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Séance en hémicycle du 1er décembre 2008 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • RFI
  • audiovisuel
  • journaliste
  • l'audiovisuel extérieur
  • langue
  • presse
  • télévision

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu, le 1er décembre 2008, de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, une communication l'informant que, le 30 novembre 2008, M. François Deluga a été élu député de la 8e circonscription de la Gironde. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Rappel au règlement, madame la présidente, pour exprimer notre dégoût de ce qui est arrivé au journaliste Vittorio de Filippis, traité comme un vulgaire malfrat dans une affaire de diffamation.

Dans notre histoire judiciaire, c'est la première fois que, dans une affaire de presse, quelqu'un se voit ainsi interpellé, menotté, déshabillé, humilié et traité de « racaille ». On est d'autant plus en droit de s'inquiéter d'une telle dérive sécuritaire qu'elle vient après la condamnation de l'association Droit au logement, au motif que celle-ci hébergeait sous des tentes des personnes sans abri, désormais considérées comme de véritables rebuts ; après les poursuites engagées par la Direction centrale du renseignement intérieur contre des jeunes du mouvement alternatif, accusés, sans aucune preuve, de terrorisme, alors qu'aucune attaque contre des personnes n'a été commise. Quand notre justice en est presque à se soumettre aux injonctions de la police, on est en droit de s'inquiéter des menaces qui pèsent sur nos libertés.

Je le dis en ces lieux, madame la présidente, car le projet de loi que nous examinons depuis la semaine dernière porte lui aussi atteinte à une liberté constitutive de toute grande démocratie, la liberté d'expression, de même qu'à l'accès à la connaissance et à la culture, puisqu'il remet en cause le service public de l'audiovisuel.

J'ajoute que l'interpellation de M. de Filippis, un des responsables du journal Libération, s'inscrit dans le cadre d'une campagne d'intimidations envers la presse : demain après-midi, la commission des lois de notre assemblée examinera, après le Sénat, le projet de loi relatif à la protection des sources. La chasse aux journalistes est désormais ouverte : en témoignent les multiples interventions de la justice ou de la police dans les rédactions, qui ont porté atteinte à un principe sacré de la profession.

Lois, interpellations, arrestations dans des conditions iniques et scandaleuses : l'addition de toutes ces méthodes, plus dignes d'un régime autoritaire que d'une démocratie, montre que la représentation nationale doit se saisir de l'affaire touchant M. de Filippis. Combien d'hommes et de femmes, étrangers, sans-papiers vulnérables et précaires, sont-ils soumis à de telles pressions et à de telles humiliations dans notre pays ? Ce qui arrive à Vittorio de Filippis doit inquiéter l'ensemble des Français, car ce sont leurs propres libertés que l'on menace, c'est-à-dire des principes fondateurs de notre loi fondamentale.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Le groupe SRC souhaite interpeller Mme la ministre de la culture et de la communication, qui représente le Gouvernement sur nos bancs aujourd'hui, sur deux faits qui ont marqué ces dernières quarante-huit heures. Nos débats, en effet, ne portent pas seulement sur l'économie de l'audiovisuel : ils concernent également la liberté de la presse.

Le premier point, particulièrement préoccupant, est la procédure choquante dont a été victime l'un des anciens directeurs de la publication du journal Libération, M. Vittorio de Filippis. Depuis des jours, nous dénonçons les pratiques d'intimidation du pouvoir à l'égard de la presse, qui en viennent à créer un climat détestable, qu'il s'agisse de l'AFP ou des chaînes parlementaires que l'on menace de fusionner. Et tout l'enjeu du texte auquel nous nous opposons est la prise de contrôle de l'audiovisuel public, via notamment la nouvelle procédure de nomination et de révocation du président de France Télévisions.

Le traitement réservé à M. de Filippis n'est au fond que la conséquence mécanique du climat de chasse aux sorcières pesant sur les journalistes qui déplaisent au pouvoir. Dans ce contexte je souhaite, madame la ministre, vous faire part de notre grande surprise en entendant aujourd'hui même au Sénat Mme Rachida Dati, garde des sceaux, trouver la procédure visant M. de Filippis « tout à fait régulière ». Eu égard à ce qu'a subi M. de Filippis, cette déclaration vous paraît-elle normale dans un pays comme le nôtre en 2008 ?

Le second fait que je veux évoquer est « l'appel de la Colline » lancé aux Français – et au Gouvernement – en faveur de la liberté de la presse par Mediapart et l'association Reporters sans frontières, qui d'ordinaire mène ce genre de combat en dehors de nos frontières, mais qui se voit maintenant obligée de le faire sur notre territoire : la liberté de la presse, selon cet appel, suppose « le respect général du droit moral des journalistes sur leur travail […] ; le refus impératif du mélange des intérêts industriels et médiatiques, afin de garantir que les opérateurs économiques n'aient pas d'autre objectif que l'information ; la préservation absolue de l'intégrité du service public de l'audiovisuel, afin de garantir que ni ses informations ni ses programmes ne soient contrôlés par le pouvoir exécutif ». Le respect du pluralisme, ajoutent les signataires, passe par « une concentration limitée et régulée, de façon à éviter tout monopole de fait ou tout abus de position dominante ».

Je vous remercie, madame la ministre, de nous répondre sur le premier point et de nous faire part de votre sentiment sur cet appel qui, je l'espère, réveillera les consciences. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Nous partageons tous la même émotion : la façon dont un journaliste a été arrêté – puisqu'il faut bien utiliser ce terme – est inacceptable dans une démocratie sereine. Aussi notre assemblée devra-t-elle interroger le Gouvernement de façon très précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il faudra surtout interroger Mme Dati sur ses déclarations !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

De tels événements ne sauraient se reproduire. Le secret des sources est aussi important que le mutisme des résistants que l'on presssait, pendant la guerre, de dénoncer leurs camarades. Notre démocratie a le devoir absolu de protéger la liberté de la presse. Le consensus qui, je l'espère, se dégagera dans les prochains jours au sein de notre assemblée sera un message fort pour que notre République reste sereine. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Madame la ministre de la culture et de la communication, c'est à vous que souhaite m'adresser, en m'associant aux propos de mes trois collègues.

Vous êtes en charge de la presse au sens large, et ce qui vient de se passer mérite une condamnation claire et nette de votre part. Nous devrions d'ailleurs exiger que Mme la garde des sceaux et Mme la ministre de l'intérieur viennent s'expliquer devant nous cet après-midi : ce serait la moindre des choses, dès lors que nous siégeons et que le sort réservé à M. Vittorio de Filippis a été largement condamné dans tout le pays, notamment au sein de la profession et par tous les directeurs de journaux. Même l'inénarrable M. Mougeotte y est allé de sa diatribe ! Et qu'entend-on, dans les rangs du Gouvernement, pour défendre une liberté essentielle à notre démocratie ? Tantôt des excuses ou des explications qui, finalement, reviennent à cautionner les faits, tantôt des silences dramatiques. Nous attendons donc, madame la ministre, que vous vous expliquiez sur le sujet ; faute de quoi nous serons conduits à demander une suspension de séance afin de laisser le temps à Mme Dati d'arriver dans notre hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Mesdames, messieurs les députés, ce qui s'est passé il y a deux jours résulte de la délivrance par un juge d'un mandat d'amener à l'encontre d'une personne qui n'avait pas répondu à ses convocations.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

C'est en substance ce que disait Ponce Pilate !

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Je n'ai à commenter ni le fond de l'affaire ni la décision indépendante de cette magistrate. En revanche, j'en ai été émue…

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Surprise et émue, monsieur Paul, en fonction des informations que j'ai reçues.

J'ai donc téléphoné à Laurent Joffrin et publié un communiqué pour demander, sans me prononcer sur le fond, que toute la lumière soit faite sur cette affaire qui provoque l'émotion dans le pays, jusque sur vos bancs. Néanmoins, tout amalgame avec le projet de loi dont nous débattons me paraîtrait dommageable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Tout cela participe d'un même climat détestable !

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Depuis plusieurs jours, je m'efforce d'expliquer l'ambition de ce texte, dont Dieu sait qu'il n'est conçu ni au détriment de l'audiovisuel public ni de celui des journalistes.

Quant aux états généraux de la presse, qui ont lieu en ce moment, ils sont l'occasion de débattre avec différents groupes et leurs dirigeants. Sur les cent cinquante participants, cinquante environ possèdent une carte de presse. Les multiples auditions et les débats sont particulièrement vifs. Si nous avons pris le risque de les ouvrir, c'est précisément parce que la presse rencontre des problèmes qui n'étaient jusqu'alors évoqués qu'en privé, dans un climat de connivence. Aujourd'hui même, à Radio France, se tient la deuxième journée publique sur les métiers du journalisme ; elle sera suivie d'une troisième dans quelques jours. Bref, toutes les opinions se confrontent : nous sommes passés à une nouvelle étape.

Il y a donc, d'un côté, une décision de justice et, de l'autre, les États généraux de la presse et le projet de loi sur l'audiovisuel. Or nous n'avons à rougir ou à nous excuser ni des États généraux ni du projet de loi, car ils participent d'une démarche qui vise à conforter l'audiovisuel public ainsi que tous les métiers de la presse.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Madame la ministre, vous représentez ici le Gouvernement et la gravité des interpellations qui ont inauguré cette séance aurait mérité une autre réaction de votre part, d'autant plus qu'on ne peut manquer de mettre ces événements en relation avec ce que l'on constate tant dans le domaine général des médias – et pas seulement dans celui de la presse écrite – que dans un projet de loi qui vise à recréer une télévision d'État…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

…au moment où tous les pays démocratiques cherchent au contraire à assurer la crédibilité et l'indépendance de leurs médias publics. La convergence de tous ces éléments ne peut qu'inquiéter les démocrates. Je me réjouis que notre collègue porte-parole de l'UMP ait fait part de son émotion à cet égard, car il n'y a pas de démocratie sans liberté de la presse.

Nous avons été extrêmement choqués de la manière dont la garde des sceaux a commenté cette affaire…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

…en justifiant le mandat d'amener contre l'ancien directeur de la publication de Libération, alors que, au-delà des procédures et des formes juridiques, la moindre des choses eût été qu'elle fasse part de son émotion de démocrate devant les conditions de cette interpellation.

Je souhaiteraisque le Gouvernement nous apporte des éclaircissements supplémentaires à cet égard, et c'est pourquoi je demande une suspension de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La suspension de séance est de droit, mais un autre orateur avait demandé à s'exprimer.

La parole est à M. Noël Mamère.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Madame la ministre, vous vous êtes dite « surprise » et « émue ». Nous avions espéré que vos propos iraient beaucoup plus loin et que vous vous déclareriez choquée et tout aussi scandalisée que nous, au nom des mêmes principes que ceux que vient d'invoquer, sur les bancs de votre majorité, notre collègue Jean-Pierre Grand.

En tant que ministre chargée de la presse, vous n'ignorez pas que jamais l'on n'avait procédé à des interpellations ou à des mises en garde à vue dans de telles conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Mme la garde des sceaux considère qu'il n'y a là rien d'anormal, que la procédure a suivi son cours ; la même ministre va bientôt convoquer une conférence de presse pour présenter le rapport sur l'abaissement de l'âge pénal et la remise en question de l'ordonnance de 1945. Mais où va-t-on ? Nous vivons donc dans un pays où, sans barguigner, au nom du pragmatisme et de la sécurité, l'on s'apprête à jeter en prison des enfants de douze ans – considérant qu'ils sont des adultes en miniature –, où l'on tient les sans-abri pour des rebuts et des déchets, où l'on s'en prend à des représentants de la presse dans des conditions intolérables !

Notre indignation est bien naturelle et il fallait la dire. Mais, au-delà de l'affaire de M. de Filippis, nous mettons en cause la multiplication des gardes à vue, des arrestations dans des conditions effroyables de tous ceux qui ne sont ni journalistes, ni cadres, ni insérés comme nous le sommes dans la société, et qui n'ont pas les moyens de se défendre et de le dénoncer. C'est au nom de tous ceux-là que nous protestons. À travers la figure de Vittorio de Filippis, ce sont nos libertés qui sont mises en cause, et pas simplement la liberté de la presse. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision (nos 1209, 1267).

Jeudi soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 2.

La parole est à M. Didier Mathus.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Madame la présidente, madame la ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, l'article 2 du projet de loi concerne l'organisation de l'audiovisuel extérieur de la France, l'AEF. Le regroupement des forces de l'audiovisuel extérieur n'est pas, en soi, une mauvaise chose, mais la forme qu'il a prise depuis un an et son aboutissement à travers ce projet de loi méritent des éclaircissements et appellent des critiques.

L'aventure cocasse que nous avons vécue lorsque M. Benamou, conseiller de l'Élysée, s'est emparé de cette affaire a objectivement eu pour seul résultat d'affaiblir la position de la France au sein de TV5 Monde. Cette dernière entité, je le rappelle, réunit plusieurs télévisions francophones – belge, suisse et canadienne –, auxquelles s'ajoute la France. Or M. Benamou a cru pouvoir entièrement instrumentaliser TV5 Monde comme s'il s'agissait d'un élément parmi d'autres de l'audiovisuel extérieur français, manifestant ainsi une incompréhension totale de la nature même de la chaîne et de ses atouts.

Chaîne de télévision multilatérale, TV5 Monde constituera en effet un outil extrêmement précieux lors des changements que continuera de connaître le monde dans les années à venir. Nous devons donc préserver et protéger ce modèle de média. Au lieu d'en tenir compte, M. Benamou et, derrière lui, l'Élysée et l'appareil gouvernemental français ont tenté une réforme qui n'a abouti à rien, sinon à froisser nos partenaires francophones, qui ont très mal pris cette tentative et rejeté les propositions françaises à la conférence de Lucerne. Aujourd'hui, la France est plutôt en difficulté au sein de TV5 Monde.

En outre, l'organisation générale de l'audiovisuel extérieur français suscite plusieurs interrogations.

Tout d'abord, l'attelage réunissant France 24, RFI et TV5 Monde – jusqu'à un certain point, puisque la chaîne ne peut être entièrement contrôlée par la France – est tout à fait étonnant. Tous ici se souviennent, car nombre d'entre nous y ont été associés, des conditions scandaleuses de création de France 24, chaîne de télévision à vocation internationale. Son capital a été réparti à parts égales entre France Télévisions – la télévision publique – et TF1, de manière quelque peu inattendue puisque cette dernière chaîne s'était montrée peu intéressée par le projet avant que l'intervention du Gouvernement de l'époque ne la conduise à participer à 50 % au capital de France 24, ce qui représentait alors 17 000 euros.

Or, lorsque les négociations visant à la faire sortir du capital de France 24 ont débuté, TF1 a réclamé 80 millions d'euros ! Finalement, la somme sera sans doute très inférieure ; c'est heureux, car cette revendication était proprement exorbitante s'agissant d'un investissement vieux de trois ans et limité à 17 000 euros. On peut toutefois regretter la manière dont l'affaire a été menée depuis trois ans : c'est un peu « Les Pieds Nickelés font l'audiovisuel » ! Nous en avons vécu ici même plusieurs épisodes ; aujourd'hui, l'avenir de ce dispositif suscite d'importantes interrogations.

Je passe sur l'anecdote du nom de cette grande entité : s'étant aperçu à la veille du dépôt que la dénomination « France Monde », initialement retenue, était déjà utilisé, on s'est rabattu sur « Audiovisuel extérieur français », franchement peu attractive.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Prenons-en acte.

D'autres interrogations portent sur la répartition des crédits. On l'a bien compris, les dirigeants de cette holding se caractérisent par un tropisme télévisuel, puisqu'il s'agit des dirigeants de France 24, Alain de Pouzillac et Christine Ockrent.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

À ce propos, comment ne pas s'interroger sur la singularité très française qui permet à Mme Kouchner de diriger la chaîne de télévision à vocation internationale ?

Ce dispositif demeure donc inabouti : des étapes ont été franchies, mais l'on reste au milieu du gué. En effet, l'attelage est inopérant, puisqu'il associe France 24, qui sera financée, et bien financée, et RFI, dont le Gouvernement critique les journalistes toutes les semaines, voire tous les jours, alors que son audience très large, en particulier en Afrique francophone, pourrait en faire le principal atout du regroupement et que celle de France 24 demeure inconnue…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Sous couvert de réforme des langues, on cherche en réalité à menacer l'indépendance de la rédaction de RFI, voire à la faire progressivement passer à la trappe.

Enfin, à France 24 et à RFI s'ajoutent TV5 Monde, dont la France constitue une sorte de partenaire dormant, alors que la chaîne dispose du deuxième réseau de distribution au monde, si bien que cet important atout pour l'audiovisuel francophone dans le monde demeure inexploité.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

De nombreux orateurs étant inscrits sur cet article, je vous demande instamment de respecter votre temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il s'agissait d'une intervention de cadrage, madame la présidente !

