dix réunions avec les agriculteurs dans ma circonscription et visité autant d'exploitations agricoles. J'avais prévu de défendre six amendements, aux articles 10, 11, 12, 13 et 14. Comme je ne veux pas connaître la même humiliation que celle que j'ai subie dans la discussion de la loi sur les collectivités territoriales, où il m'a été signifié abruptement que mon temps de parole était écoulé et où j'ai dû partir, je préfère en parler avant d'être de nouveau exposé à de tels procédés.

Monsieur le président, vous n'y êtes pour rien, ni la présidence, non plus que le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Lassalle

M. le président Ollier, avec qui j'ai eu un entretien sur le sujet, n'y est pour rien non plus. Je n'en ai après personne. Je pense simplement que l'ensemble des présidents de groupe et des députés doivent prendre conscience du problème. Sans avoir la folie des grandeurs – je ne me compare à personne –, imaginez que, dans cet hémicycle, on ait empêché de parler Clemenceau ou Mitterrand, qui ont appartenu tous deux à des groupes de deux ou trois personnes. Cela se passe de commentaire.

J'en viens au fond. Sur la gestion des risques, un énorme travail a été accompli et vos propositions, monsieur le ministre, me paraissent aller dans le bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Lassalle

Nous ne pouvons rester sans rien faire devant les situations de désarroi total que connaissent les agriculteurs, de plus en plus souvent frappés, de manière irréparable, par les éléments ou la nature.

Je ne rappellerai que deux ou trois de mes amendements. Il faut tout d'abord impérativement trouver des solutions à la pénurie sans précédent de travailleurs agricoles. Les exploitations, notamment familiales, ne peuvent plus fonctionner avec un homme seul, qui aligne les journées de travail de dix, dix-huit ou vingt heures sans même gagner le SMIC. C'est le cas de mon frère, qui travaille avec ma mère, âgée de soixante-quinze ans. Ce n'est pas qu'il manque de connaissances ni de compétences – il est président de l'AOC Ossau-Iraty et exerce des responsabilités au niveau national –, mais il ne gagne pas le SMIC. Comment voulez-vous qu'il puisse recruter quelqu'un ? Même s'il trouvait à recruter quelqu'un, son employé n'y connaîtrait rien au métier, et s'il pouvait le former, il serait obligé de s'en séparer au bout de trois mois car il ne pourrait plus la payer.

Un autre de mes amendements concernait le revenu de solidarité active. Je suis très impressionné de voir que 75 000 ressortissants du monde agricole perçoivent actuellement le RSA, et qu'ils seront bientôt 95 000. À côté des salariés, il y a aussi 20 000 exploitants. J'ai demandé à M. le président Ollier, qui m'avait invité à en parler à la commission, s'il n'y avait pas moyen d'adapter le RSA pour que des agriculteurs qui ont perdu l'an dernier 29 %, 37 % – et même 52 %, avez-vous dit, monsieur le ministre – de leurs revenus puissent employer quelqu'un qui devienne un jour leur associé ou leur successeur.

La reprise des exploitations agricoles est pour moi une affaire très importante : il y va de l'avenir même de l'agriculture. Aujourd'hui, quelqu'un qui travaille sur une ferme ne peut plus se rendre aux réunions syndicales, il n'a plus de samedis, plus de dimanches. Comment voulez-vous qu'une compagne ou un compagnon reste toute une vie avec quelqu'un qui se trouve dans une telle situation ?

Un énorme travail est à mener également sur l'installation et la transmission des exploitations agricoles. Ce sera la dernière génération à s'installer normalement. Après, il faudra, comme nous le faisons déjà pour les médecins ou d'autres métiers beaucoup plus cotés dans la société que les professions agricoles, aller chercher des candidats en Roumanie… C'est aujourd'hui la dernière génération qui peut s'installer. Vous imaginez cela, dans un pays comme la France !

Enfin, j'aurais voulu dire, à l'article 13, que j'étais totalement d'accord avec une taxe sur les terrains vendus. C'est un drame de perdre autant de terrain à cause de l'urbanisation. Ce problème dépasse le seul domaine de l'agriculture et par là même vos compétences propres, monsieur le ministre ; c'est un vrai problème de société. Nous vivons trop empilés et nous consommons beaucoup trop de terres agricoles.

Une étude montre que si nous allons perdre 30 % de ces terres, nous sommes d'un autre côté en train d'en classer 30 % en parcs nationaux et réserves naturelles. Sur ces terres, il y a des paysans, qui doivent produire. Les règles qu'on leur impose désormais auront ce résultat qu'ils ne produiront plus et n'entretiendront plus les territoires, comme ils le faisaient autrefois, en biens communs, cette notion qui a fondé notre État, notre République. C'est pourquoi il faut imaginer aussi une taxe à la charge de l'État chaque fois qu'il prendra des terrains aux fins de les classer de manière totalement surréaliste.

Voilà ce que j'avais à dire. Je ne tiens pas à me retrouver – ni à vous mettre – dans la même position que l'autre jour. Je n'ai plus de temps de parole, Daniel Garrigue doit également s'exprimer. Je ne veux pas que soient humiliés, à travers moi, mes électeurs qui croient avoir un député capable s'exprimer comme les autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Merci, monsieur Lassalle. Nous vous avons entendu.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 578 .

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Nous ne sommes pas opposés à la mise en place d'un fonds de mutualisation visant à indemniser les « pertes économiques liées à un événement sanitaire, phytosanitaire ou environnemental ». Au contraire, nous pensons qu'il y a urgence, eu égard aux dommages causés aux exploitations par les calamités agricoles.

Cet amendement est toutefois une question de principe, car nous sommes opposés à l'intervention des assurances privées. Ce n'est pas à elles de porter ce type de fonds de mutualisation, d'autant moins que, s'il y a comme d'habitude privatisation des gains – sans espoir de gains, jamais les assurances privées ne viendront pas sur ce marché –, il y aura éventuellement socialisation des pertes. Il est même envisagé de financer une assurance des assurances avec des fonds publics en cas de difficultés… L'alinéa 14 prévoit d'ailleurs « une subvention au budget de l'État » qui fera partie des recettes.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Tout à fait.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Par ailleurs, l'article 9 pose un problème de fond, dans la mesure où ceux qui auront les moyens d'anticiper des dommages éventuels, se retrouveront à bénéficier indirectement d'une subvention publique. Il y a là une distorsion problématique entre ceux qui pourront bénéficier d'aides publiques parce qu'ils auront fait le choix de s'assurer, et les autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Avis défavorable. Je rappelle que l'actuel fonds calamités est financé à 50 % par des fonds privés, c'est-à-dire par les cotisations des assurés, et que l'assurance privée que vous évoquez est financée à 65 % par des fonds publics. Ne mélangeons pas tout…

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Avis défavorable. Je note l'évolution de l'argumentation de M. Chassaigne qui, par honnêteté intellectuelle, a reconnu qu'il n'y a pas de désengagement de l'État. C'est un point très important que tous les paysans doivent bien comprendre : on réorganise la gestion du risque, on la renforce, sans désengagement de l'État. Je rappelle que les moyens supplémentaires prévus pour l'assurance récolte représentent près de 100 millions d'euros, et que le taux de prise en charge par l'assurance est de 65 %. Nous allons créer des fonds de mutualisation pour les risques sanitaires et environnementaux – ils ne sont pas possibles pour les risques économiques –, cependant que l'ancien fonds national de garantie des calamités agricoles est maintenu tel quel. C'est une vraie avancée.

(L'amendement n° 578 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 291 .

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

L'article 9 est clairement le plus structurel du projet de loi. J'ai eu à reprendre l'exploitation familiale, et je me rappelle cet été 1990, où un coup de vent a mis 600 tonnes de poires par terre en un quart d'heure, et ce mois d'avril 1991 où un gel décennal a détruit la totalité de production fruitière sur l'ensemble du Sud-Ouest. Ni les dégâts du vent ni les dégâts du gel n'étaient assurés. Il s'agit donc vraiment d'une réforme structurelle que je salue.

Mais ceux qui ont bien étudié la question savent que, avant les arbitrages définitifs – notamment au sein de la FNSEA –, le caractère obligatoire de l'assurance a été âprement discuté. Même dans mon département, cette question demeure très débattue. Je suis pour ma part favorable au caractère obligatoire de l'assurance, et c'est l'objet de mon amendement. Je connais les arguments contre : il faudrait qu'un tiers soit concerné, le caractère obligatoire atténuerait l'esprit de responsabilité des agriculteurs et serait contradictoire avec les subventions européennes. Mais cela ne me convainc pas. Si nous voulons vraiment aller au bout de cette réelle avancée, si nous voulons que cette loi soit significative, il faut que l'ensemble des agriculteurs rejoigne ce nouveau régime assuranciel. Or en le maintenant facultatif, je crains, monsieur le ministre, que vous soyez très déçu par le faible nombre d'agriculteurs qui adhéreront à votre système, et ce pour deux raisons.

Tout d'abord, nombre d'agriculteurs sont quasiment à l'euro près, dans des situations extrêmement fragiles. Je suis sûr que beaucoup ne prendront pas une nouvelle police d'assurance qui représenterait 11 % du total de leurs frais d'assurance, même si le taux de subvention est important.

Ensuite, le caractère obligatoire permettrait une réelle péréquation entre les zones à aléas, notamment climatiques, fort, et les zones à aléas faibles. Or il y a toujours cette vieille cassure Nord-Sud : les aléas se concentrent au Sud. Mais le voulons-nous ? Je le répète : s'il n'y a pas obligation de cotiser, le taux d'adhésion sera très faible. Malgré les arbitrages nationaux, beaucoup de gens sont favorables au caractère obligatoire. L'assiette serait ainsi très large et, couplée avec un taux de subvention important, la cotisation ne serait pas bien chère. Cette très bonne réforme irait alors jusqu'à son terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Mon cher collègue, vous n'avez pas défendu votre amendement, mais le principe de l'assurance obligatoire. Votre amendement parle de la contribution au fonds, qui est déjà obligatoire. Autrement dit, il est satisfait.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Monsieur Dionis du Séjour, retirez-vous votre amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Je le retire, monsieur le président.

(L'amendement n° 291 est retiré.)

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable. Je ne veux pas que nous passions totalement à côté de ce que nous voulons faire et que l'on me fasse le reproche de proposer une loi qui ne correspond pas aux attentes des agriculteurs. Je suis intimement convaincu qu'elle répondra à leurs attentes et qu'elle permettra de changer les choses dans le bon sens. Quels sont les dispositifs à notre disposition aujourd'hui pour faire face aux risques ? Le FNGCA, plus un peu d'assurance – je ne reviens pas sur les chiffres, mais vous savez qu'elle est très peu développée en France –, un point c'est tout. Moyennant quoi, quand il y a une calamité agricole, un risque sanitaire, un problème environnemental, il n'y a pas de solution. Nous nous trouvons dans la situation absurde où il y a de plus en plus de risques, de plus en plus de calamités agricoles, de plus en plus de problèmes environnementaux et sanitaires, et de moins en moins d'instruments de couverture des risques. On ne peut pas en rester là.

C'est pourquoi l'article 9 refonde totalement la couverture des risques dans l'agriculture en offrant la possibilité aux agriculteurs de se couvrir enfin contre des risques de plus en plus importants. Nous maintenons le FNGCA pour les calamités agricoles classiques – avec un financement par contributions obligatoires, monsieur Jean Dionis du séjour. Il est aujourd'hui financé à hauteur de 90 millions d'euros par l'État et pour un montant équivalent par des cotisations obligatoires des agriculteurs. En complément, nous créons des fonds de mutualisation contre les risques sanitaires d'une part, et contre les risques environnementaux d'autre part. Pour amorcer la pompe, l'État va mettre 40 millions d'euros dans ces deux fonds. C'est bien la preuve, monsieur Chassaigne, mais vous l'avez reconnu, qu'il n'y a pas de désengagement de l'État. Le principe des fonds de mutualisation, c'est bien que l'État mette, lui aussi, la main à la pâte.

Précisons que le but n'est pas de laisser les agriculteurs tout seuls. Dans le cadre de ces fonds de mutualisation, ils vont se regrouper, et bénéficieront en contrepartie du soutien de l'État et de l'Union européenne. C'est tout à fait nouveau puisqu'il y aura, pour la première fois, une couverture des risques sanitaires et environnementaux par des fonds de mutualisation, c'est-à-dire des moyens modernes et efficaces.

Troisième élément de la couverture du risque : l'assurance. Nous portons le taux de subvention à 65 %, ce qui fait passer la contribution en année pleine de l'État et de l'Union européenne de 30 millions d'euros à 133 millions d'euros. Loin d'être un désengagement de l'État, c'est au contraire une façon d'amorcer la pompe pour développer l'assurance et permettre aux agriculteurs d'être mieux couverts face aux risques.

Je le dis avec solennité parce que ce sujet me tient à coeur : le régime de couverture des risques pour les agriculteurs est actuellement indigent, insuffisant, lacunaire et inefficace. Quand la loi sera votée, il y aura un système de couverture à la fois global et efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(L'amendement n° 290 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un nos 579.

La parole est àM. André Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Monsieur le président, puis-je présenter en même temps l'amendement n° 580 puisqu'ils sont de même nature ?

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Une caisse mutuelle devrait avoir quatre fondements.

Le premier, c'est la solidarité : solidarité entre les filières de production, solidarité entre les types d'exploitation. Les participations pourraient donc être différentielles pour prendre en compte les agriculteurs dont a parlé Jean Dionis du Séjour, ceux qui sont dans les pires difficultés, ceux qui sont à un euro près.

Le deuxième pilier, c'est la péréquation : péréquation sociale, mais aussi péréquation territoriale pour établir un équilibre sur l'ensemble du territoire. Il s'agit de tenir compte de la diversité des productions et des handicaps parfois très lourds dans certaines zones – les zones de montagne notamment.

Troisième pilier : l'élargissement de l'assiette. Je suis favorable à une caisse mutuelle de couverture qui serait élargie à la forêt et à la pêche. Souvenons-nous de la tempête dans les Landes : il y avait une forte demande de la part des petits propriétaires pour une couverture mutuelle abordable, qui n'existe pas actuellement. Une telle caisse couvrirait donc tous les secteurs relevant de votre compétence, monsieur le ministre.

Quatrième pilier : l'élargissement de la contribution. C'est l'objet de mes deux amendements. Une filière agricole touche tous les niveaux, mais certains ne sont pas concernés par la contribution : vous avez rappelé que l'État mettait la main à la pâte, et bien évidemment ceux qui s'assurent, d'autres secteurs devraient participer – c'est toute la question du partage des richesses dans ce pays. L'amendement n° 579 propose une contribution assise sur les bénéfices des industries agroalimentaires, des centrales d'achat et des grands distributeurs, qui participeraient ainsi au financement de la caisse mutuelle. L'amendement n° 580 propose une contribution assise sur les bénéfices du secteur bancaire et assurantiel lié à l'activité agricole. C'est l'ensemble de la filière qui devrait être concernée par la mutualisation.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

M. Chassaigne ouvre le débat du financement de l'agriculture par l'aval de la filière. Nous retrouverons ce même débat un peu plus tard, lorsque nous aborderons un autre sujet particulièrement sensible : l'exonération des charges patronales sur le travail permanent.

En cette période où il n'y a plus d'argent public, la question se pose : reste-t-on dans le même statu quo social ou cherche-t-on d'autres sources de financement ?

Avec son amendement n° 579 , André Chassaigne pose un vrai problème, celui du financement par l'aval de l'agriculture de certains grands chantiers situés à l'amont de la filière, à savoir au niveau des agriculteurs eux-mêmes. Je vous présenterai tout à l'heure un mécanisme de financement d'exonération des charges patronales par un financement sur la grande distribution, qui participe de la même logique.

Il me paraît intéressant de dire que si on veut aller vite sur l'assurance récolte, il faut compléter par des financements venant de l'aval.

Ce principe est-il scandaleux ? Non, nous n'avons pas arrêté d'y recourir dans d'autres secteurs. François Brottes, Lionel Tardy, et Laure de La Raudière ici présents peuvent témoigner que nous n'avons pas cessé de le faire pour les télécommunications et l'audiovisuel. Nous n'avons pas arrêté de taxer l'aval – les fournisseurs d'accès à Internet – pour financer l'amont – la production de contenus.

Je le répète, cet amendement Chassaigne pose une vraie question de fond. Même s'il s'agit d'un amendement d'appel – il faudra ensuite imaginer des choses plus construites…

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Il faut ouvrir ce débat pour le régime d'assurance dont nous parlons aujourd'hui, mais il faudrait aussi l'étendre aux prestations sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

En vérité, monsieur le ministre, est-ce à l'État et aux contribuables de financer les bénéfices de la grande distribution ? Parce que cela renvient à cela !

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Ils sont déjà taxés, les bénéfices !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Quand vous exonérez les travailleurs saisonniers, qui en profite en bout de chaîne ? Regardez qui fait des profits dans la filière !

Cela revient à faire payer les contribuables français puisque c'est sur eux que vont reposer les exonérations salariales. Autrement dit, ce sont bien eux qui vont financer les bénéfices et les actionnaires de la grande distribution.

Du reste, les retraités agricoles de France réunis en association nationale soulèvent ce problème depuis plusieurs années. On nous explique toujours qu'il n'y a pas d'argent pour financer nos retraites, disent-ils. Certes, la part contributive est très faible dans le domaine agricole puisqu'elle se situe à 12 %, le reste étant assuré par les autres régimes ou l'État. Mais les retraités posent également cette question : comment se fait-il que nous ne puissions pas avoir une retraite décente alors que certains, sur notre activité, font des bénéfices colossaux ?

(Les amendements nos 579 et 580 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 188 .

La parole est à M. Germinal Peiro.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Cet amendement propose, à l'alinéa 16, de substituer « un événement sanitaire, phytosanitaire » par « l'apparition d'un foyer de maladie animale ou végétale ou d'un incident », en reprenant la terminologie de l'article 71 du règlement de la Commission européenne, n° 7320009, qui établit des règles communes pour les régimes de soutien en faveur des agriculteurs dans le cadre de la PAC.

Il nous semble intéressant d'aligner la terminologie du droit français et des directives européennes.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de William Dumas

Rassurez-vous, je voulais intervenir sur un autre sujet : le président ne m'a pas vu lever la main tout à l'heure quand M. le ministre a parlé du fonds de mutualisation de la couverture des risques sanitaires.

