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Commission de la défense nationale et des forces armées

Séance du 4 février 2009 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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Audition des représentants des syndicats des personnels civils de la défense, dans le cadre du projet de loi (n° 1216) relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014

La séance est ouverte à dix heures

PermalienPhoto de Guy Teissier

Mes chers collègues, nous accueillons ce matin les représentants de syndicats des personnels civils de la défense. Je souhaite la bienvenue à MM. Patrick Doupsis et Yves Naudin, représentant la CFTC ; MM. Jean-Jacques Manach et Luc Scappini, représentant la CFDT ; MM. Didier Duret et Hervé Beylac, représentant la CGT ; M. Edmond Scetbon, représentant la CGC ; MM. Gilles Goulm et Serge Guitard, représentant FO ; MM. Jean-Yves Placenti et Dominique Duclos, représentant l'UNSA.

Nous vous avions reçus, messieurs, au mois d'octobre dernier, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2009 et, à cette occasion, je m'étais engagé à ce que notre prochaine rencontre soit plus longue. Nous avons aujourd'hui deux heures devant nous, ce qui devrait nous permettre de débattre des conséquences sur les personnels civils de la nouvelle loi de programmation militaire, dont la réussite est, bien évidemment, liée à la réforme du ministère.

PermalienGilles Goulm, secrétaire général de la Fédération syndicaliste FO de la défense, des industries de l'armement et des secteurs assimilés

Monsieur le président, mesdames messieurs les députés, merci de nous recevoir en ces lieux pour évoquer la loi de programmation militaire.

FO est la première organisation syndicale du ministère de la défense pour le personnel civil. Elle a pour principe de ne pas s'exprimer sur la politique de défense de la France. Cela étant, son rôle est de faire connaître son opinion sur les conséquences que la politique de défense définie par le président de la République et la représentation nationale peut avoir sur l'emploi des personnels civils.

Je rappellerai ce que nous avons dit lors de la précédente audition liée à la préparation du projet de loi de finances pour 2009, et notre opposition à la révision générale des politiques publiques (RGPP), laquelle se traduit, pour les personnels civils, par plusieurs milliers de suppressions d'emplois et, pour l'ensemble du ministère, par 54 000 suppressions d'emplois. Nous avions déjà perdu, lors des douze dernières années, la moitié des effectifs des personnels civils, ceux-ci passant de 145 000 à 72 000.

Compte tenu du rude contexte économique actuel, tant au plan international qu'au plan national, nous émettons quelques réserves sur la réalisation de cette loi de programmation militaire. La mobilisation du 29 janvier dernier a permis de mettre en avant les difficultés que vivent les personnels en général, et les personnels civils du ministère de la défense en particulier. Ces derniers subissent les conséquences de la RGPP et du Livre blanc, dont découle la loi de programmation militaire : suppressions d'emplois ; fermeture d'établissements dès 2009, sans véritables possibilités de reclassement. Voilà pourquoi FO demande le gel de la RGPP en 2009 afin que puisse être étudiée précisément la situation des personnels civils.

Actuellement, la proportion personnels militairespersonnels civils affectés aux fonctions de soutien aux armées au sein du ministère de la défense est de l'ordre de 6535 et nous sommes particulièrement attachés à la complémentarité entre les personnels militaires et les personnels civils.

La LPM s'entend évidemment hors externalisation, ce qui implique qu'il n'y a pas grand-chose sur les mesures d'externalisation envisagées au ministère de la défense. Reste qu'il serait paradoxal que les fonctions de soutien aux armées confiées aux personnels militaires – restauration, habillement, etc. – soient externalisées sans être pour autant rendues aux personnels civils et que le rééquilibrage de la répartition militairescivils sur les fonctions de soutien se fasse a minima. Nous ne pouvons l'accepter.

Le ministre s'est engagé à publier un rapport sur les fonctions qui pourraient être confiées aux personnels civils. Nous attendons les conclusions de ce rapport, mais nous savons déjà qu'il risque fort de ne pas correspondre à nos attentes.

Telles sont nos revendications prioritaires. Pour autant, nous constatons avec satisfaction que la loi de programmation militaire renforce l'effort consenti par l'État en matière d'équipements. Cela implique le renforcement et l'efficience du maintien en condition opérationnelle des équipements terrestres, aéronautiques et maritimes. Nous demandons que ce maintien soit réalisé par des établissements étatiques, car nous commençons en effet à entrevoir une certaine volonté d'externalisation en la matière, ce que nous ne saurions accepter.

Je me permettrai de rappeler les revendications des organisations syndicales de DCNS et de la SNPE – vous les avez reçues dernièrement –, lesquelles sont soutenues par les personnels : il n'est pas possible d'accepter les articles 10 et 11 du projet de loi dans la mesure où ils prévoient sans ambiguïté la privatisation de la SNPE et la « mise sur les rails » de celle de la DCNS, ce qui risque d'avoir de lourdes conséquences sur l'avenir de ces deux sociétés, notamment en matière de projets industriels.

PermalienJean-Jacques Manach, secrétaire général de la Fédération établissements et arsenaux de l'état – CFDT

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, cette audition intervient près de trois mois après celle relative au projet de loi de finances et nous déplorons l'absence d'évolution, tant sur le fond que dans la forme, des restructurations qui constituent l'ossature de la LPM issue des conclusions de la RGPP. Je ne fais, volontairement, pas référence au Livre blanc parce que nous considérons que ce document repose quasi exclusivement sur des considérations budgétaires.

Les lignes n'ont donc pas bougé depuis trois mois. Elles se caractérisent toujours par des diminutions et des suppressions d'emplois –inscrites à l'article 4 –, dont la concrétisation est d'ailleurs des plus brouillonnes. Nous avons eu l'occasion de le dire à la mission confiée à MM. François Cornut-Gentille et Bernard Cazeneuve.

Initialement, l'article 6 du projet de loi prévoyait d'intégrer la défiscalisation des indemnités pour départ volontaire, mais cette disposition a été inscrite en catastrophe dans la loi de finances afin de tenter de s'ajuster à un calendrier que nous considérons comme intenable. Cet exemple montre que le processus retenu pour mener ces restructurations ne colle pas à la réalité d'un ministère chargé de le décliner, ni des institutions chargées de promulguer les textes permettant d'y parvenir.

J'ai fait état de la loi de finances. Reste encore la loi sur la mobilité et les parcours professionnels dans la fonction publique avec un dispositif législatif dont on nous dit qu'il est maintenant indispensable pour soustraire les indemnités de départ aux prélèvements sociaux.

Bref, tout cela ne fait pas très sérieux. Plus personne n'y comprend rien. Une telle situation ne peut que susciter des inquiétudes et se traduire par une perte de confiance quasi définitive en nos décideurs. C'est bien ce qui s'est manifesté le 29 janvier dernier, quand les salariés du ministère de la défense, de DCNS et de Nexter sont descendus dans la rue pour exprimer un ras-le-bol légitime.

Compte tenu de la situation du groupe DCNS, il n'y avait pas urgence à prévoir les dispositions de l'article 10. Permettre à des actionnaires de démanteler l'ensemble de l'entreprise nous paraît constituer une faute de stratégie, DCNS ayant démontré que, par des alliances industrielles, elle pouvait tout à fait évoluer positivement vers son objectif de devenir numéro 1 de la navale militaire en Europe. Nous rejetons cet article dont la l'application n'aura pour résultat que de démotiver les salariés.

Le projet de loi de programmation militaire 2009-2014 est dans le droit-fil des exercices Livre blanc-RGPP. Il s'élabore à la hussarde, au coeur de la frénésie de réformes qui gangrène notre pays déjà soumis à une crise d'une ampleur inégalée. L'absence de méthode dont a fait preuve le ministère de la défense ajoute à la rancoeur des milliers de personnels, civils comme militaires. Entre le cabinet du ministre, l'EMA et l'administration centrale, nous ne savons toujours pas qui décide quoi, ni qui pilote les restructurations. Il n'y a guère que du côté de la DGA que le dialogue social mené autour de ces restructurations apparaît un peu plus professionnel. Si vous recevez M. Collet-Billon, je vous invite à lui demander ce qu'il en pense.