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme l'a expliqué Didier Mathus, nous ne sommes nullement hostiles au principe d'un regroupement de l'audiovisuel extérieur français. Mais que l'on ne nous fasse pas dire pour autant que nous nous sommes prononcés en faveur de ce regroupement ! En effet, comme l'a souligné M. Mathus, que reste-t-il du projet initial ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Rien d'autre que l'affaiblissement programmé des chaînes composant l'audiovisuel extérieur de la France et une incontestable volonté de contrôle politique. Mon collègue l'a dit, TV5 Monde a été déstabilisée et affaiblie par le traitement qu'elle a subi. À cet égard, les protestations de nos amis canadiens contre nos prétentions à traiter unilatéralement le problème étaient édifiantes.

Pour ce qui est de France 24, loin de moi l'intention de porter une attaque personnelle, mais je suis pour ma part très gêné que la directrice générale déléguée soit l'épouse du ministre des affaires étrangères : ce lien est inacceptable dans un système démocratique. Imaginez notre réaction si M. Bongo, président de la République du Gabon – je choisis un pays au hasard –, nommait sa femme directrice générale de la télévision gabonaise !

On nous dit que cela n'a pas d'importance, car toute sa carrière montre qu'il s'agit d'une personne indépendante, qui respectera la liberté des journalistes ; ce n'est hélas pas le cas. En effet, le quai d'Orsay a déjà fait pression de manière flagrante sur la rédaction pour obtenir le licenciement d'un journaliste de RFI.

Mme Ockrent et M. de Pouzillac dirigent désormais France 24 et RFI ; or M. Richard Labévière, journaliste connu de RFI, spécialiste du Proche-Orient, vient d'être licencié à la demande de la directrice générale et sous la pression du quai d'Orsay, uniquement parce qu'il avait osé programmer un entretien avec le président syrien Bachar el-Assad avant que les relations franco-syriennes ne s'améliorent et que le Président de la République lui-même ne se rende en Syrie, après la visite de Bachar el-Assad le 13 juillet dernier, lors du sommet de l'Union pour la Méditerranée. Ainsi, l'incroyable zèle du quai d'Orsay et de sa représentante à RFI ont permis le licenciement de ce confrère ; c'est totalement inadmissible, mais ce n'est là qu'un exemple malheureusement amené à se reproduire.

Didier Mathus l'a dit : RFI est une chaîne indispensable, très écoutée dans le monde entier, et dont ceux d'entre nous qui ont eu l'occasion de séjourner à l'étranger, notamment les membres de notre commission des affaires étrangères, mesurent l'importance. Les journalistes de RFI interviennent d'ailleurs sur France Inter, sont en liaison avec l'AFP et effectuent un travail remarquable de spécialistes. Je le répète, RFI, l'une des meilleures radios internationales au monde, a toujours promu l'image extérieure de la France.

Or voilà que l'on y supprime six rédactions – première des mesures de compression qui concourent à l'entreprise de dépeçage que prépare ce projet de regroupement, ou plutôt de contrôle politique. La direction de RFI a ainsi décidé de mettre fin à ses programmes en six langues : l'allemand – bel hommage à la relation privilégiée entre la France et l'Allemagne ! –, l'albanais, le polonais, le serbo-croate, le turc et le laotien.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Veuillez vous acheminer vers votre conclusion, monsieur Loncle.

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

J'en ai terminé. Tels sont les méfaits qui résultent de l'application d'une idée, somme toute salutaire, de regroupement par un Gouvernement obsédé de contrôle politique et de rationalisation au point de dépecer des entreprises culturelles indispensables.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, je ne reviendrai pas sur la manière choquante dont la réorganisation de l'audiovisuel extérieur de la France a permis de nommer la femme du ministre des affaires étrangères directrice générale de la nouvelle société AEF.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

En somme, vous mettez en cause son intégrité professionnelle et intellectuelle ! C'est étrange, dans cette assemblée !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Mon cher collègue, je le répète, je ne reviendrai pas sur ce que cela a de choquant ; je vous laisse le soin de vous exprimer sur cette conception baroque des synergies entre le pouvoir politique et les médias.

Je me contenterai d'éclairer nos concitoyens sur les conséquences de cette réorganisation en matière de suppression de postes et d'émissions sur RFI. Si l'article 2 est adopté, 300 à 400 postes sur un millier seront supprimés et des rédactions entières disparaîtront. Six sont d'ores et déjà menacées de fermeture pure et simple : la polonaise, l'allemande, la serbo-croate, l'albanaise, la turque et la laotienne. Autrement dit, RFI n'émettra plus dans ces langues. Imaginez l'inverse : que dirions-nous si, au moment où nous exerçons la présidence de l'Union européenne, une radio polonaise décidait de supprimer ses émissions en français ? Permettez-moi de vous faire part des regrets exprimés par des personnalités intellectuelles et politiques polonaises, et non des moindres, qui se sont adressés à nous en ces termes : « Nous, intellectuels, hommes politiques, étudiants, artistes, hommes d'affaires et employés polonais et français… »

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Et les plombiers ? (Sourires sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

« …, accueillons avec un sentiment d'incompréhension et de regret le projet de suppression des émissions de Radio France internationale en langue polonaise. » Je vous passe la lecture de l'intégralité de cette tribune ; sachez simplement que ses signataires, qui se comptent par milliers, incluent Aleksander Kwasniewski, la prix Nobel de littérature Wislawa Szymborska, l'écrivain Marek Halter, l'ancien ministre des affaires étrangères Wladyslaw Bartoszewski, les cinéastes Roman Polanski, Agnieszka Holland, Jerzy Skolimowski, le chef d'orchestre Marc Minkowski, les metteurs en scène Jacques Lassalle et Krzysztof Warlikowski, de la Comédie française, Andrzej Seweryn, la scénographe Malgorzata Szczesniak, et bien d'autres personnalités tout aussi brillantes et célèbres.

En mettant fin à ces émissions, on sacrifie l'information dans des zones stratégiques, et non des moindres, du monde dangereux dans lequel nous vivons. Il n'est pas sans ironie que la nouvelle directrice générale d'AEF soit l'épouse d'un ancien administrateur pour l'ONU au Kosovo. Supprimer, par exemple, des émissions en langue albanaise n'est pas totalement anodin pour des responsables politiques qui savent à quel point l'information la plus objective possible est non seulement indispensable, mais souvent vitale, dans des régions déstabilisées où la violence est à fleur de peau, et parfois au bout du fusil.

Vous allez faire disparaître des émissions un peu partout dans le monde. Ainsi en Afghanistan : c'est vrai qu'il ne s'y passe rien ! Le fait d'émettre à la radio dans cette région du monde n'a naturellement aucune importance pour les enjeux stratégiques et le rayonnement de la France, ainsi que pour la compréhension de l'action de la France dans ce pays ! Vous supprimez la rédaction laotienne. Sans doute avez-vous remarqué, mes chers collègues, qu'il ne se passait rien en Asie en ce moment !

Si ces décisions de réorganisation n'étaient que de nature d'ordre technique, voire technocratique, nous pourrions les excuser ; mais derrière, il y va des droits de l'homme, du droit à l'information et du rayonnement de la France, ne serait-ce que de la compréhension de ce que fait la France dans ces zones du monde, de sa capacité à donner accès sur les ondes à des voix opprimées et persécutées dans leur propre pays. Autant dire que nous ne pouvons nous réjouir de la présence de cet article 2 dans le projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

L'article 2 marque un nouveau développement, d'ordre législatif, cette fois, dans la réorganisation de notre audiovisuel extérieur. Le sujet n'est pas nouveau : il a déjà été traité par plusieurs gouvernements. Comme d'autres collègues sans doute, j'ai participé à une mission d'information parlementaire sous la précédente législature, qui avait remis au gouvernement de l'époque des conclusions qui, c'est le moins que l'on puisse dire, n'ont pas été suivies d'effets. En l'occurrence, ce gouvernement avait confié à l'un d'entre nous une mission parallèle dont les conclusions allaient à l'encontre de celles que la mission d'information parlementaire, composée de tous les groupes de notre assemblée, avait – le fait n'est pas courant – adoptées à l'unanimité.

Pour avoir été, pendant de longues années, rapporteur du budget des relations culturelles internationales et de la francophonie – ce que, depuis la LOLF, on appelle l'action extérieure de l'État – j'ai été moi-même auditionné par M. Benamou, alors chargé de mener une réflexion par le Président de la République. Je l'avoue, la montagne a accouché d'une souris, et d'une souris à pâle figure au regard des enjeux qu'est censé relever l'audiovisuel extérieur de notre pays.

Faut-il rappeler que la France, qui fut jadis une des plus grandes puissances mondiales, a toujours pensé qu'elle avait pour mission de transmettre un message au monde ? On peut en sourire, en rire même, au XXIe siècle, se dire que c'est une idée dépassée et que la globalisation conduit à une banalisation du message de la France ; sans doute les peuples du monde attendent-ils moins de la voix de la France qu'en d'autres siècles, mais l'idée demeure que nous devons exprimer un point de vue, et surtout, permettre que des idées diverses, des débats, des opinions différentes puissent s'exprimer par les canaux audiovisuels dont nous disposons et qui ont une histoire.

C'est la raison pour laquelle nous avons un audiovisuel extérieur, avec deux piliers historiques RFI et TV5, cette dernière étant le produit d'un traité international – reconnaissons au passage que nous avons fait preuve d'une incorrection caractérisée à l'égard des pays signataires de ce traité, coresponsables avec nous de la gestion et de l'animation de TV5.

De fait, et là est le paradoxe, au moment où le Gouvernement prétend construire la télévision publique du XXIe siècle – je parle en l'occurrence de France Télévisions, et donc de notre audiovisuel intérieur –, on nous propose de brader l'audiovisuel extérieur de la France, et de réserver, par cet article 2, une place de choix aux intérêts privés. Le caractère public de Radio France Internationale va être mis en cause, puisque la société, intitulée avec tant d'imagination « audiovisuel extérieur de la France » – AEF, cela fleure bon le néo-colonialisme ! – sera ouverte aux capitaux privés.

Plus inquiétant encore, l'intégration de RFI au sein de AEF, comme cela vient d'être excellemment dit par les orateurs précédents, s'accompagnera de la fermeture programmée de la plupart des filiales de RFI à l'étranger. C'est donc à la fusion-absorption de RFI que nous assistons, ce qui, de notre point de vue, éteint toute ambition publique en ce domaine.

Si l'article 2 devait être adopté, il nous faudrait prendre acte du fait que la France ne souhaite pas que la conduite de son audiovisuel extérieur se fasse par le biais d'une société publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Elle passera intégralement par l'intermédiaire d'une structure holding confuse, dénommée AEF et financée exclusivement par de l'argent public, mais, et c'est là le plus scandaleux, mêlant intérêts publics et intérêts privés…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

…ambition culturelle et loi du marché : un mélange paradoxalement à l'inverse du modèle dont le Gouvernement prétend être le défenseur pour l'audiovisuel public national.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

L'article 2 pose bien des questions.

Je veux à mon tour aborder la question de Radio France Internationale qui, dans le cadre de cet article, va perdre son autonomie juridique, et ce à un moment où, chacun en conviendra, l'argent public se fait rare. Et dans ces moments-là, mieux vaudrait l'affecter au bon endroit !

Jusqu'à présent, RFI, dont le budget s'élève à environ 65 millions d'euros, était financée par la redevance. Ce ne sera plus le cas demain, puisqu'elle sera financée par une dotation d'État. Il s'agit là d'une réaffectation d'argent public, sur laquelle j'aimerais, madame la ministre, que vous nous éclairiez afin que nous ayons une meilleure compréhension du dispositif.

Si RFI fait toujours un excellent travail, sa vocation ne se limite pas pour autant à faire en sorte que la langue française soit écoutée ici et là : il s'agit de donner une vision française de l'actualité. À cet égard, on peut s'interroger, comme mes collègues, sur la fermeture de l'antenne de Berlin. Nous sommes, avec l'Allemagne, le coeur de l'Union européenne et l'on ne peut que s'étonner que cette antenne, écoutée en Allemagne, puisse se voir supprimée d'un trait de plume. Nous craignons une vampirisation de Radio France Internationale au sein de l'audiovisuel extérieur de la France, au profit de la télévision. Il s'agit d'un vrai problème, car, pour l'instant, la télévision extérieure de la France est insuffisamment financée.

Dès lors que RFI ne sera plus financée par la redevance, comment s'articulera le financement de l'audiovisuel extérieur de la France ?

Ma deuxième question porte sur France 24. J'ai essayé de lire quelques documents sur le sujet. Ainsi, j'ai appris que TF1 avait mis 18 000 euros dans le capital initial de France 24 et qu'elle demande pratiquement 90 millions pour en sortir au moment où France 24 va intégrer l'audiovisuel extérieur de la France ! Vous avez déjà répondu sur ce point, madame la ministre, en affirmant qu'il ne s'agit pas de 90 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

J'espère ! Quand bien même ce sera bien moins, mon cher collègue, il ne faudrait pas oublier les contrats de fourniture de programmation pour l'audiovisuel extérieur de la France, ce qui est une façon comme une autre de donner de l'argent à TF1. Avant d'examiner au fond l'article 2, nous aimerions, madame la ministre – et je me fais le porte-parole de mes collègues – que vous nous éclairiez sur ce sujet. Quelle sera l'issue pour France 24 ? Quelle somme d'argent va récupérer TF1 ? Quels accords ont été passés entre l'AEF, qui va être constitué, et TF1, en termes de programmation ?

En guise de conclusion, je poserai une dernière question. Par rapport au fonctionnement de l'audiovisuel extérieur des autres pays, nous avons, en France, une singularité : le principal porteur de la télévision publique, en l'occurrence France Télévisions, en est absent.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Axel Poniatowski, président de la commission des affaires étrangères, s'est lui-même interrogé sur la constitution de l'audiovisuel extérieur de la France et a fait part de son étonnement. Lorsqu'un président de commission de l'Assemblée nationale avoue son « étonnement », c'est une façon de dire qu'il est contre le dispositif ! J'ose espérer qu'il sera à nos côtés pour voter contre l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Martin-Lalande

Contrairement à ce que je viens d'entendre, j'estime que l'audiovisuel public vit une véritable refondation. Il a fait l'objet de critiques récurrentes, comme je l'ai rappelé à plusieurs reprises en tant que rapporteur spécial, y compris en juillet dernier, dans un rapport que j'ai remis à la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Martin-Lalande

Ces critiques portaient sur l'empilement des structures, la multiplicité des tutelles, les coûts de fonctionnement, l'insuffisante adéquation des modes de communication aux usages de chaque région du monde, ou encore l'absence de synergie entre des intervenants dont les missions étaient pourtant complémentaires.

C'est pourquoi l'on doit objectivement se réjouir de l'engagement du chantier de réforme de l'audiovisuel extérieur, initié par le Président de la République à l'été 2007.

Le travail conjoint de la commission des finances et des magistrats de la troisième chambre de la Cour des comptes, présidée par Jean Picq, a donné lieu au rapport d'information dont je parlais il y a quelques instants.

Les propositions de la mission pilotée par l'Élysée ont, par ailleurs, abouti à définir un objectif et à fixer une double mission à notre audiovisuel extérieur.

L'objectif est d'offrir une alternative au choix largement binaire entre les médias anglo-saxons – CNN, BBC – et ceux du Golfe – Al-Jazeera. Notre pays doit ainsi pouvoir proposer un « alter-média global » fondé sur les valeurs de la France et de la francophonie.

Une double mission est assignée à l'audiovisuel extérieur français : une mission d'influence d'abord – la France devant rivaliser avec les grands médias internationaux –, une mission culturelle ensuite – la France devant promouvoir ses valeurs : démocratie et confrontation des opinions, défense du multilatéralisme, diversité culturelle, laïcité, art de vivre, à côté des médias anglo-saxons ou arabes.

Voici venu le temps de la réforme avec des structures rénovées pour un pilotage opérationnel enfin clarifié, dont l'axe principal est la création d'une société holding ayant vocation à regrouper l'ensemble des participations publiques dans les sociétés de l'audiovisuel extérieur – RFI, France 24 et TV5 Monde – à l'exception de Canal France internationale – CFI – dont la vocation de coopération serait réaffirmée, la faisant de fait sortir du champ de l'audiovisuel extérieur.

L'audiovisuel extérieur de la France – dénomination provisoire, rassurez-vous – aura également pour mission de définir une stratégie globale. M. Alain de Pouzilhac, président-directeur général d'AEF, a, en ce sens, récemment présenté un plan d'action stratégique pour la période 2009-2013 assorti d'un plan de financement pluriannuel.

Le constat est partagé par l'ensemble des acteurs : l'audiovisuel extérieur souffre d'une déficience de pilotage politique et administratif. Ainsi, certaines sociétés doivent parfois dialoguer avec plusieurs administrations différentes, que je m'abstiendrai d'énumérer ici.