Je voulais vous interroger, monsieur le ministre, sur un problème qui se pose dans les costières, dans le département du Gard. Avec mon collègue Étienne Mourrut, ici présent, nous sommes confrontés au cas d'un arboriculteur qui a laissé 100 hectares à l'abandon, sans entretien, ce qui amené la maladie de la sharka. La presse a évoqué le sujet plusieurs fois.

Debut de section - PermalienPhoto de William Dumas

À ce stade, nous ne savons pas qui va payer l'arrachage et la destruction. Pour cette affaire, j'espère que nous allons trouver une entente avec les pouvoirs publics.

Est-ce que le fonds de mutualisation tel que prévu par le texte pourrait servir à ce genre de cas à l'avenir ? Comme le disait mon ami et collègue Chassaigne, de plus en plus d'arboriculteurs n'ont malheureusement plus d'argent et même plus les moyens d'arracher.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Je sens que nous sommes partis pour une longue journée, car je ne résiste pas au plaisir de répondre à chacune des questions qui me seront posées.

L'exemple de la sharka est caractéristique de ce qu'il ne faut pas faire. Cette maladie qui affecte les vergers est dramatique sur le terrain et créé un désarroi total chez les paysans par le fait que l'on est incapable de la repérer à l'avance : les foyers de sharka se développent sans que l'on sache que l'arbre est malade. Deux ou trois ans plus tard, les fruits se racornissent puis finissent par ne plus pousser du tout. Il faut arracher. Qu'avons-nous pour répondre à cela ? Le coup classique, si je puis me permettre, c'est-à-dire le budget de l'État : une indemnisation de 5 000 euros à l'hectare.

Que se passe-t-il ? J'insiste car c'est un cas d'école très intéressant : d'un côté, les arboriculteurs ne sont pas contents parce que les 5 000 euros à l'hectare ne suffisent pas à compenser leurs pertes ; de l'autre, François Baroin – avec toute l'amitié que je lui porte – lui aussi n'est pas du tout content, parce que la mesure coûte très cher au budget de l'État. Résultat, personne n'est satisfait…

Nous proposons la création d'un fonds de mutualisation pour l'indemnisation de la sharka. Cela signifie que tous les professionnels se mettent ensemble, tous les arboriculteurs d'une région concernée abondent le fonds avec le soutien de l'État – cette fois-ci c'est de l'argent bien employé – et de l'Union européenne. Cela permet de remédier aux difficultés que rencontrent les arboriculteurs avec des taux de remboursement plus importants.

Cela me paraît être la bonne solution. C'est une solution de solidarité. Pour l'instant, le fonds n'est pas encore créé car les discussions se poursuivent, les professionnels n'étant pas encore parvenus à un accord. Mais ce principe de solidarité est le bon. Si chaque arboriculteur reste seul dans son coin en pensant qu'il va s'en sortir et que l'État sera là lorsque cela ira mal, il se trompe : cela ne peut plus fonctionner ainsi.

Le fonds de mutualisation, c'est de la solidarité accompagnée par l'État et par l'Union européenne. C'est la bonne solution.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Oui.

(L'amendement n° 188 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 678 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Nous élargissons le champ des dommages afin que les agriculteurs puissent se protéger contre d'autres aléas que les aléas climatiques. Ces derniers sont toujours aussi incertains, même si l'on peut prévoir qu'ils deviendront plus fréquents, plus nombreux ou plus violents en raison des changements du climat. Par une sorte de grand cycle, toute la société pourrait avoir indirectement une part de responsabilité dans l'aggravation des tempêtes et des inondations observées récemment. Mais enfin, cela reste, d'une certaine manière, une calamité tombée du ciel.

Il n'en est pas de même pour les dommages sanitaires ou environnementaux qui peuvent être de la responsabilité directe des opérateurs, des agriculteurs. C'est pourquoi nous souhaitons rajouter cette disposition préventive ou curative pour éviter les tricheries.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Je propose le retrait de l'amendement. Je ne suis pas en désaccord sur le fond, mais ces précisions figureront dans le décret car elles n'ont pas leur place dans la loi.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Je rebondis sur l'amendement d'Yves Cochet et sur notre discussion à propos de la sharka, car il me semble que l'alinéa 24 de l'article 9 redéfinit la notion de risques, notamment ceux qui sont liés aux calamités agricoles.

Cette redéfinition met plus particulièrement l'accent sur les agents naturels climatiques, excluant donc les autres. Or, dans nos régions, certaines calamités sont le fait de parasites tels que le charançon pour la banane. M. le député Marie-Jeanne a aussi évoqué hier une dérogation en matière d'épandage aérien en raison de la présence de cercosporiose dans la banane. Ces agents qui provoquent des calamités ne seront pas pris en compte au motif que l'aléa n'est pas d'origine climatique.

Une question essentielle se pose : la redéfinition de la notion de calamité agricole exclut-elle bien toutes les calamités qui ne seraient pas d'origine climatique ? Si tel est le cas, le propriétaire d'une exploitation agricole touchée par le charançon, par exemple, ne pourra pas bénéficier du dispositif cohérent que vous semblez déterminé à mettre en place.

Ajoutons que les conséquences de ces calamités ne se font pas sentir que sur l'exploitation : nous avons parlé hier des liens entre l'utilisation du chlordécone et les cancers de la prostate. Le problème des calamités agricoles d'origine non climatique a aussi été soulevé lors des débats en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

Monsieur le ministre, je viens aussi avec ma question – que j'avais déjà posée à votre prédécesseur M. Barnier – sur la maladie de l'esca qui ravage les vignobles dans le département du Gers. J'ai eu encore des nouvelles hier : avec la chaleur, les pieds meurent et nous en sommes à peu près à 25 % de perte. C'est un véritable fléau pour notre vignoble. Bien sûr, notre souhait est que l'esca puisse être…

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

Malheureusement non, car nous n'avons aucun remède en l'état actuel des choses. Le seul traitement fiable était l'arsenic… Il a été interdit. Pour l'instant, la recherche n'a pas avancé sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Quéré

Les vignobles des départements de Charente et de Charente-Maritime rencontrent des problèmes identiques. Nous subissons les attaques de deux maladies : l'esca et l'eutypiose.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Cette discussion est intéressante. Chaque parlementaire pourrait prendre la parole et démontrer par l'exemple mes explications précédentes : nous assistons à une multiplication des crises sanitaires et environnementales dans notre pays. Le risque sanitaire a été multiplié par cinq en l'espace de dix ans ; nous affrontons une crise tous les six mois. Plus un seul territoire, un seul terroir n'échappe à ce risque sanitaire ou environnemental. Le ministre de l'agriculture se retrouve malheureusement à courir de catastrophe en catastrophe.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

C'était moins le cas, il y a dix ans, si l'on en juge par les statistiques.

Nous allons avoir une période de transition. Pour répondre clairement aux différents problèmes soulevés, nous allons établir des plans spécifiques, que ce soit pour la maladie du vignoble dans le Gers ou pour les problèmes liés à l'utilisation du chlordécone aux Antilles, à défaut d'avoir dès à présent des fonds de mutualisation à disposition.

Cela étant, l'objectif est de créer un fonds de mutualisation pour chaque filière. Nous y reviendrons lors de l'examen de l'amendement d'Yves Cochet. Il s'agit de créer un principe de solidarité entre les professionnels avec le soutien de l'État et de l'Union européenne.

Le fonds de gestion des calamités agricoles, lui, sera mobilisé pour les calamités spécifiques ; mais pour les problèmes environnementaux ou sanitaires – autres que les tempêtes, pour faire simple –, il faudra un fonds de mutualisation.

Si ce fonds n'est pas créé dans un certain nombre de filières, nous avons prévu de l'imposer par décret. Les professionnels discutent ainsi au sujet de la sharka depuis des mois et des mois ; il arrive un moment où l'État doit prendre ses responsabilités et leur dire : désolé, nous n'avons pas les moyens d'indemniser les paysans à la hauteur de leurs besoins, vous devez être solidaires entre vous ; c'est pourquoi nous promulguons un décret pour créer le fonds de mutualisation.

Nous n'abandonnerons évidemment pas les territoires confrontés à différents problèmes : insectes, problèmes de pollution, sanitaires ou environnementaux. Des plans sont à chaque fois mis en place, qui se justifient dans la mesure où rien d'autre n'existe. Mais il faudra bien, à l'avenir, que les fonds de mutualisation et la solidarité entre les professionnels prennent le relais. Nous finançons la recherche dans le Gers, afin d'apporter des solutions ; idem pour l'ostréiculture avec l'IFREMER.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

En clair, monsieur le ministre, il faudra, à l'avenir, que la participation au fonds de mutualisation soit rendue obligatoire. Il est impossible de faire autrement : comment imaginer que des agriculteurs ne contribuant pas au fonds viennent demander de l'aide lorsqu'ils ont un problème ? La question est donc de savoir si le texte prévoit de régler cette affaire dès aujourd'hui, ou si ceux qui subissent ces calamités devront attendre deux ou trois ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

Si vous le permettez, je reviens à la charge pour m'assurer que la maladie dont j'ai parlé pourra bénéficier des fonds.

Je suis prête à travailler dans mon département pour mettre en place un fonds de mutualisation avec les professionnels, car nous n'avons aucun traitement contre ce fléau.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Qu'il s'agisse de la maladie du cornouiller, du charançon ou de n'importe quel autre problème sanitaire ou environnemental, des indemnisations à l'hectare sont prévues ; ce sera le cas dans le Gers, n'ayez aucune inquiétude. Je vous le dis néanmoins comme je le pense : ce système ne marche pas. On creuse les déficits publics et les agriculteurs sont loin d'y trouver leur compte. Bref, tout le monde est mécontent.

La question de Germinal Peiro est essentielle : le système ne peut fonctionner que si la solidarité est parfois, hélas, rendue obligatoire ; d'où l'alinéa 17, qui dispose que « l'affiliation des exploitants agricoles à un fonds de mutualisation agréé peut être rendue obligatoire par décret en Conseil d'État ».

Mon état d'esprit est toujours de parier sur la bonne volonté. (Sourires et exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

On peut quand même essayer : laissez-moi un peu d'espoir et d'illusions ! (Sourires.) On peut y arriver. La sharka, par exemple, est un problème grave que les professionnels prennent à coeur : j'espère bien qu'ils créeront eux-mêmes le fonds de mutualisation. Si tel n'est pas le cas nous nous en chargerons en rendant l'affiliation obligatoire par décret en Conseil d'État : c'est, je le répète, prévu par le texte.

(L'amendement n° 678 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 651 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

L'amendement est défendu.

(L'amendement n° 651 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'amendement n° 1277 de la commission est rédactionnel.

(L'amendement n° 1277 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 679 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Défendu.

(L'amendement n° 679 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'amendement n° 1278 de la commission est également rédactionnel.

(L'amendement n° 1278 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 336 .

La parole est à M. Lionel Tardy.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Je ne veux pas m'appesantir sur le nouveau comité consultatif – un de plus ! – prévu par les alinéas 30 à 42, d'autant plus qu'un tel sujet me semble relever du domaine réglementaire. Pour dissoudre ce comité, il faudra donc repasser par la loi.

On peut en outre, comme d'habitude, se poser la question de son utilité : ne pouvait-on confier la même mission à un autre organisme ? J'aimerais que M. le ministre nous en dise un peu plus à ce sujet ; à défaut d'obtenir des réponses, je vous propose, mes chers collègues, de supprimer les alinéas 30 à 42, quitte à renvoyer la création d'un tel comité à un décret.

(L'amendement n° 336 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 581 .

La parole est à M. André Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Cet amendement, dans le prolongement de quelques autres que j'ai défendus et de ce que notre assemblée a voté cette nuit, traite de la représentativité des différentes sensibilités des syndicats agricoles. En d'autres termes, il s'inscrit dans la série des amendements anti-Corée du Nord (Sourires), puisque l'on a trop souvent considéré, en France, que le syndicalisme agricole devait être uniforme et ne pas prendre en compte d'autres sensibilités que celle de la majorité.

J'aurais d'ailleurs pu le placer à l'alinéa 38, aux termes duquel « un décret fixe la composition du Comité national de la gestion des risques en agriculture et de ses comités départementaux d'expertise et précise les missions et les modalités de fonctionnement de ces comités ». Mais j'ai finalement préféré compléter l'alinéa 30 par les mots : « et qui comprend obligatoirement un représentant de chacune des organisations syndicales à vocation générale habilitées à siéger nationalement. »

Vous avez compris le sens de ma proposition ; elle ne devrait pas poser problème, et elle permettra d'éviter toute tentative d'uniformisation grisâtre (Sourires) au sein du Comité national de la gestion des risques.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable : l'amendement est satisfait.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Je vais vous expliquer, ce qui me permettra de répondre également à Lionel Tardy.

Le Comité national est créé par la loi car nous réorganisons complètement la gestion des risques dans l'agriculture française, ce qui n'est pas rien. Ce comité reprend les attributions du comité actuel, au sein duquel siègent toutes les organisations syndicales : ce fait est établi par décret, et le sera encore, bien sûr, pour le nouveau comité défini par la loi. Vous n'avez donc aucune inquiétude à avoir, monsieur Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Dans ces conditions, je retire bien sûr mon amendement.

(L'amendement n° 581 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

L'amendement n° 1279 de la commission est rédactionnel.

(L'amendement n° 1279 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 288 .

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Le fonds national de gestion des risques en agriculture dispose de différentes ressources, parmi lesquelles une subvention inscrite au budget de l'État.

L'alinéa 30 de l'article, lui, institue le Comité national de la gestion des risques en agriculture, qui peut être consulté par le ministre sur différents sujets de sa compétence, auxquels il nous semble intéressant d'ajouter « l'évaluation de la subvention de l'État nécessaire au bon équilibre financier des fonds de mutualisation ».

On ne sait en effet pas grand-chose de cette subvention : aucun montant n'a été fixé, et l'étude d'impact n'en dit rien. Il serait donc utile de l'encadrer rationnellement et d'en parachever la définition administrative, sans préjuger, monsieur le ministre, des futurs arbitrages budgétaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Défavorable : on peut considérer que l'amendement est satisfait, dans la mesure où le dispositif est déjà très encadré. Qui plus est, je rappelle que le Parlement vote chaque année le budget de l'État.

(L'amendement n° 288 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 125 .

La parole est à M. Germinal Peiro.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

L'amendement est défendu.

(L'amendement n° 125 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 582 .

La parole est à M. André Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Défendu.

(L'amendement n° 582 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 287 .

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Défendu.

(L'amendement n° 287 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement n° 190 .

La parole est à M. Germinal Peiro.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Favorable également.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

J'apprécie beaucoup, monsieur le ministre, que vous approuviez cet amendement. J'ai cependant une question précise à vous poser. Vous avez parlé des fonds de mutualisation ; mais les risques sanitaires sont-ils, oui ou non, concernés par le fonds national de gestion des risques en agriculture ?

Cette question est essentielle, car l'alinéa 24 redéfinit les risques assurables et ceux qui ne le sont pas. Dans ce cadre, les agriculteurs concernés par les exemples que nous avons évoqués, y compris le charançon, bénéficieraient-ils du fonds national de gestion des risques ? Celui-ci se compose, pour une part, d'assurances traditionnelles et, pour une autre part – à hauteur de 65 % –, de contributions de l'État autorisées par l'Union européenne. Je le répète, il s'agit d'un sujet majeur car le fonds national concerne a priori les seuls risques climatiques, et pas les risques sanitaires.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Je suis désolé de prendre un peu de temps, monsieur le président, mais je veux répondre dans le détail à M. Letchimy sur ce sujet complexe.

Je rappelle l'architecture globale du projet. Nous créons un fonds national de garantie contre les risques en agriculture, qui comporte trois volets : celui relatif aux calamités – les indemnisations existaient déjà, mais nous les augmentons –, les fonds de mutualisation et l'assurance. Avec ce dispositif, je le répète, le risque agricole est enfin couvert dans notre pays. Il était temps.

La question spécifique des risques sanitaires n'avait jamais été traitée dans le détail ; or elle intéresse directement les territoires ultramarins.

Deux cas de figure bien distincts se présentent : en premier lieu, celui des agriculteurs directement touchés – ainsi des éleveurs dont le cheptel serait contaminé par le virus de la fièvre aphteuse. En ce cas, l'indemnisation prévue par l'État au titre du programme 206 de mon ministère – « Sécurité et qualité sanitaires des aliments » –, est évidemment maintenue. Si, par exemple, un nouvel épisode d'encéphalite spongiforme bovine survenait, l'État indemniserait immédiatement les éleveurs touchés au titre de ce programme.

En l'espèce, rien ne change : l'État ne se désengage pas. Si, dans votre région, des producteurs sont touchés par un problème sanitaire, ils seront indemnisés par l'État.

Mais il est une autre question qui n'avait jamais été traitée bien que, du point de vue financier, elle soit plus lourde encore. Certains ne sont pas directement touchés par le risque sanitaire, mais en subissent les conséquences. Ainsi, des éleveurs de veaux ou de porcs peuvent ne plus vendre une seule bête si la suspicion vient à peser sur la qualité de la viande et que les cours s'effondrent.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Certaines exploitations, sans être directement affectées, peuvent avoir des taux de rendement plus faibles. Il faut que tous ces gens puissent être indemnisés. Or, à ce jour, rien n'est prévu pour eux. L'objectif des fonds de mutualisation est donc de couvrir les conséquences économiques du risque sanitaire. Cela aura un effet très bénéfique, en particulier dans votre région. C'est aux professionnels qu'il reviendra ensuite de s'entendre – et ce ne sera pas la moindre difficulté – sur le niveau de couverture des conséquences du risque sanitaire. S'ils n'y parviennent pas, il est prévu de l'imposer par un décret en Conseil d'État.

(L'amendement n° 190 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 604 et 1197 .

La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Ce sujet a été débattu en commission et nous avons entendu hier une brillante intervention de M. Saddier, député de Haute-Savoie, sur les moeurs des campagnols. Je connais bien le dossier, car le massif jurassien, proche de mon département, est très touché, « sur Suisse et sur France » – comme disent les Suisses –, par le campagnol terrestre. Cependant, ces amendements sont déjà satisfaits par l'engagement qu'a pris le ministre en commission : il souhaite d'ailleurs une action plus efficace que la rédaction d'un rapport et confie le dossier au Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, qui devra réfléchir à une solution pour tous les producteurs touchés par ce fléau.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Ces amendements pourraient en effet être retirés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Oui.

(Les amendements nos 604 et 1197 sont retirés.)

(L'article 9, amendé, est adopté.)

Article 9

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures vingt, est reprise à onze heures trente-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement, n° 1050 , portant article additionnel après l'article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Dans un léger accès de faiblesse, j'ai tout à l'heure confondu la contribution et le caractère obligatoire de l'assurance contre les dommages agricoles. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser.