Vouloir moderniser des politiques publiques avec des méthodes de dialogue social datant d'avant la chute du mur de Berlin n'est pas sérieux ! Nous aurions souhaité, en tant qu'organisation responsable, pouvoir discuter des missions de service public, des délégations de service public, de l'efficacité des services publics et de ce qu'on en attend. Au lieu de cela, nous n'avons trouvé que portes closes ou nous n'avons entendu que des gens pratiquant la langue de bois ; c'est insupportable.

Les salariés ont depuis longtemps compris qu'ils allaient encore une fois subir des décisions dont les conséquences ne pèseront que sur eux seuls. C'est bien pour cela qu'ils se remobiliseront dans l'avenir, comme ils l'ont fait le 29 janvier.

PermalienDominique Dujols, délégué régional de l'Union nationale des syndicats autonomes-défense

Nous voici devant la première loi de programmation militaire issue du Livre blanc. Sa lecture nous conduit à nous poser les questions suivantes : le ministère de la défense va-t-il rester ministère de plein exercice ? Le ministre de la défense devient-il un chef d'état-major à dimension politique ? Quelles seront les conséquences des modifications apportées au code de la défense en matière de responsabilité ? Nous sommes dans l'inquiétude.

Dans un tel contexte, quel est l'avenir des personnels, des corps spécifiques de fonctionnaires de la défense, des ouvriers d'État ? La prédominance des armées sur l'ensemble du ministère nous amène à penser que le rôle des civils sera réduit encore plus qu'il ne l'est aujourd'hui. C'est d'ailleurs la réalité du terrain, les personnels des bases de défense étant en très grande majorité des militaires. Les comptables, les gestionnaires de ressources humaines, les responsables de communication, les juristes seraient-ils des personnels appelés à vivre dangereusement sur les théâtres d'opération, ce qui justifierait qu'ils soient des personnels militaires ? Comment expliquer que, dans les bases de défense, l'encadrement supérieur civil en soit réduit à traiter des questions d'hygiène et de sécurité, si importantes soient-elles ? Nous le dénonçons encore et toujours : les personnels civils sont encore une fois les oubliés de la hiérarchie militaire et de nos politiques. Celle loi de programmation militaire en est une parfaite illustration.

Que penser d'une délégation générale pour l'armement réduite au rôle de soutien et d'assistance au maître d'ouvrage que devient l'état-major ? Est-ce une séparation préfigurant une nouvelle externalisation ? Tout pourrait porter à le croire.

Le projet de loi de programmation militaire est assorti d'un plan social pour les ouvriers de l'État. Certes, ceux qui en bénéficieront pourront être intéressés. Mais qu'adviendra-t-il de nos structures qui seront fragilisées par le départ d'agents hautement qualifiés, comme ce fut le cas du fait des départs à cinquante-deux ans ? L'inquiétude est si vive que l'on entend de moins en moins parler de plan de carrière à la défense, mais de plus en plus de conditions de départ et de reclassement dans d'autres administrations ou collectivités. Si l'objet des communications est de faire fuir le personnel, l'objectif est atteint.

Quant à l'industrie de l'armement, elle n'est, de fait, plus publique. L'abaissement à un tiers de la participation de l'État dans ses ex-directions préfigure l'étape ultime avant la cession de la totalité de ce capital.

Le redéploiement des emprises du ministère de la défense s'apparente à la « vente des bijoux de famille ». Va-t-on seulement garder une journée d'appel, dernier lien existant entre l'armée et la Nation ?

Pour les personnels civils, la programmation militaire s'inscrit dans la continuité : destruction des emplois civils, externalisation des fonctions de soutien, volonté d'allégeance à l'OTAN.

Nous n'avons pas été écoutés, encore moins entendus, lors des auditions sur le Livre blanc. Nous aurons un ministre de la guerre grand chef d'état-major des armées, un ministère pour les personnels militaires, les personnels civils se trouvant externalisés dans des sociétés créées de toutes pièces sur les dépouilles de feu le ministère de la défense.

PermalienDidier Duret, secrétaire général adjoint de la Fédération nationale des travailleurs de l'état – CGT

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous ne ferons à personne l'affront d'énumérer, dans une intervention fleuve, tous les éléments qui fondent notre opposition globale au projet de loi de programmation militaire. Pourtant, il y aurait matière. Nous préférons, dans le temps qui nous est imparti, aborder quelques points essentiels de ce texte gouvernemental soumis à la réflexion de la représentation nationale.

Ce texte correspond parfaitement à la volonté de casser l'emploi déjà inscrite dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, présenté par Nicolas Sarkozy le 17 juin 2008. En l'état actuel, il confirme « la réduction des effectifs » au ministère de la défense, cette réduction de 54 000 postes sur la mission « Défense », hors externalisations, portant principalement sur l'administration et le soutien des forces.

Le Président de la République, le Gouvernement, le ministre de la défense et tous ceux qui les ont aidés entendent valider, au travers du processus législatif, leur entreprise de casse de notre outil national de défense. Leur plan dit « social » s'avère d'une ampleur destructrice jamais égalée par les conséquences qu'il aura sur l'emploi et sur nombre d'économies locales. Nous savons très bien qu'aux 54 000 emplois civils et militaires à supprimer, inscrits dans le projet de loi, viendront s'ajouter en cours de programmation, après les phases de mutualisation et de rationalisation, d'autres milliers de suppressions d'emplois au titre de l'externalisation des activités. Cela nous a été explicitement annoncé lors d'une récente réunion paritaire à l'armée de terre, laquelle a d'ores et déjà chiffré à 16 000 le nombre d'emplois supplémentaires à supprimer. L'objectif à terme, fixé par le Président de la République, est donc bien que l'externalisation des fonctions ne figurant pas parmi les activités opérationnelles devienne la règle. Nous craignons qu'il en soit de même pour les deux autres armes, ainsi que pour la DGA.

Copie conforme du Livre blanc, ce projet de loi fait, sans surprise, la part belle au nucléaire et au renseignement, à l'« Otanisation » de nos forces et de l'ensemble de notre outil de défense, alors que la mise en place de la défense européenne a connu un échec patent.

Toute sa philosophie consiste à désengager davantage encore l'État de son propre outil de défense, ouvrant ainsi plus grande la porte aux alliances industrielles européennes et mondiales, favorisant l'appétit d'actionnaires privés qui n'ont pour seul objectif que gagner de l'argent et dégager du profit avec le commerce des armes. À cette occasion, la CGT tient à réaffirmer son attachement à la préservation de la paix, dans un monde qui multiplie les risques de conflits, dont les premières victimes sont les peuples.

Nous voulons profiter de cette intervention pour évoquer le rapport d'information de la Commission sur l'exécution de la loi de programmation militaire pour les années 2003 à 2008 car il est riche d'enseignements sur l'élaboration de la prochaine programmation. De fait, sa lecture met en évidence de nombreux éléments révélateurs des difficultés présentes et à venir, tant sur les bilans humain et matériel que sur l'exécution financière de la programmation, même si nous regrettons qu'il ne fasse pas suffisamment cas du surcoût de la professionnalisation des armées.

En ce qui concerne les effectifs, le tableau figurant à la page 9 confirme la non réalisation de 9 236 effectifs civils depuis 2003, et ce sur fond de 4 874 suppressions d'emplois – bien réalisées, celles-ci ! Les rapporteurs soulignent « la persistance d'un volume d'emplois non réalisés qui ne laisse pas d'inquiéter », ajoutant que « tout se passe comme si la masse salariale budgétée pour l'année ne pouvait permettre de réaliser les prévisions d'effectifs ». Nous partageons ce constat que nous ne cessons de dénoncer lors de chaque budget, car il participe au décroissement chronique des effectifs. Mais nous ne sommes pas pour autant entendus par les autorités ministérielles, qui, pour se justifier, usent d'arguments peu convaincants : recours à des ajustements techniques, application délicate de la LOLF ou autre plafond ministériel d'emplois autorisés.