Dans la réforme qui va se concrétiser, il est envisagé de confier le pilotage politique à une structure souple qui prendrait la forme d'un comité directeur regroupant les directeurs des administrations centrales concernées – services du Premier ministre, affaires étrangères, culture, budget et économie avec l'Agence des participations de l'État – et qui se réunirait périodiquement pour décider des orientations politiques à donner à l'action audiovisuelle extérieure de la France.

Trois questions sont en cours de règlement : celle de la holding AEF qui doit à terme contrôler 100 % de France 24 ; celle des relations financières entre les partenaires de TV5 Monde, qui nécessitent un rééquilibrage des financements multilatéraux, envisagé dans le contexte du futur plan stratégique 2009-2012 – serait ainsi opéré un rééquilibrage des frais communs par les partenaires non français, ce qui ne pourrait qu'améliorer notre situation de partenaire de TV5 Monde ; enfin, la réforme de l'audiovisuel extérieur suppose, on l'a souligné, que RFI soit détenue à 100 % par la holding AEF. Ce point juridique étant réglé, il ne soulève aucun problème particulier.

Ce texte nous propose une véritable refondation de l'audiovisuel extérieur de la France – elle était, c'est vrai, attendue depuis longtemps. Elle s'impose aussi si nous voulons que notre pays continue d'apporter, dans le monde numérique d'aujourd'hui, son irremplaçable contribution au pluralisme mondial de l'information et de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

J'abonderai dans le sens des interventions de mes collègues des bancs de la gauche. Ainsi, la création, au mois d'avril 2008, de l'audiovisuel extérieur de la France n'est qu'une manière de renforcer le poids du pouvoir sur l'ensemble de l'audiovisuel français et, notamment, sur tous les organes extérieurs qui deviennent, il faut le reconnaître, la voix de la France.

Il y a une sorte de relation incestueuse – je ne vois pas d'autre mot – entre le pouvoir et les responsables de cet audiovisuel extérieur de la France, à voir les liens qu'entretiennent les responsables éditoriaux de ces chaînes avec les ministres, donc avec le pouvoir. C'est là, me semble-t-il, une atteinte au principe de la séparation des pouvoirs. Je ne remets pas ici en cause les qualités professionnelles de celles et ceux qui exercent (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Les qualités professionnelles peuvent être les meilleures du monde, chers collègues, mais lorsque les principaux responsables d'un organisme audiovisuel et les responsables du Gouvernement chargés de conduire la politique extérieure de la France entretiennent des liens qui vont bien au-delà de la seule amitié, on est en droit de s'inquiéter de cette atteinte au principe purement démocratique de la séparation des pouvoirs, tel que fixé par Montesquieu ! On est également en droit de dénoncer le principe consistant, au nom du pragmatisme, à nommer le président de France Télévisions directement en conseil des ministres, ce qui crée un lien consubstantiel de dépendance ! Vous pouvez trouver tous les arguments que vous voudrez pour qualifier le périmètre de la compétence des responsables, il y a effectivement un lien incestueux qu'il convient de dénoncer !

Nous devons également nous élever contre la manière dont France 24 a été constituée. Nos collègues Didier Mathus et Patrick Bloche l'ont expliqué tout à l'heure avec force. Nous savons bien quelles ont été les discussions, quel a été l'influence de la société TF1, qui a tout fait pour éviter tout concurrent éventuel, qui est entrée au rabais dans cette société France 24 et qui, maintenant, réclame dix fois, cent fois, mille fois plus que ce qu'elle y a joyeusement investi ! Ne prenons pas les Français – et surtout ceux de l'extérieur – pour des imbéciles !

Et lorsque vous nous expliquez que vous voulez mettre en place une holding – qui n'est plus une société publique –, on sait quel organisme est visé : RFI, qui a déjà eu bien des soucis avec nombre de roitelets de Françafrique. Souvenons-nous des conditions dans lesquelles ont été jetés en prison des journalistes et des correspondants de RFI – certains y ont perdu la vie –, qui se sont retrouvés à servir variables d'ajustement des relations entre le Gouvernement, et ceux qui l'ont d'ailleurs précédé, et certains responsables africains ! Il n'est jusqu'au maire de Mulhouse, qui avait préféré changer de rive pour entrer dans ce gouvernement, qui s'est vu dépouiller de ses responsabilités de ministre de la coopération sur ordre d'un grand démocrate bien connu de chacun – M. Albert-Bernard Bongo, président du Gabon, qui a encore la haute main sur les relations entre la France et l'Afrique ! Le malheureux est désormais chargé des anciens combattants. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Je n'ai rien contre les anciens combattants ! Vous vous offusquez chaque fois que l'on parle d'anciens, de combattants ou de Marseillaise ! Arrêtez d'instrumentaliser ce genre de vertu outragée (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et considérez avec moi que votre ami le maire de Mulhouse a été sanctionné sur ordre de M. Bongo ! Nous savons bien que la politique extérieure de la France – et en particulier la politique africaine de la France – n'est pas menée par que ne sais quel sous-secrétariat d'État, mais par des cabinets noirs de la République qui se trouvent à l'Élysée, rue Saint-Honoré !

RFI est effectivement aujourd'hui menacée d'être totalement absorbée dans cet audiovisuel extérieur de la France. Mes collègues ont insisté sur la disparition d'un certain nombre d'antennes de RFI : ainsi le bureau de Berlin, hautement symbolique. Les journalistes de RFI protestent, à juste titre. Mais le bureau de Berlin ne sera pas le seul à fermer : un certain nombre de lieux très importants pour la connaissance de ce qui se passe dans le monde, que ce soit en Asie, en Amérique latine, au Proche-Orient ou en Afrique, sont appelés à disparaître.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Cet article 2 correspond tout à fait à l'esprit de votre projet de loi qui consiste tout simplement à placer l'audiovisuel public dans la dépendance politique, économique et éditoriale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

J'aimerais interroger Mme la ministre sur une question budgétaire relevée au sein de la commission des finances.

En effet, le décret d'avance n° 2008-1089 du 24 octobre 2008 a ouvert une somme de 22 millions d'euros pour la chaîne française d'information internationale. Or, comme vous le savez, mes chers collègues, les décrets d'avance ont été institués, et pérennisés dans le cadre de la LOLF, pour faire face à des situations d'urgence, non prévisibles et encore moins envisageables lorsque la loi de finances initiale est examinée par le Parlement.

Comment pouvez-vous justifier, madame la ministre, cette situation d'urgence, alors que le fonctionnement et les besoins de France 24 étaient largement prévisibles ? Contrairement à ce que l'on aurait pu espérer, il ne semble pas que cette situation d'imprévoyance, plutôt que d'incurie, ait servi de leçon puisque, dans la loi de finances initiale pour 2009, la chaîne internationale française ne bénéficie toujours pas de dotations budgétaires suffisantes. Le Gouvernement demandera-t-il à nouveau, en loi de finances rectificative ou à l'occasion d'un décret d'avance, à la commission ou au Parlement de ratifier ou de voter des sommes néanmoins importantes – plus de 20 millions d'euros – en excipant d'une urgence qui n'existe pas, car la chose est largement prévisible ?

Enfin, je tiens à informer mes collègues qu'à l'occasion de ces décrets d'avance, qui portent sur près de 2 milliards d'euros d'ouverture nouvelle de crédits, il a fallu, comme il se doit, annuler des sommes équivalentes. Ainsi, la mission « Recherche et enseignement supérieur » a fait l'objet d'annulations à hauteur de 25 % – soit près de 400 millions d'euros – afin de doter les crédits d'avance et la loi de finances rectificative des sommes nécessaires. I agissait pourtant de secteurs prioritaires pour le Gouvernement… Je tenais à le signaler ici.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Je suis tout de même un peu surpris de l'attitude de nos collègues de l'opposition. Je leur dis très cordialement : je ne m'attendais pas à ce qu'ils se bornent à proposer la suppression de cet article. Nous sommes nombreux sur tous les bancs – et je reconnais là mes collègues avec lesquels nous avons travaillé – à demander depuis des années que l'on donne à l'audiovisuel extérieur de la France plus de cohérence et davantage de lisibilité. Tel est véritablement l'objet de cet article 2.

Faut-il vraiment que vous soyez à ce point aveuglés par votre opposition foncière et fondamentale à ce projet pour prendre de telles positions sur ce sujet en caricaturant les choses, en parlant de dépeçage de sociétés alors qu'il s'agit, en vérité, de les consolider ? Comme vous n'avez pas d'arguments, vous faites preuve sur ce sujet – et c'est ce qui me frappe – du même embarras que s'agissant de la création de l'entreprise unique la semaine dernière. Vous dites que vous n'y êtes pas opposés par principe et que vous êtes d'accord avec la réforme de l'audiovisuel extérieur. Vous l'êtes tellement que vous proposez de supprimer l'article !

Je m'attendais à ce que votre position évolue cette semaine. Au lieu de cela, vous vous cantonnez dans la caricature, les querelles de personnes et les mises en cause personnelles – nous vous avons entendu citer M. Benamou, de M. Pouzilhac ou de Mme Ockrent, et remettre en cause leur intégrité et leur compétence professionnelle !

De quoi s'agit-il en vérité ? De refonder l'audiovisuel extérieur de la France, de permettre à notre pays de mener une politique audiovisuelle extérieure plus cohérente, d'avoir une stratégie plus lisible, d'améliorer l'efficacité de chacune des sociétés concernées. C'est ce que nous appelons de nos voeux depuis des années sur tous les bancs !

Comment pouvez-vous vous opposer à l'émergence d'un média francophone puissant, qui participera au rayonnement de la langue et de la culture française à l'étranger, qui sera aussi l'instrument de quelque chose à quoi nous sommes très attachés sur tous les bancs, la diversité culturelle ?

En vérité, vous êtes totalement aveuglés par votre opposition foncière à ce projet. L'objectif est de renforcer l'audiovisuel extérieur, de lui donner plus de cohérence et de lisibilité. Je pensais que, sur la place de la France dans le monde au moins, il pourrait y avoir consensus entre nous. Je regrette que vous preniez de telles positions qui consistent tout simplement à caricaturer le projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Je ne peux pas totalement vous donner tort, monsieur Herbillon : vous avez raison de dire que notre opposition à ce texte est foncière. Tout le monde sait très bien en effet, c'est un secret de Polichinelle, qu'il ne restera pratiquement rien de l'audiovisuel public après son adoption.

On pourra certes y trouver certes une ou deux bonnes intentions, mais elles ne reposent sur aucun modèle économique viable ; quoi qu'il arrive, vous allez totalement casser l'outil. Vous êtes des législateurs responsables,² vous savez très bien que, compte tenu les circonstances économiques et sociales, l'idée de faire reposer le budget de l'audiovisuel public sur un financement budgétaire est totalement déraisonnable. Vous aurez beau nous jurer vos grands dieux que vous donnerez les moyens financiers nécessaires, des centaines de millions d'euros, au service public audiovisuel, personne ne vous croira une seconde, et vous-mêmes pas davantage : cela revient quelque part à défier les lois de la physique budgétaire. Ce n'est donc pas crédible.

À partir de là, la lecture des éléments que vous nous proposez dans ce texte est totalement transformée. Si vous aviez un business model – pour reprendre des termes proches de vos référents culturels – crédible, nous pourrions penser avec vous à telle ou telle forme de management plus ou moins opérationnelle ; mais, dans l'état actuel des choses, on ne voit que de l'agitation, qui vise en fait à cacher la misère prochaine de l'audiovisuel public.

J'en viens à l'article 2, qui concerne l'audiovisuel international.

Je veux d'abord donner acte du combat mené par des parlementaires de tous les bancs, mais notamment par vous ces dernières années, quand vous vous éleviez contre des propos peu crédibles. Ce n'est pas la première fois en effet qu'en matière d'audiovisuel, on entend des Présidents de la République tenir des propos déraisonnables. Vous le premier, vous saviez que le modèle proposé précédemment en matière d'audiovisuel extérieur n'était pas crédible : de fait, il ne s'est pas réalisé. Je vous en donne acte mais je ne peux pas exonérer la majorité que vous représentez. Quelque part, nous sommes en train d'effacer ce qu'avait engagé la majorité précédente. C'est pourquoi, si votre bonne foi est certaine, crédibilité de la démarche de la majorité est, elle, beaucoup moins évidente.

Je ne reprendrai pas ce qui a été dit excellemment par mes collègues, à savoir que l'on sent derrière ce projet la volonté de tout reprendre en main. Les Français de l'étranger, c'est très important, mes chers collègues, puisqu'ils vont être amenés à siéger sur nos bancs, et l'on sent une préoccupation certaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Ils vont enfin rendre compte des débats de l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Je suis désolé de vous avoir réveillé, monsieur Soisson !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Je trouve honteuse la manière dont vous retardez les débats !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

C'est bien ce que je pensais, j'ai parlé trop fort.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

, président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi organique relatif à la nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public et le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Il n'est pas inscrit, il insulte notre collègue et personne ne dit rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Nous ne manquons pas d'outils, même s'ils ne sont pas tous parfaits. RFI est un outil simple et de très grande qualité. Non seulement c'est la voix de la France, pas toujours exempte de critiques – quelle structure pourrait l'être ? –, mais elle fonctionne de façon remarquable. Or est-il exact, madame la ministre, qu'au moment où la mondialisation prend son essor et où l'on voit le rôle de la Chine, RFI ait l'intention de supprimer les émissions en mandarin non seulement en direction de la Chine mais plus précisément encore sur le territoire national ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Nous avons une communauté chinoise sur notre sol que nous n'arrêtons pas de mettre en avant comme étant particulièrement dynamique, favorable à l'intégration, témoignant d'un grand dynamisme culturel et économique…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

…et, au moment où la mondialisation doit faire place à un monde multipolaire, où nous devons avoir de bonnes relations avec le monde chinois, voilà que votre gouvernement se propose tout simplement de supprimer les émissions en mandarin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Il s'agit bien de l'audiovisuel extérieur et de l'image de la France et j'aimerais avoir des réponses de Mme la ministre sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Ainsi que l'a très bien expliqué Patrice Martin-Lalande, nous avions un audiovisuel extérieur totalement éclaté, avec de gros financements, comparables à ceux des autres pays européens, mais qui ne produisaient pas leurs pleins effets : pratiquement 300 millions d'euros qui avaient besoin d'être regroupés, avec un management beaucoup plus dynamique.

Cela fait très longtemps que l'on reconnaît la nécessité d'une telle réforme, pratiquement vingt ans, mais on en refuse à la fois la traduction et les modalités. Nous avons au moins le mérite de la faire.

La société holding « Audiovisuel extérieur de la France », nom provisoire, reprendra tout le capital de RFI et de France 24, et 49 % du capital de TV5, sachant que France Télévisions, l'INA et Arte conserveront à eux trois 17,6 % de son capital et nos partenaires extérieurs le reste. Tout cela a du sens puisque France 24 était venue s'ajouter dans le paysage sans que rien ne soit changé aux structures antérieures.

Le projet avance. Les actionnaires actuels de France 24 vont s'en retirer, dans des conditions correctes. TF1 avait demandé que l'apport des actionnaires soit valorisé autour de 90 millions d'euros, ce sera finalement 2 millions. Ce sont tout de même des conditions de sortie favorables.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Oui mais France 24 s'est tout de même valorisée. (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

C'est bien la seule entreprise dont le capital ait connu une telle augmentation pendant la période concernée. Dommage qu'elle n'ait pas été en bourse !

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

RFI est en effet une très bonne entreprise, largement présente partout, qui a tout de même besoin d'être redynamisée, et c'est bien l'objectif de la réforme.

Vous avez souvent évoqué la disparition de certaines rédactions. Je rappelle qu'il s'agit de quelques personnes installées à Paris et qu'elles n'ont que quelques centaines d'auditeurs. La rédaction allemande, par exemple, compte quelques personnes à Paris, dont un Allemand, pour un émetteur à Berlin, où l'on compte entre 700 et 800 auditeurs identifiés.

L'idée, c'est de recentrer là où l'on a une bonne force de frappe. RFI a ainsi tout son sens en Afrique, par exemple, et l'on va renforcer la diffusion en certaines langues africaines comme le houassa, le swahili ou le peul. On va utiliser les différents médias, aussi bien la télévision que la radio ou Internet, selon les endroits du monde où l'on se trouve.

Sur la gouvernance, je m'associe à ce qui a été dit. La tutelle administrative de l'audiovisuel extérieur, c'est la DDM, qui va rapporter directement au Premier ministre pour le programme 115. Le ministère des affaires étrangères n'a plus à en connaître.

