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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 4 mai 2010 à 15h00
Engagement national pour l'environnement — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Pourtant, la croissance des importations de biocarburants en Europe se poursuit sans qu'aucune norme ne soit exigée, et ce afin de satisfaire à l'objectif de 10 % de biocarburants pour 2020.

Ces dernières semaines, des experts environnementaux de la Commission européenne ont même débattu de la question de savoir si les nouvelles plantations de palmiers à huile d'Asie et d'Afrique, destinées à fournir des agrocarburants à l'Union européenne, devaient être considérées comme de la reforestation bénéfique en matière de stockage de CO2 ! Voilà qui en dit long sur le cynisme qui prévaut à Bruxelles quand il s'agit d'externaliser dans les pays du Sud les émissions de gaz à effet de serre imputables à la consommation finale des pays de l'Union européenne, dont la France.

Au Sud, des milliers d'hectares de forêts et de mangroves ont été détruits ces dernières années pour alimenter l'Europe en soja destiné à l'alimentation des animaux et pour fournir à moindre coût les congélateurs des grandes surfaces en poissons et crustacés. L'introduction de 10 % de carburants agricoles dans les stations-service de l'Union d'ici à 2020 va se traduire par davantage de déforestation au Sud, davantage de déstructurations de communautés rurales, davantage de conflits fonciers pour tirer partie de cette nouvelle manne verte, davantage d'affamés ! Quelle importance, me direz-vous, puisque les chefs d'État du G8 n'ont même pas daigné faire le déplacement au sommet de la FAO sur la faim dans le monde, en novembre dernier, trop occupés qu'ils étaient par la perspective de réaliser un bon deal capitalisto-climatique à Copenhague !

Que dit notre texte sur cette question ? Prévoit-il d'interdire les importations extracommunautaires d'agrocarburants ? Non. Prévoit-il de mettre en place un système public de certification de l'origine des agrocarburants ? Non. Votre texte prévoit-il seulement, monsieur le ministre d'État, de faire évoluer les objectifs d'incorporation en fonction des connaissances réelles des bilans sociaux et environnementaux de ces productions, notamment en tenant compte des changements d'affectation des sols, comme le suggèrent les derniers rapports remis par l'ADEME en France et celui remis à l'Union par l'institut international de recherche sur les politiques alimentaire ? Non.

Ce mutisme coupable en dit long sur les priorités du Gouvernement en matière environnementale. Le commerce énergétique d'abord, la vie, la biodiversité et le devenir climatique, plus tard ! Cet avis est d'ailleurs partagé par Andris Piebalgs et Peter Mandelson, respectivement commissaire à l'énergie et ancien commissaire au commerce de l'Union, qui affirment, guillerets, qu'un approvisionnement purement national en biocarburants n'est ni probable, ni souhaitable, que l'Union européenne doit s'assurer que ses normes en matière de biocarburants ne créent pas de barrières inutiles, que l'Europe devrait envisager d'accepter l'idée qu'il faudra importer une grande partie de nos ressources en biocarburants, qu'il ne faudrait certainement pas s'attendre à privilégier la production européenne de biocarburants et qu'ils sont confiants pour que les pays en développement gagnent finalement à étendre leur production de biocarburants grâce à leur capacité agricole disponible et à leur avantage comparatif dans la production.

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