Nous voici au coeur du problème. M. le ministre a répété que le dispositif qu'il créait comptait trois piliers : les fonds de mutualisation, pour l'indemnisation des dommages résultant d'événements sanitaires, phytosanitaires et environnementaux ; le Fonds national des calamités agricoles, qui prend en charge ce qui n'est pas assurable ; l'assurance, enfin, qui couvre les dommages assurables.

Je ne reviendrai pas, monsieur le ministre, sur la question du caractère facultatif ou obligatoire de ladite assurance. Je vous ai expliqué pourquoi j'étais favorable à une assurance obligatoire : dans la situation économique qui est la leur, nombre d'agriculteurs considèrent ne pouvoir assumer aucune charge supplémentaire. Par conséquent, malgré le taux de subvention de 65 %, le dispositif rencontrera un succès inférieur à vos attentes.

Les auditions m'ont donné le sentiment que la profession était très partagée. Le syndicat majoritaire, notamment, était favorable à une assurance dommages obligatoire. Même si je ne nourris guère d'espoirs quant au succès de l'amendement, j'aimerais que vous nous donniez les raisons de votre choix et que vous nous indiquiez ce qui pourrait éventuellement vous conduire à reposer la question du caractère facultatif ou obligatoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Pour pouvoir rendre l'assurance obligatoire, cher collègue, il suffirait de retirer les financements européens ! Ce n'est pas le choix qui a été fait, et la commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable également, monsieur le président.

Pour ne pas répéter toute mon argumentation à propos du caractère facultatif ou obligatoire de l'assurance, j'insisterai seulement sur deux points.

D'une part, cette loi repose, dans sa philosophie, sur l'incitation et l'encouragement, avec toutefois des clauses de rendez-vous. Si le dispositif des fonds de mutualisation tel que prévu par le texte ne donne pas satisfaction, un décret en Conseil d'État permettra – je l'ai dit tout à l'heure à M. Letchimy – de le rendre obligatoire. S'agissant de l'assurance, il est évident que nous regarderons année après année – je le fais déjà quasiment chaque mois – quels sont, dans les différentes filières, les taux d'affiliation à un régime assurantiel. Nous verrons bien s'ils progressent ou non. Dans la filière des grandes cultures, l'évolution est plutôt satisfaisante, et les incitations mises en place l'accéléreront certainement.

D'autre part, comme l'a rappelé le rapporteur, tout dispositif obligatoire est privé des subventions européennes à la prime assurantielle. La loi que nous examinons portera, elle, le taux de subvention à 65 %, soit un coût de 130 millions d'euros, pris en charge par l'État et par l'Union européenne. Si, comme vous le proposez par votre amendement, nous rendons l'assurance obligatoire, nous perdrons la subvention européenne. L'Europe estime en effet qu'elle n'a plus à contribuer dès lors qu'un système assurantiel est rendu obligatoire.

C'est pourquoi je préfère un dispositif incitatif, ce qui ne signifie pas que sa montée en puissance ne sera pas suivie année après année.

Je vous propose donc, monsieur le député, de retirer votre amendement.

(L'amendement n° 1050 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. André Chassaigne pour soutenir l'amendement, n° 583 , tendant à supprimer l'article 10.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

L'article 10 envisage les modalités d'un mécanisme public de réassurance, alors que nous avons un système d'assurance privé. Cela revient, pour reprendre l'expression consacrée, à privatiser les gains et à socialiser les pertes.

Il serait plus approprié de réfléchir à la mise en place d'une mutualisation et d'une assurance véritablement publiques. C'est d'ailleurs l'objet de notre amendement suivant.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable également. Cela étant, je ne résiste pas au plaisir de faire observer à M. Chassaigne qu'il est quelque peu surprenant de l'entendre proposer la suppression d'un dispositif de réassurance public, qui est pourtant une innovation considérable.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Réclamé depuis des décennies par tous les agriculteurs, un tel mécanisme qui offre à l'assurance privée la garantie de l'État serait le seul moyen de permettre à cette dernière de se développer, par exemple, en matière de fourrages. Ce n'est tout de même pas rien, et c'est plutôt conforme, me semble-t-il, à la philosophie politique de M. Chassaigne, que je ne saurais donc trop inciter à retirer son amendement, par cohérence avec les positions qu'il a défendues jusqu'à présent.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Monsieur le ministre, vous auriez raison si notre amendement n° 584 n'avait précisément pour objet de retenir, pour l'article 10, la rédaction suivante : « Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement relatif aux avantages et aux inconvénients du soutien de l'État au développement de l'assurance récolte et aux perspectives d'un régime d'assurance mutuel public accessible à toutes les exploitations agricoles et leur permettant de faire face à l'ensemble des aléas qui fragilisent leur existence. »

Cet amendement s'inscrit dans le droit fil des propos que je viens de tenir.

(L'amendement n° 583 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je mets aux voix l'amendement n° 584 , également repoussé par la commission et le Gouvernement.

(L'amendement n° 584 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu, pour soutenir l'amendement n° 612 .

Debut de section - PermalienPhoto de Apeleto Albert Likuvalu

Cet amendement vise la mise en place d'une réassurance privée et publique, condition indispensable du développement de l'assurance récolte, les entreprises d'assurance ne pouvant supporter seules la totalité du risque. L'offre de réassurance privée doit certainement être encouragée, mais elle reste, par nature, volatile et limitée face à des événements de grande ampleur. La réassurance publique reste donc une nécessité en tous temps, pas seulement en cas de crise conjoncturelle.

(L'amendement n° 612 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi de deux amendements, nos 605 et 443 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu, pour défendre l'amendement n° 6053 .

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Philippe Folliot, pour présenter l'amendement n° 443 .

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

La nouvelle rédaction de l'article 10 proposée par le Gouvernement au Sénat fait disparaître l'objectif de développement de l'assurance récoltes, notamment dans les secteurs non couverts jusqu'à présent, comme celui des fourrages. Pourtant, c'est bien dans cette perspective de développement de l'assurance récolte et de mise en place d'un dispositif assurantiel global accessible à toutes les exploitations agricoles, afin de leur permettre de faire face à l'ensemble des aléas qui fragilisent leur existence, que le principe de réassurance publique a toute sa pertinence.

L'amendement a pour but de rétablir la demande qui était faite au Gouvernement d'étudier les conditions et les modalités du bon développement de l'assurance récolte, notamment pour les fourrages. Ayant rencontré les agriculteurs de ma circonscription, notamment les éleveurs des monts de Lacaune, je sais que leurs inquiétudes sont grandes et qu'ils attendent des réponses.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Sur l'amendement n° 605 , avis défavorable.

S'agissant de l'amendement n° 443 , nous sommes d'accord, évidemment, sur le fond, mais nous l'estimons satisfait car le comité national de gestion des risques pourra se prononcer. La rédaction du Sénat va même plutôt plus loin.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Défavorable sur le premier amendement.

Quant au second, je suggère son retrait. Nous nous sommes beaucoup battus pour que la réassurance publique puisse être examinée sur tout le secteur agricole. Certes, vous avez raison, ce sont les fourrages les premiers concernés, puisqu'il n'y a pas d'assurance pour les fourrages, mais qui peut le plus peut le moins.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Fort des explications et de l'encouragement de M. le ministre et considérant que l'amendement est en partie satisfait, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Apeleto Albert Likuvalu

Je maintiens le mien.

(L'amendement n° 443 est retiré.)

(L'amendement n° 605 n'est pas adopté.)

(L'article 10 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi d'un amendement, n° 789 rectifié , portant article additionnel après l'article 10.

La parole est à M. Germinal Peiro.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Il est défendu.

(L'amendement n° 789 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Sur l'article 10 bis, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Corinne Erhel.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Nous arrivons à un point crucial de la discussion du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Nous sommes face à un choix de société et chacun va devoir prendre ses responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Le 16 juin, un amendement, déposé par M. Le Fur, a été adopté en commission des affaires économiques à une courte majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Cette adoption a provoqué une vive émotion et même une colère, en France et surtout en Bretagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Chez cinquante personnes ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

L'amendement a rencontré l'incompréhension totale des élus,…

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

…des associations, ainsi que des acteurs économiques et sociaux.

Alors même que nous venons à peine d'achever l'examen du Grenelle, vous continuez à effeuiller les principes que vous édictez.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Et encore, effeuiller est un faible mot.

Plus grave, cette disposition sonne comme une remise en cause de la parole de l'État sur l'épineux problème des algues vertes, qui est certes prégnant en Bretagne, mais qui peut concerner d'autres régions – je ne vous le souhaite pas.

Cet amendement a été vécu comme une provocation et une remise en cause de la parole de l'État, puisqu'un consensus avait été trouvé sur la nécessité de mettre en oeuvre un plan massif de réduction des algues vertes. Or, quoi qu'en dise M. Le Fur, la concentration en nitrates, et donc la présence d'algues vertes, est liée aux installations d'élevage.

Ce que je vous reproche le plus, ce qui me semble le plus grave, et M. le ministre l'avait souligné en commission, c'est que vous avez réussi à relancer une polémique et, surtout, à opposer agriculteurs et tenants de la protection de l'environnement. Or quand on fait de la politique, on oeuvre pour l'intérêt général, pas pour cultiver la division. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Si cet article est maintenu, monsieur le ministre, vous apparaîtrez – à votre corps défendant, j'en suis bien consciente – comme le ministre qui aura mis en contradiction la parole de l'État et ses actes, comme le ministre du double langage de l'État.

La seule solution, c'est la suppression pure et simple de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Il va bien falloir que chacun prenne ses responsabilités. Il n'est pas question, pour nous, de faire du bricolage pour améliorer la rédaction du texte ou pour sauver le soldat Le Fur. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC – Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

C'est un problème propre à votre majorité,...

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

…et nous n'avons pas à entrer dans ces considérations. Nous légiférons pour l'intérêt général, pas pour régler des problèmes personnels ou la situation d'un homme politique. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

J'ai écouté attentivement, avant-hier, les propos du premier signataire de ce fameux amendement dans la discussion générale, et j'ai été extrêmement choquée par deux choses.

D'une part, monsieur Le Fur, vous avez fustigé les journalistes – cela figure au compte rendu – parce qu'ils auraient rapporté le débat que nous avons eu en commission. Mais c'est normal : nous sommes encore en démocratie, que je sache !

D'autre part, vous avez tenu des propos extrêmement désobligeants vis-à-vis des associations. En démocratie, la moindre des choses n'est-elle pas de se respecter les uns les autres ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Vous avez par ailleurs tenu des propos en total décalage avec les attentes de la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Pas de leçons de morale, s'il vous plaît !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Cela vous gêne en effet que tous les journaux reprennent ces débats et rendent compte de la polémique que vous avez vous-même suscitée. Vous avez agi en conscience, c'est votre responsabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Fasquelle

Arrêtez les leçons de morale ! Nous ne sommes pas des petits garçons !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Sur le fond, je rappelle que les directives européennes qui évoquent ces sujets indiquent que, pour parvenir à une meilleure prévention, les États membres sont libres d'établir des règles de protection plus strictes que celles édictées par les directives.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

En d'autres termes, les seuils présentés dans ces textes sont des plafonds, et les États qui le souhaitent peuvent se montrer beaucoup plus vertueux.

M. le ministre l'a indiqué hier, nous ne pouvons pas, vous l'oubliez, comparer la situation topologique, la situation paysagère de deux pays. La problématique des algues vertes concerne essentiellement la Bretagne, mais pas seulement elle. Nous n'avons pas pour objectif d'exporter ce problème, mais je voudrais rappeler que, lors d'une visite organisée il y a un an sur les côtes bretonnes, à Saint-Michel-en-Grève, en présence de M. Bruno Le Maire, du Premier ministre, et de vous-même, monsieur Le Fur, vous aviez acquiescé aux propos de M. Fillon disant qu'il fallait absolument mettre en oeuvre un programme parce que c'était un problème compliqué. C'est bien la preuve que vous tenez un double langage.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Vous êtes en train de mettre en difficulté votre propre majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je vous expliquerai, il y a des éléments qui vous échappent !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

L'État a annoncé une enveloppe de 700 000 euros pour le ramassage des algues vertes en Bretagne. Or, pour la seule agglomération de Lannion-Trégor, la facture du ramassage va s'élever à 1,4 million d'euros, 50 % étant à la charge de l'État, c'est-à-dire que, pour la seule communauté d'agglomération de Lannion, nous consommerions toute l'enveloppe de l'État ! Nous ne pouvons pas continuer ainsi. Cela devient insupportable pour les Bretons.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Ce sont les finances publiques qui sont concernées. Je vous appelle vraiment à la raison.

Nous sommes parvenus à un consensus autour des programmes progressifs d'élimination des algues vertes. Le maintien de cet article réveillera inévitablement, j'en suis profondément convaincue, les tensions entre les agriculteurs, qui vont être stigmatisés d'une manière générale, et les exigences de la protection de l'environnement, et je pense que nous ne sommes pas là pour ça.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Vous ne pouvez tenir en permanence un double discours, c'est-à-dire voter le mardi les conclusions de la CMP sur le Grenelle de l'environnement, écouter M. Borloo nous dire, dans un grand discours, que tout aura changé grâce à lui – et nous savons que Mme Jouanno et lui sont contre cette disposition –,…

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

…pour ensuite, le vendredi, maintenir une disposition telle que celle-ci, qui va de surcroît contre l'intérêt des agriculteurs et contre l'intérêt de la filière touristique.

Debut de section - PermalienPhoto de William Dumas

Il regarde par le petit bout de la lorgnette !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Vous rêvez d'une Bretagne de résidences secondaires, moi, d'une Bretagne qui travaille ! C'est complètement différent !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Allons-nous continuer ainsi ? Vous jouez contre la Bretagne, vous instrumentalisez cette question. Je trouve cela particulièrement grave. Vous attisez la division, au lieu d'essayer d'aboutir à un consensus sur ces questions. C'est un choix de société : est-ce, oui ou non, la concentration que vous prônez ? Chacun doit prendre ses responsabilités. La seule issue, pour nous, est de voter contre cette disposition et, surtout, de n'accepter aucun arrangement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Marc Le Fur. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Non ! Mme Erhel a déjà défendu l'amendement de suppression !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis inscrit sur l'article, cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Nous en sommes à l'article 10 bis, dans le cadre du temps programmé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Regardez la feuille jaune, Mme Erhel était inscrite sur l'article, et je le suis également.

Je vais essayer d'introduire un peu de rationalité dans ce débat. Nous parlons des installations classées. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Monsieur Le Fur, permettez-moi de vous interrompre. À l'évidence, il y a un malentendu. Monsieur Brottes, laissez M. Le Fur s'exprimer, vous aurez la parole ensuite.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons réintroduire un peu de raison dans ce débat. Nous parlons des installations classées, chers collègues. Les installations classées sont un dispositif ancien, qui a été conçu pour l'industrie, et non pour l'agriculture.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Il se trouve que la loi de 1976, modifiée en 1982, a introduit un certain nombre d'élevages dans le dispositif d'installations classées. Ce dispositif d'installations d'élevages…

Monsieur le président, je croyais que les collaborateurs des groupes n'avaient pas accès au perchoir ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est en tout cas ce qui est appliqué au groupe UMP quand le Président est en séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

En ce cas, je ferai de même ! C'est une décision qui a été prise en conférence des présidents.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur Le Fur, vous êtes mal placé pour soulever des points de règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'interviens sur l'article, monsieur Brottes !

Cette police des installations classées a été organisée pour l'industrie. Initialement, elle ne s'appliquait que marginalement à l'agriculture. Il se trouve que, peu à peu, de plus en plus d'élevages se sont trouvés concernés par la procédure d'autorisation. Aujourd'hui, non seulement les gros élevages sont concernés, ce contre quoi je ne m'élève pas, mais aussi les élevages petits et moyens.

Cette question n'est d'ailleurs pas spécifique à la production porcine, elle vaut pour les volailles, les bovins, les chèvres, toutes les productions. Aujourd'hui, un élevage porcin modeste compte 450 porcs, soit entre 40 et 50 truies, ce qui est très peu par rapport aux 170 ou 180 truies d'une exploitation moyenne. Il y a donc de toutes petites installations qui sont soumises à autorisation. Mon sentiment est qu'il faut que nous nous calions sur le dispositif européen, et c'est pourquoi l'amendement adopté en commission se réfère à une directive européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Non, c'est la loi qui s'applique dans des pays que l'on cite toujours en exemple en termes d'hygiène, de propreté, de respect de l'environnement, comme les pays scandinaves ou l'Allemagne. Il se trouve que ce sont aussi nos concurrents et que, depuis quelques années, l'Allemagne est en train de nous damer le pion pour l'élevage. Il faut aussi tenir compte de cela, mes chers collègues ! Et pourquoi nous dame-t-elle le pion ? Parce que nous ne sommes pas à armes égales. Nous sommes plus compétents, plus compétitifs, mais nous avons des boulets aux pieds. Il faut quand même y réfléchir ! L'économie, ça existe aussi !

D'où l'idée de fixer la limite entre autorisation et déclaration en tenant compte de la directive européenne. Voilà l'objectif. Mais, je le répète une fois de plus, que l'on soit en régime d'autorisation ou de déclaration, ce sont les mêmes règles qui s'appliquent, qu'il s'agisse des plans d'épandage, des limites d'épandage, des 170 kilos d'azote à l'hectare, des stations de traitement... La différence se fait au départ.

Pourquoi la procédure d'autorisation est-elle pénible pour les pétitionnaires ? Parce qu'on leur impose une enquête publique et une étude d'impact.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Une étude d'impact, cela coûte entre 10 000 et 20 000 euros. Pour une grosse exploitation, cette somme est amortie dans les coûts. Mais pour une petite ou une moyenne exploitation, c'est extrêmement cher !

N'oubliez pas cette règle quasi absolue : la norme, les gros la supportent, tandis que les moyens et les petits en crèvent ! C'est exactement ce qui se passe : nous sommes en train de faire crever l'élevage familial ! Vous parlez de porc industriel, mais aujourd'hui, l'élevage familial, c'est papa et maman, ce sont deux personnes qui travaillent sur l'exploitation, et ce sont eux qu'il s'agit de défendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Mon idée est donc de faire en sorte qu'on en revienne au régime de déclaration, et qu'on leur épargne l'enquête publique. Oui, parlons-en, des enquêtes publiques qui mettent inutilement le feu à nos campagnes !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Parlons des études d'impact qui coûtent une fortune ! Parlons des délais ! Je me réjouis d'ailleurs que nous évoluions sur ce sujet, mais il s'agit d'un autre article. En tout état de cause, il faut que nous progressions.