Les personnalités qui ont été citées, ce que je regrette un peu, sont de grands professionnels. La directrice générale a une très longue carrière derrière elle. Elle n'est pas à l'antenne naturellement. Elle va poursuivre une carrière extrêmement brillante. Son professionnalisme n'est plus à démontrer. Je crois que les femmes ont le droit aujourd'hui de faire des carrières indépendamment des responsabilités qu'exercent leurs maris. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Il n'y a aucun projet de suppression du mandarin, c'est une pure rumeur. Il y aura au contraire de nouveaux projets très intéressants. France 24, par exemple, voulait renforcer son intervention en langue arabe, mais elle avait du mal à trouver les moyens. Grâce aux synergies qui vont s'établir, elle pourra bénéficier des capacités en langue arabe de RFI.

C'est dire que c'est un projet extrêmement fort, cohérent et ambitieux, qui n'est pas là pour détruire notre audiovisuel extérieur mais bien pour porter à la fois la francophonie et la francophilie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie de six amendements, nos 310 , 312 , 313 , 314 , 316 et 808 , tendant à supprimer l'article 2.

La parole est à M. Didier Mathus, pour défendre l'amendement n° 310 .

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Il n'a pas été défendu, c'est un sujet inépuisable. Nous avons bien l'intention de nous battre avec tous les outils de la procédure parlementaire pour nous opposer à ce texte, et nous le revendiquons.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

C'est un texte dangereux pour les libertés publiques, qui veut instituer une télévision d'État en lieu et place de la télévision publique, qui veut l'appauvrir. Nous avons bien l'intention d'utiliser les moyens mis à la disposition de l'opposition parlementaire pour faire vivre les droits démocratiques du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Une interjection de M. Soisson révèle l'ampleur du malaise et du malentendu. M. Soisson a fait remarquer que personne ne comprenait le mandarin en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

C'est donc qu'il croit que RFI est faite pour être écoutée en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Si les parlementaires de la majorité en sont là, il faut vraiment lever la séance et organiser une formation accélérée pour que nos collègues comprennent que RFI, ce n'est pas fait pour être diffusé et écouté en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Si c'est pour un rappel au règlement, je ne peux que lui laisser la parole, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Je m'excuse auprès de M. Mathus, mais j'ai cru comprendre que Jean-Marie Le Guen proposait de s'adresser à nos compatriotes en France en mandarin…

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Parce que seul M. Mathus l'a. En avez-vous terminé, monsieur Mathus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

J'aurais volontiers cédé une part de mon temps de parole à M. Soisson, mais je respecterai vos instructions, madame la présidente.

Comme nous l'avons dit – en essayant de faire montre de nuances, car rien n'est tout à fait noir ni tout à fait blanc –, nous étions nous aussi favorables à un regroupement des forces de l'audiovisuel français. Mais à quoi aboutissons-nous aujourd'hui, suite aux aventures mémorables de M. Benamou et du Gouvernement ? TV5 Monde ne pouvant, par définition, être qu'un partenaire de la holding AEF, faute de pouvoir y être intégré, il ne restera dans cette dernière que RFI et France 24.

France 24 est une télévision fonctionnant selon le format appelé en bon français breaking news – on peut d'ailleurs se demander si c'est le plus approprié pour diffuser la parole de la France, comme c'est, paraît-il, la vocation de cette télévision de le faire. En tout état de cause, de nombreuses autres interrogations se posent au sujet de France 24, à commencer par son audience réelle ; nous ne disposons d'aucune mesure à ce sujet.

En ce qui concerne RFI, je crois que nous pouvons tous dire qu'elle est une grande fierté de l'audiovisuel français.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

C'est une excellente radio qui s'appuie sur les compétences extraordinaires de ses journalistes. Et ce n'est pas une radio de traducteurs, comme certains le croient parfois, mais une véritable radio de journalistes, dans toutes les langues dans lesquelles elle diffuse. Cela mérite une grande considération car, même au-delà du mandarin, ce que fait RFI est une vraie richesse pour notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Je conclus.

Nous ne pouvons cependant voter une mesure qui s'inscrit dans un texte dont la dynamique générale est l'inféodation de l'audiovisuel public. J'en veux pour preuve la série de licenciements qui viennent d'avoir lieu à RFI et à France 24 : en moins d'un mois et demi, ont été licenciés le directeur de la rédaction et le rédacteur en chef de France 24, ainsi que le médiateur de RFI. Tout cela se passe dans un climat de mise au pas, d'inféodation…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

…et il serait dangereux d'accepter de discuter d'un principe alors que la réalité dont il est au fond question n'est autre que l'asservissement de l'audiovisuel public.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je rappelle que nous discutons des amendements et que seuls les députés inscrits ont la parole.

La parole est à M. Marcel Rogemont, pour défendre l'amendement n° 312 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Madame la ministre, personne ici n'a mis en cause le fait que des femmes puissent avoir des responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Vous en êtes un exemple digne d'éloges, et je tenais à vous le dire.

En même temps, il ne convient pas qu'à l'occasion de la nomination de femmes à des responsabilités, nous donnions une image de la France à l'extérieur qui ne soit pas conforme à celle que nous en attendons. En l'occurrence, que l'épouse d'un ministre des affaires étrangères soit nommée à la direction générale déléguée de l'audiovisuel extérieur de la France pose problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Cela dit, madame la ministre, nous vous avons posé plusieurs questions, auxquelles vous n'avez que partiellement répondu.

J'ai rappelé que TF1, qui a mis en tout et pour tout 18 000 euros pour entrer dans le capital de France 24, en réclamait 98 millions pour en sortir. Vous nous avez dit que 2 millions suffiraient. Je vous remercie pour cet élément de réponse, mais je souhaiterais tout de même rappeler quelques données intéressant TF1 et France 24.

En dehors du capital dont je viens de rappeler le montant, TF1 n'a pas mis un seul centime dans France 24, financée intégralement par l'État, à hauteur de 87 millions d'euros par an. En outre, alors qu'elle devait fournir à France 24 autant d'images que France Télévisions, TF1 s'est bien gardé de le faire ; pis, au moment de la Coupe du monde de rugby, dont elle détenait les droits, elle s'est montrée très chiche, ce qui est parfaitement inadmissible.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Enfin, France 24 paie 400 euros la minute d'images à France Télévisions, mais 700 euros la minute à TF1. Il y a donc un problème de relation entre les deux chaînes. Même si ce lien doit être supprimé, je souhaiterais néanmoins savoir s'il subsistera des relations financières.

Par ailleurs, mon collègue Jérôme Cahuzac vous a posé une question sur les décrets d'avance. Qu'est-ce qui justifie les 22 millions accordés par ces décrets ? Aucun de ces éléments n'est extérieur au débat, et nous souhaitons obtenir des assurances avant de voter.

Au fond, si ce texte a été élaboré, c'est parce que le président de la République a souhaité donner 450 millions d'euros aux chaînes privées. Depuis lors, que ce soit dans la commission Copé ou dans cet hémicycle, on essaie d'habiller cette décision.

C'est pourquoi nous sommes contre, non pas que nous soyons opposés à toutes les décisions qui nous sont proposées…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Alors votez celles sur lesquelles vous êtes d'accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

N'interrompez pas l'orateur, s'il vous plaît. Et vous, monsieur Rogemont, acheminez-vous vers votre conclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Si notre position est aussi déterminée, c'est que ce n'est pas le moment de faire une telle réforme.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Si ! Le moment opportun, c'est quand on a de l'argent ! Quand on n'en a pas, comme c'est actuellement le cas – il n'y a qu'à voir notre budget ! –, on remet les décisions à plus tard, pour être sûr que le financement sera assuré.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Martin-Lalande

Alors pourquoi ne pas l'avoir pas fait quand c'était possible ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Voilà pourquoi nous sommes foncièrement hostiles à ce projet. Mais ce n'est pas parce que nous y sommes hostiles que nos questions doivent rester sans réponse !

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Patrick Bloche, pour défendre l'amendement n° 313 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous demandons la suppression de cet article pour une raison très simple : c'est que ce dernier a pour but de substituer à RFI, société publique, une holding – « Audiovisuel extérieur de la France » – qui sera ouverte à des capitaux privés. Et vous voudriez que nous acceptions cet état de fait ?

Nous souhaitons que notre audiovisuel extérieur reste public et que RFI ne soit pas diluée dans une holding, et ce d'autant plus que nous savons déjà que ce qui fait le renom de RFI – son identité, son indépendance éditoriale, son cahier des charges, ses emplois – est menacé ; c'est le cas, d'ailleurs, depuis le lancement de France 24.

Au passage, madame la ministre, on sourirait presque de vous entendre vous réjouir de ce que TF1 n'obtiendra au bout du compte que deux millions d'euros, quand elle en réclamait 90 millions, pour se retirer du capital de France 24. Quand on sait qu'elle a dépensé quelques milliers d'euros symboliques pour y entrer et que France 24 a toujours été intégralement financée sur fonds publics, se vanter que TF1 s'en tire avec deux millions au nom de je ne sais quelle valorisation est tout de même un peu fort !

Les personnels de RFI sont inquiets puisque d'ores et déjà, sur un millier d'emplois, 200 ou 300, voire 400, sont menacés au moment où nous discutons de ce projet. Le 24 octobre dernier, la direction de la holding a d'ailleurs annoncé la fermeture de six rédactions, dont celle de Berlin.

Je voudrais à ce propos corriger l'image que Mme la ministre a donnée de la diffusion de RFI en langue allemande. RFI propose l'information audio la plus complète et la plus approfondie en allemand concernant la France. Les émissions s'adressent au plus grand réservoir d'auditeurs en Europe : 110 millions de germanophones, locuteurs natifs, bien qu'il se trouve parmi eux de moins en moins de francophones, il faut l'avouer.

RFI parle de politique, d'économie, de culture françaises et accorde une large place à la chanson francophone. Le programme de RFI fait mieux connaître la vision française de l'actualité ; il l'explique et la confronte à d'autres approches européennes, notamment allemandes. Comme d'autres institutions franco-allemandes, la rédaction de RFI à Berlin est un vecteur culturel important. Un site Web permet d'écouter les émissions, les reportages et les interviews en différé et en podcast.

Depuis 1994, RFI a sa propre fréquence FM – 106 – à Berlin, une ville qui est devenue au fil des ans la capitale culturelle de l'Europe. La rédaction berlinoise de RFI a accompagné cette métamorphose ; elle est devenue elle-même un acteur de cette effervescence culturelle en promouvant et en participant à de nombreux événements francophones. Signes de l'ancrage réussi dans le paysage audiovisuel berlinois : le succès du club des auditeurs et la toute récente naissance de l'association des amis de RFI à Berlin. RFI soutient l'échange entre jeunes Français et Allemands, provoque des débats entre les acteurs des deux pays, contribue à l'émergence d'une opinion publique européenne.

Voilà tout ce qui risque de disparaître. Du reste, celles et ceux qui font au quotidien RFI en langue allemande nous ont interpellés, et je conclurai en vous lisant leur adresse : « La nouvelle direction de Radio France International envisage la fermeture de six rédactions en langue étrangère, dont la rédaction allemande. Une décision qui concerne également le studio de RFI, la fréquence FM dans la capitale allemande et le site Web, ce qui équivaut à la mort annoncée d'une des vitrines les plus importantes de la France en Allemagne.

Dans la nouvelle stratégie de l'audiovisuel extérieur français, l'Europe, et plus précisément l'Allemagne, n'ont plus leur place. Une telle décision pendant la présidence française de l'Union européenne nous semble un très mauvais signal en direction du partenaire d'outre-Rhin. »

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

« Elle est aussi à l'opposé de l'ambition politique qui consiste à faire redémarrer le moteur franco-allemand, surtout dans un contexte qui a vu resurgir des malentendus et des divergences entre les deux partenaires et où le français est en constante régression en Allemagne. Notre mission consiste justement à combattre les idées reçues sur la France, qui sont toujours véhiculées dans les médias allemands. Notre objectif est de susciter l'intérêt et la compréhension pour la France à travers des reportages, des interviews et des regards croisés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

J'en termine.

« Nos émissions sont un moyen de sensibilisation à la langue et à la culture françaises. Depuis un an, nous sommes partie intégrante du réseau radio et Internet européen Euranet. »

C'est ce qui est en train de disparaître au moment où nous discutons. Oui, notre opposition est foncière à ce projet de loi, car nous en mesurons d'ores et déjà, avant même qu'il soit voté, les funestes conséquences.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

C'est un amendement important, il est de suppression !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Ce que vous avez à dire est essentiel, monsieur Christian Paul !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Il s'agit de l'audiovisuel extérieur, au cas où vous l'auriez oublié, monsieur Paul !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Monsieur Herbillon, nous connaissons la méthode, qu'elle vienne de la majorité ou du Gouvernement – ensemble ou séparément –, qui consiste à fabriquer de faux consensus. Vous et les vôtres êtes coutumiers de cette méthode.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

C'est mieux que chez vous, où vous avez du mal à trouver un consensus !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Si vous continuez à vous énerver, vous ne ferez croire à personne qu'il y a le début d'un accord entre la majorité et l'opposition sur ce texte, et certainement pas sur l'article 2.

L'amendement de suppression que je défends, comme ceux que mes collègues ont excellemment soutenu avant moi, consiste à montrer très clairement au Gouvernement et à la majorité qu'ils sont sur le point de commettre une mauvaise action. Il est encore temps de raison garder en réexaminant cet article. Vous auriez pu l'amender sur le fond mais, visiblement, vous ne le voulez pas. Dès lors, nous en demandons la suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour défendre l'amendement n° 316 .

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Je tiens à revenir sur les suppressions de rédactions à RFI. Mes collègues ont évoqué la suppression de la rédaction allemande et celle de la rédaction polonaise. S'y ajoute la suppression de la rédaction turque, comme si le rayonnement de la France en Turquie n'avait aucune espèce d'importance, particulièrement en ce moment, après que les débats sur les perspectives d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne ont émaillé la campagne présidentielle.

Je veux également saluer l'excellent rapport qu'a rendu M. Martin-Lalande, ainsi que son désir d'adapter les moyens de communication aux régions du monde dans lesquelles l'audiovisuel extérieur de la France doit émettre. Mais, après son intervention, j'ai plusieurs questions à poser : croyez-vous sincèrement, mon cher collègue, qu'après avoir supprimé des rédactions et des émissions de radio dans certains secteurs du monde, on va vraiment s'assurer que les habitants des zones concernées ont tout de même accès à l'information ? Croyez-vous vraiment, par exemple, que supprimer des ondes les émissions en persan pour les cantonner sur Internet alors que cette langue couvre l'Iran, l'Afghanistan et le Tadjikistan est raisonnable ? Pensez-vous que dans la vallée de Kandahar, il y ait le Wi-Fi partout ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

De même, après l'expérience récente des Jeux olympiques, croyez-vous que l'on puisse cesser de diffuser des émissions en mandarin – et autres langues chinoises – sur les ondes, pour se cantonner au seul Internet ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

On a vu ce qu'il en était cet été, malgré les engagements des autorités chinoises concernant la liberté d'informer des journalistes qui couvraient les Jeux et l'actualité dans ce pays. De même pour les Balkans, où nous aurions tort de cesser d'émettre et d'assurer la diffusion de l'information.

Je tiens aussi à évoquer France 24. Madame la ministre : comment les engagements que vous prenez oralement devant nous sur les financements, la garantie de l'emploi et l'indépendance des rédactions peuvent-ils être pris au sérieux alors que vous n'avez pas tenu les promesses de l'État à propos de France 24 ? Rappelons, mes chers collègues, que le niveau de son budget 2009 l'oblige à renoncer au lancement du canal continu en arabe – comme s'il s'agissait d'un objectif mineur pour l'audiovisuel extérieur de la France –, à renoncer à l'extension de sa couverture en Amérique du Nord et en Asie. Là encore, n'est-ce pas un objectif important pour France 24 d'être reçue en Asie ? Je pense à nos compatriotes qui sont, en ce moment même, coincés dans les aéroports ou dans leur hôtel en Thaïlande. N'auraient-ils pas besoin d'informations en provenance de la France ?

Lors du lancement de France 24, en 2006, promesse lui avait été faite d'indexer sur l'inflation et sur le coût du travail la subvention qu'elle perçoit. Cette promesse n'a pas été tenue dans le budget 2009 ! Dès lors, madame la ministre, comment pouvons croire une seule seconde aux engagements que vous prétendez prendre ? Il faudrait que vous nous apportiez de vraies garanties dans vos réponses.

C'est pourquoi jusqu'au bout, sur tous les tons et quoi qu'en disent nos collègues de la majorité, nous nous battrons contre ce projet de loi, en particulier son article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Noël Mamère,pour soutenir l'amendement n° 808 .

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Nos collègues des bancs de la majorité s'offusquaient tout à l'heure du nombre d'amendements que nous présentons en nous accusant d'obstruction,…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Je leur recommande très vivement la lecture de Pierre Sensot, qui a écrit un très bon livre intitulé L'éloge de la Lenteur. C'est le même auteur qui, pour parler des pauvres, a inventé cette belle expression : « les gens de peu ».

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Sachez que nous ne sommes pas une opposition de peu, et que si nous avons à notre disposition des outils démocratiques qui nous permettent de nous engager dans le débat parlementaire, nous n'hésiterons pas à les utiliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Le droit d'amendement est le dernier outil qui nous reste pour tenter de sensibiliser les Français à cette forme de double peine qu'on leur prépare : d'un côté, une augmentation inévitable des tarifs des opérateurs de télécoms, qui ne manqueront pas de répercuter la taxe sur les abonnements ; de l'autre, un service public de l'audiovisuel totalement asséché, incapable de répondre à ses vocations d'information, de culture et de diffusion des connaissances, autrement dit un service public au rabais.

Voilà pourquoi, face à une réforme de complaisance pour payer en cash ceux qui ont permis à Nicolas Sarkozy d'accéder aux plus hautes marches du pouvoir,…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

…nous avons voulu, nous, prendre notre temps pour essayer d'éclairer les Français sur ce qui se prépare. Cette réforme improvisée a obligé la commission Copé à travailler, elle aussi, dans l'improvisation. Qui plus est, bon nombre de ses préconisations ont été purement et simplement balayées par le Président de la République, notamment le calendrier de suppression de la publicité : la commission la prévoyait pour septembre 2009, mais ce sera, par le fait du princen dès le mois de janvier. Nous allons voir si le Président de la République et la majorité parlementaire seront en mesure de tenir ce calendrier, compte tenu des débats que nous menons : on ne vous laissera pas faire comme cela ! Je rappelle que, dans d'autres pays, comme en Angleterre, les grandes réformes de l'audiovisuel public ont pris quatre ans : il a fallu quatre ans pour réformer la BBC, vingt-six séminaires gouvernementaux, et force études pour mesurer l'impact de la suppression de la publicité sur les programmes et sur la création.

S'agissant de l'audiovisuel extérieur, il faut insister sur un point que notre collèguePatrick Bloche a très bien souligné : permettre l'introduction d'entreprises privées dans l'audiovisuel extérieur, c'est faire entrer le loup dans la bergerie. À cet égard, je veux vous faire état d'un article publié dans un journal qui n'a rien de révolutionnaire, puisqu'il est ami de la majorité : Le Figaro. Celui-ci nous explique, petit scoop, que la société Glem Production, qui produit cette émission de m… – c'est moi qui mets les points de suspension –, L'île de la Tentation, a décidé de délocaliser l'enregistrement et la production de cette émission dans des pays de l'Union européenne moins regardants sur les conditions sociales que le nôtre pour éviter de payer des indemnités aux candidats qui avaient tendance à se considérer comme des salariés et non plus comme des invités.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Voilà à quoi on nous prépare en introduisant le privé dans l'audiovisuel extérieur, avec des entreprises qui chercheront d'abord le profit sans se soucier de favoriser l'information des Français de l'étranger et des autres personnes vivant à l'extérieur de la France.

Je rejoins l'inquiétude de notre collègue Sandrine Mazetier : supprimer le turc des émissions de RFI, c'est bien dans l'esprit de ce qu'a défendu ici la majorité. Je me souviens qu'un ancien Premier ministre a osé nous expliquer, sans sourciller, qu'accepter la Turquie dans l'Union européenne, c'était faire le lit de l'islamisme. Supprimer le turc à RFI, c'est envoyer un très mauvais signe à la Turquie et à tous ceux qui, en France, souhaitent l'adhésion de ce pays à l'Union européenne, et veulent que leurs liens traditionnels se perpétuent et soient politiquement consacrés. Derrière la question du regroupement de l'audiovisuel extérieur, de très mauvais coups se préparent. C'est ce que nous voulons souligner par l'amendement n° 808 .

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est àM. Jean-François Copé, président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi organique relatif à la nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public et le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision..

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Madame la présidente, mes chers collègues, je veux seulement mettre en perspective la méthode de travail qui est la nôtre depuis l'ouverture de nos débats. Nous avons déjà débattu une trentaine d'heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Le président de la commission peut intervenir quand il le souhaite – peut-être le serez-vous un jour, mon cher Christian Paul. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Quand il n'est pas là, vous n'êtes pas contents, et quand il intervient, vous n'êtes pas contents non plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Compte tenu du temps que vous passez au micro, souffrez que je vous accorde, ou plutôt que je vous consacre un tout petit peu du mien, mes chers collègues de l'opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Nous sommes très flattés que vous consentiez à nous donner un peu de votre temps, monsieur Copé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Heureusement, monsieur Mamère, que je suis plus indulgent avec vos propos que vous ne l'êtes avec les nôtres !

Nous avons débattu, disais-je, une trentaine d'heures, et nous avons encore 727 amendements à examiner, ce qui fait beaucoup. Je me permets d'apporter ces précisions aussi bien à nos collègues de l'opposition qu'à ceux de la majorité. À ces derniers, je tiens à dire que je suis très impressionné par leur patience et par leur capacité d'écoute. Il ne faut pas craindre de prendre notre mal en patience. Chacun l'a bien compris, s'il arrive à nos collègues de l'opposition de consacrer de temps en temps un peu de leur énergie à parler des amendements en cours, ils en consacrent l'essentiel à parler d'autre chose. Comme nous sommes les uns et les autres bien rompus à la technique parlementaire, nous avons tous bien compris qu'il s'agissait d'une pratique assez classique – il nous est arrivé nous-mêmes de l'utiliser en d'autres temps, et je le regrette. C'est pourquoi l'idée de modifier notre règlement n'est pas forcément mauvaise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Oui, mais maintenant cela nous gêne. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Rires sur les bancs du groupe UMP.) Même vous, chers collègues de l'opposition, lorsque vous aurez plus d'expérience et que vous aurez vécu notre situation, vous vous direz que nous avons bien fait de changer le règlement. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Et puisque Noël Mamère s'est mis à citer les grands auteurs, je l'invite à méditer cette formule d'Aldous Huxley : « Le secret du bonheur et de la vertu, c'est d'aimer ce qu'on est obligé de faire ». Nous allons donc être malheureusement obligés de vous écouter encore un certain temps dire des choses qui n'ont plus rien à voir avec le sujet. Mais c'est la loi du genre…

Je souhaite tout de même que l'on ne perde pas de vue que cela déstabiliserait beaucoup l'entreprise France Télévisions, à laquelle nous sommes tous très attachés (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), si l'opposition se bornait à faire de l'obstruction alors que nous voulons, dans l'intérêt des Français, débattre du fond, c'est-à-dire de l'avenir de la télévision publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Défavorable également.

S'agissant des décrets d'avance, les quelque 22 millions de crédits ouverts se décomposent de la façon suivante : 18,5 millions correspondent à des engagements pris à l'égard de France 24 – il s'agit d'un rattrapage puisque le budget réel s'élevait à plus de 88 millions contre 70 millions en 2008 – ; 3,7 millions d'euros viennent compenser les crédits alloués par France 24 à l'audiovisuel extérieur de la France ; enfin, un reliquat n'avait pas été versé à France 24 en 2007, en raison d'annulations de crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Christian Paul, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58. Sur un ton très patelin et presque angélique, M. Copé, président de la commission spéciale, a cru bon d'exercer une sorte de pression sur l'Assemblée nationale, en tout cas sur l'opposition, en établissant un parallèle entre l'évolution du règlement de l'Assemblée nationale – la faculté de conserver le droit d'amendement, excusez du peu ! – et le déroulement de nos débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Je crois bon de lui rappeler que nous entendons bien exercer les droits de l'opposition, librement et hors de toute pression.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Comme il n'était pas là tout à l'heure quand nous avons interpellé la ministre de la culture sur le sujet, je voudrais l'amener à méditer quelques instants sur des événements graves qui font douter de l'existence réelle de la liberté de la presse en France.

Monsieur Copé, vous n'ignorez pas qu'un ancien directeur de la publication de Libération a été interpellé ce week-end, dans des conditions honteuses pour notre pays, et que vous n'avez pas dénoncées. Quelques-uns, au sein de votre majorité, l'ont fait, mais pas vous, qui êtes pourtant un ardent défenseur de la presse audiovisuelle – du moins le croirions-nous à vous entendre au cours de ce débat. Pas une fois je ne vous ai entendu dénoncer vigoureusement, comme vous auriez pu le faire en tant que président du groupe majoritaire à l'Assemblée nationale, les conditions intolérables dans lesquelles ce journaliste a été interpellé.

Je vous renvoie à la lecture du quotidien, qui a relaté les faits : réveil et interpellation du journaliste à six heures quarante du matin devant ses enfants, menottage, fouilles humiliantes dans le sous-sol du palais de justice. Quant au Gouvernement, quelles ont été ses réactions ? Mme Albanel s'est dite émue, mais Mme Dati a seulement indiqué que la procédure a été « régulière » et Mme Alliot-Marie, qui vient de s'exprimer, considère aussi que la police a suivi les procédures en vigueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Dans un tel contexte, où la question de la liberté de la presse n'est pas seulement posée par des parlementaires de l'opposition mais aussi par la Ligue des droits de l'homme et Reporters sans frontières, où l'on s'attaque à l'audiovisuel public de la manière dont vous le faites – nous y reviendrons lors de l'examen des articles 8 et 9 de ce texte –, vous comprendrez que nous prenions le temps, tout le temps du débat, et que nous entendions utiliser toutes les ressources de la procédure, malgré vos pressions et vos menaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Je voudrais, pour ma part, dire au président Copé que ses propos n'étaient pas très utiles. Je crois que faire pression sur l'opposition, la menacer de modifier le règlement – même en faisant amende honorable pour des pratiques naguère utilisées largement et dans l'allégresse par l'actuelle majorité –, ce n'est pas normal dans un Parlement démocratique. L'opposition a des droits ; elle les utilise, et ce d'autant plus qu'elle estime son combat fondé.

Nous pensons en effet que ce texte est dangereux pour la télévision publique et, plus globalement, pour la démocratie, et qu'il s'inscrit dans le climat inquiétant pour la liberté de la presse qu'a décrit Christian Paul. L'article dont nous discutons vise l'audiovisuel extérieur de la France. Or, au cours des semaines écoulées, nous avons reçu beaucoup de signaux d'alarme en provenance de RFI et de France 24 au sujet de la liberté des journalistes. Nous devons donc faire preuve de beaucoup de détermination. La nôtre est intacte. Nous mènerons ce combat avec sérénité, mais aussi avec force.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

C'est normal. À votre place, nous aurions fait de même !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Les questions soulevées à l'instant par Christian Paul sont graves. Cet après-midi même, dans le cadre des états généraux de la presse, Bruno Frappat, directeur de La Croix, qui n'a rien d'un gauchiste, a interpellé le Gouvernement avec beaucoup de solennité. La réponse de Mme la ministre n'est pas suffisante, alors qu'affluent les dépêches rapportant les réactions des membres du Gouvernement concernés : Mme Dati et Mme Alliot-Marie trouvent que tout est très normal !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Nous ne pouvons nous satisfaire de ces réactions. Aussi demandons-nous à Mme la ministre et à M. Copé de nous dire clairement quelle est la position du Gouvernement et de la majorité sur cette affaire. Pour leur permettre d'y réfléchir, nous demandons une suspension de séance. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt.)

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Je me demande si nous devons reprendre la séance dès maintenant, madame la présidente, dans la mesure où le président de la commission spéciale n'est pas revenu dans l'hémicycle. Je voulais en effet lui dire à quel point j'ai été étonné par les propos qu'il a tenus, et qui me paraissent la marque d'une forte divergence entre lui et nous sur la façon dont doivent se dérouler les travaux parlementaires.

L'origine du texte que nous examinons actuellement n'est autre qu'un oukase pris par le tsar…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

…qui, un beau matin, s'est réveillé avec l'idée de supprimer la publicité sur France Télévisions ! Dès lors, le texte résultant de cette décision unilatérale et définitive du Président de la République obéit à la même logique, ou plutôt la même absence de logique, qui nous conduit droit dans le mur.

Vous allez certainement me demander quel est le rapport avec l'intervention de M. Copé…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Eh bien, je veux simplement lui dire que nous ne sommes pas complètement soumis à l'oukase, et que lui-même, en tant que parlementaire, ne devrait pas l'être non plus, même si les fonctions qu'il occupe le placent dans une situation un peu particulière et l'obligent à composer avec un ordre auquel il ne peut se soustraire complètement.

J'aurais également voulu demander au président du groupe UMP, qui s'est vu confier la présidence de la commission chargée de préparer la réforme – commission qui comprenait, outre des parlementaires, d'éminentes personnalités du paysage audiovisuel –, s'il est exact qu'il n'a appris qu'un quart d'heure avant la remise de son rapport le contenu du deuxième oukase présidentiel, à savoir la décision de nommer en conseil des ministres le président de France Télévisions.

J'aimerais savoir s'il considère, en tant qu'animateur du travail de fond effectué par la commission qu'il a présidée, que cette décision s'inscrit dans le cadre d'un véritable dialogue démocratique, si cela correspond à sa propre conception de la « coproduction » législative, s'il souhaiterait-il que notre assemblée travaille dans les mêmes conditions, et s'il pense que les parlementaires de l'opposition s'y plieront de bonne grâce. J'espère qu'il aura l'occasion de venir nous préciser son point de vue sur ces questions, que je ne manquerai pas de lui rappeler – avec votre accord, madame la présidente – car il est important que notre assemblée soit informée de la position du président du groupe majoritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

À défaut de celle du Président de la République, qui n'a pas le droit de venir s'exprimer ici !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Sans vouloir faire offense au président de la commission spéciale, je veux lui dire qu'il ne manque pas d'oxygène lorsqu'il prétend que nous risquons de déstabiliser le service public en prenant notre temps pour discuter d'un sujet abordé de façon totalement improvisée par le Président de la République et sa majorité ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.)

Si déstabilisation il y a, c'est du fait de la majorité et de la décision prise par le Président de la République, qui n'a fait que fragiliser davantage un service public qui n'avait pas besoin de cela. Pour notre part, nous essayons d'alerter notre assemblée et, au-delà, l'opinion publique, sur certains dangers.

M. Copé est intervenu tout à l'heure pour souligner, en affichant une grande lassitude, qu'il fallait tenir compte du « contexte ». Mais comme Didier Mathus l'a très justement démontré, ce contexte est celui d'une très forte pression exercée sur les journalistes et sur la presse en général !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

J'en veux pour preuve ce qui a été dit aujourd'hui dans le cadre des états généraux de la presse par un journaliste qui ne saurait être considéré comme un révolutionnaire : Bruno Frappat, directeur de La Croix, y a fait part, en effet, de sa grande inquiétude. Je vous rappelle également l'affaire de l'interpellation de M. Vittorio de Filippis, les dispositions votées par le Parlement sur le secret des sources des journalistes, ainsi que les perquisitions effectuées dans les locaux de certaines rédactions.

Tout cela s'inscrit dans un contexte de recul des libertés et de menaces sur la liberté de la presse. Comment pourrions-nous ne pas nous en inquiéter, alors même que les ministres de l'intérieur et de la justice s'empressent de cautionner ce qui est à l'évidence scandaleux et devrait, à ce titre, être condamné de façon unanime ? Notre collègue Jean-Pierre Grand est intervenu tout à l'heure pour protester contre les conditions humiliantes dans lesquelles M. de Filippis a été interpellé et placé en garde à vue. Nous attendons de l'UMP autre chose que de la surprise et de l'émotion au sujet de cette affaire : celle-ci, qui a donné lieu à de graves remises en cause des libertés, doit faire l'objet d'une condamnation pure et simple.

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

M. Lefebvre l'a fait, mais vous n'en parlez pas ! Il est pourtant porte-parole de l'UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Avant de répondre au rapporteur sur les amendements de suppression, je veux m'associer à ce que vient de dire M. Mamère. Il nous est difficile, dans le contexte des événements survenus samedi dernier et alors que le Gouvernement refuse de nous répondre au sujet des conditions dans lesquelles s'est produite cette atteinte manifeste aux libertés, de délibérer aujourd'hui d'un sujet qui concerne la liberté de la presse et l'avenir de l'audiovisuel.

Pour en revenir à l'article 2, M. Kert sait bien que si nous en souhaitons la suppression, c'est parce qu'il tend à dépecer l'audiovisuel extérieur français et à le soumettre à un contrôle politique. J'ai cité tout à l'heure les effets d'une pratique quelque peu « bananière » ayant conduit à la nomination d'une directrice générale entretenant des rapports étroits avec le quai d'Orsay. Je pourrais également rappeler le licenciement dont ont fait l'objet, en septembre dernier, Grégoire Deniau et Bertrand Coq, respectivement directeur de la rédaction et rédacteur en chef de France 24, et tous deux lauréats du prix Albert-Londres, l'un des plus prestigieux qui soient. Sur le moment, personne n'a compris le pourquoi de ce limogeage – jusqu'à ce que l'on se rappelle que Grégoire Deniau avait été l'auteur, en 1993, d'un livre très critique envers l'action de Bernard Kouchner en ex-Yougoslavie. Dans la situation actuelle de France 24, qui n'est véritablement pas saine, il est inévitable que l'on établisse un lien de cause à effet de cet ordre, faisant apparaître une volonté de contrôle politique.

Quant au dépeçage, mes collègues ont évoqué la perspective de suppression de 300 à 400 postes à la rédaction. Vous avez malheureusement cru bon, madame la ministre, de minimiser, pour ne pas dire de tourner en dérision, le rôle joué par les émissions en langues étrangères de RFI. C'est à juste titre que mes collègues Sandrine Mazetier, Jean-Marie Le Guen et Noël Mamère ont dit à quel point ces rédactions sont importantes pour la francophonie, pour le rayonnement de la France dans le monde, mais aussi pour la promotion de l'ouverture et de la démocratie dans un certain nombre de pays, comme, par exemple, le Laos. Lorsque la France est absente de ces pays, lorsqu'elle s'efface en raison de mesures d'économie dérisoires, c'est la démocratie, ce sont les valeurs universelles qu'elle porte qui se trouvent compromises.

Parce que nous nous opposons au dépeçage de cette grande radio qu'est RFI et au contrôle politique imposé à France 24, nous souhaitons la suppression de ce néfaste article 2. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Dans mon intervention sur l'article, je vous ai interrogée, madame la ministre, sur le décret d'avance du 26 octobre 2008, par lequel 22 millions d'euros ont été attribués à la chaîne française internationale.

Je vous remercie pour la franchise avec laquelle vous m'avez confirmé qu'il n'y avait aucun caractère d'urgence ni aucun élément nouveau justifiant cette procédure, puisque la somme aurait dû être budgétée dès la loi de finances initiale pour 2008. Pire, si j'ose dire, vous avez même précisé – et je rends hommage à votre sincérité et à vos efforts de transparence – que ce décret d'avance visait à compenser une sous-budgétisation datant elle-même, pour partie, de 2007. Je rappelle que ces décrets d'avance, ratifiés par la commission des finances et votés en loi de finances rectificative, ne doivent normalement concerner, aux termes de la loi organique qui régit nos textes financiers, que des mesures non prévisibles, et donc non financées à ce titre, ou faisant l'objet d'un caractère d'urgence incontestable. Or rien dans vos propos, madame la ministre, ne fait état de telles caractéristiques. Ces 22 millions d'euros traduisent donc bien une sous-budgétisation, en 2007 comme en 2008, et je crains que nous ne retrouvions le même problème dans la loi de finances que nous venons de voter, et qu'il ne vous faille, par conséquent, prendre un nouveau décret d'avance l'année prochaine, en abusant d'une procédure qui n'est pas prévue pour ce type d'agissement.

Enfin, je ferai observer à M. Copé que l'attitude de l'opposition n'est pas la cause de quoi que soit : elle est la conséquence de la décision prise à la hussarde par le chef de l'État, et qui méconnaît à la fois ce que l'intérêt général commandait et les travaux de la commission ad hoc. Cette décision constitue bien un oukase, pris à un moment sans doute jugé opportun pour occuper le devant de la scène. Parce que nous n'acceptons pas cette façon de diriger le pays et encore moins de traiter le Parlement, nous avons bien l'intention, quelles que soient les remarques émanant de la majorité ou l'amertume qui pourrait naître sur ses bancs, de faire valoir tous nos droits, aussi longtemps que nous l'estimerons nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Le silence du président Copé est assourdissant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Quand je parle, je vous énerve, et quand je ne parle pas, je vous énerve aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

En cette affaire, le Président de la République a un coup d'avance sur vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

C'est pour cela qu'il est Président de la République. (Rires sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il a dit en effet, tout à l'heure, comprendre l'émoi suscité par l'interpellation de Vittorio de Filippis. Nous aurions cependant préféré qu'il réagisse à l'affaire elle-même, et pas seulement aux réactions qu'elle a provoquées. Et nous vous demandons la même chose, monsieur Copé.

Alors que nous débattons d'une loi relative à l'audiovisuel, cette affaire donne en effet le sentiment très déplaisant que l'on s'en prend à la presse par tous les moyens. S'il n'y avait que les députés socialistes pour s'en offusquer, vous pourriez, comme d'habitude, balayer nos protestations avec désinvolture, mais nous ne sommes pas les seuls. Ainsi, la Fédération européenne des journalistes, qui représente 250 000 professionnels de trente pays européens, a déclaré par la voix de son président : « Cette affaire a des relents de chasse aux sorcières contre la presse au moment où les autorités tentent de réformer par tous les moyens, de briser le service public audiovisuel, l'AFP et la presse écrite. »

Monsieur Copé, dans ce climat détestable de chasse aux sorcières, nous aimerions vous entendre. Nous y reviendrons, bien sûr, lors de l'examen des articles 8 et 9, puisque ce sont eux qui concrétisent la reprise en main de l'audiovisuel public, mais toujours est-il que votre silence assourdissant est choquant.

(Les amendements identiques nos 310 , 312 , 313 , 314 , 316 et 808 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 34, de la commission.

(L'amendement n° 34 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisi d'un amendement n° 35 .

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Je m'interroge sur le bien-fondé de cet amendement qui vise à substituer la notion de langue à celle de culture, dont elle fait partie. L'audiovisuel extérieur de la France devrait insister davantage sur l'image que nous voulons donner de notre pays. Quant au pluriel, je conçois qu'on puisse considérer qu'en France les cultures sont diverses, mais dans ce cas il faudrait accorder les adjectifs « française » et « francophone ». Bref, cet amendement me paraît alourdir inutilement le texte et, surtout, dénaturer le mot culture, qui embrasse naturellement la langue française.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

Nous en avons débattu en commission, mais c'est avec plaisir que je reprends les explications que nous avions alors données. Nous avons voulu, Mme Marland-Militello et moi-même, préciser la place de la langue au sein d'une notion plus globale qui est la culture, et si nous avons mis ce dernier mot au pluriel, c'est parce qu'il est question à la fois de culture française et de culture francophone.

(L'amendement n° 35 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisi de trois amendements, nos 809 , 36 rectifié et 693 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 36 rectifié et 693 rectifié sont identiques.

La parole est à M. Noël Mamère, pour soutenir l'amendement n° 809 .

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Cet amendement s'inscrit dans la même logique que les précédents. Je voudrais profiter de l'occasion pour interpeller une nouvelle fois le président du groupe UMP. Monsieur Copé, puisque le Président de la République a en quelque sorte donné le feu vert, rien ne vous empêche maintenant de réagir et de nous dire ce que vous pensez des conditions de l'interpellation de Vittorio de Filippis.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Rien ne vous empêche de nous dire si vous êtes d'accord avec le Président de la République, qui souhaite une dépénalisation de la diffamation.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Rien ne vous empêche de nous dire que vous êtes scandalisé, que vous trouvez honteuses les conditions dans lesquelles s'est déroulée cette interpellation. Rien ne vous empêche de vous prononcer sur le principe. En votre qualité de juriste, vous savez bien que jamais, dans l'histoire de la justice, des affaires de presse n'avaient donné lieu à ce type d'interpellation avec menottes et garde à vue. C'est la première fois ! Nous attendons donc que vous partagiez nos inquiétudes face aux menaces qui planent sur la presse et, au-delà, l'ensemble de nos libertés. Votre silence est pesant. Si vous continuez de vous taire, nous verrons dans cette attitude une forme de complicité avec Mme Dati et Mme Alliot-Marie dont les déclarations sont très choquantes.

L'amendement n° 809 traduit les objections que nous avons à l'encontre de l'article 2, dont nous avons demandé tout à l'heure la suppression. Il importe de ne pas limiter l'audiovisuel extérieur français à la « fourniture d'information », et de permettre à ses filiales de créer des documents audiovisuels propres. S'il ne s'agit en effet que d'ouvrir le robinet pour diffuser des informations qui, de plus, ne seront pas forcément préparées et fabriquées par les filiales, cela reviendra à vendre par appartements l'audiovisuel extérieur à des entreprises privées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Pour tout vous dire, monsieur Mamère, si je n'ai pas répondu jusqu'à présent, c'est parce que je pensais que ces interpellations relevaient de la technique de l'obstruction. J'attendais que cela passe…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Défendre la liberté de la presse, c'est faire de l'obstruction ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Laissez-moi répondre, monsieur Paul. Vous défendez avec beaucoup de promptitude la liberté de l'opposition, mais je vous trouve moins empressé envers celle de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je n'ai pas répondu car je l'ai déjà fait deux fois : hier après midi et cet après midi encore.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Les socialistes n'ont pas la télévision !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je pensais vraiment que votre ton comminatoire, qui contraste avec votre attitude bien plus accommodante en privé, était un simple « truc » pour faire de l'obstruction, que vous vous étiez donné le mot. J'ai d'ailleurs invité mes amis à faire preuve de patience, puisqu'il est écrit que, pour examiner ce texte, on doit se taper des heures de logorrhée parfaitement hors sujet. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Vous ne vous êtes pas exprimé publiquement sur l'affaire Vittorio de Filippis !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Comme vous êtes toujours très prompt à défendre la liberté de la presse, je dirai à vos ex-confrères de France-Inter, d'i-Télé, de RTL et du Monde, auxquels je m'adressais, que ce sont de simples voisins. Cela leur fera sûrement plaisir…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Vos amis sont épatants, madame la présidente. Cet après midi, ils ne sont vraiment pas décevants !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Mme la présidente n'a pas d'amis lorsqu'elle préside !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je vais donc répéter ici ce que j'ai déjà dit à plusieurs reprises depuis hier après midi. Tout d'abord, j'ai été, comme tout le monde, surpris pour ne pas dire frappé…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Dites-moi plutôt ce que j'ai à dire, ce sera plus simple ! Cette question mérite mieux que de l'ironie de votre part, monsieur Paul.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Parfaitement, et cela en dit long. J'ai exprimé mon émotion et mon étonnement quant à la brutalité de cette interpellation. Pour le reste, j'ai dit que, sur le fond de l'affaire, je ne savais rien d'autre que ce que j'en avais lu dans la presse. En tant que responsable politique mais également comme juriste, cher confrère (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), je suis contre le fait de commenter des procédures judiciaires en cours, et la moindre des choses me semble de laisser fonctionner l'État de droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Puissiez-vous vous en inspirer, monsieur Mamère !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

S'il y a eu des dérapages, il appartient aux services compétents de l'État de faire toute la lumière.

Enfin, je ne compte pas faire l'objet, tout au long de la séance, de vos mises en causes récurrentes, et je considère n'avoir à répondre ni à vos interpellations désobligeantes ni à vos incessants diktats, qui contrastent singulièrement avec la cordialité qui a présidé à l'ensemble de nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

J'ai fait part de mon émotion et je souhaiterais que vous ayez la même promptitude de réaction quand, dans des situations similaires, ce ne sont pas des journalistes qui sont concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Eh bien, nous progressons, monsieur Mamère… Et j'indique à l'Assemblée que, si je vous ai, tout à l'heure, donné du « cher confrère », c'est que vous êtes avocat comme moi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Certes, cela a provoqué beaucoup moins de cris que dans mon cas…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Cela n'a rien à voir, je ne travaille pas dans un cabinet d'affaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je constate simplement qu'il y a deux poids et deux mesures, ce qui, venant du groupe socialiste, ne nous étonne même plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

L'amendement n° 809 implique que la majorité des émissions diffusées soient conçues, produites et programmées par la nouvelle société nationale de programme. La commission l'a repoussé, car elle ne voit pas de raison d'imposer un pourcentage rigide et arbitraire de 50 % des missions, ni de donner une telle épaisseur à cette holding qui coordonnera les émissions des autres opérateurs de l'audiovisuel extérieur.

Elle a, en revanche, émis un avis favorable à l'amendement n° 36 rectifié , cosigné par M. Braouezec et M. Mamère.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Je ne partage pas l'avis négatif de notre rapporteur, dans la mesure où la rédaction proposée, qui comprend l'adverbe « notamment », n'est pas exclusive.

Notre débat porte en fait sur la stratégie et le rôle que nous voulons assigner aux sociétés de programme, notamment en matière de production, qu'il s'agisse de l'audiovisuel extérieur ou des autres sociétés de programme.

Les vieux schémas des années quatre-vingt, époque où les nouveaux dispositifs réglementaires et législatifs avaient pour but de favoriser l'émergence de producteurs indépendants, sont aujourd'hui obsolètes : il faut au contraire redonner du contenu à nos sociétés de programme, en leur fournissant des capacités de production plus importantes. La BBC, référence obligée de ce type de débat, produit énormément, bien davantage que les sociétés de programme françaises. Il est essentiel de donner à l'audiovisuel extérieur français la capacité de produire et de programmer, car cela permettra de redonner de l'identité et du corps aux sociétés de programme, et ce d'autant plus que les outils dont nous disposons dans ce domaine sont exceptionnels.

Je rappelle enfin à M. Copé que, lorsqu'il a fait l'objet de critiques pour avoir rejoint le barreau de Paris, elles provenaient davantage de ses propres amis que de nos rangs.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Défavorable. Nous sommes en effet attachés à la notion de fourniture d'informations, dont nous faisons l'un des objectifs assignés à la holding que nous sommes en train de créer. En effet, la France et la francophonie doivent être mieux représentées aux côtés des grands médias internationaux comme CNN, la BBC ou Al Jazeera.

Nous pensons par ailleurs que ces amendements sont satisfaits par le troisième alinéa, qui prévoit qu'AEF peut directement concevoir et programmer des services de communication audiovisuelle – parmi lesquels figurent les services de radio et télévision – et qu'elle est par ailleurs chargée de coordonner les services de communication audiovisuelle édités par des sociétés dont elle détient tout ou partie du capital.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Je souhaite insister sur l'importance du mot « production ». En effet, un amendement du rapporteur a malencontreusement, et sans malice de sa part, fait tomber une série d'amendements à l'article 1er, dans lesquels figurait ce terme. Nous n'avons donc pu en débattre, ce que j'aimerais que nous fassions maintenant, à l'occasion de la discussion de l'article 2.

Les missions de production ne sont ni concurrentes ni exclusives de la production d'informations, et il nous paraît important que l'activité de production soit spécifiquement mentionnée parmi les missions de la holding et de ses éventuelles filiales. Le groupe socialiste s'associe donc à l'amendement proposé par Noël Mamère.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

J'aimerais que M. Copé prenne conscience de la triple pression que subit la presse. Une pression économique d'abord, dans la mesure où le Gouvernement n'a qu'un seul mot à la bouche : concentration. Une pression politique ensuite, puisque c'est désormais le Président de la République qui va chapeauter l'ensemble du service public, tout en continuant à animer les débats de la télévision privée. Enfin, et c'est nouveau, une pression judiciaire, plus indirecte mais bien réelle.

Il n'est donc pas anormal, dans ces conditions, que nous nous interrogions sur l'avenir du métier de journaliste – interrogation que partagent les femmes et les hommes venus de tous les horizons politiques, parfois proches de vous, qui étaient réunis aujourd'hui pour les états généraux de la presse, et qui n'acceptent plus de telles pratiques.

Alors qu'il n'était que candidat, le Président de la République avait fait part de son intention de s'occuper de la question des sources. Une loi a été votée, dont nous voyons aujourd'hui qu'elle ne sert pas à grand-chose. Et M. Sarkozy peut bien parler de créer telle ou telle mission, nous savons que cela peut n'être qu'un moyen de gagner du temps.

Alors que nous réfléchissons au meilleur système audiovisuel et à la meilleure télévision à offrir aux Français, il n'est pas inutile d'exprimer ce que ces pressions ont d'inacceptable. Jusqu'à preuve du contraire, madame la ministre, monsieur le président de la commission spéciale, aucun autre pays démocratique n'a de pratiques comme celles auxquelles nous assistons.

Vous vous trompez si vous jugez que l'essentiel n'est pas là. Il est en effet essentiel que le citoyen soit considéré comme tel quand il regarde la télévision, écoute la radio ou lit son journal. Nous ne pouvons accepter qu'il soit réduit à n'être qu'un consommateur privé de sa liberté de choix et de jugement.

Il est donc légitime que nous défendions les journalistes, comme il est légitime que nous vous interrogions sur la diversité. Le rapporteur ne m'a pas vraiment convaincu, et j'attends de nouveaux éclaircissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

, rapporteur. Je voudrais rappeler que la commission a donné un avis favorable à l'amendement n° 36 rectifié , après que j'ai émis des réserves de deux ordres.

J'ai d'abord estimé que l'influence de l'audiovisuel passerait à l'avenir par le multimédia et par Internet et que cet amendement, sans fermer entièrement la porte, restreignait fâcheusement sa portée aux seules radios et télévision.

Il m'a semblé ensuite que son insertion dans le corps de l'article 2 était redondant avec l'alinéa 3, qui donne déjà à la société en charge de l'audiovisuel extérieur la possibilité de concevoir et de programmer elle-même des services de communication audiovisuelle.

Malgré cette double réserve, la commission a adopté l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Notre échange est révélateur de ce que va malheureusement devenir l'audiovisuel extérieur. Je suis d'ailleurs surpris que l'on accuse l'opposition de faire de l'obstruction, alors que nous parlons de l'avenir de l'audiovisuel extérieur de la France et que ce qui est en cause n'est rien de moins que la survie de RFI et le devenir de TV5. Y consacrer trois heures de débats n'a rien d'excessif, d'autant que plusieurs centaines d'emplois sont en jeu et que l'on annonce d'ores et déjà la fermeture de plusieurs stations dans le monde.

Les amendements nos 809 , 36 rectifié et 693 rectifié visent à préciser la mission et le rôle de l'audiovisuel extérieur de la France. C'est une question de fond.

Mme la ministre et M. le rapporteur voudraient réduire sa mission fondamentale à la fourniture d'informations. C'est une erreur historique : peut-on faire entendre au monde la langue et la culture françaises par la seule fourniture – puisque tel est le terme consacré – d'informations ? Bien sûr que non. D'abord, les chaînes d'information continue se sont multipliées. Et puis, si l'information est un des éléments de la langue française, la culture, le sport, le divertissement – et que sais-je encore ? – aideront à rendre attractive la culture francophone, et constitueront un élément de repère pour tous les francophones, mais aussi pour les francophiles. La programmation de l'audiovisuel extérieur de la France doit être diverse et attractive.

Nous ne saurions donc d'autant moins nous satisfaire de la formulation actuelle de l'article 2 du projet de loi que la lutte pour les places au sein des bouquets satellitaires est rude, et que TV5 déploie pour cela une énergie considérable. Comme parlementaires voyageant à l'étranger, nous nous plaignons souvent que TV5 ne soit pas présente dans notre chambre d'hôtel. La parole de la France doit être écoutée ; TV5 doit être regardée, RFI écoutée : pour conquérir des auditeurs, des téléspectateurs, soyons conquérants ! Nous replier frileusement sur nous-mêmes serait tragique.

(L'amendement n° 809 n'est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 36 rectifié et 893 rectifié ne sont pas adoptés.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. L'amendement avait pourtant été accepté par la commission !

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n° 37 .

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Cet amendement, accepté par la commission, vise à ce que l'audiovisuel extérieur français ait aussi pour mission de traiter de l'actualité européenne.

Je voudrais faire une remarque préliminaire sur les conditions d'interpellation de M. Vittorio de Filippis, qui ont fait débat cet après-midi. Au récit des conditions de cette interrogation, l'émotion des centristes a été forte. J'entends bien le raisonnement de M. le président Copé : il y a une instruction. Mais celle-ci doit être rapide, et s'il y a eu faute – ce qui est probable, notamment de la part du juge –, il n'y a aucune honte à la condamner.

L'opposition a choisi une stratégie d'obstruction. Elle est libre de le faire, dans le cadre du Règlement, et il nous faut l'accepter. En tant que vétéran des débats sur GDF-Suez – 56 000 amendements avaient été déposés, et l'obstruction a duré trois semaines –, je voudrais rassurer mes collègues : il y a une alchimie de l'obstruction ; ça coince, et puis, à un moment ça ne coince plus. La trêve de Noël nous aidera peut-être ; il suffit de saisir le moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Notez bien, mes chers collègues de l'opposition, que j'ai moi-même émis de fortes réserves sur le financement de cette réforme. Mais quand les médias disent que l'Assemblée avance à la vitesse de l'escargot, cela ne donne pas de nous une bonne image. Quand la salle des Quatre Colonnes est vide, quand les tribunes de presse sont vides, la question de la façon dont se déroule le débat démocratique se pose, mais il vous appartient d'en juger. C'est pour cela que je dis : ça coince, et puis, à un moment, ça ne coince plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

C'est comme les centristes, qui finissent toujours par voter avec le Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Ne désespérez pas de nous !

L'amendement n° 37 est modeste : il souligne qu'on ne peut plus parler de la France sans parler de l'Europe, et que l'ambition européenne ne suffit pas : une pédagogie de l'Europe est nécessaire. Si cet amendement réunissait un consensus, il annoncerait peut-être Noël ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

J'interviens d'abord pour rassurer M. Dionis du Séjour : il est possible que nous apportions notre concours à son amendement…

J'avoue d'abord mon incompréhension devant le vote précédent.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Le rapporteur le rappelait à l'instant : cet amendement a été discuté et adopté en commission. Si notre volonté à tous est bien de mettre en avant la capacité de l'audiovisuel extérieur de la France à produire de l'intelligence, alors je ne comprends pas, et je regrette même fortement, que Mme la ministre ne nous ait pas expliqué les raisons de son hostilité.

J'en viens à l'amendement n° 37 . La majorité nous reproche sans cesse de faire de l'obstruction et de ne voter aucune proposition des autres groupes. À titre personnel, je trouve intéressant que, dès lors que l'on parle de l'actualité française, francophone et internationale, on glisse le mot « européenne » – car cette radio, cette télévision doivent porter cette belle idée européenne dont nous sommes tous ici, j'espère, les défenseurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Je ne voudrais surtout pas faire de peine à M. Dionis du Séjour, et je ne doute pas de la détermination des centristes. (Sourires) Mais je m'interroge sur la portée de cet amendement : est-il bien opportun d'ajouter la dimension européenne, alors que l'on évoque déjà l'actualité internationale ? Je n'en vois pas la nécessité, sauf s'il s'agit d'un salut obligatoire aux mânes de Jean Monnet.

Si les Français n'aiment pas assez l'Europe, c'est par ignorance et par inculture : j'ai souvent entendu ce discours – et je l'ai même relu dans un amendement de la majorité. En 2005, une campagne massive de la télévision en faveur du oui n'avait pourtant pas empêché nos concitoyens d'exprimer une autre opinion. Il faut donc, je crois, s'en méfier.

Je voudrais surtout dire que la loi n'est pas faite pour écrire les programmes de la télévision, qu'il s'agisse de l'audiovisuel extérieur français ou des chaînes nationales. J'ai ainsi noté avec beaucoup d'intérêt une déclaration faite hier, dans le Journal du dimanche, par Mme la ministre : la téléréalité, nous dit-elle, sera interdite sur le service public. Comme la cavalerie, Mme la ministre arrive après la bataille : la télévision publique n'a justement diffusé aucun programme de téléréalité depuis le début des années 2000 – c'est d'ailleurs une spécificité française !

Tout le monde devrait donc se calmer : ni les ministres ni les députés n'ont vocation à faire les programmes, à nommer les animateurs, ou à distribuer des bons points aux journalistes. Notre rôle est autre : je pense que dans l'énumération des missions de la télévision, il faut s'abstenir de rentrer par trop dans le détail de la programmation.

France 24 comme RFI ont la vaste mission de diffuser une certaine idée de la France, de la culture française. Il ne s'agit pas seulement de fournir des informations ; M. Patrick Bloche a entièrement raison sur ce point. TV5 apporte ainsi autre chose que de l'information ; elle fait vivre la culture française, y compris dans les oeuvres de divertissement. Réduire tout à l'information est vraiment dommage.

Parler de la France et du monde, et aussi de l'Europe : cet ajout ne fait de mal à personne, donc nous ne voterons pas contre cet amendement, mais je crains qu'il n'apporte rien à la réflexion collective sur la télévision publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Je veux seulement rappeler qu'il n'était pas neutre, en Afrique où j'ai effectué une partie de ma carrière, d'expliquer la PAC ou les accords de Lomé. Il faut se placer sous l'angle de la construction européenne et non pas réagir en tant que sous-ensemble international. Aujourd'hui, pour que la France soit lisible, il faut expliquer que, pour certaines de ses compétences, elle est d'abord européenne, avant d'être nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Voilà le sens profond de mon amendement.

(L'amendement n° 37 , accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie de deux amendements, nos 38 et 810 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 38 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

Les amendements ont tous deux été proposés par M. Mamère. Mais, si l'amendement n° 38 a reçu avis favorable de la commission, l'amendement n° 810 a reçu, lui, un avis défavorable. Je propose donc que leur auteur les présente l'un et l'autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Il ne s'agit pas d'amendements de détail puisqu'il est proposé de remplacer « langue étrangère », au singulier, qui ne signifie rien selon moi, par « langues étrangères », au pluriel.

La diversité linguistique mérite d'autant plus d'être défendue que nous venons, avec nos collègues de l'opposition, de dénoncer les menaces qui pèsent, par exemple, sur la société RFI, du fait de la disparition de plusieurs de ses bureaux à l'étranger. Jean-Marie Le Guen a évoqué la probable disparition du mandarin tandis que notre collègue Sandrine Mazetier s'est inquiétée pour le turc, mais nous pourrions citer d'autres langues dont il est prévu qu'elles disparaissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

En effet, avec la suppression du bureau de Berlin.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Il nous semble très important de parler du respect de la diversité linguistique. C'est à cette condition que l'audiovisuel extérieur français aura vraiment un sens politique et un rayonnement. C'est à ce titre qu'il pourra s'adresser non seulement aux Français qui sont à l'étranger mais également à toute la planète – puisque c'est cette couverture-là qui est envisagée.

Pour l'instant, je maintiens mon amendement n° 810 . Je pense qu'il a une certaine légitimité et j'attends de voir ce qu'en diront mes collègues.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 38 et défavorable à l'amendement n° 810 , qui obligerait à sous-titrer toutes les émissions s'il était retenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Je voudrais profiter de la discussion de ces deux amendements pour faire le point sur les votes qui viennent d'intervenir à propos de l'avenir de l'audiovisuel extérieur de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous avons adopté des amendements pour nous faire plaisir, mais ils auront peu d'impact et sont, de mon point de vue, en totale contradiction avec le sort que nous sommes en train de réserver à l'audiovisuel extérieur français, et en particulier à TV5 et à RFI.

L'Assemblée a en effet rejeté un autre amendement qui aurait permis que ces sociétés, qui seront des filiales d'AEF, puissent continuer à concevoir et à programmer des émissions et des documents aussi bien pour la radio et la télévision, rétrogradant leur rôle et leurs missions à la simple « fournitures d'informations ». Et, dans la foulée, nous avons été amenés, dans un climat de consensus mou, à voter l'amendement de notre collègue Jean Dionis du Séjour.

Je trouve extraordinaire, mon cher collègue du Nouveau Centre, de vous entendre donner tant de leçons à l'opposition, alors que celle-ci est dans son rôle quand elle dénonce ce mauvais projet de loi et défend bec et ongles l'audiovisuel public et la pérennité de son financement.

Je vous rappelle que, le 24 octobre dernier, la direction de la holding AEF a confirmé la fermeture de six rédactions dont les langues étaient jugées « trop confidentielles ». Parmi ces langues, quatre étaient européennes : l'allemand – excusez du peu ! –, l'albanais, le polonais et le serbo-croate. Ayant l'honneur de présider, depuis maintenant six ans, le groupe d'amitié France-Croatie, je me permets de vous rappeler que ce pays sera le prochain pays à adhérer à l'Union européenne, sans doute l'année prochaine, et au plus tard en 2010.

Je trouve extraordinaire qu'on vote un amendement proposant que TV5, RFI et France 24 parlent de l'actualité française, francophone, internationale et européenne, tandis que, dans le même temps, on ferme la station de RFI à Berlin et que quatre langues européennes se trouvent pénalisées par des décisions intervenues il y a déjà un mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il faudrait expliquer à M. Dionis du Séjour que Berlin est en Europe !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Le russe étant sans doute jugé « confidentiel » lui aussi, les émissions en russe de RFI seront désormais cantonnées à Internet et ne seront plus diffusées sur les ondes !

J'aimerais que nous montrions un peu de cohérence dans ce que nous votons et que nous adoptions, en l'occurrence, l'excellent amendement de notre collègue Mamère, qui est, je le souligne, inclusif et non exclusif.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Le fait d'écrire que la société nationale de programme en charge de l'audiovisuel extérieur de la France contribue à définir les orientations en français « et en langues étrangères » permettrait de donner à l'audiovisuel extérieur de la France sa vraie vocation, sa vraie mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Ce débat me rappelle étrangement le débat que nous avons eu lors de la discussion de la proposition de loi de Mme Taubira. Certains voulaient que les programmes incluent l'histoire de la décolonisation, tandis que d'autres estimaient que les programmes devaient inclure l'histoire de la présence française. Nous avons tous eu tort à l'époque, et le Conseil constitutionnel et le Président de la République de l'époque ont jugé que l'Assemblée ne devait pas prendre position sur les détails et les modalités des programmes. Et aujourd'hui, nous sommes en train de recommencer la même chose !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

J'ai voté contre l'amendement qui proposait la fourniture d'informations relatives à l'actualité « européenne ». Nous n'avons pas à intervenir dans la définition des programmes et sur les conditions dans lesquelles les émissions sont faites. Nous sommes en train de faire du mauvais travail.

Les propos de Didier Mathus tout à l'heure, j'aurais pu les prononcer et je les approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Quand l'opposition me paraît être dans le droit chemin, je la soutiens toujours. Là, nous sommes en train de faire un mauvais travail, nous allons trop dans le détail. Les précisions que nous introduisons sont complètement inutiles, elles seront d'ailleurs sans doute supprimées lors du vote final de la loi. Je le dis simplement, nous dénaturons le travail et la grandeur de l'Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Je voudrais revenir sur le déroulement des votes sur les derniers amendements et en particulier sur les leçons qu'on nous donne, sur les menaces à peine voilées du président de la commission spéciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Je rappelle à tous mes collègues que, depuis le début de la législature, l'urgence a été déclarée sur la quasi-totalité des textes, sauf quatre ou cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Clément

Il est temps de réformer la Constitution, et le pays !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Cet après-midi, nous délibérons sur le service public de l'audiovisuel et l'audiovisuel extérieur français – tout petit sujet, n'est-ce pas ? – et on nous congédie, on critique le fait que nous osions passer trois heures sur rien moins que RFI, France 24 et TV5.

Vous venez de voter contre un amendement qui avait été adopté en commission, contre un amendement du rapporteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Alors que, bientôt, nous travaillerons sur les textes tels qu'amendés par la commission, c'est vous, mes chers collègues, qui n'êtes pas mûrs pour le travail parlementaire tel qu'il va se dérouler. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

C'est vous qui ne vous respectez pas vous-mêmes. La plupart d'entre vous n'avez même pas participé au travail de la commission, et vous nous donnez des leçons parce que nous faisons notre travail ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Le président de la commission spéciale se tourne vers vous et regrette d'être contraint – je cite – à « se taper des logorrhées » ! Est-ce ainsi que l'on nous traite ? Est-ce ainsi que vous vous traitez vous-mêmes ?

Je vous demande de bien réfléchir. C'est votre droit de voter contre les amendements du rapporteur, mais ne nous reprochez pas de faire notre travail, tout notre travail. C'est pour cela que nous avons été élus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Ce n'est pas du travail, c'est de l'obstruction !

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Je voudrais m'adresser courtoisement à mon collègue Jean-Pierre Soisson, car il s'est égaré – probablement meurtri, comme moi, de la nouvelle défaite de l'AJ Auxerre samedi. (Sourires.) Il s'est égaré au point d'imaginer que la démarche qui a présidé à l'élaboration de la loi Taubira pouvait être comparée avec celle d'aujourd'hui.

Comment comprendre le refus de la majorité de voter l'amendement présenté par le rapporteur Christian Kert au nom de la commission spéciale qui visait à ne pas limiter TV5 à la fourniture d'informations et qui demandait au contraire, comme le souhaitent d'ailleurs aussi bien les Français responsables de cette chaîne que les Québécois, les Suisses et les Belges, que toute la variété des programmes y figure, au risque, sinon, d'aboutir rapidement à une fusion, peut-être souhaitée en haut lieu, entre France 24 et TV5, avec la menace majeure d'un incident diplomatique ?

De même, comment comprendre votre réaction lorsque nous exprimons le souhait d'associer les langues étrangères à la langue française, lorsque nous regrettons la disparition de six rédactions qui produisaient en six langues étrangères essentielles, notamment l'allemand, alors que la construction franco-allemande est en péril – triste symbole – bien que l'Union européenne soit présidée par la France ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Vous ne devez pas critiquer le fait que nous nous battions sur des questions de fond concernant la culture française.

Je représentais, avec Axel Poniatowski, notre assemblée au sein de la commission du Livre blanc, présidée par Alain Juppé. Le but principal de ce Livre blanc, qui a d'ailleurs été adopté à l'unanimité et dont j'espère que le Gouvernement tiendra compte, était de cerner l'influence française à l'étranger. Or, en adoptant des dispositions essentielles, puisque concernant la culture, nous sommes en train d'éroder terriblement l'influence de la France à l'étranger.

Je pense donc que cette discussion est sérieuse et qu'elle mérite que nous prenions notre temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Il nous faut en effet prendre notre temps pour discuter de questions aussi sérieuses, qui mettent en cause le rayonnement de la France grâce à ses outils audiovisuels extérieurs.

Je ne crois pas, monsieur Soisson, qu'il soit opportun de comparer notre débat avec celui que nous avons eu sur la loi Taubira. Même si je pense, pour ma part, que ce n'est pas aux députés, mais aux historiens de fixer le contenu des programmes, c'est un autre débat, qu'il ne faut pas confondre avec celui-ci.

En revanche, parler de la production audiovisuelle extérieure de la France, de la programmation ou de la capacité de produire des émissions plutôt que de déverser de l'information comme un robinet, ce n'est pas se perdre dans les détails, mais définir le périmètre de l'audiovisuel extérieur de la France et sa vocation. À ce titre, notre amendement, identique à celui du rapporteur, est une bouée de sauvetage lancée à la diversité linguistique et aux langues étrangères aujourd'hui menacées, notamment sur RFI. L'article 2 du projet de loi ne vise en effet qu'à absorber une société dont le rayonnement n'est plus à démontrer, vivant grâce à des journalistes courageux, qui prennent des risques considérables dans des pays très sensibles. Certains y ont même perdu la vie.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Mais les journalistes ne sont pas des soldats : ils ne sont pas payés pour faire la guerre, mais pour informer, ce qui n'est pas la même chose ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Fromion

Les soldats sont payés pour défendre leur pays et votre liberté !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Ne comparez pas les journalistes aux soldats, et n'essayez pas d'introduire en France les pratiques des Américains qui, pendant la guerre d'Irak, ont emmené avec eux des journalistes embedded, « embarqués », selon l'idée de George Bush. Le rôle du journaliste est au contraire l'indépendance : il doit montrer ce qui se passe dans le monde, quitte à descendre en Enfer pour montrer l'Enfer, sans jamais se faire complice de ceux qui l'ont créé.

De même, sur un autre plan, nous sommes évidemment opposés aux théories du spécialiste de l'ingérence et du militaro-humanitaire, qui est une dérive : souvenons-nous de ce qui s'est passé par exemple au Darfour.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Vous cautionnez d'abord, pour dénoncer ensuite !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Pour revenir à l'amendement n° 810 , la décision de supprimer l'utilisation de l'allemand, du serbo-croate et du polonais, ainsi que d'autres langues, a déjà été prise, alors qu'on sait bien que les langues étrangères sont indispensables à la validité de l'audiovisuel extérieur de la France. C'est pourquoi, loin de nous perdre dans les détails en défendant nos amendements, nous défendons un principe.

Mais si vous voulez des détails, je veux bien en citer un : au début de la discussion, avant l'article 1er, le président de la commission spéciale, qui s'est targué de son amendement sur la diversité, nous a manifestement pris pour des imbéciles. Croit-il qu'il suffise d'inscrire la diversité dans la loi, alors qu'elle relève d'un combat de tous les jours ? Aujourd'hui, bien des gens se considèrent comme des étrangers de l'intérieur, parce que la République n'est plus présente dans leur quartier ou qu'ils y sont humiliés, comme l'a été hier Vittorio de Filippis. Si l'on veut favoriser la diversité, que ce soit par des politiques qui assurent à tous les mêmes chances, et non par le biais de cet amendement déposé avant l'article 1er, qui, pour le coup, était bien un amendement de détail. Les amendements en discussion sont autrement plus sérieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Madame Mazetier, quels que soient la position de la commission et le vote qu'elle a émis, l'Assemblée n'est pas liée par ses avis. Ce sont les députés dans leur ensemble – même ceux qui n'ont pas participé aux travaux de la commission – qui votent. C'est une règle simple que vous apprendrez. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Plusieurs orateurs ont protesté contre la fermeture de certaines rédactions, mais cette mesure ne concerne que celles qui connaissent une très faible audience.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Je vous renvoie à toutes les enquêtes que nous avons lues.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Serait-il normal, par exemple, qu'une radio allemande émettant à Paris et en français pour moins de mille auditeurs bénéficie d'une rédaction de dix journalistes ? Notre projet est d'éviter ce type de situation, afin de recentrer l'effort de RFI sur ce qui présente davantage de sens.

Quant aux amendements, je rappelle les termes de l'article 2 : « La société nationale de programme en charge de l'audiovisuel extérieur de la France a pour mission de contribuer à la diffusion et à la promotion de la culture française et francophone […].

« À cette fin, elle définit ou contribue à définir les orientations stratégiques et la coordination des services de communication audiovisuelle, en français ou en langue étrangère… » Dans cette phrase, si l'on remplaçait « ou » par « et », cela impliquerait que les programmes français soient sous-titrés en langue étrangère.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Si !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

C'est seulement la conjonction de coordination qui est en cause !

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Le droit de réponse ayant déjà été exercé sur les amendements, je veux bien vous donner la parole pour un rappel au règlement, monsieur Paul, mais seulement à cette fin.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Je ne me permettrais pas de demander la parole s'il ne s'agissait pas d'un rappel au règlement, madame la présidente. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

De l'article 58, puisqu'il s'agit du déroulement de nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il est vrai, monsieur Soisson, que j'avais huit ans lorsque vous avez été élu pour la première fois à l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Mais cela ne vous donne pas le droit de nous faire la leçon, car nous connaissons aussi bien que vous la Constitution de la République et le règlement de l'Assemblée nationale. À ce titre, nous savons que celle-ci est souveraine, quelle que soit la décision de la commission.

Vous conviendrez néanmoins que, lorsqu'un amendement proposé par le rapporteur et adopté par la commission est désavoué par la majorité, il y a de quoi être surpris. D'ailleurs, nous aimerions savoir pourquoi le rapporteur n'a pas voté cet amendement qui porte sa signature. Son silence est assourdissant.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Dans un instant, madame la présidente, vous interromprez nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

M. Paul veut présider à la place de la présidente !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Quand nous reprendrons la discussion, vers vingt et une heures trente, j'espère que la majorité cessera de nous administrer des leçons. Si telle était la teneur de nos débats, croyez bien que nous lui tiendrions tête toute la nuit, si nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n° 692 .

La parole est à M. Didier Mathus.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Nous avons eu raison de passer du temps sur ces amendements, qui visent à changer un singulier en pluriel. « Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde », disait Albert Camus. Il importe donc d'être précis.

J'observe que nos collègues de la majorité ont une curieuse conception de leur responsabilité de parlementaires. Nous sommes nombreux à avoir été tour à tour dans l'opposition et dans la majorité. Au terme des périodes où nous étions majoritaires, nous nous sommes toujours promis que nous ne nous soumettrions plus jamais au Gouvernement. (Sourires.) Nous recommandons par conséquent à nos collègues d'être moins dociles quand la ministre leur fait les gros yeux : nous les rappelons à leurs responsabilités d'élus.

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

Il est vrai que vous êtes fondés à nous donner des leçons : lors du vote sur la réforme de la Constitution, la liberté de parole a caractérisé votre groupe !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Vous pourriez rendre le Parlement plus vivant et plus énergique face au Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Le groupe socialiste n'a pas voté la réforme qui a donné plus de pouvoirs au Parlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Le groupe UMP n'a besoin ni de leçons ni de professeurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Vais-je devoir demander une suspension de séance pour ramener le calme, ou demander que ces interruptions soient décomptées de mon temps de parole ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

L'amendement n° 692 propose que France Télévisions collabore étroitement avec AEF, ce qui pose un problème de fond. Aux termes du projet de loi, l'audiovisuel extérieur français va en effet devenir une construction particulièrement saugrenue : il s'agira du seul audiovisuel extérieur ne s'appuyant pas sur son opérateur de télévision nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Même à TV5 Monde, la présence de nos partenaires francophones, qu'ils soient québécois, belges ou suisses, se manifeste non par celle de leur gouvernement, mais par celle de leur télévision nationale, qui siège, en adulte responsable, au conseil d'administration.

En France, nous avons fait un choix différent : l'opérateur national, qui, jusqu'à présent, intervenait activement au sein de TV5 Monde, va finalement disparaître, ainsi que de France 24 et de tout le dispositif. Ainsi, loin de cultiver le potentiel extraordinaire que représente l'existence du groupe public France Télévisions, on le chasse, par cette loi, de l'audiovisuel extérieur français. Devant cette contradiction pour le moins étonnante, nos collègues ultramarins ont du moins souhaité que l'audiovisuel extérieur français puisse utiliser les ressources de RFO, pour une mission que nous souhaiterions plus large que la seule diffusion d'information.

Cet amendement souligne donc la nécessaire articulation, que le projet de loi voudrait mettre en pièces, entre l'opérateur national de la télévision publique et l'audiovisuel extérieur français. Il est vraiment absurde que l'on ne cherche pas à tirer parti du potentiel que représentent les centaines de journalistes de France Télévisions – France 2, France 3 ou RFO – pour utiliser au mieux l'outil audiovisuel français dans le monde.

Et qu'on ne nous objecte pas que cet élément n'a pas à être inscrit dans le texte. Celui-ci compte tant de choses inutiles qu'une précision aussi importante mérite bien d'y figurer !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

Didier Mathus est très fort : il fait la question et la réponse. (Sourires.)

Plutôt que d'affirmer qu'il est inutile d'écrire dans la loi ce que propose l'amendement, je vous dirai, monsieur Mathus, qu'il est inutile de rendre celle-ci plus rigide qu'elle ne l'est déjà. Graver dans le marbre des règles qui s'imposeront probablement dans les faits ne ferait qu'enlever de la souplesse à une structure naissante, et serait, de toute façon, prématuré.

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Il s'agirait pourtant d'une précaution, d'une garantie !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

Je rappelle à Didier Mathus et à Victorin Lurel qu'AITV, l'agence internationale d'images de RFO, fournit déjà son signal audiovisuel journalier, composé de sujets prêts à diffuser et d'images d'actualité, à France 24, et bénéficie d'un réseau de correspondants outre-mer et à l'étranger.

La commission a choisi de faire confiance à la nouvelle société pour déterminer les synergies qui doivent s'opérer entre les différents opérateurs. Elle est donc défavorable à l'amendement.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Pour les raisons que vient excellemment de nous présenter M. Kert, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous espérions que l'amendement n° 692 recevrait un accueil favorable, tant de la part du rapporteur que de la ministre.

Par ailleurs, je déplore que, depuis le début de ce débat, à seize heures, deux amendements présentés par le rapporteur, et adoptés par la commission, aient déjà été éliminés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Nous avons rejeté l'amendement n° 36 rectifié , mais quel est le second amendement dont vous parlez ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Il faut suivre, monsieur Herbillon ! Il s'agit de l'amendement n° 38 .

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

Et alors ? Il n'y a aucune obligation d'adopter ces amendements !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Je me souviens du temps qu'il nous a fallu pour adopter la loi d'août 2000 qui réformait la loi de 1986 : les travaux parlementaires avaient commencé en 1998 ! C'est qu'en ce temps-là le Gouvernement, contrairement à l'actuel, ne déclarait pas systématiquement l'urgence, pratique qui constitue une grave atteinte aux droits de l'opposition et une régression du rôle du Parlement.

La majorité et le Gouvernement nous ont vendu une révision constitutionnelle qui, selon eux, donnera de nouveaux droits au Parlement. Le président de la commission spéciale, M. Copé, parle de coproduction législative. Mais tout cela n'a aucun sens quand l'urgence est déclarée sur presque tous les textes inscrits à l'ordre du jour. Si nous avons fait une bonne loi en 2000, ce n'est pas seulement parce que Didier Mathus en était l'excellent rapporteur, mais aussi parce que nous avions pu peaufiner le texte au cours de la navette, avec trois lectures – première lecture, deuxième lecture puis lecture définitive. Aujourd'hui, nous écrivons mal la loi, comme le montre le sort des deux amendements de la commission spéciale, rejetés par l'Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Certes, mais en si peu de temps, et sur des sujets qui ne sont guère stratégiques pour l'avenir de l'audiovisuel public, cela fait tout de même beaucoup.

Au nom de l'intérêt général, il faut laisser les parlementaires voter l'amendement. Oui, nous avons une idée de la façon dont la France doit assurer le rayonnement de sa langue et de sa culture sur le plan international ! Oui, nous sommes partisans de la promotion de la culture et de la langue française ! Oui, nous sommes des militants ardents de la francophonie ! Nous prenons donc nos responsabilités,…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

…et nous voulons que des missions précises soient assignées aux dirigeants de la holding AEF, puisque cette dernière est, en grande partie, financée sur fonds publics. Il s'agit bien du rôle de la loi. Pourquoi ne pas faire avec AEF ce que nous faisons avec l'audiovisuel public national ?

Comme le propose l'amendement n° 692 , AEF doit donc, pour mener a bien ses missions, « établir une coopération étroite avec les chaînes locales ultramarines de France Télévisions ».

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Tous ceux qui connaissent les enjeux du rayonnement culturel et linguistique de la France savent que le potentiel de l'outre-mer en la matière est extraordinaire. Ces territoires sont répartis dans le monde entier et constituent autant de relais de notre présence internationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Mme la ministre nous a expliqué, dans une réponse laconique, que le sujet abordé n'avait pas beaucoup d'importance. Voilà qui est surprenant !

Sur la question de l'audiovisuel extérieur de la France, il n'est pas inutile de se remémorer d'où nous venons. On nous a d'abord fait travailler sur un schéma ahurissant en voulant nous faire croire que c'était TF1 qui devait être à la manoeuvre. Après avoir perdu pas mal de temps – au bout duquel TF1 a récupéré ses billes, et même un peu plus –, on nous propose maintenant une réflexion générale pour un audiovisuel extérieur qui fasse honneur à la France, mais dont, manifestement, le service public ne sera pas le pilier. La situation est déjà étrange, lorsque nous apprenons, de la bouche même de la ministre et du rapporteur, que le rôle de RFO ne sera pas primordial ! Cette fois, monsieur Soisson, j'imagine que vous serez d'accord avec moi : il appartient bien aux parlementaires de se prononcer sur cette question. Autant les programmes de télévision ne relèvent pas de notre domaine de compétence – si nous nous en tenions à ce constat, le projet de loi n'en serait sans doute que meilleur et plus équilibré –, autant la question des acteurs et du rôle de l'audiovisuel extérieur en fait bien partie.

Monsieur le rapporteur, j'espère que vous changerez de position. Après l'intervention de Patrick Bloche, vous savez que, pour faire un bon texte, il faut prendre du temps. La dernière fois que nous avons légiféré sur le sujet, il nous a fallu deux ans. Madame Albanel, nous aurons donc l'occasion de poursuivre le débat avec vous jusqu'en 2010. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous aurons peut-être ainsi une petite chance d'améliorer le projet de loi…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

Je suis perplexe en ce qui concerne l'amendement n° 38 dont M. Bloche nous a dit qu'il a été rejeté.

Je n'ai vu personne voter contre cet amendement, qui a recueilli au moins deux voix puisque j'ai voté pour et Patrice Martin-Lalande aussi. Il doit donc y avoir un malentendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Monsieur le rapporteur, nous avons procédé scrupuleusement au vote. Il est acquis et l'amendement a été rejeté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Madame la présidente, vous assurez parfaitement la présidence, mais une sorte de confusion s'installe puisque le rapporteur a le sentiment que l'opinion majoritaire n'a pas été parfaitement traduite dans un vote. Je vois aussi que des commissaires du gouvernement s'en émeuvent. Il va peut-être nous falloir interrompre la séance : la fatigue se fait sans doute sentir après quatre heures de débats. M. Mathus demandera dans quelques instants une suspension de séance.

Monsieur le rapporteur, je suis très surpris de votre avis sur l'amendement n° 692 . Vous faites preuve de myopie stratégique en refusant la synergie nécessaire entre l'audiovisuel extérieur et RFO. Nous sommes nombreux, depuis des années, à considérer que les antennes de RFO peuvent jouer un rôle éminent dans les régions où elles émettent : la région Caraïbe à partir de la Guadeloupe et de la Martinique, le continent latino-américain à partir de la Guyane – à condition que M. Jégo cesse d'y provoquer des incendies –, la région Pacifique à partir de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie, ou encore l'océan Indien où la France est attendue et entendue. Cet amendement n'était donc pas de pure forme : au contraire, il voulait donner une orientation de politique publique à RFO et aux chaînes en charge de l'audiovisuel extérieur.

Je regrette très sincèrement que le Gouvernement et le rapporteur refusent de saisir la chance qui leur est offerte. Ils tentent de nous convaincre, tant bien que mal, qu'ils veulent favoriser le rayonnement culturel de notre audiovisuel extérieur, mais ils refusent de lui en donner les moyens : c'est très décevant !

(L'amendement n° 692 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma