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Intervention de Sylvia Pinel

Réunion du 27 mai 2010 à 15h00
Réforme des collectivités territoriales — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 20 octobre 2009, à Saint-Dizier, le Président de la République avait promis une réforme de notre organisation territoriale sans précédent dont les deux piliers majeurs devaient être la création du conseiller territorial et une parfaite lisibilité des compétences reconnues à chaque collectivité. Une réforme initiée dans un objectif précis : renforcer la démocratie locale en mettant fin au fameux « millefeuille territorial ».

Aujourd'hui, disons les choses comme elles sont : la simplification annoncée ne sera pas au rendez-vous d'un projet de loi qui crée la confusion et réunit tous les ingrédients du « pudding territorial ».

Après nos collègues sénateurs – pour le moins divisés sur les prétendus bienfaits de ce texte –, il nous appartient de nous prononcer sur le premier projet de loi de ce que le Gouvernement présente comme une « réforme territoriale » mais qui, en réalité, j'ai déjà eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises, n'est rien d'autre que la première des « lois de recentralisation ». Et je pèse mes mots.

En effet, en l'absence de consensus, au mépris des rapports parlementaires, ce texte entend instaurer une recentralisation partisane par le biais de la création du conseiller territorial, doublée d'une recentralisation des compétences, de la suppression de la clause de compétence générale reconnue jusqu'alors et du retour en force du pouvoir exorbitant confié aux préfets.

Au nom de mes collègues députés radicaux de gauche – Gérard Charasse, Dominique Orliac et Joël Giraud notamment –, je m'attarderai sur deux articles de ce projet de loi révélateurs du dessein gouvernemental, les articles 1er et 35, tant leurs effets seront ravageurs pour nos territoires, pour nos concitoyens et pour la démocratie de proximité.

L'ensemble de cette réforme est une insulte au bon sens, qui en révèle la véritable nature, à savoir une gigantesque manoeuvre politicienne. Une manoeuvre dont les tractations prêteraient à sourire si l'avenir de la décentralisation n'était pas en jeu.

Mais revenons à la création du mandat de conseiller territorial. Disons-le clairement : elle relève du non-sens, de l'erreur grossière d'appréciation. Il s'agirait de créer un super-élu – homme de préférence –, doté de super-pouvoirs – parmi lesquels le don d'ubiquité –, un élu condamné de surcroît au cumul des mandats.

Encore plus incroyable : nous devons nous prononcer sur la création du conseiller territorial alors même que la question essentielle des compétences qui lui seront attribuées dans le cadre de son mandat est remise à plus tard.

Que penser du dépôt en toute hâte d'un amendement du Gouvernement venant fixer le nombre de ces futurs élus et leur répartition par région et département ? S'agirait-il de l'ultime concession avant rupture du fait majoritaire ?

Le scénario, digne d'un vrai vaudeville, s'est joué en plusieurs actes. Dans un premier temps, il était question de faire élire 80 % des conseillers territoriaux au scrutin uninominal majoritaire à un tour, 20 % des sièges étant attribués à la proportionnelle. Puis, le moment crucial fut le passage du texte en première lecture au Sénat. Afin de s'assurer les faveurs du plus grand nombre et de dégager une majorité, un article additionnel vient préciser les orientations du mode de scrutin : on consent à garantir un scrutin uninominal avec une dose de proportionnelle, ainsi que la parité.

Enfin, dernier rebondissement sur fond de défaite aux élections régionales, le Premier ministre change son fusil d'épaule et sort du chapeau une nouvelle mouture : il est alors question d'un scrutin uninominal majoritaire à deux tours sans dose de proportionnelle.

De toute évidence, le Gouvernement ne fait plus l'économie de ses propres contradictions et, sentant le vent tourner, fait adopter in extremis par la commission des lois un amendement précisant le mode de scrutin.

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