S'agissant du bilan capacitaire et matériel, plusieurs éléments contenus dans le rapport amènent à penser que la loi 2003-2008 n'a pas tenu ses promesses, contrairement à ce que nous avait affirmé Mme Alliot-Marie quand elle était encore ministre de la défense.

La programmation 2003-2008 n'aura donc pas échappé à la règle des programmations précédentes – et, malheureusement, ce sera très certainement le cas de la prochaine. Les rapporteurs insistent sur les mauvais résultats concernant l'entraînement des forces, la disponibilité technique et opérationnelle des matériels et les taux de réalisation des programmes d'équipement. Ils ciblent la forte contrainte liée, d'une part, à la complexité des équipements de nouvelle génération et, d'autre part, à la présence soutenue en OPEX, qui favorise le vieillissement des parcs et l'usure prématurée des matériels. Cette constatation est d'autant plus vraie que les étalements successifs de programmes, qui sont intervenus dans toutes les armées, ont conduit à utiliser de nombreux matériels bien au-delà de leur date de fin de vie. Un tel point de vue nous paraît fondé, encore faut-il en tenir compte pour changer réellement de cap et ne pas utiliser ces graves dysfonctionnements pour libéraliser encore davantage le secteur de l'armement.

L'examen critique de la situation – globale et par armées – conduit les rapporteurs à conclure que « si elle souhaite garantir la réalisation des contrats opérationnels, la prochaine LPM devra donc avant tout donner aux armées les moyens matériels d'exécuter leurs missions ». À les en croire, il y a urgence, vu l'état de nos armées en matière d'équipements : les retards sont considérables pour le programme VCBI de l'armée de terre, mais aussi dans l'aéromobilité tant pour les hélicoptères d'attaque que pour les hélicoptères de manoeuvre. On peut aussi évoquer les difficultés de la Marine, dues aux décalages et restrictions de programmes, et également aux surcoûts liés au changement de statut de la DCN, qui, selon les rapporteurs eux-mêmes, « s'est révélé beaucoup plus coûteux pour l'État que ce qui avait été envisagé ». De même, selon le rapport, l'armée de l'air entre dans la nouvelle programmation militaire « avec une flotte vieillissante et d'ores et déjà insuffisante ».

La situation est extrêmement préoccupante et invite à ne pas reconduire les mêmes choix.

Il ne s'agit pas pour autant d'augmenter encore le budget de la défense, donc l'effort du contribuable. La réorientation des crédits du nucléaire vers le conventionnel pourrait constituer une première réponse. La CGT propose aussi de mettre en place un pôle public national de défense, seul de nature à enrayer la privatisation en cours et à redonner à la représentation nationale toutes ses attributions légitimes en matière de contrôle et de choix de défense.

Nous terminerons cette intervention en évoquant les articles 10 et 11 du projet de loi. Votre Commission a auditionné les représentants syndicaux des deux sociétés nationales concernées par ces articles. Vous avez pu constater, tant pour SNPE que pour DCNS, qu'un front syndical unitaire s'oppose au contenu desdits articles. La CGT a rencontré ou saisi de nombreux groupes parlementaires et élus politiques, en s'appuyant sur les milliers de signatures recueillies par les deux pétitions nationales unitaires.

Ces deux articles doivent être retirés, car ils consacrent de fait le processus de privatisation en cours de DCNS – il s'agit de l'article 10 – et la liquidation pure et simple du groupe SNPE – c'est l'objet de l'article 11. À quelques jours de l'ouverture de la discussion parlementaire sur la loi de programmation, nous écouterons attentivement votre réponse sur ce sujet.

Nous ferons d'ailleurs de même sur tous les autres thèmes évoqués dans cette intervention. En effet, le débat sur la loi de programmation militaire est l'affaire de milliers de personnels civils du ministère de la défense et des sociétés nationales sous sa tutelle, personnels dont l'emploi et l'avenir sont menacés. Il est également l'affaire d'une communauté militaire que les personnels civils côtoient quotidiennement et qui s'inquiète elle aussi de son avenir immédiat. À bien des égards, ce débat suscite un intérêt citoyen grandissant dans le pays. Vous ne pouvez l'ignorer. Vous ne pouvez pas ignorer non plus la forte mobilisation des salariés de notre secteur, notamment lors des grèves et manifestations interprofessionnelles du 29 janvier dernier.

PermalienPhoto de Guy Teissier

À plusieurs reprises, vous avez cité, monsieur, le rapport d'information sur l'exécution de la LPM pour les années 2003-2008. L'existence même de ce rapport prouve que nous exerçons bien notre contrôle. Nous avons été alertés par les conclusions de nos collègues rapporteurs, et le Gouvernement a d'ores et déjà pris en compte un certain nombre des difficultés évoquées.

Par ailleurs – et cette remarque vaut également pour votre collègue de FO –, nous avons reçu hier le nouveau P-DG de DCNS. Vous pourrez consulter sur le site de l'Assemblée les éléments de réponse qu'il nous a fournis et qui vont, selon moi, dans un sens favorable.

La représentation nationale s'acquitte donc de son travail et vous avez vous-même souligné la grande objectivité du rapport établi par nos collègues.

PermalienYves Naudin, secrétaire général fédéral de la Fédération CFTC du personnel civil du ministère de la défense et des établissements et structures connexes

Il ne nous est pas donné tous les ans d'être entendus par les parlementaires sur un projet de loi de programmation militaire, celui-ci portant en effet sur une durée de cinq ans. Certains dirigeants syndicaux, dont nous sommes, n'ont encore jamais eu l'occasion de commenter un tel projet, véritable « catalogue de La Redoute » de notre outil de défense. Nous tenons à exprimer d'emblée notre regret que la décision de lancer un éventuel deuxième porte-avions soit repoussée en fin de programmation.

Les défenseurs des personnels civils et les citoyens que nous sommes respectent le travail de fond qui a été fait pour élaborer ce projet, lequel s'est notamment nourri du nouveau Livre blanc traçant la politique de défense sur le plan stratégique et opérationnel.

Nous n'évoquerons pas les articles 10 et 11 consacrés au possible démantèlement de DCNS et SNPE, puisque deux réunions se sont tenues sur le sujet, le 4 novembre 2008 avec le conseiller social du ministre, et le 21 janvier dernier devant votre commission. Je tiens malgré tout à rappeler que nous n'avions pas été consultés sur ce projet de loi avant son adoption en conseil des ministres le 29 octobre 2008, ni par le ministre, ni par son chef d'état-major, qui commence néanmoins à pratiquer enfin le dialogue social tant attendu, conformément aux préconisation de notre charte ministérielle de dialogue social de décembre 2005.

La LPM met l'accent sur la modernisation des équipements de nos forces – qui en ont tant besoin – en affichant une mission « Défense » dotée de 185 milliards d'euros, en valeur constante, hors pensions, dont 101 milliards d'euros pour les seuls équipements ; pour ces derniers, l'annuité passe de 15,4 à 18 milliards d'euros sur le quinquennat.

À sa sortie du conseil des ministres du 20 octobre 2008, le ministre déclarait : « Cet effort sans précédent au profit des équipements et de la condition du personnel sera le corollaire des économies générées au terme d'une réforme sans précédent du dispositif de soutien et d'administration générale […].Toutes les économies réalisées par le ministère de la défense seront intégralement réinvesties au sein de ce ministère. ». Eh bien, non. Nous affirmons que l'effort en matière de revalorisation de la condition du personnel civil n'est pas proportionnel aux 24 % du plafond ministériel des emplois autorisés, celui-ci étant de 75 478 emplois. Nous vous le disions déjà lors l'audition du 15 octobre 2008 sur le projet de loi de finances pour 2009, première annuité de cette LPM : les 15 millions d'euros prévus – au lieu de 15,9 millions d'euros en 2008 – correspondent seulement à 16,85 % des mesures totales.