En fait, j'oserai dire que ce que nous avons voté en commission, c'est la formule la plus respectueuse de l'environnement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je vais vous expliquer pourquoi : mon objectif n'est pas d'augmenter d'un cochon, d'une vache ou d'une poule la capacité de production. Tout d'abord parce qu'elle est bloquée pour d'autres raisons, en particulier par la limite des 170 kilos d'azote par hectare. Il ne s'agit donc pas d'augmenter la production.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Aujourd'hui, il y a souvent un, deux ou trois bâtiments dépassés, vieillots, qui posent des problèmes au voisinage parce que, disons les choses clairement, ils créent des nuisances olfactives. Au lieu de garder ces deux ou trois bâtiments vieillots, faisons un beau bâtiment neuf, qui sera un progrès pour les conditions de travail de l'éleveur – car j'aimerais que l'on entende aussi cette préoccupation, dont je suis porteur ici.

Ce sera aussi un progrès pour l'environnement, grâce aux techniques modernes.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Visitez les porcheries les plus modernes : elles sont dotées de cheminées qui permettent d'extraire l'air et de le filtrer, de sorte que les nuisances de voisinage, les pollutions, sont bien plus réduites. C'est dans ce sens qu'il faut aller.

Mon amendement ne produira aucune algue verte supplémentaire, puisqu'il n'y aura pas une vache, pas un cochon, pas une poule de plus ! Il permettra simplement de pérenniser la production dans nos secteurs. La production, ce sont les éleveurs, mais c'est aussi tout le monde ouvrier qui travaille dans l'agroalimentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Si j'ai la chance, dans une circonscription comme la mienne, d'avoir un taux de chômage de 6 % seulement, ce n'est pas, pardonnez-moi, grâce au député : c'est parce qu'il y a une filière agricole et agroalimentaire qui crée de l'activité et des emplois. Vous allez me dire que ce sont des emplois modestes, mais ce sont des emplois respectables. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ce sont des ouvriers qui rentrent chez eux le soir avec un salaire. Ce sont des mères de famille qui travaillent, et il faut en tenir compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Au contraire, c'est le vrai sujet ! En ces périodes de crise, il faut rappeler les priorités. La crise nous renvoie à la réalité, et la réalité, c'est l'emploi, c'est l'activité, c'est de permettre aux familles d'avoir un peu d'argent pour élever leurs enfants et mener une existence correcte dans la région qui leur est chère.

En tout état de cause, l'amendement est très clair : il applique à tout le monde le régime des installations classées, la limite entre autorisation et déclaration étant modifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

En effet : ce n'est pas l'amendement, pardonnez-moi, mais le texte de la commission.

Faisons comme les autres : nous croyons toujours être les meilleurs, mais nous ne sommes pas seuls au monde, nous avons des concurrents, et ces concurrents ont aussi leurs exigences environnementales. Ils parviennent à les respecter, il faut que nous y parvenions.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Pas une vache de plus, pas un cochon de plus, pas une poule de plus ! Simplement, au lieu d'avoir un, deux ou trois bâtiments minables, on en fait un seul, mais de qualité, qui apportera un avantage en termes d'environnement comme d'énergie, car on va pouvoir investir dans la méthanisation, faire des panneaux photovoltaïques, autant d'éléments qui seront des progrès. On oublie trop souvent que l'agriculture est un immense gisement de réduction des dépenses énergétiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Tout cela, on peut le faire avec la législation actuelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voilà pourquoi cette disposition me semblait cohérente, la commission l'a d'ailleurs bien compris lors de sa réunion.

Je regrette qu'elle ait été caricaturée. Cinquante personnes, au demeurant fort respectables, sont venues manifester chez moi. Cinquante associations appelaient à manifester, et ce sont cinquante personnes qui sont venues ! Elles connaissaient tellement bien le coin qu'elles se sont trompées de permanence et sont allés manifester devant la permanence de la caisse d'allocations familiales, qui n'a évidemment pas grand-chose à voir avec tout cela ! Je retiens aussi qu'il y avait cinq cents agriculteurs à Rennes pour défendre mes amendements. Cinq cents agriculteurs qui en ont marre de l'impôt-paperasse ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mes chers collègues, je comprends parfaitement les contraintes qui pèsent sur le Gouvernement et sur le ministre, et je sais qu'il n'est pas possible de rajouter des dépenses ou des avantages fiscaux. L'un des rares leviers dont nous disposions, c'est d'atténuer l'impôt réglementaire, d'atténuer la paperasse. Nous avons cette occasion, il faut la saisir. Cette paperasse, les gens ne la supportent plus. En circulant le dimanche, je voyais les gens venir vers moi, pour me dire : « Enfin quelqu'un qui nous défend, qui nous soutient. » (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Plus encore que les agriculteurs, ce sont surtout les agricultrices qui venaient vers moi, car ce sont elles qui gèrent la paperasse. Ces femmes qui ont choisi un métier et qui passent leur temps à remplir et à classer des formulaires en ont assez. Atténuons la charge qui pèse sur elles, progressons dans ce domaine, atténuons l'impôt-paperasse ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je vous rappelle que nous n'en sommes pas encore à la discussion des amendements et que, sur l'article lui-même, plusieurs de nos collègues sont encore inscrits.

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il s'est en effet passé quelque chose la semaine dernière en commission, puisque plusieurs amendements « Le Fur » ont été examinés. Le premier a été repoussé, un deuxième a finalement été adopté, qui se traduit par cet article 10 bis, que nous condamnons très fermement car il aura pour conséquence une concentration accrue des élevages et, partant, des lisiers et des fientes.

Or, nous avions déjà beaucoup de pollution des eaux, notamment en Bretagne, grande région d'élevage comme le disait Mme Erhel.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Mais ce sont les plans d'épandage qui gèrent cela ! Quel amalgame !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Cette pollution est notamment révélée par la prolifération des algues vertes, et elle coûte chaque année des millions d'euros aux communes du littoral. Le Premier ministre a parlé d'un plan de 120 millions d'euros. J'ai fait le calcul : depuis 1994, ce sont 840 millions d'euros qui ont été dépensés contre la prolifération des algues vertes et l'eutrophisation des rivières – tout cela en vain, puisque l'on va encore accroître la concentration.

Les cinquante députés qui, avec M. Le Fur, soutiennent cette mesure, trahissent l'esprit du Grenelle de l'environnement en favorisant ainsi le productivisme agricole.

Je vais reprendre mot pour mot ce que vous, monsieur le ministre de l'agriculture, avez dit à la commission la semaine dernière. Vous vous êtes déclaré défavorable à l'amendement pour deux raisons : « Premièrement », avez-vous dit, « nous ne devons pas envoyer le signal d'un retour en arrière en matière environnementale. » Or, quel signal envoie une telle mesure ? Tout le monde l'a compris en Bretagne, notamment les associations, mais aussi la plupart de nos concitoyens bretons. Il suffit de lire les débats dans Le Télégramme de Brest ou dans Ouest-France pour comprendre que la plupart des gens, j'allais dire l'immense majorité, sont complètement opposés à cette disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je continue à citer les propos du ministre devant la commission la semaine dernière : « Deuxièmement, au moment où le contentieux nitrates oppose notre pays à la Commission européenne et où des menaces de sanctions européennes pèsent sur la France, il convient de ne pas gâcher les efforts considérables qui ont été consentis par nos agriculteurs en adoptant une mesure d'assouplissement des règles d'installation d'élevage porcin qui risquerait de donner aux autorités européennes le sentiment d'une fermeté moindre de notre pays. »

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

C'est bien ce que j'ai dit.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le ministre, trois amendements de suppression de l'article 10 bis ont été déposés : y serez-vous favorable ? Ce devrait être le cas si vous tirez les conséquences de vos propos en commission la semaine dernière. Dans le cas contraire, c'est qu'il y aura eu des changements dans je ne sais quel rapport de forces au plus haut niveau – cela dépasserait peut-être même votre autorité. Je n'ose pourtant pas envisager cette éventualité car vous êtes un homme droit et un homme de parole. Cela dit, nous verrons bien si votre parole de la semaine dernière tient encore cette semaine.

La prolifération des algues vertes et des algues bleues, symptômes de l'eutrophisation des rivières, a donné lieu depuis longtemps à un certain nombre d'études, notamment de la part d'associations, et pas seulement en Bretagne. Quelle sera la conséquence de l'élévation du seuil – on passe de 450 à 2 000 porcs, ce qui représente environ 5 000 bêtes par an – au-delà duquel l'installation d'une exploitation est soumise à un régime d'autorisation ? Les porcheries qui échapperont à ce régime seront dispensées de réaliser l'étude d'impact sur l'environnement. Pour elles, on supprime toute enquête publique, tout avis des conseils municipaux concernés ainsi que l'examen des projets d'installation par les conseils départementaux de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques. L'État lui-même se prive de toute capacité à réguler la pression polluante puisque, dans le cadre du régime déclaratif, le préfet n'a aucun pouvoir d'opposition.

Je l'ai déjà dit, 120 millions d'euros sont consacrés à un plan de lutte contre les marées vertes en Bretagne. Nos amis les maires de communes bretonnes vont avoir beaucoup de travail. La marée verte est déjà là : j'ai vu aujourd'hui des photos dans le journal. Cela semble beau parce que c'est tout vert ; en réalité, c'est dangereux.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Fasquelle

Vous avez raison, une marée verte, c'est dangereux ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Cher collègue, c'est sans doute de l'humour noir !

J'appartiens à l'association environnementale Eau et rivières de Bretagne, qui s'appelait dans les années 1970 Association pour la protection des salmonidés en Bretagne. (Sourires.) À l'époque, nous avions réussi, avec ces écologistes de terrain, à pacifier les rapports entre le milieu agricole et le milieu environnemental. Il a été très difficile de parvenir à une bonne entente, cela a pris des décennies.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

En faisant systématiquement des procès aux agriculteurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Aujourd'hui, vous remettez le feu, et vous perturbez un équilibre très fragile.

Le Conseil d'État a publié au mois de juin un rapport public intitulé L'eau et son droit. Peut-être tous nos collègues n'ont-ils pas pris le temps de lire ce document : il remettrait en mémoire, à ceux qui avancent l'argument selon lequel les agriculteurs allemands sont favorisés par le respect des normes européennes, les règles communautaires qui traitent d'autres sujets, comme la directive du 12 décembre 1991 sur les nitrates, à laquelle l'article 10 bis n'est pas conforme, comme l'a relevé le ministre lui-même.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'Europe vient pourtant de nous adresser un satisfecit !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Le Conseil d'État souligne dans son rapport que « l'augmentation concomitante de la taille des élevages, mal contrôlée par l'administration, a limité l'effet des plans » comme ceux de lutte contre la pollution en Bretagne. Je me souviens des PMPOA, les programmes de maîtrise des pollutions d'origine agricole. J'ai moi-même été l'un des acteurs de leur mise en place, il y a une dizaine d'années. Je n'occupais pas le poste de M. Le Maire, mais, à la tête d'un autre ministère, j'avais essayé, avec M. Glavany, d'élaborer un plan impliquant toutes les parties concernées.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur Le Fur, peut-être vous souvenez-vous que nous nous étions rendus à la préfecture de région. Mais nous avions échoué. Finalement, on a dépensé des dizaines de millions d'euros pour les PMPOA, et cela n'a pas marché. Aujourd'hui, cela ne marche pas mieux.

Il ne faut pas que nous prenions des mesures contraires à la directive, qui proscrit le dépassement d'un certain seuil de nitrates dans les eaux.

Quel va être l'effet de l'article 10 bis sur le tourisme ? Nous pourrons le constater très vite avec l'ouverture de la saison. La Bretagne est une grande région touristique, c'est une destination plutôt familiale, ni bling-bling, ni people. La clientèle est plutôt composée de familles modestes. Je suis très souvent allé en vacances sur la plage de Saint-Efflam qui s'étend jusqu'à Saint-Michel-en-Grève. Quoi qu'il en soit, l'article 10 bis risque de dissuader les touristes.

J'espère que le rapporteur et le Gouvernement seront favorables aux amendements de suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Monsieur Cochet, nous n'en sommes pas encore à la discussion des amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Je fais ce rappel au règlement sur le fondement de l'article 58, alinéa 1 du règlement, afin qu'il ne soit pas décompté du temps de parole de mon groupe.

Mme Erhel a commencé son intervention tout à l'heure en affirmant qu'elle défendait un amendement de suppression, c'est pourquoi j'avais compris que les amendements avaient été appelés…

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

J'en conviens, monsieur le président.

Cela dit, M. Le Fur a lui aussi annoncé qu'il défendait son amendement. En fait, il n'arrive pas à croire lui-même qu'il a réussi à faire voter cet amendement en commission à une voix près. C'est en quelque sorte un aveu de sa part !

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Il faut que les choses soient claires : l'amendement adopté en commission est devenu l'article 10 bis du projet de loi. La seule et unique manière de revenir dessus – même si son auteur n'a pas encore admis qu'une telle disposition ait pu être votée en commission, tellement il la sait scandaleuse – est de voter la suppression de l'article.

Il n'y a pas d'autre moyen de faire disparaître l'article 10 bis que de voter les amendements de suppression, et il n'y aura pas d'autres rendez-vous pour le faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Nous reprenons la discussion de l'article 10 bis.

La parole est à M. Germinal Peiro.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Le sujet dont nous débattons est extrêmement sérieux. Quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, je ne doute pas de notre volonté commune de soutenir la production agricole de notre pays.

Je suis également persuadé que nous sommes parfaitement conscients des effets de la distorsion de concurrence subie par nos agriculteurs. Elle est due au fait que l'Europe libérale refuse l'harmonisation sociale et fiscale – sur ce point, la majorité a sa part de responsabilité, car aujourd'hui ce sont les libéraux qui dirigent l'Union européenne. Ces distorsions ont également des causes plus conjoncturelles, notamment celles liées aux salaires, à la méthanisation, à la fiscalité – notamment par rapport à l'Allemagne. Tout cela a déjà été dit, je n'y reviendrai pas.

L'article 10 bis prévoit que le régime d'autorisation s'appliquera désormais aux seules exploitations comptant plus de 2 000 porcs ou 40 000 volailles, alors qu'il s'applique aujourd'hui à partir de 450 porcs ou 30 000 volailles. Ce n'est pas anodin : avec cette disposition, le régime déclaratif s'appliquera à des exploitations comptant quatre fois plus de porcs qu'aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Vous voulez de la paperasse ? Ne vous inquiétez pas : le régime déclaratif en demande déjà beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Pourquoi cette évolution ? M. Le Fur affirme que la suppression de l'enquête publique et de l'étude d'impact permettrait d'économiser de la paperasse. Il est vrai que les études d'impact ont un coût. Mais si nous le comparions au coût total de la création d'un élevage, nous constaterions qu'il est très faible et qu'il ne joue pas sur la décision d'ouvrir une exploitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Pour les exploitations petites et moyennes, ce coût n'est pas négligeable !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Monsieur le ministre, mes chers collègues, peut-être aurions-nous pu réfléchir à la prise en charge de ce coût. Ce ne serait pas la première fois que les pouvoirs publics interviendraient en matière d'élevage, je pense aux plans de mise aux normes des bâtiments d'élevage de bovins.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Il ne serait pas scandaleux d'intervenir pour alléger les coûts des dossiers de demande d'autorisation d'installation des exploitations. Nous serions ouverts sur ce dernier point.

De la même façon, nous avons montré que nous étions conscients des problèmes en votant pour la réduction des délais – qui a fait l'unanimité. Cela dit, M. Le Fur et ceux qui l'ont soutenu ne peuvent tout de même pas ignorer les conséquences de cette affaire !

Pour ma part, j'avoue humblement que j'étais, dans un premier temps, plutôt favorable à l'évolution proposée.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Je veux aborder les questions agricoles avec pragmatisme. J'ai beaucoup d'amis dans le monde de l'élevage et j'essaie de comprendre les problèmes qu'ils rencontrent.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Cela dit, je me suis aperçu à quel point nous leur rendrions un mauvais service en votant cet article. En effet, nous rallumerions au niveau national une guerre entre les éleveurs et le reste de la société.

Même s'il y a, en Bretagne, des algues vertes et des nitrates dans les rivières, cette affaire n'est pas bretonne. Ce sont des problèmes qu'on rencontre partout aujourd'hui ; ils remplissaient dimanche dernier une plein page de Sud-Ouest Dimanche, qui couvre neuf départements. Le problème est national.

Je pense sincèrement que, si nous poursuivons dans la voie que vous avez empruntée, nous rendrons le plus mauvais service qui soit au monde agricole. En effet, nous savons avec certitude que, depuis un siècle, les activités humaines ont totalement pollué les masses d'eau de notre pays. Nous savons tous que nous ne pourrons pas respecter la directive-cadre européenne qui nous impose de revenir d'ici 2015 à un bon état écologique des cours d'eau pour 70 % des masses d'eau.

Nous savons tous aussi d'où viennent les pollutions. Elles sont d'origine industrielle et sont causées par les métaux lourds, le chlore et les PCB. Songez, mes chers collègues, que, bientôt, nous ne pourrons plus consommer les poissons pêchés dans la moitié des rivières de France. On a tué la pêche professionnelle sur le Rhône, la Saône et la Seine. Nous sommes à la veille d'interdire la consommation des poissons de la baie de Seine, autrement dit des poissons pêchés en mer ! Nous sommes aussi à la veille d'interdire la consommation des poissons pêchés en Méditerranée face au delta du Rhône : voilà la réalité ! Monsieur Dionis du Séjour, vous savez parfaitement que, depuis quelques mois, la consommation des anguilles de la Garonne est interdite en raison de la pollution par les PCB.

Ces pollutions sont d'origine industrielle et urbaine – en tant qu'élus nous avons d'ailleurs notre part de responsabilité en la matière –, mais aussi d'origine agricole. Or nous avons plus travaillé sur les pollutions industrielles et urbaines que sur les pollutions agricoles, car les premières se voient plus que les secondes. Le gros problème des pollutions agricoles, c'est qu'elles sont diffuses et qu'il est extrêmement compliqué de les traiter. Elles proviennent des intrants disséminés sur les millions d'hectares de notre territoire et des épandages. Il est très difficile de les repérer. Reste qu'en Bretagne nous sommes arrivés à trouver l'origine des pollutions.

Je considère donc que, partant d'une bonne intention, vous rendez un très mauvais service au monde agricole que vous voulez pourtant soutenir. Cette mesure sera à l'origine d'une nouvelle stigmatisation des agriculteurs et des éleveurs. Il ne vous a pas échappé que, depuis que nous débattons de la LMA, personne ne s'intéresse vraiment à ce projet de loi. Avez-vous lu la presse hier, aujourd'hui ou au lendemain des réunions de la commission ? Il n'y avait rien sur le projet de loi lui-même, alors que pas un seul jour ne passe sans un article sur les algues vertes et la pollution des eaux.

Le monde agricole a besoin de soutien. Il reçoit 10 milliards d'euros par an grâce à la PAC, et nous nous battrons tous pour que ces montants soient maintenus parce qu'ils sont indispensables. Cependant, la société n'acceptera ces soutiens à l'agriculture que si les méthodes de culture et d'élevage évoluent.

Pour régler un tout petit problème technique, localisé à un endroit précis, on va jeter l'opprobre sur l'ensemble des agriculteurs. Il va donc falloir recommencer ce travail considérable qui consiste à convaincre que ces derniers ne sont pas des pollueurs, qu'ils doivent être les premiers défenseurs de l'environnement. Si vous voulez que ce discours soit crédible, monsieur Le Fur, il faut les aider à adapter leurs méthodes, au lieu de tendre les bâtons pour qu'ils se fassent battre, comme vous êtes en train de le faire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Mes chers collègues, je vous informe que sont encore inscrits sur l'article 10 bis Mme Le Loch, M. Dionis du Séjour, M. Gaubert, M. Folliot, M. Herth, M. Benoit et M. Lurel. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

La parole est à Mme Annick Le Loch.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Le Loch

Je suis, moi aussi, favorable à la suppression de l'article 10 bis. Je souhaite en effet que soit maintenue la réglementation actuelle sur les seuils à partir desquels le régime des installations classées s'applique, car ces seuils tiennent compte de la réalité des risques environnementaux, notamment de la sensibilité des territoires classés en zone d'excédent structurel, et il serait prématuré de les modifier. Nous ne sommes pas encore parvenus à rétablir la qualité de l'eau dans les cours d'eau et sur les zones côtières : les flux d'azote y restent trop importants. En dépit des efforts réalisés par la profession agricole – et ils ne sont pas négligeables –, nous sommes loin d'avoir abouti. Certes, il convient de raccourcir les délais d'instruction, mais il ne faut pas pour autant que les procédures soient bâclées.

La situation du littoral breton est délicate, en cette veille de saison touristique. Les algues vertes commencent à se répandre dans quelques baies. Ainsi, avant-hier, une plage qui se trouve dans ma circonscription a été fermée : 1 000 tonnes d'algues vertes y ont été ramassées en deux jours et entreposées sur un site qui ne peut en accueillir que 2 000 tonnes. Inutile de vous dire l'émoi et l'impuissance des élus locaux face à cette situation. D'autant que la mise en oeuvre du plan gouvernemental de lutte contre les algues vertes s'est notamment traduite par l'implantation, sur quelques plages du littoral breton, de panneaux où il est indiqué que ces algues, une fois séchées, peuvent dégager des gaz toxiques susceptibles de gêner les personnes qui s'y trouvent, voire de présenter un danger de mort. Tout cela est mentionné sur un panneau : vous imaginez le désastre que cette communication peut engendrer ! Néanmoins, je tiens à rassurer ceux qui souhaitent se rendre en Bretagne : celle-ci compte plus de 3 000 kilomètres de littoral et le nombre des baies concernées est limité.

Le plan gouvernemental de lutte contre les algues vertes, auquel sont consacrés 134 millions d'euros, fait suite aux travaux d'une mission interministérielle, qui a prouvé que les flux d'azote étaient à 90 % d'origine agricole. La responsabilité de l'État est reconnue depuis longtemps ; il a du reste été condamné en 2007, et cette condamnation a été confirmée en 2009. Est-il besoin de rappeler que, dans les Côtes-d'Armor, on procède au ramassage des algues vertes depuis 1974, et que la création du centre d'étude et de valorisation des algues vertes date de 1982 ?

Ce plan, qui est en retrait par rapport aux préconisations de la mission interministérielle, comporte néanmoins trois volets intéressants : l'amélioration des connaissances, le ramassage et le traitement des algues, ainsi que des actions préventives, qui visent à donner à l'agriculture les moyens d'assurer un développement durable. Parmi ces actions, je citerai celles destinées à favoriser l'évolution de l'agriculture vers des systèmes de production à très basses fuites d'azote, à améliorer le respect de la réglementation par des contrôles renforcés plus efficaces et à limiter la pression d'azote organique et minéral. La garantie d'opérationnalité et de plus-value par rapport aux contrats existants doit être démontrée, au même titre que les contrats de bassin versant algues vertes, qui sont déjà appliqués. L'ensemble du modèle agricole est concerné.

Le plan de lutte contre les algues vertes doit s'appliquer sur une période de trois ans, au cours de laquelle on attend une réduction de 30 % à 40 % des flux de nitrates, grâce notamment au renforcement du système herbager, qui doit être préféré au système hors-sol. Ce plan prévoit également un projet d'arrêté modificatif du quatrième programme d'action « directive nitrates », auquel seraient ajoutées des mesures, applicables en bassin versant « algues vertes », beaucoup plus sévères afin d'atteindre un bon état des eaux. Nous le savons tous, le territoire de la Bretagne est entièrement classé en zone sensible. La règle sera demain celle d'une fertilisation équilibrée. Puisque les sédiments marins contiennent déjà du phosphore, les actions doivent principalement porter sur la diminution de la production d'azote afin d'enrayer l'apparition des algues vertes.

Non seulement la modification de la réglementation ne rendra pas service à la profession agricole, mais elle nie le travail du Grenelle et les résultats obtenus grâce aux efforts consentis par les agriculteurs. Ces derniers attendent une politique de régulation et de prix, au service d'un projet économique viable et durable, et ce n'est pas à coups d'amendements de ce type que l'on répondra à leurs attentes. La modernisation de l'agriculture ne passe pas par un assouplissement des règles, mais par une meilleure reconnaissance. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Monsieur le président, le débat suscité par l'article 10 bis est un débat politique majeur, et vous avez raison de nous laisser le temps de la discussion. De quoi s'agit-il ? Marc Le Fur propose d'adapter la loi française à une nouvelle directive européenne, adoptée en 2008, qui fixe de nouveaux seuils, notamment pour les élevages de porcs ou de volailles. Il n'y a donc pas de raison de faire un procès en sorcellerie à notre ami Marc Le Fur.

Sur le fond, cet amendement soulève un problème national. Nous, centristes, l'avons voté en commission, et nous l'assumons. Notre ligne politique est claire : nous sommes pour l'harmonisation des normes environnementales au niveau européen : si l'on considère que la directive de 2008 est insuffisante, c'est au niveau européen qu'elle doit être modifiée, et je ne vois pas pourquoi l'on renoncerait à agir en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Non, c'est la réalité, et c'est le coeur de notre débat. Nous, nous voulons que nos agriculteurs puissent se battre à armes égales avec leurs concurrents européens. Voilà l'enjeu de la question que pose Marc Le Fur, mes chers collègues de l'opposition. On peut alourdir les charges sociales, les contraintes environnementales ou phytosanitaires, mais la compétition est d'abord intra-européenne (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) : voulez-vous, oui ou non, permettre à nos agriculteurs de se battre à armes égales avec leurs concurrents ? (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Notre filière pommes régresse par rapport à la filière italienne, celle des fruits et légumes régresse par rapport à celle des Allemands. Cette situation s'explique-t-elle uniquement par le fait que nous sommes mauvais ? Ce type de questions mérite d'être posé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Nous avons une ligne politique claire, et c'est pourquoi nous avons voté l'amendement de Marc Le Fur. Mais nous souhaitons également rapprocher le monde paysan des objectifs du Grenelle, et c'est un véritable problème. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Par ailleurs, je rappelle à nos collègues bretons que nous ne légiférons pas pour la Bretagne, mais pour la France. Le problème des élevages de volailles notamment se pose en Lot-et-Garonne, en particulier dans ma circonscription. Encore une fois, l'amendement Le Fur est fondé sur des arguments sains. Il est en effet nécessaire d'harmoniser les règles environnementales à l'échelle européenne, afin de donner à nos agriculteurs la possibilité de se battre à armes égales avec leurs concurrents.

Néanmoins, cet amendement pose problème sur le terrain puisqu'il permettrait la création d'élevages industriels sur des sites nouveaux, quand bien même la création d'un nouveau site s'accompagnerait de la fermeture de deux ou trois élevages existants. Il faut donc trouver un compromis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Le Gouvernement y travaille et nous ne le gênerons pas dans sa tâche. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je serai bref, car beaucoup d'arguments ont déjà été utilisés.

Tout d'abord, Jean Dionis du Séjour a raison d'insister sur le fait que la Bretagne n'est pas la seule concernée par cette disposition. Néanmoins, certains bassins versants bretons sont en contentieux : une procédure de l'Union européenne contre le gouvernement français est pendante depuis plusieurs années. En 2007, lorsqu'il est arrivé au ministère de l'agriculture, Michel Barnier – votre prédécesseur, monsieur le ministre – a pris cette question à bras-le-corps. Cela n'a pas été simple, notamment sur le terrain, où cela a été très mal vécu car il a fallu demander à tous de faire à nouveau des efforts, y compris à ceux qui en avaient déjà fait, alors que les agriculteurs qui n'avaient rien fait avaient été couverts. L'État a donc une responsabilité dans cette situation, puisqu'il n'a pas contraint à agir ceux qui ne faisaient rien.

Comment a-t-on pu progresser dans la discussion avec la Commission européenne, sinon en promettant qu'en Bretagne, les contraintes seraient encore plus draconiennes pendant un certain temps ? Voilà la réalité. Si l'on ne veut pas tenir compte de cette situation, on ne peut pas comprendre le débat qui porte sur la comparaison des normes françaises et allemandes. Les Allemands ne sont pas dans la même situation que nous ; leur écosystème est différent du nôtre. En Bretagne, celui-ci est très fragile : les ruisseaux sont des oueds, souvent asséchés en été, les plages sont plates et la photosynthèse y fonctionne mieux que dans d'autres régions. Or, nous n'allons pas transformer la Bretagne pour supprimer ces problèmes. Il faut donc que la réglementation tienne compte de cette spécificité.

Par ailleurs, ce qui nous place dans une position défavorable par rapport aux Allemands en termes de concurrence, ce n'est pas tant la réglementation environnementale que bien d'autres éléments, et nous le savons, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Hélas, oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je pense au recours à des prestataires de services venant d'ailleurs et au fait que la production française est ancienne et présente donc des défauts dont ne souffrent pas les productions récentes.

Je pense que c'est aussi, il faut le dire, l'effet d'un système de consommation plus nationaliste que le nôtre. Si, depuis 1998, le cours du porc allemand est plus élevé de 20 centimes d'euro que le cours du porc français, c'est parce que nos voisins d'outre-Rhin privilégient la consommation locale.

Après des années d'affrontements en Bretagne, les choses se sont un peu apaisées depuis un an ou deux et le dialogue a commencé à s'instaurer. C'est dû en partie au fait que l'on a enfin compris que le cochon n'est pas seul responsable de la situation et que, tuerait-on tous les cochons en Bretagne, on n'aurait pas forcément réglé le problème pour autant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

J'en veux pour preuve qu'il n'y a que deux élevages de porcs sur le bassin versant où s'est rendu le Premier ministre l'année dernière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

En réalité, c'est la surfertilisation généralisée qui est en cause, notamment du fait du recours aux engrais chimiques que peu de personnes stigmatisent, simplement parce que ces engrais n'ont pas d'odeur – et nonobstant le fait qu'ils ont, en revanche, les mêmes effets en termes de pollution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Le dialogue qui vient à peine de s'engager est encore très fragile. Comme je l'ai dit en commission, notamment avec Corinne Erhel, il est à craindre qu'il ne soit difficile pendant un certain temps encore.

Le texte de l'article 10 bis, qui n'est plus un amendement, permet des regroupements. S'il s'agit de prendre trois élevages « pourris » pour en créer un nouveau à la place, tout le monde est d'accord. Le problème, c'est que c'est déjà possible ! Ce qui ne l'est pas, c'est de prendre trois élevages « pourris » dans trois sites différents et de les ramener sur le même site. Le risque de ce texte, c'est de permettre d'installer le site de regroupement sur un bassin versant déjà surchargé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

De toute façon, on est bloqué par le plan d'épandage !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

On est également en train de donner de faux espoirs aux agriculteurs, car la vraie question est celle du plan d'épandage, comme vous le dites vous-même, monsieur Le Fur. Si je prends un bout d'élevage à Guidel et un autre à Redon pour les installer chez moi, je ne ferai croire à personne que je vais ramener le lisier là-bas ! Il faudra bien régler ce problème : le texte proposé ne comporte aucune notion de distance de bassin versant.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La réglementation est la même pour toutes les installations !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Quand je dis que vous allez donner de faux espoirs à certains agriculteurs, monsieur Le Fur, c'est parce que ce n'est pas tant le bâtiment qui justifie l'étude d'impact que l'épandage. Quand vous laissez entendre qu'il ne faudrait plus d'étude d'impact à partir du moment où l'on est passé de 450 à 2 000 porcs, c'est inacceptable !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

J'ose espérer que, même si votre amendement en reste là, l'État gardera la même rigueur sur les études d'impact en matière d'épandage.

Je vais vous faire un aveu : il y a quelques années, j'ai eu l'occasion d'acquérir vingt hectares de terre près de chez moi. Je ne l'ai pas fait car, pour moi, ces terres n'étaient pas épandables. Elles ont été achetées par d'autres et font partie d'un plan d'épandage. J'ai vérifié auprès de mon successeur : on n'a jamais vu une tonne de lisier dessus – c'est à se demander où il va. Il faut reconnaître que l'on a déjà trop tiré la ficelle dans un certain nombre de secteurs.

En clair, c'est mauvais pour la Bretagne, mauvais pour la compréhension entre les uns et les autres, et mauvais pour l'image des paysans – à qui, en outre, cela n'apportera rien. Quant à ce que cela peut produire dans d'autres régions françaises, on pourrait imaginer que quelqu'un aille récupérer un tout petit élevage dans l'Orne et le transforme en élevage de 1 999 porcs. Et personne ne serait au courant, à l'exception du préfet, qui doit être informé ! En matière de compréhension du problème, je ne suis pas sûr que nous aurons progressé. Je dis cela à l'intention de ceux de nos collègues qui pensent que les choses peuvent se passer différemment chez eux : nous avons tous besoin de clarté et de transparence.

Le dernier point que je veux évoquer est le coût des études. Il me semble qu'un toilettage ne serait pas inutile, monsieur le ministre : le droit français est trop souvent basé sur l'obligation de moyens, très compliquée à mettre en place. Si, en matière d'études d'impact, on avait institué une obligation de résultat, on aurait sans doute progressé davantage. Quant aux contrôles, ils auraient été plus rapides, puisqu'il aurait suffi de procéder à des analyses de sol à proximité des installations. Ce n'est pas le choix qui a été fait en 1994 par M. Barnier, et ce n'est pas ce que voulaient les organisations professionnelles – pour des raisons que je n'analyserai pas ici, mais j'ai mon idée sur la question. En tout état de cause, c'est un mauvais service que l'on rend à tous ceux que l'on prétend vouloir aider. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Monsieur le président, mes chers collègues, notre débat est passionné et passionnant à bien des égards. Comme l'a justement rappelé Jean Dionis du Séjour, nous voyons se confronter différents éléments. Dans la mesure où les enjeux de cette loi de modernisation de l'agriculture sont en grande partie économiques, l'un des éléments les plus importants est de donner les moyens à notre agriculture de pouvoir faire face aux défis de la mondialisation et de négocier avec la grande distribution.

Comme certains de mes collègues l'ont dit avant moi, je pense que nous ne pourrons pas préserver, sur le long terme, une dynamique agricole dans notre pays ; nous ne pourrons pas préserver tous les emplois du secteur agro-alimentaire si nous n'établissons pas à la base, au moins à l'échelle européenne, des règles du jeu identiques à celles des autres pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Alors que, pendant longtemps, la France a bénéficié d'une certaine dynamique qui lui permettait de valoriser ses propres productions, aujourd'hui, on voit de plus en plus d'industriels de l'agro-alimentaire qui font « faire leur marché » de matières premières agricoles dans d'autres pays de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Si, à terme, on ne peut plus produire dans des conditions correctes, les industriels vont aller transformer les matières premières près des lieux de production. L'Allemagne est en train de devenir la puissance agricole majeure de l'Europe…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

…et la Pologne va prendre le relais demain et après-demain.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Il est essentiel que nous ayons conscience de tout cela avant de prendre un certain nombre de mesures et de dispositions.

La filière porcine pose effectivement des problèmes spécifiques, en particulier en Bretagne, en raison d'excès que nul ne songera à contester. Cette situation est souvent exagérée et caricaturée, y compris dans les esprits. Dans mon département, le Tarn, dès que l'on veut installer une petite porcherie, c'est la levée de boucliers tant cette activité est stigmatisée, et il y a toujours quelqu'un pour dire : « Il ne faut pas que le Tarn devienne la Bretagne ! » (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

La production porcine du Tarn tout entier ne doit pourtant guère excéder celle de trois ou quatre communes bretonnes.

Avant l'ouverture de ce débat, je me suis rendu sur le terrain. J'ai passé une demi-journée chez un producteur porcin du Tarn, Bernard Guidez, président des réseaux FARRE pour une agriculture raisonnée. J'ai regardé dans le détail tous les éléments relatifs au processus de production et j'ai pu voir comment il était possible de concilier respect de l'environnement et contraintes économiques – la finalité, pour l'éleveur, étant tout de même de vivre dignement de son travail. J'ai été très favorablement impressionné par ce que j'ai vu, par le sens des responsabilités de cet éleveur. Il est le premier à souffrir de la stigmatisation dont fait l'objet son activité, une stigmatisation entretenue par certains propos relayés au sein même de cet hémicycle et qui, même s'ils sont souvent tenus de bonne foi, ont pour effet de jeter l'opprobre sur la filière porcine et, au-delà, sur tout l'élevage français.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

J'ai été stupéfait quand, lundi soir, à une heure de grande écoute, j'ai vu une émission de télévision dénoncer un certain nombre de pratiques, certes condamnables, mais tout à fait marginales.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

En raison du comportement de quelques-uns, c'est toute une profession que l'on donne ainsi en pâture à l'opinion publique.

