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Interventions sur "histoire" de Christian Vanneste


26 interventions trouvées.

...e loi doit avoir une portée normative, quelle place pensez-vous que pourraient prendre, pour donner corps aux intentions que le Parlement avait cru pouvoir exprimer par la voie législative, les résolutions qu'il a désormais la possibilité d'adopter ? Par ailleurs, comment fonder la citoyenneté des jeunes générations sur des principes solides ? Considérant qu'on ne peut jamais résumer un siècle d'histoire en une page dans un livre de classe, les politiques aspirent à un dialogue avec les historiens, afin que la place nécessaire soit donnée à l'enseignement de nos valeurs. Quelle est votre position sur ce thème ?

Je reviens sur les deux aspects que vous avez soulignés. L'histoire est un objet de connaissance dans les programmes scolaires. Mais elle a un contenu qui la distingue des autres formes de connaissance : un contenu moral, qui nous ramène au thème de la mémoire. L'histoire est une connaissance spécifique. La plupart des sciences enseignées en classe correspondent à des lois fondées, par exemple, sur des expérimentations ; ce n'est pas le cas de l'histoire qui rep...

Lors de l'audition précédente, on a évoqué l'Histoire, qui peut tendre à être une connaissance objective. Ici, nous sommes dans la commémoration, c'est-à-dire dans l'affectif et le collectif. Je peux lire avec un certain recul un livre d'histoire relatant des événements qui ne me concernent pas. Lorsque je commémore, je participe ; les commémorations relèvent du sacré républicain, du rite. Pascal disait à propos de la religion : « pour croire, faite...

..., plusieurs centaines de soldats français ont péri, 150 000 harkis ont été tués dans des conditions lamentables. Il n'y a donc rien à commémorer ce jour-là. Une telle reconnaissance serait une condamnation de la politique algérienne de la Ve République. Dans quelle situation nous mettrions-nous alors, nous qui sommes toujours dans la Ve République ? Pourtant, cette politique fait partie de notre histoire. C'est là un véritable problème que je ne saurais résoudre. Il faut se méfier des fêtes tristes. Jean-Paul Sartre, dans sa pièce Les mouches, montre ainsi parfaitement le lien entre une commémoration autoflagellante et un régime oppressif. Rien n'est plus facile que de dominer des gens qui se sentent coupables. Je conçois que les Pieds-noirs n'aient aucun enthousiasme vis-à-vis de la politique a...

Une fois de plus, il faut souligner la différence entre l'histoire et la mémoire. Tout à l'heure, on a émis l'idée que les dates pouvaient être relatives, qu'elles étaient, en quelque sorte, « à la carte ». Ce n'est évidemment pas le cas. Elles peuvent l'être pour un historien, car le domaine de la science peut laisser une part au relativisme, à la discussion sur certaines dates. En revanche, lorsque l'on parle de commémoration, on n'est plus dans la science, ma...

J'ai participé à presque toutes les réunions de cette mission et, une fois de plus, je voudrais bien différencier le travail scientifique de l'histoire et le travail affectif de la mémoire. Ce n'est pas un hasard si, dans l'intitulé de cette table ronde, « histoire » est au singulier et « mémoires » au pluriel. Pour autant, si nous voulons discuter sérieusement, il faut que vous fassiez tous preuve d'un peu d'honnêteté historique et, quand vous citez un texte, que vous évitiez de le déformer. Je suis l'auteur de l'article 4 de la loi du 23 févr...

J'ai eu l'occasion d'opposer l'histoire qui se veut objective à la mémoire plus affective et souvent instrumentalisée. Or, non seulement l'utile ne saurait être un critère du vrai mais ne ressasse-t-on pas parfois certains événements afin d'en escompter un bénéfice ? Comment, même dans le registre mémoriel, atteindre un maximum d'objectivité ? Avant d'écrire une proposition de loi visant à faire reconnaître le génocide ukrainien ...

La censure peut certes s'appuyer sur des lois mais elle est extrêmement rare. En est-il en revanche de même s'agissant de l'autocensure ? En effet, dès lors qu'il existe un discours officiel sur l'histoire, n'y a-t-il pas une histoire officielle et cette dernière n'implique-t-elle pas de facto l'autocensure de ceux qui n'y adhèrent pas ? Enfin, la rétention de l'information ne touche-t-elle pas autant l'historien que l'éditeur ?

Tout le monde est d'accord pour considérer qu'une démocratie repose sur la liberté d'opinions et qu'il faut limiter le moins possible la liberté d'expression, sauf lorsque celle-ci devient dangereuse par les conséquences que le fait de proférer telle ou telle opinion peut avoir. Cela étant dit, l'histoire n'appartient pas au domaine de l'opinion mais, au moins au niveau de la prétention, à celui de la science et du savoir. D'où mes questions : le savoir a-t-il besoin d'être protégé par la loi ? Cette protection n'est-elle pas un affaiblissement du savoir en question ? Selon Poper, il n'y a pas de science s'il n'y a pas de falsifiable. En d'autres termes, si l'on interdit de prouver que c'est vrai...

Je m'interroge sur la question de savoir s'il peut exister une interprétation unique. Je distingue deux niveaux. Le premier est celui des faits. Le négationnisme, par exemple, va jusqu'à nier l'existence des chambres à gaz. Le second niveau qui, à mon sens, est véritablement celui de l'histoire, est celui de l'interprétation. Ricoeur a beaucoup insisté sur le fait que l'histoire est une herméneutique, comme toutes les sciences humaines. Celles-ci consistent à donner un sens aux faits, ce qui n'est pas le cas des sciences physiques, par exemple. L'histoire peut et, à mon avis, doit offrir une multiplicité de sens possibles. C'est dans la confrontation de ceux-ci que peut naître la vé...

Parce que la mémoire relève partiellement de l'affect national et qu'elle contribue à conforter la citoyenneté, elle concerne les élus. L'histoire, quant à elle, ne relève-t-elle pas aussi de ce que j'ai appelé, non sans provocation, une « science molle » ? Par ailleurs, entre l'histoire scientifique et celle qui est enseignée, n'y-t-il pas une déperdition ? Paul Ricoeur a mentionné quatre difficultés substantielles inhérentes au métier d'historien : la sélection des faits, le choix des schèmes de causalité, la sympathie à l'endroit de l'ob...

Si les hommes politiques ne se sont jamais appuyés sur des théories physiques pour asseoir leurs conceptions de la citoyenneté, ils se sont en revanche toujours fondés sur une conception de l'histoire. Par exemple, la lecture qu'ils feront de la place de la Vendée dans l'historiographie révolutionnaire sera déterminante.

Vous avez conclu La Défaite de la pensée en évoquant le face à face terrible et dérisoire du zombie et du fanatique vous êtes d'ailleurs vous-même aujourd'hui la victime de ce dernier, héraut de la pensée unique mais, entre les deux, n'y a-t-il pas une place pour l'enseignement de l'histoire républicaine ? Si l'histoire républicaine peut être scientifique, elle met également en jeu l'affectivité de tout un chacun c'est la reconnaissance, la commémoration dès lors qu'elle sert aussi à fonder l'appartenance à un groupe. Si la Shoah est bien en effet un événement unique, elle est également liée, si paradoxal que cela puisse paraître au premier abord, à la renaissance d'Israël. L'his...

L'histoire est affaire de vérité et la mémoire est affaire de fidélité, avez-vous dit. C'est une merveilleuse définition, mais conduit-elle à une synthèse ou à une impasse ? Si l'histoire et la mémoire doivent être objets d'éducation, l'histoire permet de construire une personne rationnelle, consciente, lucide et critique dont on ne peut exclure qu'elle ait un petit côté faustien je suis l'esprit qui touj...

...us modéré, plus équilibré que la loi Taubira, parce qu'il laissait la place à d'autres points de vue. Je regrette d'avoir opté pour « en particulier » au lieu de « aussi », qui aurait été beaucoup plus clair. En tout cas, une de vos expressions m'a frappé, qui vous est commune avec Alain Finkielkraut, c'est la haine de soi. Pourriez-vous développer ? Quel est le rapport entre l'enseignement de l'histoire, ou un certain enseignement de l'histoire et la haine de soi ?

Vous avez bien voulu reconnaître que l'histoire n'est pas une science objective mais une science dite « molle ».

Paul Ricoeur a été extrêmement clair à ce propos : l'historien sélectionne les faits et les schémas de causalité. Mais il a aussi ses sympathies et ses antipathies. Enfin, la distance du temps complique les interprétations. L'histoire n'est même pas toujours une science, car la science historique doit être distinguée de la mémoire. Dans un livre d'histoire, lorsqu'un événement qui a duré un ou deux siècles, comme la colonisation, est traité en une page, s'agit-il de science ou de mémoire ? Or, en matière de mémoire, les parlementaires ont en effet leur mot à dire. Je suis un peu étonné que des jugements différents soient port...

Vous êtes manifestement passionné et c'est tout le problème. L'histoire est la plus humaine des sciences sociales. Des tentatives d'histoire quantitative ont été menées, mais cela n'intéresse personne. On n'explique pas les hommes comme des électrons. N'est-ce pas ?

Il est assez émouvant, Madame, Monsieur, de se trouver face à vous. L'Histoire est à la fois une science universitaire et une discipline visant à former des citoyens. Vous avez été très clair sur ce second point : les lois mémorielles sont absolument nécessaires. Faut-il pour autant ne pas entendre les historiens estimant que le législateur n'a pas à se mêler de l'écriture de l'Histoire ? Ces derniers ne doivent-ils pas être absolument libres de mener à bien leurs travaux ?...