Toutefois, ce qui fait peur au personnel, et que nous dénonçons à nouveau ici, c'est « l'enchaînement diabolique », voulu par notre chef des armées et le Gouvernement, du triptyque « Livre blancLPMRGPP » : le pourcentage de 25 % des 54 000 personnels à « déflater » sur la période – soit 13 500 – sera largement dépassé. L'effet « RGPPexternalisation » alourdira sérieusement le prix à payer par nos personnels.

Aussi, nous voudrions pouvoir compter sur les parlementaires, notamment sur les corapporteurs de la mission d'information sur la mise en oeuvre et le suivi de la réorganisation du ministère de la défense, MM. Bernard Cazeneuve et François Cornut-Gentille, pour dialoguer sur trois points : le bilan des externalisations passées et une étude prospective de ces mêmes opérations ; le bilan des « économies réalisées » et leur réinvestissement « au fil de l'eau », comme promis par le ministre ; le bilan et le contrôle des cessions immobilières, afin d'assurer une meilleure transparence de l'activité de la MRAI (mission pour la réalisation des actifs immobiliers) dans ce domaine. À ce propos, la CFTCdéfense déplore une fois de plus que l'on vende sans états d'âme les « bijoux de famille » du ministère de la défense !

J'aborderai maintenant des sujets plus techniques.

L'article 6, relatif aux mesures d'accompagnement des restructurations, mérite d'être réexaminé. Voilà pourquoi, monsieur le président, nous vous avons remis une lettre attirant l'attention sur la défiscalisation des IDV (indemnités de départ volontaire) et sur le maintien, en cas de mise en disponibilité d'office, du salaire global du personnel civil fonctionnaire et contractuel de la défense. Ces deux questions pourraient faire l'objet d'amendements, aussi bien lors de la discussion du projet de LPM que durant celle du projet de loi relatif à la mobilité et au parcours professionnel dans la fonction publique.

Pouvez-vous nous dire quel sera le statut de la SOFREDADIT et de la SOVAFIM ? Qui en assurera la gouvernance ? Quel sera le capital social ?

Le projet de loi prévoit des dispositions relatives au « secret de la défense nationale ». N'est-ce pas un peu hors sujet ?

En ce qui concerne le rapport annexé au projet de loi, je vous poserai un certain nombre de questions.

À l'issue de la présidence européenne assurée par la France, croyez-vous que l'ambition européenne affichée d'une « capacité d'intervention globale de 60 000 hommes », assortie de la possibilité « de conduire simultanément deux ou trois opérations de maintien ou de rétablissement de la paix », soit réalisable rapidement compte tenu de la crise qui sollicite beaucoup les budgets nationaux de nos 27 partenaires ? Où en est d'ailleurs, bien que reportée en fin de LPM, la collaboration entre le Royaume-Uni et la France sur l'éventuel deuxième porte-avions ?

La répétition ayant valeur pédagogique, nous vous rappelons cet important passage du Livre blanc, à peine repris dans votre projet de loi : « Chacune de ces deux populations – civils et militaires – a sa légitimité propre dans la structure : les militaires pour assurer la conduite des missions opérationnelles et participer à l'encadrement général du ministère ; les civils pour maîtriser, dans la durée, les domaines techniques et administratifs notamment et participer à l'encadrement général du ministère. ». Nous avons constaté que les lignes commençaient un peu à bouger, mais de façon insuffisante à notre goût.

S'agissant des fonctions dédiées au soutien, nous aimerions que soit inversé le ratio actuel pour aboutir, à terme, à la répartition suivante : 60 % de personnels civils et 40 % de personnels militaires. Le directeur du cabinet du ministre de la défense nous a d'ailleurs donné l'assurance que, dès la mise en oeuvre du plan annuel de mutation, la situation allait évoluer en faveur du personnel civil.

Le renforcement des effectifs, dans le renseignement, devrait atteindre 700 personnes. Quelle sera la nature des statuts des personnels civils et militaires concernés ?

Que recouvre l'expression « un accroissement important du reclassement (du personnel militaire) dans les fonctions publiques »? Les syndicats ont tous leur idée, mais nous aimerions connaître la vôtre. Avez-vous un chiffre à nous fournir ?

Quels territoires bénéficieront des 24 contrats de redynamisation de sites de défense ? Quelles communes profiteront des plans locaux de redynamisation et combien y en aura-t-il ?

Quel rapport parlementaire a dressé le bilan des externalisations ? Quels ont été les remboursements de TVA afférents faits par le MINEFI ? Si la représentation nationale valide les projets d'externalisation du Gouvernement concernant la défense, pourrez-vous utiliser de votre influence sur le ministère de l'économie et des finances pour qu'il rembourse la TVA, ce qu'il n'a jamais fait jusqu'à présent ? Cela éviterait au ministère de la défense de devoir puiser dans ses moyens de fonctionnement pour la payer.

Peut-nous nous communiquer le bilan officiel de la revue des programmes d'armement ? Nous n'en connaissons ni le détail ni le chiffrage.

Enfin, à combien se monte la réserve de précaution interministérielle ?

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je tiens à apporter quelques précisions.

Vous nous honorez particulièrement en disant « votre projet de loi ». Mais ce n'est pas le nôtre, c'est celui du Gouvernement. Ce texte deviendra davantage le nôtre lorsque nous en aurons débattu au sein de la commission, puis dans l'hémicycle, et que nous l'aurons – éventuellement – adopté.

La majorité des questions que vous venez de posez, nous nous les sommes aussi posées. Nos travaux vont continuer et les rapporteurs, MM. Beaudouin et Fromion, nous présenterons leurs conclusions.

La date d'examen en séance publique de la LPM n'a pas encore été fixée. À ce stade, il n'y a pas encore de certitude. Soyez toutefois assurés de l'action des parlementaires de la commission, toutes tendances confondues, pour obtenir un cadre de travail visible. En effet, il nous est particulièrement difficile d'exercer efficacement notre mandat dans ce contexte.

PermalienEdmond Scetbon, vice-président de défense CGC, Fédération de l'encadrement civil de la défense – FECD

Défense CGC tient tout d'abord à exprimer le respect qu'elle porte aux militaires opérationnels, engagés au nom de la France sur plusieurs théâtres.

Le projet de loi de programmation militaire 2009-2014 intègre à la fois la stratégie de défense et de sécurité de la France, décrite par le Livre blanc, et l'objectif d'économies résultant de la révision générale des politiques publiques.

Défense CGC souhaite éclairer la représentation nationale sur le traitement réservé au personnel civil de la défense dans le contexte des restructurations.

Commençons par le flux militaire « opérationnel ».

Le Livre blanc indique que « les personnels militaires devront se concentrer sur les missions opérationnelles, les personnels civils sur les tâches administratives et de soutien ». Le rapport annexé à la loi de programmation militaire confirme, quant à lui, les places respectives militairescivils, ainsi que la réduction des effectifs du soutien.

Aujourd'hui, l'administration et le soutien représentent 117 500 militaires et 73 000 civils. Parce que les militaires coûtent cher à la Nation –ils ne travaillent que pendant vingt ans et reçoivent une pension pendant quarante ans–, il conviendrait, selon la logique de la RGPP, de réduire de façon drastique le nombre de ceux affectés aux tâches non opérationnelles : secrétariat, ressources humaines, comptabilité, santé, entretien, restauration, hôtellerie, etc. Leur « civilianisation » immédiate permettrait, à elle seule et à effectifs constants, sans recourir à la déflation des 54 000 emplois, de faire des économies au niveau résultant de l'application de la RGPP. Or, en pratique, la LPM suit une logique exactement inverse. Pourquoi ?

Inscrit dans le projet de loi, le renouvellement de l'effectif militaire opérationnel à hauteur de 10 % par an, s'il inclut les militaires affectés au soutien, va majorer artificiellement ce recrutement de 11 700 militaires par an. Ce « subterfuge tactique » apporte aux armées un recrutement supplémentaire, alors que la gestion des effectifs doit être guidée par la recherche d'économies.

Dans le même temps, le personnel civil en place, pour partie recruté dans le cadre de la professionnalisation, et pour partie constitué d'anciens militaires, va être littéralement « poussé dehors » pour permettre la future reconversion des militaires actuels. Ainsi, à Marseille, 220 civils du CTAC (centre territorial d'administration et de comptabilité) et 50 de la DIAC (direction interdépartementale des anciens combattants) n'auront aucune possibilité de reconversion sur place, 15 postes seulement étant disponibles pour les civils.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Sauf si les collectivités locales, comme c'est le cas de la commune de Marseille, proposent des emplois.

PermalienEdmond Scetbon, vice-président de défense CGC, Fédération de l'encadrement civil de la défense – FECD

Peut-être pas 200… Mais si tout le monde s'y met, ce sera déjà bien.

Les tableaux d'effectifs des bases de défense expérimentales montrent que l'ensemble des fonctions d'administration et de soutien sont la plupart du temps confiées à du personnel militaire en attente d'une reconversion civile future. Ce flux réel ne permet jamais d'atteindre l'équilibre et contraint à éliminer en permanence du personnel civil. Et cela va continuer.

J'aborderai maintenant les mesures d'indemnisation.

Les mesures de restructuration mises en place par le ministère de la défense font que le militaire qui se reconvertit bénéficie d'un dispositif d'accompagnement financier très généreux, incluant des partenariats, qui lui permet de retrouver un emploi et de s'y former.

L'ouvrier de l'État bénéficie, quant à lui, d'un dispositif de départ volontaire satisfaisant : montant « alléchant », non imposition, allocation de chômage, retraite facilitée par allégement du dispositif relatif aux travaux insalubres, etc.

En revanche, le fonctionnaire ou l'agent contractuel est face à un dispositif assez contraignant : soit il demande l'indemnité de départ volontaire, qui est peu incitative, taxée et n'ouvre pas droit aux allocations de chômage ; soit il trouve un détachement dans la fonction publique sans mobilité géographique, mais aussi sans indemnisation ; soit, comme le prévoit le statut de la fonction publique, il rejoint un nouveau poste parmi un des trois sites proposés, lequel peut être lointain – quand il existe et s'il n'est pas déjà préempté par un militaire. S'il refuse les trois postes, il est licencié. Il faut enfin noter que, pour le personnel civil fonctionnaire et contractuel, on ne tient pas compte des risques d'insalubrité reconnus à l'ouvrier de l'État, même quand il exerce ses fonctions dans les mêmes conditions.

Ainsi, le personnel civil non ouvrier est à la fois le plus mal traité et le moins bien indemnisé.

Venons-en à l'amélioration de la condition des personnels restants. Des mesures de retour sur économies sont annoncées en faveur de tous les personnels.

Pour le personnel militaire, les mesures indiciaires sont effectives depuis le 1er janvier 2009. Des mesures indemnitaires vont suivre, de même que diverses mesures à vocation familiales très avantageuses par rapport à celles appliquées jusqu'à présent. La part du gâteau est belle, au point que l'expression « armée mexicaine » n'est même plus péjorative au regard de l'armée française, laquelle compte désormais un nombre démesuré d'officiers généraux : 500 il y a quatre ans, 1 013 aujourd'hui !

Les ouvriers d'État bénéficient de leur côté, depuis 2000, d'augmentations générales trois à quatre fois supérieures à celles qu'ont obtenues les fonctionnaires – en 2008, 3,8 % contre 0,7 % pour les fonctionnaires – et de taux d'avancement comparables.

Pour le personnel civil non ouvrier, le retard d'avancement des fonctionnaires – plus d'un an à ce jour, ce qui n'est pas réglementaire et constitue un cas unique dans la fonction publique – n'est toujours pas résorbé pour 2008, avec des taux d'avancement de grade parmi les plus bas. Quant aux plans de requalification des personnels, qu'ils soient administratifs ou techniques, sont au point mort ou abandonnés. La filière sociale, pourtant fortement sollicitée dans nos armées, a même dû restituer le « petit plus » indemnitaire qu'elle avait obtenu en 2007.

Le budget salarial global des personnels non contractuels, pour ceux qui en disposent –ingénieurs, cadres, techniciens –, est revalorisé d'à peine 1,5 %, alors que le triple serait nécessaire pour être au niveau de celui des fonctionnaires. Pour les autres, rien n'est prévu.

J'en viens aux personnels de DCNS et SNPE. Défense CGC est opposée au maintien de articles 10 et 11 du projet de loi et souligne le manque de dialogue et de concertation dans le traitement de ce dossier. Le volet social a été complètement négligé et l'inquiétude du personnel est très grande.

Ainsi, afin de permettre une liberté de manoeuvre plus grande en matière d'effectifs militaires, les commandements du Livre blanc – l'opérationnel au militaire et le soutien au civil – et ceux de la RGPP – faire des économies – ont été clairement détournés, voire bafoués par ceux qui ont été chargés de l'élaboration du projet de loi.

Défense CGC ne se prononce pas sur ce qui en résultera pour le professionnalisme et l'efficacité de la fonction soutien, alors que les personnels ainsi « civilianisés » n'ont bénéficié d'aucune adaptation – ils n'ont même pas obtenu l'obtention d'un diplôme. Je plaide pour mes collègues militaires qui, malgré l'existence de formation au cours leur carrière, n'ont pas obtenu de diplôme reconnu par l'Éducation nationale. Ce n'est pas normal.

En revanche, les conséquences sur le personnel civil en place seront gravissimes. Le ministère de la défense se montre inconséquent dans la gestion de ce dossier, s'attachant plus à satisfaire une catégorie de personnels plus revendicative qu'à accorder le moindre avantage au personnel fonctionnaire et contractuel. Ainsi, à la gabegie des deniers de l'État s'ajoute le traitement discriminatoire injustifié du personnel civil non ouvrier du ministère de la défense.

Aujourd'hui, Défense CGC sollicite officiellement l'intervention de la représentation nationale afin de modifier quelque peu les orientations de la LPM dans le sens d'une plus grande équité de traitement en faveur du personnel civil non ouvrier.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je tiens à vous signaler que la commission continuera de débattre sur ces sujets, notamment dans le cadre du rapport d'étape que sont chargés d'établir MM. Cornut-Gentille et Cazeneuve. Je souhaiterais maintenant répondre à vos questions.

Tout d'abord, s'agissant de la répartition des effectifs entre civils et militaires, les travaux portant sur la rationalisation du soutien n'ont pas encore tous abouti. Il faut cependant rappeler que le ministre de la défense s'est engagé à préserver dans le cadre des suppressions d'emplois un rapport général de 75 % de militaires pour 25 % de civils, de façon à maintenir un traitement paritaire. Les premières projections paraissent assez favorables au personnel civil puisque 76 % des emplois supprimés seraient des postes détenus par des personnels militaires. Cependant, il ne faut pas sous-estimer les enjeux humains de la restructuration et de la suppression d'effectifs. La suppression de 54 000 emplois aura des répercussions importantes, d'autant que le contexte économique et social s'est sensiblement dégradé.

En outre, des inquiétudes ont été exprimées au sujet de la mise en place des bases de défense. Comme vous le savez, chacune d'entre elles constituera l'unique échelon administratif local de la défense et assurera l'ensemble des fonctions de soutien général au profit des militaires et des civils situés dans un rayon d'environ 30 kilomètres. Dix bases seront constituées en 2009 de façon à expérimenter le concept et à préparer la mise en place des autres. Les difficultés éventuelles mèneront à des adaptations, tandis que seront préparés les textes indispensables au fonctionnement stabilisé de l'ensemble.

Par ailleurs, chaque base sera placée sous l'autorité d'un commandant, distinct des responsables des unités opérationnelles, étant entendu que ce poste pourra être occupé par un civil. À titre d'exception, notamment si la base de défense ne comporte qu'une seule formation importante, son commandant pourra être le commandant de cette formation.

S'agissant du MCO, le phénomène généralisé de vieillissement des matériels a des conséquences dramatiques dont nous sommes parfaitement conscients. Le renchérissement des coûts a cependant été partiellement compensé grâce à des efforts importants de rationalisation et de modernisation des organismes chargés de la maintenance, principalement dans la marine et l'armée de l'air. Sur ce point, l'ambition affichée par la LPM 2003-2008 a été concrétisée, comme l'ont relevé les rapporteurs de la mission d'information.

L'ambition du projet de loi est de contenir l'enveloppe consacrée au MCO en adaptant les structures internes du ministère et en préservant les compétences technologiques et industrielles françaises, conformément aux priorités soulignées par le Livre blanc et aux choix stratégiques du Président de la République. Les membres de la Commission, dans leurs divers travaux, ont montré la nécessité de maintenir une base industrielle et technologique française. C'est dans cet esprit que travaillent les rapporteurs du texte.

En outre, je tiens à souligner, en réponse à une vos questions, que M. Cazeneuve a interrogé le nouveau P-DG de DCNS, lors de son audition par la commission le 3 février, sur faisabilité financière des programmations engagées. Celui-ci a répondu qu'il avait pris contact avec la DGA en ce sens. Vous pouvez d'ailleurs vous reporter au compte rendu de l'audition.

S'agissant de la défiscalisation des indemnités de départ volontaire des personnels fonctionnaires et contractuels, l'indemnisation des personnels civils non ouvriers d'État ne relève pas exclusivement du ministère, même si celui-ci a tenté de faire valoir sa spécificité, mais d'un dispositif commun à l'ensemble de la fonction publique d'État. Les indemnités sont fiscalisées, mais elles sont calculées sur l'ensemble des rémunérations perçues alors que dans le cas des personnels militaires, l'indemnité est calculée sur la base du traitement indiciaire hors primes, soit 60 % de leur rémunération. La défiscalisation des indemnités destinées aux militaires vient en compensation de cet écart et permet d'obtenir une parité entre personnels civils et personnels militaires.

Par ailleurs, un décret et un arrêté instaurent un complément spécifique de restructuration pour les fonctionnaires et agents publics non titulaires bénéficiant d'un CDI. S'agissant du maintien du salaire des personnels mis en disponibilité, la logique retenue a été une approche interministérielle ; toutefois, nous pouvons sensibiliser le cabinet du ministre de la défense à cette question.

Vous m'avez interrogé sur le statut de la SOFRED et de la SOVAFIM. La SOFRED est actuellement une filiale du groupe GIAT Industries dotée d'un capital de 45 millions d'euros. Constituée en 1993, son rôle a consisté à mener des actions de revitalisation des bassins d'emploi faisant suite à l'abandon des sites de production. L'article 7 vise à réorienter l'utilisation des fonds pour accompagner les actions de restructurations entraînées par la restructuration des armées. La SOFRED deviendra une société nationale de droit privé, dont le capital sera détenu directement par l'État. Quant à la SOVAFIM, nous sommes en attente des précisions demandées au ministère de la défense.

La CFTC s'est interrogée sur la pertinence des dispositions relatives au secret de la défense nationale dans le projet de loi. Le Livre blanc a souhaité la consolidation du cadre législatif du secret de la défense nationale, conformément à un avis rendu par le Conseil d'État le 5 avril 2007. Les règles spécifiques déclinées dans le projet de loi réorganisent notamment le cadre des perquisitions judiciaires.

En ce qui concerne le renforcement des effectifs dans le renseignement, le cabinet du ministre nous fait savoir que la répartition des effectifs de renseignement serait de deux tiers de personnels civils et d'un tiers de personnels militaires.

S'agissant de la question relative aux accords de défense, la liste ayant été rendue publique par le Livre blanc, vous pouvez utilement vous y reporter.

Des précisions ont également été demandées sur l'« accroissement important du reclassement des personnels militaires dans la fonction publique ». Selon le bilan social 2007 publié par le ministère de la défense, un peu plus de 1 000 militaires ont été reclassés, dont environ 700 au sein de la fonction publique d'État si l'on inclut les emplois réservés, et 275 au sein de la fonction publique territoriale. Le dispositif de reclassement des personnels militaires dans la fonction publique concernera, quant à lui, un volume complémentaire de 1 100 emplois par an, ce qui contribue pour 17 % aux objectifs de réduction d'emplois. Il faut toutefois rappeler que la majeure partie des réductions de postes devra résulter de non remplacement de personnels ou de non renouvellement de contrats.

Pour les dispositifs d'accompagnement territorial des restructurations, je peux vous indiquer que les contrats de redynamisation de sites de défense seront mis en place pour les sites affectés par une perte nette de plus de 200 emplois : 225 millions d'euros y seront consacrés sur la période 2009-2014. Les plans locaux de redynamisation – auxquels sera consacrée une enveloppe de 75 millions – concerneront tous les autres sites touchés par une perte supérieure à 50 emplois.

Il n'y a pas eu de bilan des externalisations Un rapport d'information sur les perspectives d'externalisation, réalisé en janvier 2007 par notre collègue M. Marc Francina, a cependant souligné les enjeux et les limites de la démarche. Il faut noter que, dans le cadre de la RGPP, des groupes de travail du ministère de la défense ont pour mission d'évaluer la faisabilité ou l'opportunité d'externaliser certaines fonctions. Il n'est pas prévu que le supplément de TVA résultant de l'externalisation d'activités par le ministère de la défense donne lieu à un rétablissement de crédits. Lors de son examen du projet de loi de finances pour 2007, le Sénat avait adopté un amendement en ce sens mais cette disposition n'a finalement pas été retenue.

S'agissant de la revue des programmes d'armement, je souligne que le bilan de la programmation militaire 2003-2008, établi par Mme Adam, MM. Beaudouin et Fromion, permet de répondre à vos interrogations.

Enfin, il a aussi été question de la réserve de précaution interministérielle. Sachez que celle-ci est prévue par l'article 51 de la LOLF et que les taux sont fixés chaque année par arbitrage du Premier ministre. Pour 2009, le dispositif de mise en réserve prévoit un taux de 0,5 % sur les crédits relatifs à la masse salariale et de 5 % pour les autres dépenses. Pour cette année, la réserve de précaution représente 5,6 milliards d'euros.

PermalienHervé Baylac, membre du bureau fédéral de la Fédération nationale de la nationale des travailleurs de l'état – CGT

Prenons garde à ne pas donner de fausses illusions aux personnels civils et militaires de nos établissements. Le reclassement au sein des collectivités locales est un leurre, j'en ai acquis la conviction auprès des présidents de conseils régionaux que j'ai pu rencontrer, notamment M. Alain Rousset.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Ce peut être le cas en Aquitaine, mais vous ne pouvez en tirer des généralités.

PermalienHervé Baylac, membre du bureau fédéral de la Fédération nationale de la nationale des travailleurs de l'état – CGT

S'agissant du MCO, le rapport de la mission d'information fait état de matériels vieillissants et de coûts de maintenance élevés. Des activités de réparation et de recherche sont menées quotidiennement pour les réduire, mais nos établissements étatiques sont fragilisés, d'une part, par l'absence de remise à niveau des effectifs et, d'autre part, par les pratiques des fournisseurs de pièces de rechange, qui profitent de la situation pour augmenter leurs prix de façon injustifiée. Nous vous demandons d'exercer toute votre vigilance sur cette question lors de l'examen du projet de loi de programmation.

Par ailleurs, vous avez affirmé qu'un bilan sur l'externalisation serait prématuré. Il serait alors souhaitable de le rappeler aux commandants d'unité ou d'établissement qui prennent les devants et externalisent sans avoir pris la mesure des conséquences en termes opérationnels, humains et économiques.

Je tiens aussi à souligner combien les conséquences de la tempête dans le sud-ouest ont permis de démontrer, une nouvelle fois, le sens du service public des fonctionnaires du ministère de la défense. La nécessité de maintenir des effectifs suffisants de personnels civils et militaires, de même que la préservation de leurs missions et de leurs compétences ont été ainsi rappelées. Cette mise au point s'est révélée nécessaire car la mise en oeuvre de la RGPP, les préconisations du Livre blanc et le contenu de la LPM 2009-2014 semblent parfois bien éloignés des réalités du terrain.

Pour ce qui est de la coopération européenne, les spécificités de chaque pays commanditaire doivent être prises en compte, même si cela entraînera par ailleurs des retards importants, comme le montrent les exemples du NH90 et de l'A400M. Dans cet esprit, il m'apparaît nécessaire de maintenir une industrie nationale garantissant notre indépendance et propre à contenir le coût de MCO à un niveau acceptable.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Il est vrai que les industriels donnent parfois l'impression de tirer à la hausse leurs prix, proposant des équipements toujours plus sophistiqués et toujours plus chers, ce qui rend les coûts du MCO exponentiels. Lors de l'examen de la loi de finances pour 2009, nous avons fait part de notre crainte : le coût du MCO induit par la sophistication du matériel risque d'être aussi important que celui engagé pour entretenir aujourd'hui un matériel vieillissant. Lors de l'examen de la LPM 2009-2014, nous ne manquerons pas d'être attentifs aux implications techniques et financières.

Je pense également que, lors de la dernière tempête, la défense n'a pas failli dans sa mission de service public. Elle s'est ainsi inscrite dans la tradition des armées, qui viennent en aide aux populations grâce aux moyens spécifiques dont elles disposent. Cette action, notamment celle du 17e régiment de génie parachutiste, a été unanimement saluée et hier, lors de la séance des questions au Gouvernement, des hommages ont été rendus à nos soldats. Tout cela est justifié, même si je considère que nettoyer des plages atteintes par la marée noire, par exemple, ne relève pas des missions qui doivent être confiées à une armée professionnelle.

Enfin, je tiens à rappeler que la coopération européenne est un enjeu auquel la commission attache une importance particulière. Nous sommes tous inquiets, notamment sur le risque de rupture capacitaire de nos armées en action. Nous souhaitons, là encore, exercer notre mission de contrôle et d'évaluation et tentons de sensibiliser le ministère de la défense sur cette question. Mais s'agissant de la coopération, je suis moins libéral que vous : s'il est vrai que chaque pays a le droit de mettre en avant ses spécificités, cela complexifie considérablement les programmes et ralentit les livraisons.

PermalienGilles Goulm, secrétaire général de la Fédération syndicaliste FO de la défense, des industries de l'armement et des secteurs assimilés

Notre organisation a été très volontariste sur la question des bases de défense : plutôt que de prévoir dix bases en 2009 avec un retour d'expérience en juin, ce qui paraît impossible, elle a préconisé la mise en place de vingt bases en 2010, avec un retour d'expérience à la fin de l'année, avant une extension générale en 2012-2013.

Si l'on ne profite pas de cette occasion pour inverser la tendance et rééquilibrer la répartition des effectifs civils et militaires sur les fonctions de soutien, il y aura 80 000 personnels militaires en fin de programmation, tandis que nous ne serons plus que 40 000 civils. Nous ne voulons pas créer d'antagonisme, mais force est de constater que chaque réforme menée dans ce ministère l'a été à notre détriment. Dans une armée professionnelle, compter 116 000 personnels militaires contre 72 000 personnels civils dans les fonctions de soutien est une hérésie. Nous avons fait des propositions, notamment sur le passage des personnels militaires au statut de personnel civil, sans trouver d'écoute et sans que les solutions envisagées ne nous satisfassent. Notre ambition est que cette réforme aboutisse à une répartition où les civils représentent enfin 80 % des effectifs sur les fonctions de soutien. Sans quoi la preuve sera faite que, depuis 1996, la professionnalisation a été menée en dépit du bon sens.

Je me félicite que Marseille soit une commune volontariste pour l'accueil des personnels de la défense. Mais nous entendons chaque jour les responsables locaux nous dire qu'ils ne peuvent pas prendre d'ouvriers de l'État, en raison d'un texte de 1997 qui prévoit que la mise à disposition est compensée à condition de rembourser les salaires au ministère de la défense. Ainsi, le conseil régional d'Alsace est d'accord pour reprendre quelques militaires, mais pas des civils.

En outre, les autres ministères, également concernés par la mise en oeuvre de la RGPP, doivent reclasser leurs personnels. Le ministère de la défense veut certes apparaître comme le premier de la classe en termes de suppressions d'effectifs, mais les autres ne sont pas disposés à en faire les frais. Ainsi le ministère de l'intérieur devra reclasser du personnel de préfecture et de sous-préfecture, et il est fort à parier que les 4 000 postes ouverts du fait de l'intégration de la gendarmerie ne seront pas proposés aux personnels civils de la défense.

Par ailleurs, le MCO doit être renforcé au sein du secteur étatique. Nous connaissons tous ici les pressions exercées par les industriels pour récupérer les activités de MCO par le biais de l'externalisation. Il faut avoir le courage de dire que si la maintenance du moteur M88 du Rafale est confiée à la Snecma, cela tuera l'Atelier industriel de l'aéronautique de Bordeaux.

Or, nous n'avons pas de bilan portant sur les externalisations. Nous avons simplement reçu du secrétaire général de l'administration un rapport sur l'externalisation de la gamme commerciale des véhicules, plein de poncifs et de lieux communs, sans chiffres à l'appui de ses conclusions. Nous ne sommes pas dupes : nous savons bien que l'objectif est de gagner de la masse salariale. Mais s'il a manqué 200 millions d'euros à l'armée de l'air pour boucler son budget MCO, ce n'est pas à cause du coût que représentent les ouvriers de l'État et le SIAé, mais en raison de la hausse des prix décidée par les industriels.

Ceux-ci sont intéressés par la maintenance lorsqu'ils peuvent vendre du matériel neuf. Ils n'hésiteront pas, une fois qu'ils se seront vu confier la maintenance du M88, à nous expliquer qu'ils ont mieux que le Rafale. Mais l'échelle de temps n'a jamais été la même pour les constructeurs et pour les utilisateurs. L'histoire se répète : le ministre de l'époque justifiait la création du service de la maintenance aéronautique par l'incapacité de l'industriel à répondre aux besoins de l'armée. Nous souhaiterions que ce service étatique perdure.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Mon credo est de ne pas opposer personnels civils et personnels militaires. Le ministère a besoin des uns comme des autres. Par ailleurs, votre raisonnement est spécieux, car il faut bien que les industriels construisent : ce n'est pas le MCO seul qui permet aux industriels d'investir dans la recherche et le développement.

PermalienLuc Scappini, secrétaire fédéral de la Fédération établissements et arsenaux de l'état – CFDT

Nous ne souhaitons pas opposer personnels civils et personnels militaires et nous sommes attachés à la complémentarité, mais tout est fait pour nous dresser les uns contre les autres.

Nous attendons de la représentation nationale qu'elle soit responsable et garante devant le peuple des choix qui seront faits. C'est pourquoi nous exprimons aujourd'hui nos inquiétudes et souhaitons entendre vos réactions.

Le ratio 6040 des fonctions de soutien est devenu un ratio 7525, le déséquilibre étant, une fois de plus, en défaveur des personnels civils. Nous sommes d'autant plus inquiets que lors des réunions sur la mise en place des bases de défense expérimentales, un responsable de l'EMA nous a expliqué que les décisions seraient prises au fur et à mesure, « en marchant ». C'est là tout l'esprit d'une méthode que nous ne trouvons pas à la hauteur des enjeux. Dix bases expérimentales supplémentaires seront créées en 2010 ; il n'y aura pas de retour d'expérience avant 2011, date à laquelle pourrait être décidée l'extension à 80 bases.

S'agissant de l'externalisation, nous dénonçons le fait que plusieurs années après les grandes externalisations de 2003, nous n'ayons toujours pas de bilan.

Vous aurez remarqué, en auditionnant les délégués de DCNS, qu'il existe un front commun syndical contre l'article 10. Les partenaires sociaux, sans parti pris idéologique, ont saisi votre Commission afin de dénoncer les dangers que représente un tel article. Je vous le dis solennellement, la représentation nationale sera comptable des choix qui auront été faits. Il faut préserver la première entreprise de la navale militaire en Europe.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Nous en avons bien conscience et nous avons entendu ces délégués, qui ont très bien su faire valoir leurs convictions.

Enfin, le ratio 6040 concerne la répartition des effectifs entre les fonctions de soutien et la fonction opérationnelle, tandis que le ratio 7525 constitue un objectif de répartition des suppressions entre militaires et civils.

PermalienJean-Yves Placenti, délégué de l'Union nationale des syndicats autonomes

– UNSA-défense. Ce texte aurait pu être l'occasion de mettre en place un plan de « civilianisation » volontaire, au lieu de quoi nous demeurons dans le déclaratif et dans le voeu pieux. Il conviendrait de réserver les fonctions de soutien aux personnels civils. Mais une nouvelle fois, priorité sera donnée au maintien d'une composante militaire très forte. Comme l'ont rappelé les représentants de la CFDT, cette réforme est portée par des équipes constituées d'officiers généraux pour lesquels la problématique de la coexistence entre deux types de personnels est inexistante. De par leur culture, ils estiment que le ministère de la défense est celui des militaires et la composante civile leur semble quelque peu exotique.

Nous souhaitons vous soumettre une piste de réflexion, qui tendrait à impliquer davantage les personnels civils dans la réserve, dont ils sont de facto exclus. Il serait important et intéressant pour l'ensemble de notre communauté de mieux les impliquer dans cet aspect de notre défense.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je suis d'accord avec vous sur ce dernier point.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

Je ne souhaite pas revenir sur le fait que la RGPP est à mes yeux une réforme technocratique et comptable.

Je constate avec inquiétude que certains choix sont annoncés puis modifiés dans le plus grand des silences. Dans ma circonscription, la fermeture du centre d'essais et de lancement des missiles (CELM), prévue initialement pour 2011, est avancée subitement à 2010 sans explication. Le renforcement de la base aéronavale de Lann-Bihoué sera finalement accompagné de la suppression de 130 postes de personnels civils. La réforme est brutale, mais si elle évolue sans crier gare, cela risque de rendre les choses compliquées et difficiles à gérer.

Par ailleurs, cette réforme entre en collision avec la crise et réduit à néant nos efforts pour combattre cette dernière. Pour reclasser les personnels du CELM, nous travaillons au cas par cas. Je confirme que les collectivités locales ne peuvent les accueillir, non seulement pour les raisons administratives qu'a exposées M. Gilles Goulm, mais aussi parce que le transfert des compétences sans compensation a rendu leurs finances exsangues. C'est la raison pour laquelle j'estime l'idée d'un gel ou d'un moratoire intéressante.

En outre, l'absence de bilan ou d'éléments prospectifs sur l'externalisation est dommageable. J'ai été chargée avec mon collègue Louis Giscard d'Estaing d'un rapport sur le coût et le financement des opérations extérieures au sein de la MEC ; j'ai tenu à ce qu'un volet sur l'externalisation y figure.

Enfin, je suis très inquiète des conséquences que pourrait entraîner l'article 10 – une forme de vente par appartements – et je voterai contre. Un certain nombre d'engagements pris vis-à-vis des personnels, notamment sur le volontariat et la mobilité, n'y figurent plus.

PermalienEdmond Scetbon, vice-président de défense CGC, Fédération de l'encadrement civil de la défense – FECD

Je voudrais vous remercier de nous avoir donné l'occasion de nous exprimer sur la place des personnels civils dans le cadre de la RGPP. C'est un fait suffisamment rare pour qu'il en soit fait état ; d'ordinaire, nos autorités nous opposent une fin de non-recevoir. La défense a besoin d'être aidée et soutenue, et l'ensemble des personnels qui la composent pris en compte.

À ce titre, soulignons que la crise aura nécessairement des conséquences sur les coûts des MCO. En Allemagne – un pays reconnu pour son pragmatisme –, l'activité de soutien est exclusivement assurée par les personnels civils, les personnels militaires coûtant trop cher. Il est tout de même surprenant de constater que le secrétariat, au ministère, est assuré par des personnels militaires qui n'ont jamais quitté la rue Saint-Dominique ou que les gérants de mess, sur tout le territoire, sont des sous-officiers. S'il faut faire des économies, procédons de manière intelligente et cherchons à nous inspirer de nos voisins.

Mme Olivier-Coupeau a évoqué le contexte économique dans lequel va se dérouler cette réforme. Nos civils vont être littéralement débarqués de ce ministère, avec six mois d'indemnités et sans dispositif de reclassement. Les militaires, eux, verront leur reconversion prise en charge dans le cadre de contrats conclus avec de grandes entreprises et leurs indemnités s'élever à trois années de traitement. Nous ne le remettons pas en cause, mais que l'on ne vienne pas nous dire que les civils ont obtenu les mêmes conditions !

Ainsi, lorsqu'un fonctionnaire refuse à trois reprises un poste, le statut général prévoit qu'il soit licencié. Or un projet, auquel nous sommes vivement opposés, vise à le mettre en disponibilité d'office, sans indemnité, lorsqu'il refuse d'être muté. C'est inconcevable ! Bientôt, le fonctionnaire aura moins de garanties qu'un travailleur du secteur privé. A-t-on le droit, en période de crise, de mettre à la rue des personnels sans aucune précaution ? Il faudrait plutôt donner aux personnels militaires de soutien un statut civil, cela ferait gagner autant d'argent à la nation que la RGPP !

PermalienPhoto de Guy Teissier

Les opérations extérieures font que l'on ne peut pas confier le MCO uniquement aux civils, à moins de leur demander d'être réservistes. Certes, nous pouvons nous inspirer de l'Allemagne, mais ce pays n'a pas la même histoire ni les mêmes traditions.

Je partage votre point de vue sur le fait qu'il n'est pas forcément bon d'affecter des commandants, des colonels ou des officiers pilotes à des tâches de comptabilité ou de logistique dans des structures administratives. Les personnels civils seraient sans doute plus performants dans ces emplois que les militaires, qui n'ont pas été formés pour de tels métiers.

PermalienYves Naudin, secrétaire général fédéral de la Fédération CFTC du personnel civil du ministère de la défense et des établissements et structures connexes

Nous sommes conviés vendredi à une réunion multilatérale au ministère, lors de laquelle nous sera présenté un rapport du contrôleur général des armées sur le rôle et la place du personnel civil. Je ne crois pas que nous y entendrons quoi que ce soit de nouveau

Par ailleurs, ne pensez-vous pas que la crise et que le budget alloué par les États à leur défense seront un obstacle à la constitution d'une force européenne de 60 000 hommes, préconisée par le Livre blanc ?

PermalienPhoto de Guy Teissier

Il ne vous a pas échappé que l'Union a eu en 2008 un très grand président. Si nous n'avons pas parachevé l'ouvrage, c'est qu'il s'agit d'une entreprise de longue haleine. Lorsque la volonté existe, le chemin apparaît. En résolvant un certain nombre de crises, la présidence française a montré que nous pouvions avancer si nous y mettions le prix. Je vous remercie.

La séance est levée à 12 heures