Il ne faut pas perdre de vue la problématique économique. Dans ma circonscription, la commune de Lacaune comporte un site de salaison représentant 1 000 emplois. Implanté au coeur d'une zone de revitalisation rurale, ce site constitue la seule chance de développement d'un secteur éloigné de tout. Si les élevages porcins de notre pays ne sont pas en mesure de résister à la concurrence internationale, nous allons devoir importer de plus en plus de cochons. Il y a déjà en Catalogne de véritables « usines à cochons » bénéficiant d'une extrême souplesse en matière d'exigence environnementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Si l'on ne réagit pas, les importations provenant d'élevages de ce type vont se généraliser et les filières françaises finiront par être complètement déstabilisées, en amont comme en aval.

La solution radicale consisterait à dire : « Supprimons les cochons, il n'y aura plus de pollution ! » Peut-être est-ce ce que souhaitent certains, comme cela a été le cas dans d'autres secteurs, notamment dans l'industrie. Ainsi, dans le Tarn, on n'a pas trouvé d'autre solution, pour régler le problème de la pollution du Dadou et de l'Arnette à Mazamet par les industries de mégisserie et de délainage, que celle consistant à fermer les usines !

Je pense que Jean Dionis du Séjour a raison de dire qu'il faut trouver un compromis entre les légitimes exigences environnementales et la nécessité de préserver l'outil de production et ses filières ; j'espère que nous y parviendrons en maintenant cet article, éventuellement sous une forme améliorée. En tout état de cause, nier le problème de la distorsion de concurrence n'est pas le résoudre.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Ce débat est important et il est bon qu'il ait lieu. Je voudrais mettre en lumière un point qui a été insuffisant explicité, à mon sens. On a parlé d'économie et, très longuement, d'environnement. Mais, dans le développement durable, il y a aussi un pilier social et humain. Or j'ai précisément le sentiment qu'une catégorie de Français, en l'occurrence un certain nombre d'éleveurs, est au ban de la société. Ils ne sont pas aussi égaux que d'autres devant la loi. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

C'est inacceptable ! C'est la raison pour laquelle il faut mettre un terme à la situation actuelle. Dès lors qu'ils se disent éleveurs de porcs, ils sont regardés de travers et leurs enfants sont montrés du doigt à l'école. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Dès lors qu'ils obtiennent un permis de construire, on déclenche une campagne de presse et des associations se mobilisent. Certes, elles sont dans leur rôle et je ne les critique pas. Je constate simplement les faits.

Quant à l'administration, monsieur le ministre, elle hésite. Elle est même parfois tétanisée. Les choses sont figées : c'est la glaciation. Rien ne se passe plus : on attend la mort silencieuse et annoncée d'un secteur économique. Pour l'éviter, il faut sortir de cette situation. Nous devrions arriver à trouver un accord.

Par ailleurs, cette loi prévoit qu'il faut valoriser la biomasse. Cela signifie qu'il faudra, comme nos voisins européens, construire des méthaniseurs, ce qui suppose qu'on dépose des permis, qu'on fasse des enquêtes publiques… Si l'on ne règle pas les dispositifs administratifs liés à ces investissements que nous souhaitons tous, ce voeu restera lettre morte.

Enfin, et M. Ollier nous le rappelle souvent en commission, il faut faire bonne loi. Il importe donc de ne pas mélanger questions réglementaires et questions législatives.

L'amendement de la commission a précisément trouvé le juste équilibre : il permet de sortir de l'immobilisme, de ne pas faire du réglementaire à la place de l'autorité administrative, tout en donnant une impulsion.

Je terminerai en m'adressant à mes collègues de l'opposition, qui ont déposé des amendements de suppression de l'article 10 bis. Trois possibilités s'offrent à nous. La première consiste à maintenir le texte de la commission. J'ai participé à sa rédaction, mais il apparaît aujourd'hui qu'il est excessif et qu'il faut le modifier. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) La deuxième consiste à supprimer l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Cela reviendrait à dire aux éleveurs : circulez, il n'y a rien à voir ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Cet article n'était pas dans le projet de loi initial !

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Je suis d'accord avec vous, monsieur Brottes. Nous avons introduit cet article pour ouvrir le débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

La troisième consiste à adopter l'amendement que vont nous présenter le rapporteur et le président de la commission. Et je pense que c'est la bonne solution. Hier soir, nous sommes parvenus à un compromis similaire sur le purin d'ortie. Nous avons su nous retrouver sur un sujet emblématique, qui fait souvent la une de la presse… Nous avons su écrire la loi sans nous enfermer dans des postures. Que l'ensemble des groupes politiques se retrouvent à présent sur l'amendement de la commission honorerait le Parlement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Mon propos sera dans le droit fil de celui d'Antoine Herth. L'article 10 bis, c'est-à-dire l'amendement déposé par Marc Le Fur, s'appuie sur une réalité. En France, l'agriculture et l'agroalimentaire ne font qu'un : 420 000 emplois dans l'industrie agroalimentaire, 128 milliards d'euros de chiffre d'affaires. En outre, fustiger un parlementaire, qui plus est s'il est breton, fustiger une corporation, une profession ou, à l'intérieur d'une profession, une catégorie d'éleveurs est une erreur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Comme Antoine Herth et d'autres de mes collègues, j'en appelle à la sagesse de l'Assemblée et du Gouvernement. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, il faut, avec l'aide des parlementaires, trouver la voie du compromis. Il serait insensé que, dans le cadre d'une loi de modernisation de l'agriculture, nous ne nous intéressions pas à cette question, qui est celle de la concurrence et de la compétitivité de nos éleveurs car c'est bien de cela qu'il s'agit. Nous voulons permettre à nos agricultures, aussi diverses soient-elles – familiales, de niche ou biologiques – d'être compétitives. Nous voulons permettre à nos éleveurs, à nos agriculteurs de vivre de leur métier et, surtout, d'être compétitifs.

Ce qui se passe dans les pays qui nous entourent ne peut nous laisser indifférents. La question de l'harmonisation européenne est donc majeure. Je dis à mes collègues de sensibilité politique différente de la mienne, et que je respecte, qu'il nous faut aujourd'hui concilier urgence économique et urgence écologique. L'un ne doit pas aller sans l'autre. En Bretagne, cette nécessité prend tout son sens.

Certains ont dit qu'on allait rallumer le feu, réactiver des braises. J'ai pu constater dans ma région natale de Bretagne que cette campagne de désinformation a été méthodiquement organisée. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Il faut retrouver dans cet hémicycle la voie de la sagesse. Nous déployons des efforts pour mettre en place des périmètres de protection des captages, nous travaillons à l'élaboration de schémas d'aménagement et de gestion des eaux, les éleveurs et les producteurs font des efforts pour se mettre aux normes : il faut expliquer à nos concitoyens que ces efforts conjugués des différents acteurs – professionnels de l'agriculture, de l'agroalimentaire, collectivités territoriales, État – vont dans le bon sens. Nous avons fait beaucoup d'effort en Bretagne et je sais qu'il en est ainsi dans de nombreuses autres régions.

Je demande aux parlementaires qui ont plus d'expérience que moi de regarder quelques années en arrière : cette agriculture, aujourd'hui clouée au pilori et si décriée par certains, a été pourtant pour la France, et notamment pour la Bretagne, source de création de richesse et d'emploi. Il ne faut pas l'oublier.

Rien n'est inéluctable. La question européenne me paraît majeure et il faut travailler à trouver la solution du compromis entre l'urgence économique et l'urgence écologique. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Mon intervention visera, une fois encore, à montrer l'inadaptation de ce texte à mon département. Ce sujet m'intéresse, mon frère est éleveur porcin. Il a environ 200 truies. Dans une île touristique de 1 700 kilomètres carrés, qui compte quelques dizaines d'élevages, même si nous sommes en déficit de production, on pourrait donc, grâce à ce texte, faire passer les ateliers de 450 à près de 2 000 truies.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Même s'il s'agit de 1 000 truies, on voit bien que le texte est totalement inadapté à nos réalités.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué la rédaction de votre ordonnance. Outre le fait que nous sommes philosophiquement contre le principe des ordonnances, vous allez adapter cette loi aux outre-mer sur quatre petits points : la réforme des chambres d'agriculture, la composition des commissions chargées de statuer sur la destination des terres agricoles déclassées, les schémas directeurs pour l'aquaculture et la pêche marine. Or les outre-mer, c'est l'essentiel des espaces maritimes français, c'est 98 % de la biodiversité française. On va cependant nous parler de l'organisation de nos chambres consulaires !

Monsieur le ministre, comment comptez-vous adapter ce texte, qui risque d'être calamiteux au regard des réalités insulaires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Merci tout d'abord, monsieur le président, d'accepter que nous prolongions la séance. Ce sujet le mérite.

Chers collègues, je voudrais essayer de dépassionner le débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Monsieur Le Fur, vos interrogations sont légitimes. Vous avez raison de vous interroger sur les difficultés rencontrées dans les élevages. Mais la solution que vous proposez risque de poser plus de problèmes demain qu'elle n'en résoudra.

Oui, c'est vrai, les délais d'instruction sont insupportables pour les éleveurs. Oui, l'administration, qui rajoute bien souvent des règles aux règles, prend beaucoup plus de temps qu'en Allemagne pour instruire les dossiers. Dès lors, il peut y avoir des distorsions de concurrence. M. Folliot et M. Benoit ont fort justement évoqué les aspects économiques de la question. Mais il y a aussi l'écologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Nous avons pris en compte les deux éléments !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

On ne peut pas traiter l'agriculture en tant que telle, à travers quelque filière que ce soit, si l'on n'accepte pas en même temps de considérer que cette activité s'inscrit dans une logique, que nous avons tous approuvée ici : celle du développement durable.

Comment concilier les deux ambitions ? Entre l'amendement de M. Le Fur, qui a été adopté par la commission, et la position défendue par nos collègues de l'opposition, il y a un juste milieu : ce sont les deux amendements que nous avons déposés et qui semblent de nature à concilier les points de vue. Le ministre nous donnera son avis.

De quoi s'agit-il ? Monsieur Le Fur, vous avez raison sur les délais. Réglons donc le problème. L'amendement que nous proposons ramène les délais à un an, contre deux ans et même plus – un orateur a parlé de quatre ans. Cela n'aura aucune conséquence en termes d'environnement et ne soulève aucune difficulté sociétale.

Sur les seuils, il faut ouvrir la discussion. Lorsque j'ai pris connaissance de l'initiative de Marc Le Fur – j'étais ce jour-là à la commission mixte paritaire sur le Grenelle 2 –, j'ai considéré qu'elle était bonne. Je suis comme M. Peiro – nous sommes tous deux périgourdins, nous sommes même voisins en Dordogne.

Monsieur Le Fur, vous avez développé avec beaucoup de talent et d'intelligence des arguments qui ont su convaincre, même nos collègues du Nouveau Centre (Rires)…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

…que l'on voit très enthousiastes.

Chers collègues, je vous demande d'entrer dans cette discussion sans passion, d'accepter de comprendre que des gens attendent beaucoup de nous pour pouvoir développer leur activité économique. De même, il faut accepter que certains ici, et j'en fais partie, veulent, tout en étant d'accord pour faciliter les activités, qu'on reste intransigeant au regard du développement durable. Tout le monde nous regarde : pas seulement les acteurs de la filière porcine mais le monde entier pour voir dans quelle mesure notre pays pourra respecter le Grenelle de l'environnement, y compris pour les productions agricoles.

Je sais que la conciliation n'est pas facile. Il faut donc que chacun fasse un effort. Je citerai deux exemples. Je commencerai par les conflits communautaires. Avez-vous songé, monsieur Le Fur, que, si l'on en reste à votre position, le gouvernement français va se trouver en difficulté dans le cadre des contentieux communautaire, notamment au regard de la directive nitrates ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Il faut bien penser que, si nous restons sur cette position, cela aura des conséquences graves.

L'évaluation environnementale est un autre contentieux en cours.

Un troisième contentieux pourrait reprendre : celui des eaux potables en Bretagne. Nous venons tout juste d'en sortir ; le risque s'élève à 50 millions d'euros. Qui dit, si d'aventure nous en restions au texte que vous avez fait voter, que ce contentieux ne sera pas rouvert ? Bien sûr, je ne sais pas ce qu'il en sera, mais je m'interroge.

Je voudrais que l'on ne se détermine pas, à chaque fois que l'on vote quelque chose, en fonction de la passion du moment : il faut réfléchir sereinement aux conséquences pour demain.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

J'ajoute, monsieur Le Fur, qu'avec votre texte on sortira du régime de l'autorisation. En effet, il y a à peu près 16 000 élevages en France, et sur ce nombre 13 000 seront sortis du système de l'autorisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Est-ce acceptable ? Je comprends bien ce que vous souhaitez. Vous dites qu'en Allemagne les contraintes sont plus légères que chez nous. Quant à moi, j'aimerais qu'il y ait une étude d'impact, et nous allons d'ailleurs en réaliser une dans le cadre de la commission des affaires économiques. En Allemagne, aux contraintes fédérales s'ajoutent les contraintes au niveau des Länder, ce dont personne ne parle. Au total, les choses ne sont peut-être pas si différentes de chez nous.

Alors, monsieur Le Fur, je souhaiterais vous appeler à une conciliation, vous et ceux de vos collègues qui partagent votre sentiment. Si vous pensez que votre proposition risque de vous entraîner trop loin, rejoignez-nous. C'est d'ailleurs la position que M. Raison va défendre dans quelques instants.

Monsieur Dionis du Séjour, vous invoquez la liberté.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Pensez à la dégradation de l'acceptation sociale des élevages en France. Je veux que les agriculteurs puissent poursuivre leur activité sans se heurter à des lobbies qui viennent systématiquement manifester avec des banderoles devant les mairies. J'ai connu ce problème quand j'étais député des Hautes-Alpes : des gens rejetaient la création d'élevages.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Si toutes les garanties ne sont pas prises en ce qui concerne l'enquête publique et toutes les consultations nécessaires menées de façon à ce que la chose soit acceptable, alors on ne pourra plus créer un seul élevage en France.

À cet égard, ceux qui défendent la même position que vous, monsieur Le Fur, ont raison sur le fond mais tort sur la forme, parce qu'ils créent les conditions pour que la création de nouveaux élevages ne soit plus acceptée. Vous faites en sorte que l'on puisse brutalement regrouper, sur un site qui n'existe pas encore, sans enquête publique et sans étude d'impact, 2 000 ou 3 000 porcs. Vous avez peut-être raison, sur le fond, d'accorder cette facilité aux agriculteurs, mais je vous mets au défi de réaliser cette opération. Les agriculteurs se trouveront demain dans l'impossibilité de le faire, parce que la population s'y opposera. Ils seront les premières victimes de cette facilité que vous voulez leur donner.

Je souhaite simplement, en dehors de toute passion, que l'on essaye de concilier les points de vue des uns et des autres. Bonté divine ! Ce n'est pas là une affaire de gauche et de droite ; les deux parties de cet hémicycle sont divisées sur la question.

M. Raison exposera rapidement les deux amendements que nous avons déposés. Vous verrez ainsi, monsieur Le Fur – et je remercie M. Herth de l'avoir reconnu –, que nous ouvrons la possibilité de raccourcir les délais. Nous donnons aussi de la souplesse pour l'installation par rapport au système des autorisations, en favorisant les regroupements que vous souhaitez.

Je ne souhaite pas, chers collègues, que nous rouvrions une guerre sur ce sujet uniquement pour une affaire de principe. Mettons-nous d'accord, tous ensemble, pour trouver la meilleure solution possible pour l'élevage porcin, mais aussi pour une agriculture durable. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Un certain nombre de mots forts ont été prononcés. Je rappellerai que nous sommes ici à l'Assemblée nationale, au Parlement français. Jusqu'à preuve du contraire, la Bretagne n'a pas pris son indépendance ! J'ai pourtant eu l'impression, à un certain moment, que nous étions au parlement de Bretagne ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Il est tout de même important de le rappeler. Mme Erhel a beaucoup parlé d'intérêt général et de respect : c'est dans cet état d'esprit que je vais m'exprimer.

L'intérêt général, ce n'est pas l'intérêt politique que tel ou tel parti représenté dans cet hémicycle peut tirer de cette question, mais bien l'intérêt du pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

C'est aussi cela, le développement durable. En effet, le terme est souvent galvaudé. Le développement durable, c'est l'équilibre entre le respect de l'environnement, les données sociales et l'économie.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

On l'oublie trop souvent. Or ce que nous essayons de faire ici, c'est bien de trouver des équilibres. Dans cet hémicycle, il y a eu de grands moments, lorsque les défenseurs de positions très opposées, voire extrêmes – d'un côté comme de l'autre – ont fini par trouver un accord raisonnable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

C'est ce que nous vous proposons, Patrick Ollier et moi, avec l'amendement qui sera défendu après les amendements de suppression, si ceux-ci, bien sûr, ne sont pas votés.

J'anticiperai donc en commençant par donner mon avis sur l'idée qui consisterait à supprimer cet article. J'y suis très défavorable, parce que si nous le faisions, cela voudrait dire que les parlementaires ne sont plus capables, dans le cadre d'un débat législatif, de trouver un équilibre. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Ce n'est pas un bon argument ! Ce n'est pas acceptable !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Or c'est cet équilibre que nous vous proposerons d'atteindre par l'amendement no 1280 .

Je vous rappelle tout de même que j'avais dit, en préambule à l'adoption de l'amendement Le Fur en commission, que je n'accepterais aucun amendement qui pourrait remettre en cause les progrès en matière d'environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Or j'ai accepté cet amendement. Il faut tout de même dire que cet amendement ne remet pas en cause la qualité de l'environnement. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

En effet, une installation soumise à déclaration doit fournir un plan d'épandage.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Si ce plan d'épandage est modifié, ne serait-ce que d'un hectare, il doit à nouveau être autorisé par la préfecture après qu'un hydrogéologue est venu vérifier si, sur ce nouvel hectare, l'épandage est possible. Or c'est bien là le fond du problème en matière de respect de l'environnement.

Nous ne sommes pas là non plus, cher Germinal Peiro, pour faire la loi en fonction des titres des journaux. Je ne peux pas reprocher au Monde de ne pas titrer sur la contractualisation ou l'assurance récolte : ce n'est quand même pas très vendeur ! (Sourires.) En revanche, si vous regardez La France agricole, qui est un journal spécialisé, vous constaterez qu'il consacre toute sa première page à la LMA,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

…et c'est normal. Il me semble un peu délicat de décider de la manière dont on vote en fonction du titre qu'il y a – ou non – dans un quotidien généraliste !

J'en viens à l'amendement d'équilibre que nous proposons. Je vais vous en livrer la substance, certains ne l'ayant peut-être pas vu – il faut dire qu'il arrive plus tard dans la liasse d'amendements. Nous vous proposons qu'un décret soit pris avant le 31 décembre 2010. Cela nécessite d'ailleurs que nous administrations fassent diligence, car il y a un certain nombre de précautions à prendre.

Ce décret « précise les règles applicables aux regroupements ou modernisations d'élevages ». Cela améliorera les conditions des élevages. Vous avez souri à propos de l'exemple des trois élevages. Je dis bien : trois, parce qu'on ne parle ici que des cochons, mais, dans les élevages, sont aussi concernés par les autorisations les bovins et les volailles. Si vous avez, donc, trois élevages vétustes, dont les fosses vieillissantes peuvent avoir des fuites, et si ces trois élevages se regroupent pour en former un seul beaucoup plus propre – tout en sachant également que l'on choisit souvent pour cela le site le plus éloigné du village –, ce sera forcément un progrès pour l'environnement et cela ne modifiera en rien – je le souligne encore une fois – le plan d'épandage. Or c'est bien cela qui est primordial, car ce qui compte, c'est la quantité d'azote épandue sur chaque hectare.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire un cours sur le cycle de l'azote, même si la chose mérite d'être connue. Je me souviens d'avoir eu affaire à Mme Voynet, quand elle était conseillère régionale en Franche-Comté. Eh bien, j'ai été obligé, une fois, de lui faire un cours d'une demi-heure sur le cycle de l'azote, parce qu'elle ne savait pas comment cela fonctionnait. (Rires sur les bancs du groupe UMP – Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Vous avez bien du mérite, monsieur le rapporteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

C'est une attaque personnelle inadmissible !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

C'est comme cela que vous comptez apaiser le débat ?

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Monsieur le rapporteur, veuillez avancer dans vos explications, s'il vous plaît.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

J'avance, monsieur le président !

Ce que nous vous proposons donc, c'est une modernisation des élevages, à condition que l'on n'aboutisse pas à un accroissement sensible. En effet, c'est bien là le grand souci que j'ai relevé dans toutes les interventions, ainsi que dans tous les articles que j'ai pu lire. On dit que nous allons créer de nouveaux élevages. Eh bien, la solution d'équilibre que nous vous proposons consiste à ce que l'on puisse moderniser nos élevages existants, sans pour autant qu'il y ait un seul animal de plus ou le moindre changement en matière de plan d'épandage.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Si ce n'est pas un équilibre, je ne sais pas ce que c'est !

Je propose aussi une autre chose qui peut satisfaire aussi bien les pessimistes que les optimistes. En effet, les pessimistes – ceux qui n'ont pas confiance en l'administration – pensent que le décret peut aller plus loin que ce que je suis en train d'expliquer, tandis que les optimistes ont l'impression qu'il ira moins loin. Bien que j'aie obtenu des engagements du ministre sur ce point, on peut avoir des doutes sur l'administration. Eh bien, ce qui est proposé, c'est que les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat soient consultées sur ce projet de décret, pour qu'il n'y ait pas de surprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Ainsi, personne ne sera surpris et les engagements qui ont été pris ici seront respectés dans le décret, ce qui n'est pas toujours le cas.

Je vous encourage donc, chers collègues, à rejeter les amendements de suppression et à voter l'amendement présenté par le président de la commission des affaires économiques et par moi-même. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le président, tout a été dit, remarquablement dit, et d'ailleurs sans redites. Je ne serai donc pas très long. Je ferai seulement quelques observations pour bien recadrer tout ce qui a été dit et essayer de trouver une solution, en accord naturellement avec le rapporteur et le président Ollier.

Première remarque, très générale : je rappelle que nous sommes ici pour faire la loi française. Nous ne sommes pas ici pour légiférer en faveur d'une catégorie de la population. Notre honneur est d'arriver à trouver un consensus, un équilibre entre des intérêts qui sont divergents. Or il y a effectivement, sur la question que nous traitons aujourd'hui, des intérêts divergents.

Deuxième remarque : qu'est-ce que les producteurs, et en particulier les éleveurs de porc, ont à l'esprit ? C'est d'abord le coût de leur production et le prix auquel ils peuvent arriver à la vendre – aux alentours d'un euro le kilogramme, très souvent en dessous du coût de revient.

Ensuite, ils ont à l'esprit la stigmatisation dont ils font trop souvent l'objet. Je rejoins à cet égard ce qui a été dit aussi bien par Antoine Herth que par Marc Le Fur : il devient presque impossible aujourd'hui d'élever dans des conditions de dignité acceptable des porcs en France, parce que le métier est dévalorisé, parce qu'il n'est plus suffisamment rentable et parce que les éleveurs de porc sont montrés du doigt.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Enfin, la troisième chose qu'ils ont à l'esprit, c'est la courbe de l'évolution comparée de la production de porc en France et en Allemagne depuis vingt ans.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

La production de porc en France est passée de 30 à 24 millions de tonnes. En Allemagne, elle est passée de 28 à 45 millions.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Voilà la réalité économique que les producteurs ont à l'esprit.

Ils ont le sentiment très profond – je le sais parce que je les rencontre, aussi bien en Bretagne que dans le Nord – que, petit à petit, sans le dire et sans l'avouer, on se dirige vers une extinction de la production de porc en France.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Ce serait naturellement une erreur. Il nous faut donc réagir à cette situation.

Comment devons-nous le faire ? Devons-nous aller jusqu'à nous aligner sur le régime allemand pour répondre à cette difficulté ? Est-ce la bonne réponse, comme le suggère Marc Le Fur ?

Je reconnais à ce dernier le mérite d'avoir mis le doigt sur la difficulté.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Mais je ne crois pas que l'alignement sur la situation et les choix allemands soit la bonne solution.

Sur la question de l'harmonisation des règles européennes, je voudrais faire une remarque à Jean Dionis du Séjour. Vous savez que je suis un Européen convaincu et que je plaide en faveur de l'harmonisation des règles européennes. Mais je crois aussi qu'il n'y a rien de pire pour l'Europe que l'esprit de système.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

La directive a donné une possibilité. Elle a indiqué les règles qui pouvaient être appliquées en termes d'autorisations à l'intérieur de l'Europe. Libre ensuite à chaque État d'adapter cette directive à sa propre réalité.

Dieu sait qu'il n'y a pas plus germanophile et germanophone que moi dans ce gouvernement, mais je vous dis qu'il n'est pas bon de s'aligner, en matière de régime d'installation, sur les règles allemandes. Les choix allemands ne sont pas les choix français et les règles européennes sont non pas impératives, mais indicatives.

Notre intérêt n'est pas de nous aligner rigoureusement sur les choix faits par les Allemands en la matière : la géographie allemande n'est pas la géographie française, les réalités des sols allemands ne sont pas celles des sols français, les taux de nitrate dans l'eau ne sont, hélas ! pas non plus les mêmes en Allemagne et en France, notamment en Bretagne.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Le travail remarquable – je le dis en connaissance de cause – de Michel Barnier a été rappelé. Directeur de cabinet du Premier ministre au début de l'année 2007, j'ai été le premier à engager les travaux de fermeture des captages d'un certain nombre de bassins versants, en estimant que les taux de nitrates dans leurs eaux étaient excessifs. Je crois donc savoir de quoi je parle.

Utilisons donc les facultés qui nous sont offertes par les directives européennes, mais ne nous alignons pas sur les règles allemandes ; prenons en compte les difficultés particulières à la France, notamment la réalité de nos eaux et de nos sols.

Monsieur Cochet, si je maintiens ma position, c'est pour les deux raisons que j'ai déjà exprimées en commission, et sur lesquelles je ne reviens que rapidement. D'abord, nous sommes tous ici convaincants et expérimentés, nous connaissons bien les dossiers. Mais si nous allons vers un alignement, nous aurons beau dire et beau faire, nous aurons beau apporter toutes les explications possibles, nous aurons rallumé la guerre du porc en Bretagne. Alors nous aurons tous perdu : nous, un tout petit peu ; les producteurs de porc, beaucoup.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Ensuite, nous avons effectivement réussi à clore le contentieux sur les nitrates avec l'Union européenne, et cela n'a pas été une mince affaire. Si je reviens à Bruxelles en expliquant que la France a finalement considéré devoir s'aligner rigoureusement sur les choix allemands, alors nous courons le risque de rouvrir le contentieux sur les nitrates avec l'Union européenne. Je ne le souhaite pas.

Je crois pourtant qu'il existe une voie possible entre le statu quo – on ne fait rien, parce qu'on croit que rien n'est possible – et l'alignement sur les choix allemands, qui ne correspondent pas à notre réalité. Michel Raison l'a très bien expliqué.

Avant d'expliquer nos propositions, je tiens aussi à recadrer notre débat et à signaler que les producteurs de porc rencontrent des problèmes beaucoup plus graves que celui du régime d'installation. Ainsi, la question de la mise aux normes au titre du bien-être animal, qui doit être faite d'ici à 2013, est une question autrement plus importante que ce dont nous parlons maintenant. Cela représente 370 millions d'euros d'investissement : les éleveurs de porcs n'en sont pas capables, il faudra donc traiter ce problème et les aider – soit en leur apportant un soutien financier, soit en leur accordant un délai pour la mise aux normes. C'est là une question autrement plus grave que celle du régime d'installation.

Il faudra aussi traiter la question de l'abattage : avant même le problème de la déclaration d'installation, la compétitivité allemande vient de l'abattage. Le transport des animaux – notamment le problème des quarante-quatre tonnes – est une autre question absolument vitale pour la compétitivité des élevages de porcs.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Ne résumons donc pas cette question de la compétitivité à celle, certes importante, du régime de déclaration d'installation : il faut avoir conscience de tout ce qui reste à faire.

Notre proposition est claire et simple : voyons les difficultés que rencontrent vraiment les producteurs de porcs, et essayons d'y apporter une solution.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Il y a, c'est évident, un problème de délais : tous ceux qui ont rencontré des producteurs de porcs savent qu'il est inacceptable que notre administration mette deux ou trois ans avant de délivrer une autorisation qui, dans tous les autres pays, l'est en neuf mois ou un an. Je souhaite que, dans la loi, nous puissions réduire ce délai à un an. C'est une première mesure, que je crois indispensable.

Nous proposons ensuite de ne pas toucher aux seuils : ce serait envoyer un signal politique négatif, et cela ne rendrait pas service aux producteurs – nous leur ferions croire que nous améliorons leur situation, alors que nous renforcerions la stigmatisation dont ils font déjà l'objet et que nous rendrions en réalité encore plus difficile l'installation et le développement d'une installation porcine en France. Monsieur Le Fur, je sais que vous agissez par conviction ; mais vous verrez que, si nous touchons les seuils, non seulement nous allons rallumer la guerre du porc, mais en plus l'administration sera contrainte, pour toutes sortes de raisons, de renforcer ses contrôles. Nous aurons, je le redis, tous perdu : nous, un tout petit peu ; les producteurs de porc, beaucoup.

En revanche, il faut agir sur la question du regroupement. Quand deux élevages de porcs existants, l'un de 600 ou 700 porcs, l'autre de 1 000 porcs situé un petit peu plus loin, sont regroupés, ces élevages sont modernisés, l'environnement est mieux respecté – et les règles d'épandage ne sont pas modifiées. Je crois que tout le monde est alors gagnant : l'éleveur y gagne du temps, notamment en procédure ; les riverains bénéficient d'une installation plus respectueuse de l'environnement ; la compétitivité française dans son ensemble s'améliore.

Voilà ce que proposent votre rapporteur et le président de la commission. Hors de tout débat idéologique, je crois que nous pouvons, sur cette base, trouver un compromis et faire la loi comme nous sommes tous ici soucieux de la faire.

Monsieur le président, je vous demande, si c'est possible, de passer à la discussion des amendements de suppression, de façon à ne pas interrompre des travaux bien engagés. (« Très bien ! » sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je suis saisi de trois amendements, nos 127 , 585 et 652 , tendant à supprimer l'article.

Sur le vote de ces amendements, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour défendre l'amendement n° 127 .

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

De la discussion que nous venons d'avoir ressort au moins une chose : l'adoption de cette disposition le 16 juin dernier nous a menés dans une impasse. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Pour nous, la seule solution pour sortir de cet imbroglio est de voter la suppression de cet article. Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, je fais appel à vous : au fond de vous-même, vous êtes, je le sais, opposés à cet article 10 bis. Si vous ne vous associez pas à notre demande de suppression, vos noms seront – à votre corps défendant, je le répète – associés à cette disposition, même si vous êtes contre, j'en ai la conviction.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Cet article est dangereux, il est en contradiction avec le Grenelle de l'environnement, il remet en cause la parole de l'État, il est irresponsable, il oppose les uns aux autres. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et NC.) Cette discussion est suivie de près, et il faut, je crois, que chacun prenne ses responsabilités.

Je suis sûre qu'au sein de cet hémicycle, vous êtes nombreux à partager notre conviction que cet article n'est pas bon : prenez vos responsabilités et rejetez-le ! Bien sûr, il est toujours difficile de reconnaître que l'on a eu tort de faire adopter une disposition. Mais vous pouvez vous exprimer contre. On ne peut pas comparer la situation allemande et la situation française : cela a été expliqué tout à l'heure, et M. le ministre l'a très bien rappelé.

C'est ma conviction profonde : il faut supprimer cet article. Je vous appelle donc tous à voter cet amendement de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 585 .

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je ne suis pas encore intervenu sur cet article, et je voudrais donc dire quelques mots sur le sens de nos échanges.

Je ferai d'abord une observation que je crois largement partagée ici : on peut regretter que le Gouvernement ait engagé la procédure accélérée. C'est l'exemple même d'un débat conduit à la va-vite… (Protestations sur les bancs des groupes UMP et NC.) Mais si !

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Cet amendement est arrivé devant notre commission des affaires économiques ; que le débat puisse aussi avoir lieu en deuxième lecture au Sénat aurait été une très bonne chose. C'est en ce sens que nous allons trop vite : nous allons voter, certes après un large échange, mais il aurait fallu prendre le temps du débat au sein de chacune des deux assemblées. Je sais que cette opinion est partagée par beaucoup.

Le problème sera finalement réglé en commission mixte paritaire, et on sait qu'en CMP les problèmes ne sont pas toujours réglés de la bonne façon.

Ensuite, je ne mets pas en cause Marc Le Fur.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Il s'est comporté en grenadier voltigeur. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Les orientations de politique agricole visent – et l'on peut le comprendre, même si je pense qu'il pourrait y avoir d'autres moyens d'action – la performance et la compétitivité. M. le ministre l'a bien dit. Au sein de ce mouvement, notre collègue Le Fur a essayé d'apporter des réponses qui, à mon avis, ne sont pas bonnes. Mais il a apporté des réponses dans le cadre de cette stratégie agricole-là.

En bon grenadier voltigeur, il a tout de même ouvert un peu vite sa grenade ; et tout le monde est bien embêté pour la regoupiller. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

On voudrait enfin, faire croire que ceux qui sont opposés à l'amendement Le Fur, devenu l'article 10 bis, sont les adversaires des éleveurs : mais ce n'est pas cela du tout !

Tous les éleveurs porcins – y compris ceux qui possèdent de grosses exploitations – sont pris dans ce mouvement de concentration, dans cette recherche du prix le plus bas. Ce ne sont pas les éleveurs en tant qu'individus qu'il faut attaquer : c'est tout un système qui les amène là où ils sont ! Moi-même, pendant mes vacances en Bretagne, j'ai visité des élevages, et j'ai pu mesurer les contraintes qui pèsent sur eux.

Il faut donc être très clair : en aucun cas, nous ne remettons en cause des exploitants agricoles qui sont conduits à évoluer pour des raisons économiques, à cause des contraintes de la compétitivité – même si, pour ma part, encore une fois, je pense qu'on pourrait évoluer d'une autre façon.

Monsieur le ministre, vous avez émis, en commission, un avis défavorable à l'amendement de M. Le Fur, mais le problème, c'est que vous avez justifié cet avis non pas par des arguments de fond, mais plutôt par des arguments de contexte : vous avez fait valoir – et vous avez d'ailleurs raison ! – qu'en matière de politique agricole il faut aujourd'hui rechercher le consensus. Un amendement comme celui-ci, qui crée un clivage, est donc par nature mauvais : il oppose les uns aux autres. Or, le devenir de l'agriculture aujourd'hui, c'est le rassemblement des producteurs, des consommateurs, des distributeurs. Il faut avoir une volonté de rassembler, et non pas de diviser.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

C'est vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Monsieur Le Fur, cher collègue, vous avez eu tort de choisir la division alors qu'il faut aller vers le consensus et le rassemblement pour apporter des réponses partagées. C'est extrêmement important.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Pour ma part, je crois qu'il faut supprimer purement et simplement cet article ajouté en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je comprends bien les tentatives qui sont faites, et j'ai bien entendu les discours des uns et des autres, notamment ceux du président Ollier et du ministre. Mais ne prenons pas de mesures expéditives qui ne répondront pas au problème de fond !

Nous devons réfléchir à un autre développement de l'agriculture, s'agissant notamment de l'élevage porcin. D'ailleurs, monsieur le ministre, le document Objectif terres 2020, présenté au mois de février 2009 – que nous avons tous reçu, mais dont on parle peu – contient des orientations dans le domaine agricole montrant la possibilité, dans notre pays, d'un développement de l'agriculture équilibré et respectant l'environnement. Hélas, nous n'allons pas dans cette direction !

Ce document donne des exemples d'élevage de taille mesurée, avec des productions de qualité et un accompagnement en termes de commercialisation et de lutte contre la pollution. C'était le chemin à suivre, car si nous adoptions l'article tel qu'il nous est proposé, nous entrerions véritablement dans un processus de concentration.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Pour ma part, j'estime qu'il faut plutôt viser la rupture. Il faut réduire les délais, certes, mais cela n'en signifie pas moins que nous sommes déjà dans le mouvement, puisqu'il faut, selon vous, concentrer au plus vite. Ce n'est pas une bonne solution.

Il faudrait pouvoir inscrire dans la loi de finances 2011 des aides qui accompagneraient les agriculteurs pour tout ce qui est urgent – je pense notamment à la mise aux normes, dont vous avez dit vous-même, monsieur le ministre, qu'elle était prioritaire. Cette question est beaucoup plus importante que celle qui nous divise aujourd'hui.

De même, monsieur le ministre, s'agissant d'accorder la certification environnementale aux éleveurs porcins, pensez-vous que nous allons dans le bon sens en nous dirigeant vers une concentration effrénée ? (Marques d'impatience sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Il faut, au contraire, accompagner techniquement, au niveau de la recherche et de l'innovation, en matière de nouvelles techniques d'élevage. Il faut, certes, accorder des aides financières, mais en aucun cas continuer dans la voie de la concentration, qui ne pourra pas se conjuguer avec le respect de l'environnement et qui aura des effets désastreux.

Pour toutes ces raisons, il faut supprimer l'article 10 bis. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Yves Cochet, dont nous connaissons la brièveté oratoire (Sourires), pour soutenir l'amendement n° 652 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Nous avons encore du temps de parole, monsieur le président !

Comme l'ont démontré Mme Erhel et M. Chassaigne, j'estime que cet article, dans l'intérêt général, doit être purement et simplement supprimé. En outre, c'est une sorte de bombe pour la nature, pour toute la société, pour les éleveurs et les agriculteurs, et même pour le Gouvernement, comme je vais tenter de vous en convaincre, monsieur le ministre.

L'article 10 bis viole l'article 4 de la directive 85337CE du 27 juin 1985 relative à l'évaluation des incidences sur l'environnement de certaines activités, en imposant une évaluation environnementale obligatoire pour les installations destinées à l'élevage intensif et concentré – André Chassaigne vient d'en parler excellemment. Le classement des installations d'élevage aurait pour effet de modifier les seuils et mettrait donc la France en infraction avec l'article 4 de la directive. De plus, la participation du public au processus décisionnel, imposée par l'article 6 de la même directive, serait empêchée.

Si l'Assemblée n'adopte pas nos amendements de suppression et vote pour le relèvement des seuils, elle ne sauvera pas la France, monsieur le ministre, permettez-moi de le souligner, dès lors qu'un acte législatif, pour être valide, doit répondre aux finalités essentielles des directives européennes. L'adoption de l'article 10 bis aboutirait donc à une condamnation quasi certaine de la France devant la Cour de justice des communautés européennes.

Les conséquences en seraient néfastes pour tous. Pour les consommateurs, les riverains, les plaisanciers et autres vacanciers dès l'ouverture de la saison ; pour les contribuables, qui devront payer plus cher la potabilisation de l'eau, la lutte contre la prolifération des algues vertes et des algues bleues et, enfin, les amendes de la Cour de justice européenne pour non-respect des directives, comme cela s'est produit en 2001 pour le non-respect de la directive nitrates en Bretagne. Quant aux éleveurs eux-mêmes, ils verront se dégrader leurs conditions de travail, leurs relations et leur image avec le reste de la société.

Pour conclure, je rappelle que le rapport publié cette année par la Cour des comptes sur la gestion de l'eau en France vient de souligner le manque de volonté de l'État pour remettre en cause des pratiques agricoles marquées par l'encouragement au productivisme et le choix d'une agriculture intensive.

Voilà pourquoi, chers collègues, je vous propose de supprimer l'article 10 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur les amendements identiques nos 127 , 585 et 652 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 75

Nombre de suffrages exprimés 75

Majorité absolue 38

Pour l'adoption 29

Contre 46

(Les amendements identiques nos 127 , 585 et 652 ne sont pas adoptés.)

Je suis saisi d'un amendement, n° 1280 , qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements.

La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir les sous-amendements n° 1382 , 1381 , 1383 et 1384 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Monsieur le ministre, beaucoup a déjà été dit. L'amendement présenté par le président de la commission et le rapporteur est pour moi un élément de progrès, même s'il ne satisfait pas toutes les attentes que j'avais exprimées en rédigeant le texte précédent.

D'abord, cet amendement n'augmente pas la capacité des élevages. C'est une condition que j'avais moi-même posée.

Ensuite, nous allons permettre des constructions nouvelles sur les sites existants, d'une manière plus simple qu'aujourd'hui. Nous créons en effet un système d'enregistrement, qui existe dans l'industrie, mais qui, jusqu'à présent, était assez peu répandu dans l'agriculture.

Par conséquent, nous progressons. La vie parlementaire m'a appris à prendre les compromis comme ils viennent s'ils vont dans le bon sens. Nous devons nous dire que nous ne sommes pas à la recherche de la perfection, mais seulement du progrès.

J'ai déposé plusieurs sous-amendements. Pour ne pas allonger les débats, et compte tenu des réponses du rapporteur et du ministre, je les retire à l'exception du sous-amendement n° 1381 , qui vise précisément à appliquer ce qui figure dans l'exposé sommaire de l'amendement de la commission.

À la différence de mon texte, qui était d'application immédiate, la mise en oeuvre du dispositif est subordonnée à la publication d'un décret. Je fais confiance au ministre et au Gouvernement pour que son contenu soit satisfaisant. Objectivement, les conditions posées devraient permettre d'arriver à un système plus simple et à moins de contraintes. Nous ne sommes pas au bout du chemin, mais nous en avons bien parcouru la moitié.

J'intègre également le fait que ce compromis ne concerne pas seulement cette disposition, monsieur le ministre, mais les délais concernant les autorisations ainsi que les délais de recours. Tous ces éléments vont dans le bon sens.

(Les sous-amendements nos 1382 , 1383 et 1384 sont retirés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 1381  ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Favorable. Il s'agit en effet de rectifier une erreur de rédaction de notre part.

Je remercie également M. Le Fur d'avoir retiré ses autres sous-amendements.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Le vote sur le sous-amendement est commencé (« Non ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Je demande la parole pour une explication de vote sur l'amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Vous l'aurez aussi. Il y en aura pour tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

C'est faux ! J'ai demandé la parole avant ! C'est inadmissible !

(Le sous-amendement n° 1381 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Germinal Peiro, pour une explication de vote sur l'amendement n° 1280 .

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Monsieur le ministre, nous voterons contre cet amendement, car nous ne sommes pas dupes de la manoeuvre à laquelle nous assistons aujourd'hui, qui vise à tirer d'embarras la majorité. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

…nous considérons que vous continuez à rendre le plus mauvais service possible au monde agricole. La LMA n'a pas été prévue pour cela, mais vous allez rallumer la guerre du porc dans notre pays. C'est évident !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Cher collègue, chacun a le droit de s'exprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

La vérité, monsieur Herth, est propre à chacun d'entre nous. Vous direz la vôtre. Pour ma part, je dis ce que je ressens à un moment crucial. Nous voterons contre…

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

…parce que nous considérons, au groupe SRC, que vous allez rallumer la guerre du porc en France et que les éleveurs n'avaient pas besoin de cela.

Le ministre et le président Ollier vous ont rappelé que, lorsque le décret sera paru – à moins qu'il ne paraisse jamais, mais la loi le prévoit –, 13 000 élevages vont tout à coup basculer du système de l'autorisation à celui de la déclaration.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Vous écrivez vous-même dans l'amendement que le décret sera pris pour « exonérer d'enquête publique ces regroupements ou modernisations dès lors qu'ils ne s'accompagnent pas d'augmentation. »

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Vous allez donc rédiger un décret avant la fin de l'année pour exonérer les regroupements d'enquête publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Ce n'est pas acceptable, mes chers collègues, sans même compter le fait que nous sommes de piètres législateurs. Franchement, que signifie « augmentation sensible » ? La loi peut-elle employer le mot « sensible » ?

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Que veut dire « effet notable » ? Comment peut-on employer de tels qualificatifs dans une loi ? Ce sera une source formidable de contentieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Nous ne pouvons donc pas cautionner une telle manoeuvre. Nous retenons simplement que la majorité a décidé de rallumer la guerre du porc en France…

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Vous allez voir, mes chers collègues, ce que cela va entraîner et vous le savez bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La guerre de truies n'aura pas lieu ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Soyez sérieux ! Vous savez tous combien il est difficile de faire accepter l'installation d'élevages dans nos circonscriptions. Le président Ollier vous l'a rappelé tout à l'heure. En passant de l'autorisation à la déclaration, vous allez rendre plus inacceptable encore la création d'élevages. Vous obtiendrez, à terme, l'effet inverse de celui recherché ! En tout cas, nous nous y opposerons, car nous considérons que vous rendez un mauvais service au monde agricole. Vous allez, une nouvelle fois, faire en sorte que les agriculteurs soient montrés du doigt, soient stigmatisés…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

C'est l'inverse, c'est vous qui les montrez du doigt !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Rendez-vous à l'évidence, monsieur Le Fur ! Un préfet de la République a écrit, il y a un an (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je croyais que nous avions eu le débat ! Votre explication de vote est terminée, monsieur Germinal Peiro !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Monsieur le président, un préfet de la République a écrit dans un rapport, il y a un an, qu'il faudrait cesser toute activité agricole en Bretagne pendant vingt ans pour retrouver un bon état écologique des cours d'eau. C'était un préfet de la République, et non M. Cochet ! (Exclamations sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Non, c'est avec beaucoup d'égards que je le dis ! Essayons d'être sérieux ! Mes chers collègues, c'est avec beaucoup de déférence que je cite M. Cochet, parce qu'il serait dans son rôle de le dénoncer.

Aujourd'hui, mes chers collègues, vous rendez un mauvais service au monde agricole. C'est pourquoi nous voterons contre cet amendement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Connaissez-vous, oui ou non, l'article 58 du règlement, monsieur le président ? C'est incroyable et scandaleux !

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Je vous demande d'être brève, madame Erhel. Je pense que vous souhaitez que le débat ne se prolonge pas, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Je crois ne pas avoir abusé de mon temps de parole depuis le début de l'examen de ce projet de loi !

Soyons bien clairs. Nous sommes collectivement, depuis le 16 juin, dans une impasse politique. Cela a été reconnu par M. le ministre et M. le président de la commission des affaires économiques. Nous avons immédiatement bien compris que l'objectif de votre majorité politique est maintenant de faire en sorte que M. Le Fur et les cosignataires de cet amendement ne perdent pas la face. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Vous avez, en conséquence, déposé un amendement, que je vous invite à lire précisément. Comment voulez-vous que l'on puisse voter un amendement dans lequel vous avez écrit : « les modernisations ne s'accompagnent pas d'augmentation sensible de la capacité de ces élevages » ? Je suis sûre que la signification du mot « sensible » n'est pas la même pour M. Le Fur que pour M. le ministre de l'agriculture !

Je lis également le deuxième paragraphe pour que vous soyez tout de même bien conscients de ce que vous allez voter : « Ce décret précisera notamment, dans le respect des règles communautaires, un dispositif permettant d'exonérer d'enquête publique ces regroupements ou modernisations dès lors qu'ils ne s'accompagnent pas d'une augmentation sensible de la capacité de ces élevages ou d'effets notables sur l'environnement. » Quelle est la portée de qualificatifs comme « sensible » ou « notable » ? Vous savez parfaitement qu'ils ont un caractère subjectif.

Cet amendement a donc uniquement pour objectif de ne pas faire perdre la face à M. Le Fur et ses amis. Je vous le répète, la seule solution, et vous ne l'avez pas choisie, était de supprimer cette disposition.

Nous voterons donc résolument contre l'amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, vous permettrez à un Normand, qui est né en Bretagne et qui se rend souvent dans la circonscription de Mme Erhel, là où l'on compte beaucoup d'élevages porcins et où se trouvent la plage de Saint-Michel-en-Grève et les plages du Trégor, devenues maintenant des prairies, de dire quelques mots sur ce sujet.

Je partage l'idée selon laquelle vous avez rouvert la guerre du porc en intégrant l'amendement de M. Le Fur comme vous l'avez fait. Vous avez vous-même, tout à l'heure, montré les limites à ne pas dépasser, mais franchies par notre collègue Le Fur, et avez admis que tout s'était calmé parce que l'on s'orientait vers une amélioration de la situation. Or, en proposant cet amendement, vous reconnaissez vous-même que vous inscrivez dans le décret une dégradation nouvelle de la situation.

Vous écrivez, en effet, dans l'alinéa 2, que : « Ce décret précisera notamment, dans le respect des règles communautaires, un dispositif permettant d'exonérer d'enquête publique ces regroupements ou modernisations dès lors qu'ils ne s'accompagnent pas d'augmentation sensible […] ou d'effets notables […] » Il n'est pas besoin d'être membre de l'Académie française pour savoir que parler d'augmentation « sensible » et d'effet « notable », c'est reconnaître qu'il y en aura ! Vous devrez alors faire face dans les mois qui viennent, donc à partir du 31 décembre 2010, à des contentieux et à des recours,…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

…et vous serez dans l'impossibilité de mettre en oeuvre un certain nombre de mesures positives telles que la modernisation des outils.

Vous allez tout simplement rouvrir les contentieux et créer, en Bretagne mais aussi, probablement, dans d'autres régions, des obstacles au maintien d'une agriculture – raisonnée ou non, cela m'est égal – dont notre pays a besoin. C'est le risque de votre amendement.

Il n'y a pas d'agriculture, monsieur le ministre, avec le seul consensus de la chaîne qui va du producteur, au distributeur et au consommateur, sans tenir compte de la position de toutes les populations rurales. Avec cet amendement, vous ouvrez la boîte de Pandore et votre projet ne suscitera pas le consensus des populations rurales. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je me permettrai tout d'abord une sorte de fait personnel et une mise au point. Monsieur Peiro, je ne considère pas être moins digne qu'un préfet de la République, et réciproquement. Tout le monde a le droit d'avoir des opinions, c'est d'ailleurs le propre de la démocratie. C'est la liberté d'expression. Tout le monde a le droit d'avoir des analyses différentes, voire même de se confronter et d'avoir des divergences profondes.

Sur ce point, j'ai lu, en effet, comme tout le monde, l'amendement de réécriture de l'article 10 bis par MM. Raison et Ollier. C'est une sorte de gloubi-boulga juridique qui ne sauve rien du tout et qui n'est absolument pas destiné à faire avancer le droit positif dans notre pays. Il a pour but de sauver la face entre UMP et UMP ! C'est un pur règlement, non de comptes, mais de textes !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Hélas pour vous, mais peut-être tant mieux pour nous, vous ne sauverez la face ni des uns ni des autres !

C'est pourquoi nous nous prononcerons évidemment contre cette nouvelle proposition de rédaction. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et Garrigue ?

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Nous allons mettre sur le compte de l'heure tardive un certain nombre d'excès dans les propos qui ont été tenus ! Je veux simplement, à l'égard de la majorité, rétablir un certain nombre de vérités et ne pas laisser croire que certains propos sont exacts.

M. Cochet vient de dire que cet amendement est un « gloubi-boulga » qui ne répond à rien de concret. Rencontrez des éleveurs de porcs sur le terrain, interrogez-les sur les regroupements d'installations et vous verrez si ce n'est pas un problème concret ! Que proposez-vous, au fond ? Je suis sûr, cela dit, que Germinal Peiro n'est pas tout à fait convaincu par ses propres paroles. Vous proposez de laisser mourir à petit feu l'élevage de porcs (Protestations sur les bancs du groupe SRC) en disant aux éleveurs : « Désolé, on ne peut rien faire pour vous » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je ne peux laisser dire non plus que le régime que nous proposons est un simple régime de déclaration. Le regroupement est un problème spécifique et concret pour tous les éleveurs de porcs, en Bretagne et ailleurs. Ce n'est d'ailleurs probablement pas en Bretagne que les éleveurs sont le plus concernés, mais plutôt dans le nord de la France. Nous ne proposons pas un simple régime de déclaration, mais un régime d'autorisation simplifiée, dans le cadre de regroupements sur des sites existants. Ce régime est très clairement identifié sur le plan juridique. Il n'est pas aussi simple, comme l'affirmait Germinal Peiro, qu'un régime de déclaration.

Nous ne rallumons certainement pas la guerre du porc en Bretagne. Nous ne faisons que régler un problème concret qui se pose aux éleveurs de porcs. Je vais vous dire mon sentiment profond : la guerre du porc se rallumera en Bretagne si l'on joue sur les peurs des uns et des autres.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. Voilà !

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Elle se rallumera si vous décidez d'expliquer aux citoyens sur le terrain, par le biais des médias, que nous avons totalement bouleversé l'équilibre des choses, alors que ce n'est pas vrai et que nous n'avons fait que régler un problème concret qui se pose aux éleveurs de porcs en France ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Avant de donner la parole à M. Garrigue pour un rappel au règlement, je demande à l'Assemblée de se prononcer sur l'amendement de M. Raison.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Non !

(L'amendement n° 1280 , sous-amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

La parole est à M. Daniel Garrigue, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Monsieur le président, je ne mets pas en doute votre bonne volonté dans la conduite de ces débats, mais je voudrais tout de même vous rappeler les dispositions de l'article 58 du règlement de l'Assemblée nationale : « Les rappels au règlement et les demandes touchant au déroulement de la séance ont toujours priorité sur la question principale ; ils en suspendent la discussion. La parole est accordée à tout député qui la demande à cet effet soit sur le champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention. »

Alors que je voulais faire un rappel au règlement, vous avez donné la parole à trois ou quatre au moins de mes collègues. Vous n'avez donc pas respecté les dispositions de l'article 58. Vous m'avez dit tout à l'heure que vous étiez tenu de faire respecter le temps programmé. Je constate que, lorsqu'il s'agit du respect de l'article 58 du règlement de l'Assemblée nationale, votre position est beaucoup moins précise et ferme. Puisque l'on veut appliquer certaines dispositions avec rigueur, on doit toutes les appliquer avec la même rigueur.

Mon intervention se fonde sur les articles 95 et 100 du règlement. Alors que nous avons commencé la discussion de sous-amendements à l'amendement n° 1280 de la commission des affaires économiques, cet amendement n'était pas dans la liasse qui m'a été distribuée.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Si !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Je suis désolé, celui qui m'a été distribué, c'est l'amendement n° 1380 du Gouvernement à l'article 10 quater. J'aurais tout de même souhaité, avant de me prononcer, que cet amendement me soit distribué. Les huissiers ont été dans l'impossibilité de m'en remettre un exemplaire. Obliger le Parlement à se prononcer sur un amendement qui n'a pas été distribué,…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

…c'est un vice de forme qui peut justifier une censure du Conseil constitutionnel.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il est dans la liasse !

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Le vote était engagé, monsieur Garrigue. C'est la raison pour laquelle j'ai laissé poursuivre les opérations de vote. Je crois que c'est la tradition dans cette maison.

Il m'a été confirmé par ailleurs que l'ensemble des amendements et sous-amendements avaient été correctement distribués.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Tony Dreyfus

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche.

La séance est levée.

(La séance est levée à quatorze heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma