COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 5 octobre 2011
La séance est ouverte à douze heures trente.
(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la commission)
La Commission des affaires sociales entend Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, de M. Xavier Bertrand, ministre de l'emploi et de la santé, et de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
Nous tenons à élever une protestation contre l'horaire auquel se tient cette réunion, et qui nous obligera embrayer directement sur les questions d'actualité. Ce sont là des conditions de travail inacceptables.
Cela résulte des fonctions de porte-parole du Gouvernement de Mme Pécresse. Le même problème s'est posé à la commission des finances pour le projet de loi de finances et le président Cahuzac n'y a pas trouvé à redire.
Nous accueillons donc M. Xavier Bertrand, Mme Valérie Pécresse et Mme Roselyne Bachelot-Narquin. Nous disposons ainsi une semaine plus tôt que de coutume du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), ce qui nous laissera davantage de temps pour en débattre. Nous avons le système de sécurité sociale le plus développé d'Europe. Nous avons donc un devoir de vérité, un devoir d'efficience si des marges de productivité existent, enfin une exigence de justice. Tels sont les paramètres qui doivent être au coeur de notre débat.
La porte-parole du Gouvernement que je suis doit tenir un point de presse à l'issue du conseil des ministres. Il s'agit d'une contrainte institutionnelle, non d'une volonté délibérée d'arriver tard.
Le 24 août dernier, la France a réaffirmé, par la voix du Premier ministre, un choix clair : celui de tenir le cap de notre trajectoire de réduction des déficits publics malgré l'évolution de la conjoncture, pour les ramener à 5,7 % du PIB en 2011, 4,5 % en 2012 et 3 % en 2013.
Notre stratégie constante pour atteindre ces objectifs repose sur trois piliers. Le premier est la maîtrise des dépenses publiques par des réformes de fond – c'est le socle de notre action. Le deuxième, c'est le soutien de la croissance, avec un investissement sans précédent dans l'innovation, la recherche et l'enseignement supérieur. Le troisième, c'est le recours à des recettes supplémentaires par la réduction des niches fiscales et sociales et des prélèvements ciblés qui améliorent l'équité de notre système fiscal.
Cette stratégie globale vaut pour l'État et pour les administrations de sécurité sociale. Toutes les politiques, tous les secteurs de l'action publique sont en effet confrontés à un même enjeu : mettre fin à la hausse incontrôlée des dépenses dont certains prétendent, aujourd'hui encore, qu'elle est le prix à payer pour préserver notre modèle social.
Pour nous, un État qui protège est d'abord un État solide, dont les bases financières sont saines. Je pense d'abord à notre système de protection sociale : aussi efficace et solidaire soit-il, il ne peut reposer sur le vide, sur ce déficit permanent qui, un jour ou l'autre, nous le savons tous, ne sera plus tenable. C'est pourquoi nous agissons en suivant une stratégie qui porte aujourd'hui tous ses fruits. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en apporte la démonstration. C'est le budget du rétablissement, puisque nous allons avoir deux ans d'avance sur nos objectifs de réduction des déficits sociaux. En bref, nous faisons mieux et plus vite.
Ce projet s'inscrit dans la continuité de l'effort historique de maîtrise des dépenses engagé voici quatre ans, qui produit désormais tous ses résultats. Je pense notamment à la réforme des retraites, qui se traduit dès 2012 par 5,6 milliards d'économies pour l'ensemble des régimes. Nous allons poursuivre et amplifier cet effort : pour la deuxième année consécutive, nous respecterons en 2011 l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) qui ne l'avait jamais été depuis sa création en 1997. Ces résultats, nous les devons aux réformes structurelles que nous avons entreprises : la rénovation de la gouvernance des hôpitaux, la création des agences régionales de santé, les nouveaux modes de régulation des soins de ville, notre politique du médicament. Elles nous ont permis, par exemple, de réduire le déficit des hôpitaux, passé de 475 millions en 2007 à 185 millions en 2010. Dix centres hospitalo-universitaires présentent aujourd'hui des comptes à l'équilibre, contre deux seulement en 2007.
Nous poursuivrons cette politique de maîtrise des dépenses en 2012, en fixant à nouveau le taux d'augmentation de l'ONDAM au niveau particulièrement ambitieux de 2,8 %. Pour respecter cet objectif, nous devrons réaliser 2,2 milliards d'économies par rapport à la tendance spontanée de progression des dépenses, qui est de 4,4 % par an. Le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie a rendu hier son avis sur la construction de l'ONDAM pour 2012 : il le juge crédible.
Nos efforts, dont M. Xavier Bertrand vous donnera le détail, porteront en priorité sur les produits de santé et l'amélioration du fonctionnement de notre système de soins.
Un dernier mot sur notre politique de maîtrise des dépenses : nous avons non seulement démontré que l'on pouvait contenir la progression des dépenses de santé mais aussi que cela n'avait aucun impact négatif sur la qualité des soins dont bénéficient les Français, bien au contraire. L'excellence de nos médecins et de nos hôpitaux fait toujours notre fierté. La France demeure l'un des seuls pays au monde, si ce n'est le seul, où toute personne, quels que soient ses moyens et son origine, peut recevoir les soins les plus avancés, aussi coûteux soient-ils. C'est cette exception française que nous nous sommes donné les moyens de préserver. La majorité peut légitimement en être fière.
J'en viens au deuxième axe directeur de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui transcrit une partie des mesures du plan anti-déficit annoncé par le Premier ministre le 24 août dernier.
Les décisions de cet été démontrent notre réactivité : nous avons immédiatement adapté les recettes aux nouvelles prévisions de croissance afin de maintenir nos objectifs de réduction du déficit public. Nous tenons nos engagements en dépit de la conjoncture. Les mesures annoncées par le Premier ministre se traduiront par 6 milliards d'euros de recettes supplémentaires pour la Sécurité sociale. La moitié de cet effort a déjà été adopté lors du vote du projet de loi de finances rectificative en septembre. C'est le cas de l'augmentation des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, qui rapportera 1,5 milliard – dont la moitié sera acquittée par les 5 % de ménages les plus aisés –, et de la réforme des abattements sur les plus-values immobilières, qui touche également les plus aisés. La seconde moitié des recettes supplémentaires figure dans le projet de loi de finances et le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, à l'exception de l'augmentation des prix du tabac, qui est d'ordre réglementaire.
Ce plan anti-déficit témoigne de notre constance dans nos choix de recettes. Nous sommes en effet restés fidèles à trois principes. Nous poursuivons en priorité la réduction des niches fiscales et sociales, pour un total de quelque 4 milliards d'euros qui représentent les deux tiers des nouvelles recettes sociales. Nous confortons ainsi les sources de financement existantes en mettant fin à des dérogations qui n'avaient plus lieu d'être : outre la suppression de l'exonération partielle sur la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA) que vous avez déjà adoptée, je pense aux mesures relatives à la contribution sociale de solidarité des sociétés et sa contribution additionnelle (C3S), au forfait social, aux cotisations dans les industries électriques et gazières et à la contribution sociale généralisée (CSG).
Nous n'augmentons pas la CSG mais nous élargissons sa base car c'est l'impôt moderne et universel qui garantit l'assise financière de notre protection sociale ; l'abattement pour frais professionnels sur les revenus des salariés sera ainsi réduit de 3 à 2 %. Nous proposons en outre de supprimer entièrement cet abattement pour les revenus qui ne constituent pas un salaire, comme l'épargne salariale, l'intéressement ou la participation.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit également d'appliquer uniformément la CSG à tous les revenus de remplacement, dont le complément de libre choix d'activité. Celui-ci, en effet, n'est pas une allocation mais un revenu de remplacement. Il est donc logique qu'il soit soumis à la CSG comme le sont les autres revenus de remplacement. Il continuera en revanche à ne pas être imposable à l'impôt sur le revenu. Ce dispositif reste donc fiscalement avantageux et demeure une pièce importante de notre politique familiale.
Par ailleurs, le texte prévoit l'intégration des heures supplémentaires dans le barème de calcul des allégements généraux de charges sur les bas salaires. Cette mesure technique proposée par le Conseil des prélèvements obligatoires tend à corriger une double exonération pour les employeurs. Mais l'idée fondatrice de l'exonération des heures supplémentaires n'est pas remise en cause : les salariés qui travaillent plus continueront à gagner plus et cette part de leurs revenus ne sera pas imposée.
Le deuxième principe qui a guidé nos choix en matière de recettes est le recours, dans un esprit d'équité, à des prélèvements ciblés. Comme vous le savez, 82 % du plan du 24 août pèsent sur les grands groupes et les ménages aisés. Il est juste de demander davantage aux plus aisés, en augmentant les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine ou en réformant l'abattement pour durée de détention sur les plus-values immobilières, mesures que vous avez adoptées lors de l'examen du collectif budgétaire de septembre.
Ces mesures permettront également de rééquilibrer les contributions respectives des revenus du patrimoine et du travail au financement de notre protection sociale. C'est une question essentielle ; le Gouvernement a pris sur ce point des décisions extrêmement fortes, qui vont toutes dans le sens de l'équité.
Troisième principe : nous avançons sur le terrain de la fiscalité comportementale, avec l'augmentation des prix du tabac mais aussi de la fiscalité sur les alcools forts et la création d'une taxe sur les boissons à sucres ajoutés, qui figure dans le projet de loi de finances. La rumeur a couru ce matin que nous avions l'intention d'élargir l'assiette de cette taxe ; il n'en est rien. Certains se sont étonnés de cet usage de l'outil fiscal ; nous assumons pleinement ce choix. L'exemple de la hausse régulière des prix du tabac montre en effet que les taxes sur les comportements à risque sont l'un des outils de prévention et de responsabilisation les plus efficaces, y compris lorsqu'elles sont faibles - elles jouent un rôle de signal pour les consommateurs et les entreprises. L'idée d'une taxe sur les boissons à sucres ajoutés en donne un autre exemple : les réactions qu'elle suscite provoquent une vraie prise de conscience, et c'est déjà une excellente chose ! Envisager ces taxes sous l'angle des seules recettes qu'elles apportent serait donc réducteur. C'est en changeant les comportements que nous contribuerons, sur le long terme, à la maîtrise des dépenses de santé, exigence à laquelle nous ne pouvons manquer.
Notre politique de maîtrise des dépenses, conjuguée à des recettes ciblées, produit tous ses résultats : la réforme des retraites, le respect de l'ONDAM et le dynamisme des recettes nous permettent de ramener à 18,2 milliards le déficit prévisionnel du régime général pour 2011, ainsi réduit de 5,7 milliards par rapport à 2010 et inférieur de 2,7 milliards aux prévisions figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Nous ferons mieux encore en 2012.
La loi de programmation des finances publiques fixait l'objectif de réduction du déficit du régime général à 16,3 milliards en 2014. Nous pourrons atteindre et même dépasser cet objectif dès 2012, puisque ce déficit sera ramené à 13,9 milliards. Celui de l'assurance maladie sera légèrement inférieur à 6 milliards, alors qu'il était de 11,6 milliards en 2010. Ainsi, entre 2010 et 2012 nous serons parvenus à réduire de 40 % le déficit du régime général et à diviser par deux celui de l'assurance maladie.
La constance et le courage payent : ils nous ont permis de rompre avec la progression incontrôlée des dépenses d'assurance-maladie. II n'y a à mes yeux aucune autre stratégie crédible pour préserver notre modèle de protection sociale. Les recettes sont un complément, elles ne peuvent être le point de départ de notre action de réduction des déficits sociaux.
C'est parce que nous l'avons compris que nous préservons aujourd'hui la santé financière d'un système de soins dont la qualité exceptionnelle bénéficie à tous les Français. Le reste à charge pour les ménages a ainsi encore diminué en 2010, passant de 9,7% en 2008 à 9,4 % aujourd'hui. C'est sans conteste l'un des taux les plus bas au monde pour une qualité de soins parmi les plus élevées. C'est ce modèle que nous préservons, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en est la meilleure preuve.
On peut effectivement exercer une maîtrise responsable des dépenses et maintenir un haut niveau de prise en charge : c'est ce que nous réussissons à faire.
Cet effort concerne d'abord notre système de santé et l'assurance maladie. La croissance de l'ONDAM a été fixée à 2,8 % pour 2012. Cela représente 4 milliards d'euros de dépenses en plus mais aussi, au regard de l'évolution tendancielle des dépenses, 2,2 milliards d'économies à trouver.
Nous devons d'abord poursuivre nos efforts dans le champ des soins de ville. La maîtrise médicalisée des dépenses, cela marche ! Les actions des caisses d'assurance maladie en ce sens vont donc se poursuivre ; elles permettront 550 millions d'euros d'économies.
Le médicament – je l'assume – sera le premier poste d'économies. La contribution de l'industrie des produits de santé à ces économies sera renforcée pour 2012 à hauteur de 770 millions d'euros : certains prélèvements seront relevés ; les baisses de prix seront amplifiées, ce qui permettra une économie de 670 millions d'euros ; la substitution par les génériques sera favorisée, ce dont nous attendons 40 millions d'euros. La France consomme trop de médicaments, et nous les payons parfois trop cher - cela doit changer.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale harmonise par ailleurs les méthodes de calcul des indemnités journalières de toutes les branches, qui seront désormais systématiquement calculées à partir du salaire net. Cela simplifiera le travail des caisses et des entreprises, tout en préparant la déclaration sociale nominative. Compte tenu de la dynamique des dépenses des indemnités journalières maladie – 6,6 milliards d'euros, en hausse de 3,8 % en valeur en 2010 - une économie d'environ 220 millions d'euros sera cependant réalisée sur ce poste.
Mais la maîtrise des dépenses concerne aussi l'hôpital. Cela passe par la signature de contrats de performance avec l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé, qui devraient permettre d'économiser 50 millions d'euros. Cela passe aussi par la poursuite de la rationalisation des achats, qui représentent 18 milliards d'euros et constituent le deuxième poste de dépenses après le personnel ; les efforts entrepris devraient permettre de gagner encore 145 millions d'euros en 2012. Par ailleurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale instaure un mécanisme d'incitation à la performance dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens, sur la base d'indicateurs de performance précis. Enfin, la convergence vers le tarif le plus efficient entre établissements publics et privés se poursuivra, avec à la clef une économie de 100 millions d'euros.
Nous maîtrisons donc les dépenses ; mais, dans le même temps, l'ONDAM nous permet d'investir pour faire évoluer au mieux l'offre de soins. Conformément aux souhaits de votre commission, et plus particulièrement de M. Yves Bur, le projet de loi de financement de la sécurité sociale propose ainsi la création d'un fonds d'intervention régionale (FIR) chargé de mutualiser les crédits sanitaires à la disposition des agences régionales de santé (ARS) pour les responsabiliser pleinement.
Les cycles conventionnels contribuent à renforcer la relation de confiance avec les professionnels de santé. La convention signée le 21 juillet dernier a généralisé la rémunération à la performance, ce qui consolidera l'amélioration des pratiques et nos objectifs de maîtrise médicalisée. En outre, le projet de loi prolonge de deux ans les expérimentations des nouveaux modes de rémunération, ce qui permettra de créer une rémunération mieux adaptée aux maisons de santé pluridisciplinaires. Les négociations conventionnelles avec les pharmaciens libéraux vont débuter ; le cadre conventionnel proposé par le texte permettra aux pharmaciens d'assumer pleinement leur rôle de professionnels de santé et de restructurer le réseau des officines.
Voilà pour la maîtrise des dépenses de santé. Mais nous prévoyons aussi des recettes nouvelles. Plus de 4 milliards d'euros iront à la branche maladie du régime général, dont 1,7 milliard par le biais du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le reste ayant été voté dans le cadre de la deuxième loi de finances rectificative pour 2011. Ces recettes permettent d'améliorer considérablement le solde de la branche maladie du régime général, dont le déficit s'élèvera à moins de 6 milliards d'euros fin 2012, alors que le déficit tendanciel est de 12 milliards.
Nous parvenons donc à maîtriser les dépenses tout en maintenant un haut niveau de prise en charge. Pour la troisième année consécutive, le reste à charge des ménages a diminué en 2010, comme le signale la Commission des comptes de la santé. Seuls les Pays-Bas font un peu mieux que nous en cette matière.
Par ailleurs, nous continuons à garantir l'accès aux soins des plus modestes. La couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), qui bénéficie à plus de 4,2 millions de personnes, et l'aide à la complémentaire santé (ACS) ont montré leur pertinence. Le Gouvernement s'est en outre engagé l'an dernier à élargir la couverture pour les plus modestes, en relevant le plafond de ressources ouvrant droit à l'ACS ; il passera, le 1er janvier 2012, au niveau du plafond retenu pour la CMU-C majoré de 30 %. Je sais l'importance que le président de votre Commission et plusieurs de ses membres attachent à cette question et je suis prêt à aller plus loin lors du débat parlementaire.
Pour apporter une solution structurelle au problème des dépassements d'honoraires, et donc de l'accès aux soins, je suis très favorable à la création dans les meilleurs délais du secteur optionnel pour les trois spécialités de chirurgie, d'anesthésie-réanimation et de gynécologie. Les discussions avec l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire progressent et je souhaite qu'elles aboutissent à un accord ; dans le cas contraire, nous prendrons nos responsabilités. En tout état de cause, le temps de l'apaisement est venu.
À la suite des Assises du médicament, le taux de la contribution sur le chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique passera de 1 % à 1,6 %. Le rendement supplémentaire de 150 millions d'euros qui en résultera ira au financement de la formation médicale continue de tous les médecins hospitaliers et libéraux.
Enfin, le financement de la future Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, outre qu'il sera augmenté de 40 millions d'euros, ne proviendra plus directement de l'industrie pharmaceutique, mais de l'assurance maladie. Cette étanchéité nouvelle est gage de transparence.
Notre exigence de responsabilité vaut également pour la branche vieillesse. Dix mois après la publication de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, les trois quarts des textes d'application ont ainsi été publiés, et le Gouvernement confirme l'objectif de retour à l'équilibre de l'ensemble des régimes de la branche à l'horizon 2018.
En 2012, le solde de la branche vieillesse du régime général sera nettement amélioré par rapport au solde tendanciel, avec un déficit prévisionnel de 5,8 milliards d'euros.
Par ailleurs, nous tiendrons l'engagement pris par le Président de la République de revaloriser le minimum vieillesse pour les personnes seules de 25 % sur le quinquennat. L'effort consenti cette année montre que nous tenons cette promesse ; ce n'est que justice.
La réforme des retraites est prolongée par ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, la principale mesure concernant l'amélioration du solde du régime des exploitants agricoles, dont le déficit cumulé sera de 3,8 milliards d'euros fin 2011. Pour réduire ce déficit, le Gouvernement propose une action en deux volets : une reprise de dette par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) sans allongement du calendrier d'amortissement ; l'allocation de recettes nouvelles provenant du relèvement du prix des boissons alcoolisées prévu en 2012 et d'une affectation de droits sur les bières et boissons non alcoolisées.
La branche accidents du travail et maladies professionnelles doit être structurellement équilibrée ; aussi avons-nous relevé le taux de cotisation de 0,1 % à partir de 2011. Cette branche assure le financement des dépenses des fonds spécialisés pour l'indemnisation des victimes de l'amiante, dont le montant est reconduit au niveau des années précédentes. Elle contribue également à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Cette dernière contribution sera légèrement revalorisée dans le projet de loi, pour tenir compte du dernier rapport de la commission présidée par M. Noël Diricq. Notre priorité est de renforcer la prévention des risques professionnels et de prévenir la pénibilité, volet essentiel de la réforme des retraites.
Pérenniser notre système de protection sociale, c'est enfin lutter contre la fraude aux prestations sociales. Comme je l'ai indiqué devant la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de votre Assemblée, nous allons poursuivre les efforts déjà engagés à cette fin les années précédentes. D'ailleurs, le sujet me semble plutôt consensuel. Le projet de loi prévoit que les informations déclarées à Tracfin seront désormais transmises aux organismes de sécurité sociale lorsqu'elles ont trait au travail dissimulé. D'autre part, nous mettons en place le Répertoire national commun de la protection sociale qui comporte à la fois les données d'affiliation et les prestations servies aux assurés – vous pouvez le dénommer « fichier national des allocataires sociaux », cela me convient tout aussi bien. Ce répertoire, qui sera opérationnel à la fin de l'année, donnera une photographie complète de la situation d'un assuré social – régime, caisse d'affiliation et prestations servies. Il permettra de repérer incohérences et doublons et d'engager un nouveau plan d'action ; ce sera donc un outil très efficace de lutte contre la fraude. Enfin, l'expérimentation relative au contrôle des arrêts de travail des fonctionnaires commencée l'an dernier sera prolongée de deux ans.
Telles sont les mesures proposées par le Gouvernement pour préserver notre système de protection sociale.
Nous ne voulons plus reporter systématiquement sur les générations futures la charge de financer nos dépenses courantes. En témoignent, pour la branche famille et le secteur médico-social, l'amélioration significative – 400 millions d'euros – du solde de la branche famille, mais aussi la décision de ne pas proposer de mesures nouvelles aussi longtemps que cette branche sera déficitaire et celle de reporter les mesures financières les plus lourdes de la réforme de la dépendance.
Nous entendons néanmoins poursuivre nos efforts en faveur des plus fragiles de nos concitoyens. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en est l'illustration. Car si le Gouvernement a décidé de différer la mise en oeuvre des mesures financières les plus lourdes de la réforme de la dépendance – dans le contexte actuel, cela n'aurait pas été responsable – il propose dès ce projet de loi plusieurs mesures d'effet immédiat en faveur des personnes âgées.
La progression des moyens pour le secteur médico-social sera ainsi de 4,2 %. Cet effort permettra de financer près de 400 millions d'euros de mesures nouvelles pour améliorer la qualité de la prise en charge des personnes âgées, soit une croissance de 6,3 % par rapport à 2011 pour le secteur des personnes âgées. Nous allons ainsi poursuivre la médicalisation des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) à hauteur de 140 millions d'euros au moins. Nous allons également notifier aux agences régionales de santé, dans les tout prochains jours, 20,4 millions d'euros d'enveloppes anticipées, dont près de 10 millions en 2011, permettant l'achèvement des notifications du crédit du Plan de solidarité grand âge (PSGA) dès 2012. Je serai très vigilante sur le fléchage de ces crédits, qui devront être essentiellement consacrés aux services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) afin de respecter l'équilibre retenu initialement dans le plan de solidarité.
Ces moyens nouveaux nous permettront également de mettre en place un plan d'aide à l'investissement – à hauteur de 50 millions d'euros l'an prochain – afin de favoriser les travaux de rénovation des établissements et des services accueillant les personnes âgées ou handicapées. Ils contribueront aussi au développement des structures intermédiaires de prise en charge.
Le texte vous propose par ailleurs de poursuivre l'amélioration de l'accueil des résidents dans les maisons de retraite médicalisées, en prévoyant le versement d'une dotation supplémentaire aux établissements s'engageant dans une démarche de qualité et d'efficience ; c'est indispensable. Dans un premier temps, une expérimentation visera à valoriser, dans la tarification des EHPAD, les efforts consentis pour améliorer la qualité de la prise en charge ou limiter le recours à l'hospitalisation. À cela s'ajoutera le lancement par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) d'un site internet visant à comparer les établissements en fonction de leurs coûts mais aussi d'indicateurs reflétant la qualité de la prise en charge. Ainsi aidera-t-on les familles qui choisissent une maison de retraite pour un proche dépendant.
J'ai également obtenu que l'on apporte une réponse aux difficultés auxquelles sont confrontées les associations et les entreprises chargées des services d'aide à domicile ; je remercie Mme Bérengère Poletti pour ses travaux à ce sujet. Le Gouvernement a ainsi décidé la création d'un fonds exceptionnel, doté de 50 millions d'euros, pour accompagner la restructuration de ces services. Ce fonds sera abondé par le budget général de l'État ; la mesure sera donc débattue lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012.
Il faut cependant aller au-delà de mesures strictement financières. Aussi allons-nous améliorer l'accès des familles à l'information, faciliter leurs démarches et améliorer la coordination des intervenants autour de la personne âgée dépendante. À cette fin, le projet de loi de financement de la sécurité sociale permettra la création de cent nouvelles maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades Alzheimer (MAIA) en 2012, ce qui portera leur nombre à 155.
Les mesures financières que nous proposons constituent un nouvel effort important de l'État, alors même que notre socle de prise en charge des personnes âgées dépendantes est déjà considérable. La réforme de la dépendance est donc loin d'être abandonnée.
L'effort de solidarité en faveur des personnes handicapées sera également amplifié, comme s'y est engagé le Président de la République lors de la dernière conférence nationale du handicap, le 8 juin dernier. Scolarisation des enfants handicapés, emploi des adultes et renforcement de l'accessibilité sont autant d'engagements déjà mis en oeuvre ou qui trouveront leur traduction financière dans le projet de loi de finances. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale contient, quant à lui, une mesure très attendue par les parents handicapés : la majoration de 30 % du complément du mode de garde pour les couples ou les parents isolés bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé ayant un enfant de moins de six ans.
La progression des moyens dans le secteur médico-social nous permettra de mobiliser plus de 186 millions d'euros pour tenir notre engagement de créer plus de 51 000 places pour enfants et adultes d'ici 2012. Mes services vont d'ailleurs notifier des enveloppes anticipées – 140 millions d'euros en 2011 et de 223 millions d'euros en 2012, soit 363 millions d'euros au total – permettant l'achèvement du plan de création de places dans les établissements et services accueillant les personnes handicapées.
Ce projet nous permet enfin de poursuivre nos efforts en faveur des familles, notamment les plus fragiles. Notre politique familiale ne constituera pas une variable d'ajustement à la crise. Mme Valérie Pécresse l'a excellemment dit : l'assujettissement du complément de libre choix d'activité à la CSG aligne le régime de ce revenu de remplacement sur celui des allocations chômage et des indemnités journalières.
Nous continuons à mener une politique familiale ambitieuse, dont les moyens représentent aujourd'hui 5,1 % de la richesse nationale, contre 4,7 % en 2007. C'est d'ailleurs indispensable dans la période de crise que nous traversons, car les prestations sociales, notamment familiales, sont un puissant outil de redistribution en termes de niveau de vie. J'ai souhaité renforcer cet effet redistributif par deux mesures qui concernent les familles monoparentales. La première prévoit la création d'un plafond spécifique de ressources augmenté de 40 % pour les parents isolés ; les familles concernées pourront ainsi bénéficier du montant maximal du complément de mode de garde. La seconde disposition vise à améliorer l'aide versée par les caisses d'allocations familiales en cas de versement partiel d'une pension alimentaire. Le coût cumulé de ces deux mesures est estimé à 5 millions d'euros par an environ. Cette somme, raisonnable sur le plan budgétaire, apportera une aide précieuse à des familles confrontées à des difficultés spécifiques.
Je salue le choix constant fait par le Gouvernement, depuis le début de la crise : ne pas toucher à la solidarité en dépit de nos difficultés budgétaires. En affectant des recettes supplémentaires à la solidarité face à la maladie et au vieillissement, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit cette volonté. En ces temps de crise, il convient de saluer le fait que 6,5 milliards d'euros de recettes supplémentaires iront à la sécurité sociale.
Ma première question concerne les perspectives de croissance, estimées fin août par le Premier ministre à 1,75 % pour 2011 et 2012 et à 2 % pour les deux années suivantes. Avez-vous tenu compte du risque de dégradation de la dynamique de croissance que certains instituts économiques commencent à envisager ? Les mises en réserve de crédits permettent-elles de faire face à une éventuelle baisse du taux de croissance ? Le volontarisme du Gouvernement se comprend, mais il convient aussi d'être réaliste.
Ma deuxième question porte sur la taxation des sodas. Cette mesure est présentée comme une mesure de santé publique, mais je peine à comprendre sa cohérence quand par ailleurs on ne touche pas aux taxes sur le vin, la bière ou le rhum. Un soda serait-il plus dangereux qu'un verre de vin, de bière ou de rhum ? D'autre part, l'ambiguïté subsiste sur le niveau de la taxation. Le Gouvernement s'en tiendra-t-il à celui qui assure un rendement de 120 millions d'euros affectés à la sécurité sociale ou laissera-t-il l'initiative parlementaire le hausser pour en affecter le produit à la réduction des charges sociales sur le travail agricole ?
Ma dernière question porte sur les mauvaises habitudes de gestion de notre système de santé, qui conduit à hospitaliser des gens qui n'ont rien à faire à l'hôpital – ce serait le cas, chaque jour, de 18 % des patients hospitalisés, pour un surcoût qui atteindrait 2 milliards d'euros. Tout l'enjeu est de déplacer cette somme, par le jeu de la fongibilité asymétrique, vers le secteur médico-social et le traitement de la dépendance. La fongibilité asymétrique pourrait être complétée par la fongibilité interrégionale chère au président Méhaignerie. Est-il en effet acceptable que le coût des dépenses de santé par assuré continue d'être significativement plus important dans certaines régions que dans d'autres ? Comment assurer l'égalité dans la prise en charge ?
J'ai constaté, lors des travaux préparatoires et des auditions que nous avons menés, la grande acceptabilité de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, exception faite de l'irritation, compréhensible, de l'industrie pharmaceutique et des mutuelles, qui se trouvent mises à contribution.
Ma grande satisfaction est que l'ONDAM soit fixé à 2,8 % ; cela permet de consacrer plus de 4 milliards d'euros supplémentaires à la santé de nos concitoyens, alors même que la conjoncture est difficile.
Monsieur le ministre, vous réformez le mode de financement de la nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), et vous avez proposé d'en augmenter les ressources de 40 millions d'euros. Mais peut-on être sûr que ce financement de l'agence, qui relèvera désormais du budget de l'État, sera pérennisé malgré les restrictions budgétaires actuelles ?
Le projet renforce, à juste titre, la mission d'évaluation médico-économique de la Haute Autorité de santé (HAS). Ne conviendrait-il pas aussi de resserrer les liens entre la Commission de la transparence de la Haute Autorité et le Comité économique des produits de santé (CEPS), dans le cadre de la détermination du prix et du service rendu des médicaments ?
La question du secteur optionnel sera-t-elle débattue au Parlement, ou est-elle du seul ressort des négociations conventionnelles ?
J'appelle votre attention sur la situation des 5 000 médecins retraités qui continuent d'exercer, notamment dans les déserts médicaux : bien qu'ils aient liquidé leur retraite, ils sont contraints de payer des cotisations à fonds perdus.
Je souhaite des précisions sur les modalités de la mise en réserve – décidée pour suivre les recommandations du rapport Briet – des dotations destinées aux missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC) des hôpitaux publics.
Dans son récent rapport, la Cour des comptes estime qu'il faut prendre sans tarder les arbitrages qu'implique la mise en oeuvre de la convergence tarifaire à l'horizon 2018. Quels seront-ils ?
Créer un fonds régional d'intervention est une excellente idée. Laisse-t-elle présager la création d'objectifs régionaux de dépenses d'assurance maladie (ORDAM), possibilité évoquée par Mme Bachelot l'an dernier ?
Enfin, il a été fait état devant nous d'un courrier de la Commission européenne exigeant que les mutuelles soient soumises à l'impôt sur les sociétés avant la fin de l'année. Si c'est exact, qu'envisage le Gouvernement à ce sujet ?
Je salue à mon tour l'effort consenti par le Gouvernement dans le secteur médico-social, puisque, malgré un contexte budgétaire très contraint, l'ONDAM médico-social augmente de 4,2 %, après avoir bénéficié depuis plusieurs années d'augmentations substantielles qui ont permis d'améliorer la situation des établissements.
Permettez-moi de revenir sur les 2 milliards d'euros qui pourraient être économisés chaque année par l'assurance maladie. L'organisation des réseaux et l'orientation des personnes âgées dépendantes sont défectueuses : il y a certes à l'hôpital des patients qui n'ont rien à y faire, mais il s'y trouve aussi des personnes qui ne peuvent en sortir faute de réseaux – soins infirmiers à domicile, hospitalisation à domicile, établissements médico-sociaux, médecins libéraux – adaptés à leur prise en charge. Je félicite donc Mme Bachelot, car les 50 millions d'euros apportés aux services d'aide à domicile permettront d'agir sur l'organisation de ces services et de créer ces réseaux, ce qui aura un effet positif sur les dépenses de l'assurance maladie.
Ma première question porte sur les crédits de l'ONDAM médico-social. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a restitué 150 millions d'euros à l'assurance maladie au début de l'année 2010, et encore 100 millions en 2011 ; cela signifie-t-il qu'il y a eu débasage ? Ces reprises s'expliquaient par des réserves de crédits non consommés, réserves en réalité mal estimées. À combien s'élèvent désormais les réserves de la CNSA, et quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
On sait les difficultés que le processus de médicalisation des établissements a rencontrées en 2011. Je salue l'effort supplémentaire de 150 millions d'euros annoncé et je souhaite savoir comment il sera réparti. Je m'interroge par ailleurs sur l'article 37, qui prévoit l'expérimentation d'une enveloppe liée à la performance pour le forfait soins : l'évaluation de la performance est souhaitable, mais elle est délicate puisque tous les établissements ne sont pas dotés de la même manière. En sera-t-il tenu compte ?
Enfin, l'expérimentation de l'intégration des dépenses de médicaments dans le forfait soins des EHPAD a été prolongée de deux ans dans la loi de financement pour 2011. Pourriez-vous en dresser un bilan d'étape ? Cette expérimentation a-t-elle été positive pour les établissements qui l'ont conduite ? La poursuivront-ils ? Quelles sont les consignes pour la dernière année d'expérimentation qui va s'ouvrir ?
De combien le déficit de la branche vieillesse va-t-il être réduit en 2012, compte tenu de la réforme des retraites de 2010, par rapport à ce qu'il aurait été en l'absence de réforme ? Est-on dans la ligne des prévisions ?
Le projet de loi de financement prévoit, en faveur des sportifs amateurs de haut niveau, la validation gratuite, prise en charge par l'État, de trimestres de cotisations à l'assurance vieillesse. Quels sont le nombre de personnes concernées, le coût prévisionnel du dispositif et les modalités de remboursement à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) des périodes assimilées ?
Cette année encore, la branche famille est le parent pauvre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Seules sont proposées deux mesures ciblées, relatives à l'allocation de soutien familial et au complément de libre choix du mode de garde. Elles sont positives, notamment pour les familles monoparentales, mais l'on ne peut que constater le manque d'ambition de votre politique familiale. De nombreuses promesses avaient pourtant été faites, mais nous attendons toujours la réforme du congé parental annoncée par le Président de la République en 2009, la création d'un droit de garde opposable et celle de 200 000 places de crèche supplémentaires. Le Gouvernement pense-t-il tenir ces deux engagements ? Quel bilan dressez-vous de la politique du Gouvernement en matière d'offre de garde depuis 2007 ?
Je m'inquiète enfin du niveau record du déficit de la branche famille pour 2012, 2,7 milliards d'euros selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale. Quelles sont les perspectives de retour à l'équilibre de la branche ?
Je m'associe à mes collègues rapporteurs pour saluer l'effort sans précédent de réduction des déficits porté par le Gouvernement : 7,3 milliards d'euros pour le seul régime général, dont quelque 2,2 milliards de moindres dépenses et 5,2 milliards de recettes nouvelles. Quels sont respectivement, et pour quels montants, les branches et les organismes qui bénéficieront de ces recettes nouvelles et qui seront concernés par les économies prévues ?
Si l'hypothèse de croissance pour 2011 a dû être revue à la baisse, la progression de la masse salariale a été beaucoup plus dynamique que prévu : 3,7 % au lieu de 2,9 %. N'y aurait-il pas intérêt à présenter plusieurs scenarii d'évolution macroéconomique, comme par le passé ? Les hypothèses retenues pour 2012 correspondent-elles à un scénario moyen ?
Le projet de loi prévoit une croissance de l'ONDAM de 2,8 % pour 2012 – un ONDAM qui n'a plus besoin d'être rebasé puisqu'il est enfin respecté. Pour ce faire, 550 millions d'euros d'économies sont prévues au titre de la maîtrise médicalisée des dépenses de soins de ville ; mais comment peut-elle être mise en oeuvre alors que la nouvelle convention médicale a déjà été signée ?
Enfin, l'ONDAM médico-social est en hausse de 4,2 %. Indépendamment de ces moyens supplémentaires, des mesures doivent être prises pour améliorer la qualité de l'accueil en établissement. Comment l'expérimentation d'une réforme de la tarification des EHPAD peut-elle permettre d'atteindre cet objectif ?
Le groupe SRC est loin de partager votre analyse. Nous nous interrogeons tout d'abord sur les hypothèses qui fondent ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le Gouvernement dit avoir tenu compte de la révision à la baisse de l'hypothèse de croissance, passée de plus de 2 % à 1,75 %. Mais vous n'ignorez pas que plusieurs analystes l'évaluent désormais plus proche de 1,4 % que de 1,75 %. Avez-vous commencé de réfléchir aux secteurs auxquels vous demanderez des économies supplémentaires le cas échéant ?
Quelle est la crédibilité d'un taux d'augmentation de l'ONDAM fixé à 2,8 % et obtenu au prix du gel de 545 millions d'euros de crédits ? Pour ma part, elle me semble très faible, sauf à considérer que l'on peut continuer sans dommage à étrangler l'hôpital public.
Vous avez présenté des mesures d'économie qui ne suffisent pas à faire une politique, et nous ne partageons pas votre enthousiasme sur les efforts demandés.
Nous ne pouvons évidemment que souscrire à l'idée qu'il faut rationaliser la politique du médicament et faire que nos concitoyens en consomment moins. Mais nous n'avons pas le sentiment que les mesures proposées puissent aboutir à réguler les pratiques car vous taxez sans chercher à modifier ni les conditions d'octroi des autorisations de mise sur le marché ni le comportement des patients et des médecins.
La taxation des sodas, qui traduit une recherche éperdue de ressources nouvelles, n'est pas absurde en soi. Encore faudrait-il savoir dans quelle politique de santé publique elle s'inscrit, car taxer les sodas sans prendre d'autres mesures pour prévenir l'obésité n'a guère de sens. D'autres produits alimentaires pourraient être taxés si vous aviez à l'esprit une politique réfléchie de santé publique.
J'en viens aux mutuelles. Vous nous expliquez que le système français est l'un des meilleurs qui soit, que le taux de remboursement demeure élevé et le reste à charge relativement bas. Pourtant, selon une étude récente dont toute la presse s'est fait l'écho, un tiers des Français déclarent avoir dû renoncer à des soins pour des raisons financières. C'est que le Gouvernement a fait diminuer le remboursement par l'assurance maladie au profit des assurances complémentaires privées, et que le renchérissement des contrats pénalise les assurés. Nous sommes vigoureusement opposés à cette approche.
S'agissant des indemnités journalières, nous sommes convaincus de la nécessité de lutter contre la fraude, mais nous refusons de voir un fraudeur en chaque malade. Au demeurant, il ne s'agit pas tant pour vous de responsabiliser les malades que de faire des économies au détriment des assurés.
Je regrette enfin que ce projet de loi ne comporte aucun axe de réforme structurelle. Si le déficit diminue, c'est par un saupoudrage de mesures diverses. Ce projet ne consacre pas moins l'abandon de la réforme de la dépendance, l'incapacité du Gouvernement à réduire les inégalités de santé, à dompter l'inflation des dépassements d'honoraires – nous ne croyons pas à la solution du secteur optionnel – et à résoudre par des mesures novatrices le problème, qui va s'aggravant, des déserts médicaux. Dans le prolongement des quatre précédents, ce texte illustre une politique qui conduit au recul des droits des patients et de l'accès aux soins.
Je salue un projet de budget protecteur et engagé. Loin de faire sienne la description caricaturale qui vient d'en être tracée, le groupe UMP se félicite du volontarisme avec lequel le Gouvernement, dans un contexte économique extrêmement contraint, s'attache à continuer de protéger nos concitoyens. Dans une Europe confrontée à une crise économique, la France reste un pays où l'on peut se soigner et où l'on garantit un haut niveau de protection sociale – une protection sociale à laquelle le Gouvernement a souhaité allouer 4 milliards d'euros supplémentaires, ce qui n'est pas rien. Des économies et une politique volontariste sont nécessaires ; des choix devront être faits, c'est le rôle du Parlement.
Non, la politique de la dépendance n'est pas abandonnée mais le Gouvernement considère, de manière responsable, que dans la situation économique actuelle de notre pays, il ne serait pas responsable d'instaurer une politique forcément coûteuse à ce sujet. En revanche, dans ce projet, une enveloppe de 400 millions d'euros concerne les personnes âgées dépendantes ; elle devra être fléchée vers les soins à domicile, l'hospitalisation de jour et les maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades Alzheimer (MAIA).
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire où en est la réflexion sur l'amélioration de l'aide à la souscription d'une assurance complémentaire santé ?
Le groupe GDR considère l'autosatisfaction qui s'est exprimée pour le moins excessive au regard de la réalité. Elle l'est d'autant plus que les prévisions affichées ne seront sans doute pas tenues, le projet de loi étant construit sur une prévision de croissance de 1,75 % en 2012 alors que les économistes les plus optimistes tablent sur une croissance de seulement 1,4 %, les projections des autres s'établissant plutôt à 1,2 %. L'affirmation de Mme Pécresse selon laquelle il s'agirait d'un budget de « rétablissement » n'est pas sans rappeler la phrase d'un certain ministre affirmant qu'en 2007 l'équilibre serait rétabli. En fait de volontarisme, le Gouvernement persiste dans son refus de prendre les mesures qui permettraient de réelles recettes nouvelles, se limitant à grappiller quelques millions ici et là ; je ne m'appesantirai pas sur la plaisanterie de la taxation des sodas, au demeurant incohérente. Je note toutefois une timide augmentation du forfait social sur les revenus du capital, qui rapportera 410 millions d'euros, un montant plutôt faible au regard du 1,2 milliard d'euros prélevé sur les mutuelles. Pourquoi vous obstinez-vous à refuser que les revenus du capital contribuent à notre protection sociale au même niveau que les revenus du travail ? On y gagnerait en recettes et l'on revaloriserait véritablement le travail. M. Alain Minc lui-même est favorable à cette mesure – c'est tout dire !
Le refus de mesures ambitieuses, outre qu'il aggrave le déficit d'année en année, conduit le Gouvernement à prendre des mesures dangereuses pour la santé – ainsi de la décision de retirer l'hypertension artérielle sévère de la liste des affections de longue durée (ALD), ce qui de surcroît coûtera plus cher à terme. De même, vous creusez délibérément le déficit de l'hôpital public en fixant systématiquement l'augmentation de l'ONDAM hospitalier à un niveau inférieur à celui de l'augmentation naturelle des dépenses de santé. L'an dernier, M. Jean Leonetti, alors président de la Fédération hospitalière de France, avait demandé une augmentation de 3,23 % de l'ONDAM hospitalier, et n'avait obtenu que 2,8 %. C'est le taux d'augmentation que vous reconduisez cette année ; mais, comme cet objectif n'est évidemment pas tenable, vous gelez une partie des dotations MIGAC. Ce procédé inadmissible entrave les missions de service public. L'autosatisfaction affichée est donc rien moins que justifiée.
Vous annoncez, monsieur le ministre, la nécessité de trouver des économies ; par quels mauvais coups pour la santé de nos concitoyens cela se traduira-t-il ? D'autre part, l'Inspection générale des finances, la mission d'information sur les exonérations de cotisations sociales dont le rapporteur était Yves Bur et le Conseil des prélèvements obligatoires ont tous souligné la faible efficacité de certaines niches sociales ; quelle suite audacieuse donnerez-vous à ces conclusions ? Pourquoi, enfin, vous obstinez-vous à poursuivre la convergence tarifaire, une démarche inéquitable qui avantage les établissements hospitaliers privés au détriment des hôpitaux publics, comme l'a fait valoir avec une vive préoccupation M. Frédéric Valletoux, le nouveau président de la Fédération hospitalière de France ? Pourquoi persistez-vous à désorganiser, jusqu'à le tuer, l'hôpital public ?
Le groupe Nouveau Centre se félicite d'avoir appris deux bonnes nouvelles : d'une part, l'ONDAM a été respecté l'an dernier – mais c'est plus facile quand les dotations MIGAC sont gelées pour partie ; d'autre part, le déficit des comptes sociaux se réduit. Malgré cela, le déficit restera important en 2012, puisque, en y incluant celui du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), il s'établira à 19,4 milliards d'euros. Comment ce déficit sera-t-il financé ? Pour le groupe Nouveau Centre, qui ne souhaite pas qu'il le soit par les générations futures, deux solutions sont possibles : l'augmentation de la CSG ou celle de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Laquelle proposez-vous ? Il faut, dans tous les cas, améliorer l'efficacité de la dépense.
Les comptes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) demeurent déséquilibrés. Nous préconisons la suppression des régimes spéciaux et le passage à une retraite à points ou par comptes notionnels. Le Gouvernement l'envisage-t-il ?
Pour 2012, il est proposé d'augmenter l'ONDAM de 2,8 %, ce qui représente 4 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. Mais puisque des agences régionales de santé ont été créées, pourquoi ne pas expérimenter la fixation d'objectifs régionaux, comme le propose le rapport de M. Jean-Pierre Fourcade, au nom du Comité d'évaluation de la réforme de la gouvernance des établissements publics de santé ? De même, nous saluons la création d'un fonds d'intervention régional, qui permettra l'ébauche d'une fongibilité ; mais pourquoi ne pas en laisser la responsabilité aux agences régionales elles-mêmes, comme la logique le voudrait ?
Peut-on vraiment penser que la création d'un secteur optionnel réglera le problème des dépassements d'honoraires ? N'est-ce pas prendre le risque de voir les praticiens, qui appliquent actuellement des dépassements d'honoraires inférieurs à 50 %, monter à ce niveau ? Et en quoi règle-t-on le cas des dépassements très supérieurs ?
Enfin, quel sera enfin le taux de revalorisation des pensions de retraite en 2012 ?
Chacun sait que la crise ne s'est pas arrêtée à nos frontières. Dans ce contexte, la ligne de crête trouvée par le Gouvernement, consistant à protéger nos concitoyens en préservant la protection sociale tout en réduisant progressivement la dette n'est pas facile à maintenir, mais la démarche est partagée par beaucoup – d'autant que, madame Fraysse, n'y aurait-il pas eu la crise, nous anticipions l'équilibre des comptes sociaux en 2008 et en 2009.
Le point faible de ce projet de loi concerne l'accès aux assurances complémentaires santé. Il y a de petits salaires dans notre pays et le coût d'une mutuelle n'est pas négligeable. À quel niveau sera fixé l'aide à la souscription d'une complémentaire santé ?
Par ailleurs, la Confédération du logement et du cadre de vie a relevé de considérables différences dans les intentions des complémentaires santé, certains organismes envisageant une augmentation tarifaire nulle, d'autres s'apprêtant à demander une augmentation allant jusqu'à 8 ou 9 %. On peut se demander si certains organismes ne vont pas rejeter sur le Gouvernement la responsabilité d'augmentations voulues par eux seuls, alors même qu'ils ne prennent pas en charge le traitement des ALD et que les réserves de certaines mutuelles sont très importantes. Je souhaite que les augmentations à venir ne dépassent pas 4 % et, avec le président du Conseil économique, social et environnemental, je réunirai les présidents des mutuelles pour le leur dire.
D'autre part, compte tenu du poids des corporatismes, on ne parviendra à améliorer l'efficience de notre système d'assurance sociale qu'en responsabilisant le niveau régional. Les différences régionales en matière de dépenses de santé, une fois corrigé l'effet vieillissement, laissent stupéfait. Pourquoi, en effet, ne pas en venir à des objectifs régionaux ?
Enfin, à quel niveau sera fixé l'allègement des charges qui pèsent sur le travail dans l'agriculture ? Comment distinguera-t-on les zones de maraîchage et d'arboriculture, où le poids du travail est important, des zones de grande culture dont la richesse n'est pas négligeable ?
Plusieurs questions ont porté sur le risque de dégradation de la croissance et sur le bien-fondé des hypothèses macro-économiques qui sous-tendent ce projet de loi. Or, le Gouvernement a toujours fait en sorte de présenter des hypothèses crédibles et réalistes. Nous étant réunis en août, nous avons ramené de 2,25 % à 1,75 % notre prévision de croissance pour 2012. Mais, en cette période de fortes turbulences, aucun économiste n'est en mesure de dire avec précision quel sera ce taux en décembre 2012.
La France s'est engagée à réduire le déficit de ses comptes publics et cet engagement sera tenu quelle que soit l'évolution de la croissance. L'objectif que nous nous sommes fixés est de réduire de 1,1 % le déficit structurel – c'est ce à quoi tendent 90 % des mesures prises cette année. Aussi, à supposer que, par malheur, la croissance soit moindre que prévue, l'objectif demeurerait accessible. Mais, à ce jour, rien ne nous pousse à revoir les prévisions faites il y a quatre semaines. J'observe que nos voisins allemands ont une perspective de croissance similaire à la nôtre.
Monsieur Bur, la taxation du vin demeurera, telle qu'elle est, supérieure à celle qui pèsera sur les boissons à sucres ajoutés. Je vous invite par ailleurs à vous reporter aux études de l'Organisation mondiale de la santé qui montrent que la mesure proposée est, des mesures de prévention de l'obésité, la meilleure en termes de coût-efficacité. Je sais que les mesures de fiscalité comportementale, encore peu courantes, frappent les esprits et je me souviens que lorsqu'un ministre de la santé courageux a pris, il y a plusieurs années la décision d'augmenter passablement le prix du tabac, les commentaires n'ont pas manqué. Par cette mesure, nous envoyons un signal fort.
Le Président de la République souhaite que le coût du travail agricole diminue pour préserver la compétitivité de notre agriculture par rapport à celle de nos voisins. Nous travaillons à réduire les charges sociales sur le travail agricole, et cette réduction pourrait trouver son financement – mais ce n'est pas encore tranché – dans une augmentation de la taxe sur les boissons à sucres ajoutés, dans la limite de deux fois le taux de taxation initialement considéré, et sans qu'il soit question d'en élargir l'assiette. Certains de vos collègues sont associés à cette réflexion, qui aboutira à une initiative parlementaire.
J'insiste sur le fait que tous les secteurs de notre agriculture ne sont pas dans la même situation ; le Gouvernement doit donc s'attendre à des réactions contrastées.
Nous en sommes conscients. Monsieur Door, la Commission européenne a effectivement demandé que les mutuelles opérant en France soient désormais soumises à l'impôt sur les sociétés. Pour répondre à cette obligation, mon collègue François Baroin et moi-même travaillons avec les organismes concernés à l'instauration d'un mécanisme que nous souhaitons rendre le plus progressif possible ; nous en débattrons d'ici la fin de l'année.
Monsieur Jacquat, le déficit de la branche vieillesse sera de 5,8 milliards d'euros en 2012 ; en l'absence de réforme des retraites, il aurait été de 12 milliards. Le recul de l'âge du départ en retraite représentera pour le régime général une économie de 1,5 milliard d'euros en 2012 et de 9,1 milliards en 2018.
Monsieur Préel, le déficit de la CNAV et du FSV pour 2012 et jusqu'en 2018 est préfinancé par la CADES, comme prévu dans le cadre de la réforme des retraites. Il est encore de 8 milliards d'euros pour l'assurance maladie et la branche famille en 2012, mais nous l'avons beaucoup réduit et nous travaillons à une trajectoire crédible de retour à l'équilibre à l'horizon 2015.
Madame Touraine, le Comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie, ayant examiné la construction de l'ONDAM pour 2012, a rendu son avis hier, et le juge crédible. Que les ONDAM 2010 et 2011 aient été respectés montre que c'est possible, et que nous tenons nos objectifs.
Madame Vasseur, les 5,2 milliards d'euros de recettes nouvelles bénéficieront au régime général. À la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) iront 4 milliards d'euros par le relèvement du taux de la taxe sur les conventions d'assurance, la hausse de deux points du forfait social, les taxes de nature comportementale et l'affectation de fractions importantes de certains prélèvements. La Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), pour 800 millions d'euros, et la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), pour 400 millions d'euros, bénéficieront également du produit des mesures présentées : la moitié du prélèvement sur les revenus du capital sera destinée à la CNAV ainsi qu'une fraction de la réintégration des heures supplémentaires dans le calcul de l'allégement Fillon. La CNAF bénéficiera aussi de cette dernière mesure, et de l'assujettissement à la CSG du complément de libre choix d'activité et du complément optionnel de libre choix d'activité.
Le Gouvernement a retenu une hypothèse de croissance de la masse salariale de 3,7 % en 2011 en tenant compte des derniers relevés de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), qui font état d'une croissance de la masse salariale de 3,5 % à l'issue du premier semestre ; cela montre que notre hypothèse est crédible et prudente. Pour 2012, nous avons retenu une progression de 3,7 % conforme à l'évolution du PIB en valeur, ce qui correspond à une élasticité proche de l'unité qui a été constatée sur longue période.
J'ajoute que présenter plusieurs scenarii d'hypothèses macroéconomiques a pour inconvénient de compliquer singulièrement la lecture des comptes.
Enfin, Mme Fraysse a estimé qu'il serait équitable de rapprocher les taux de taxation des revenus du travail et de ceux du capital. C'est ce que nous faisons : nous aurons rapproché de 4,2 % en un an le niveau de taxation des revenus du patrimoine – passé de 31,3 % en 2010 à 35,5 % en 2012 – de celui des revenus du travail. C'est une étape notable dans l'harmonisation de la fiscalité.
Je rappelle que la plus haute tranche d'imposition sur les revenus est fixée à 41 %.
J'ajoute que nous évoluons dans un monde ouvert où nous sommes, hélas, les vice-champions internationaux tant pour le coût du travail que pour la taxation du capital.
L'instauration du fonds d'intervention régional, monsieur Bur, est une première étape. Beaucoup d'agences régionales de santé souhaitent que les dotations MIGAC y soient intégrées.
Il reste à corriger les inégalités régionales : pourquoi un assuré social de Bretagne dépense-t-il beaucoup moins qu'un assuré de Provence-Alpes-Côte d'Azur ? Il faut une plus grande équité dans l'allocation des moyens.
On en revient au débat sur la mise en place d'objectifs régionaux, qui demande de la circonspection, car si certaines régions dépensent moins que d'autres, la question peut être posée de savoir s'il est normal de demander à toutes la même contribution. Or notre système de santé est fondé sur la solidarité nationale.
En ma qualité d'élu de la région Picardie, je puis vous parler savamment des différences d'espérance de vie selon les régions et des différences de besoins en matière sanitaire et sociale. Ce débat, délicat, doit être appréhendé dans tous ses aspects au risque, sinon, de susciter des lignes de fracture.
S'agissant de l'hospitalisation des personnes âgées, le Gouvernement déposera un amendement tendant à engager une expérimentation en vue d'une meilleure coordination des soins destinés aux personnes âgées, en ville et à l'hôpital.
Pour ce qui est du médicament, monsieur Door, les moyens de la nouvelle agence en charge du médicament seront désormais garantis par l'assurance maladie au lieu que, comme par le passé, ils lui soient directement alloués par l'industrie pharmaceutique. Cette mesure a été largement approuvée, et il faudra désormais veiller à ce que les moyens consacrés à la sécurité du médicament soit sanctuarisés à l'avenir.
Je suis favorable au renforcement des liens fonctionnels entre la Commission de la transparence et le Comité économique des produits de santé (CEPS) mais je suis opposé à la fusion des deux organismes, car nous nous trouverions alors pieds et poings liés pour ce qui est de la fixation des prix quand l'autorisation de mise sur le marché a été délivrée au niveau européen. J'ai décidé, vous le savez, qu'il n'y aurait plus d'admission au remboursement dès lors que le nouveau médicament proposé ne présenterait pas d'avantage par rapport aux médicaments existants ; les choses seraient beaucoup plus compliquées si les deux organismes étaient fusionnés.
Pour remédier aux problèmes que nous connaissons en matière de démographie médicale, il faut continuer de relever le numerus clausus mais aussi, singulièrement pendant les cinq années difficiles à venir, donner envie à des médecins proches de l'âge de la retraite de continuer à exercer sur la base du volontariat et, à cette fin, mieux faire connaître les dispositifs de cumul emploi retraite qui les concernent et notamment le système de cotisation forfaitaire. Au-delà, l'un des motifs de la réticence des médecins à exercer plus longtemps, même à temps partiel, semble être qu'ils redoutent la lourdeur de la charge administrative ; aussi serait-il sans doute judicieux d'adapter à leur cas le statut prévu pour les médecins remplaçants.
Les mises en réserve faites pour donner suite aux recommandations du rapport Briet proviennent pour 300 millions d'euros des aides à la contractualisation régionale, pour 50 millions des aides à la contractualisation nationale, et pour 50 millions des crédits issus du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP). Nous attendons de savoir quelle aura été la consommation effective de crédits pour « dégeler » tout ce qui peut l'être.
Les retraites seront revalorisées du niveau de l'inflation, conformément aux dispositions de la loi Fillon de 2003.
Madame Touraine, où est-il fait mention dans le projet d'un recul de la part obligatoire de la prise en charge ?
La Commission des comptes de la santé a montré qu'il n'en est rien. Il y aurait eu recul si nous avions augmenté le ticket modérateur, mais nous avons écarté cette mesure. Au contraire, la part des affections de longue durée (ALD) progresse sans cesse, et avec elles la part de la prise en charge par les régimes obligatoires.
Tout dépend de quoi l'on parle. Si l'on choisit des montures de lunettes au prix très élevé, il est certain que le reste à charge sera élevé. Mais l'on ne peut nier ce qui a été constaté par une estimation indépendante et objective.
En revanche, les organismes d'assurance complémentaires ne sont pas obligées d'augmenter leurs tarifs. Sinon, comment expliquer que la GMF-Santé n'éprouve pas le besoin de le faire cette année ? Pourquoi, ces quatre dernières années, le poids de la fiscalité n'a-t-il représenté qu'un tiers de l'augmentation du coût des assurances complémentaires ? Le Gouvernement a bon dos ! La transparence sur les tarifs doit s'imposer, tout comme la modération en ce moment difficile.
Nous sommes prêts à faire davantage pour l'aide à la souscription d'une complémentaire santé. Cela étant, une augmentation qui resterait virtuelle n'aurait que peu d'intérêt. Or, l'aide n'atteint pas tous ceux auxquels elle est destinée ; nous devrons trouver les moyens de mieux faire connaître ce dispositif et de toucher effectivement les populations visées.
Je l'ai dit, madame Fraysse, le premier poste d'économie sera le médicament. Déjà, le déficit se réduit, ce qui montre que la tendance est bonne.
Monsieur Jacquat, l'effectif des sportifs de haut niveau potentiellement concernés par la validation gratuite de trimestres de cotisations à l'assurance vieillesse est compris entre 6 500 et 7 000 personnes ; les sportifs éligibles sont environ 3 000. Le coût prévisionnel du dispositif est évalué entre 6 et 9 millions d'euros, en fonction du niveau de ressources de chacun. Ce coût de la mesure sera compensé par l'État à la CNAV sur le budget du ministère des sports. La disposition entrera en vigueur le 1er janvier 2012.
Enfin, selon moi, s'en prendre à la fraude, c'est s'en prendre tant à celui qui a bénéficié d'une prestation indue qu'à celui qui a permis qu'il en soit ainsi.
M. Yves Bur et M. Jean-Luc Préel m'ont interrogée sur la fongibilité asymétrique dans le domaine médico-social. Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) a, en effet, signalé une marge de manoeuvre de 2 milliards d'euros dans ce domaine ; autrement dit, on pourrait pratiquement financer la réforme de la politique de la dépendance en recherchant simplement une plus grande efficience.
La fongibilité des crédits de l'ONDAM médico-social entre régions est un objectif fondamental pour la CNSA ; il faudra à cette fin parfaire les liens entre cette caisse et les agences régionales de santé. Mais il faut d'abord asseoir l'administration sanitaire et médico-sociale, à travers ces dernières, entrées en fonction il y a dix-huit mois seulement. Après que les agences auront construit leurs projets régionaux de santé, nous pourrons envisager la création d'objectifs régionaux de dépenses d'assurance maladie.
Je signale que l'une de nos expérimentations tend à valoriser le moindre recours à l'hospitalisation. C'est aussi un indicateur de qualité qui pourrait être retenu pour les EHPAD. J'ai visité, sans la circonscription de votre collègue Patrice Martin-Lalande, un établissement autour duquel s'est bâti tout un réseau ; on obtient des résultats remarquables, qui permettent de réduire le recours à l'hospitalisation.
Mme Bérengère Poletti m'a posé plusieurs questions. Pour l'ONDAM 2010, la restitution de 100 millions d'euros qui a eu lieu n'était pas un débasage, et elle n'a pas pénalisé le secteur : le taux de croissance des crédits du secteur « personnes âgées » a été de 11,2 % en 2010 par rapport à l'objectif voté en 2009. La restitution a permis la mise en oeuvre des mécanismes de solidarité de l'ONDAM.
Les 100 millions d'euros mis en réserve au titre de l'ONDAM « médico-social » 2011 ont porté pour 71,3 millions sur le plan d'aide à l'investissement (PAI) et pour 28,3 millions sur l'enveloppe « personnes âgées » de l'objectif général des dépenses médico-sociales (OGD) 2011. Il est prématuré de se prononcer sur le dégel de cette réserve de précaution, puisque nous ne connaissons pas le niveau d'exécution de l'objectif général de dépenses 2011. Si l'évolution est en ligne avec les prévisions, je suis favorable à ce que les crédits soient rendus disponibles début 2012, en priorité pour couvrir un éventuel dépassement de l'objectif 2011 qui serait constaté dans les traitements de fin d'exercice, puis pour compléter le plan d'aide à l'investissement en sus des 50 millions d'euros évoqués.
La médicalisation des EHPAD est un axe important de la politique médico-sociale. Elle consiste à augmenter de façon importante – de l'ordre de 20 % – leurs dotations « soins ». Nous mobiliserons 140 millions d'euros pour médicaliser plus de 83 000 places nouvelles, soit 45 % des places qu'il reste à « pathossifier » fin 2011.
À Mme Poletti et à Mme Vasseur, j'indique que la publication du décret « tarification » a été repoussée. Après une phase de réflexion sur les indicateurs pertinents qui peuvent servir de base à la modulation des dotations, des expérimentations vont être conduites dans les établissements volontaires. Nous visons l'amélioration de la qualité de la prise en charge et l'efficience de chaque euro engagé. Ces objectifs s'accompagneront d'une plus grande transparence, avec la création d'un site Internet spécialisé. Nous en revenons donc aux préconisations du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.
Une réforme de la tarification des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) est également nécessaire pour fonder sur des critères objectifs la répartition des 1,5 milliard d'euros entre eux. À ce jour, les écarts de dotations vont de 1 à 3, et la tarification n'incite vraiment pas à la bonne gestion car elle ne varie pas, qu'il s'agisse de patients lourdement ou faiblement dépendants. Je souhaite que ce travail aille à son terme, mais il ne faut pas miser dès 2012 sur une réforme qui risquerait de déstabiliser le secteur.
S'agissant de l'intégration des dépenses de médicaments dans le forfait « soins », l'expérimentation a été prolongée de deux années. Nous en profitons pour élargir le champ d'étude. Les établissements précédemment inclus dans l'expérimentation continuent de recevoir un forfait pour les médicaments et les agences régionales de santé ont reçu l'autorisation de verser des forfaits médicaments pour les trois derniers mois de l'année. Nous avons souhaité analyser finement l'impact de l'expérimentation sur les prescriptions médicamenteuses, la prise en charge des résidents et la soutenabilité à moyen terme des dépenses de médicament d'une pharmacie à usage intérieur. Seront aussi pris en compte les travaux des agences et des caisses primaires dans le cadre de la gestion des risques. Ainsi se révèleront les forces et les faiblesses de chaque pratique. Tout sera achevé avant la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Une réunion du comité de suivi va faire le point sur l'impact des travaux engagés.
Vous m'avez aussi interrogée sur le plan solidarité grand âge (PSGA). Dans ce plan ont été inscrites 90 500 places nouvelles dont 59 % pour faciliter le maintien à domicile et quelque 40 % pour les EHPAD. Le calibrage initial du plan a été révisé plusieurs fois. Au 31 décembre 2010, 87 % des places avaient déjà été notifiées, ce qui est tout à fait considérable. Je tiens à votre disposition les données détaillées.
J'en viens à l'articulation entre le plan d'aide à l'investissement (PAI) annoncé pour les secteurs des personnes âgées et handicapées et les plans « solidarité grand âge » et « handicap ». Les 50 millions d'euros du plan d'aide pour 2012 prolongeront l'initiative à l'origine de laquelle est Mme Desmarescaux, alors sénatrice : à son initiative, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, 4 % de la recette de la contribution solidarité autonomie (CSA) avait été affectés au nouveau plan d'aide. Le lancement de celui-ci permettra de satisfaire des besoins clairement identifiés : la maîtrise les tarifs d'hébergement ; la poursuite des investissements pour achever le processus de rénovation du parc existant ; l'amélioration des conditions d'accueil qui demeurent très difficiles dans certains EHPAD. Le plan permettra enfin de compléter les moyens dévolus aux créations de places nouvelles prévus par le plan handicap et ainsi d'améliorer la qualité de l'accueil des personnes atteintes de handicap.
Comment se répartissent les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de la CNSA pour 2012 ? La loi de financement pour 2011 a enrichi l'annexe 7 d'une information sur les objectifs d'engagements prévisionnels et ceux notifiés les deux années précédentes, et sur la consommation de l'objectif général des dépenses qui en résulte. J'ai retenu 20,4 millions d'euros d'enveloppes anticipées dont près de 10 millions en 2011, qui permettront l'achèvement des notifications des crédits du plan solidarité grand âge, et 363 millions d'euros d'enveloppes anticipées –- dont 140 en 2011 et 223 en 2012 – afin d'achever la notification des créations de places nouvelles dans les établissements et services accueillant les personnes atteintes de handicap. En outre, je l'ai dit, 140 millions d'euros de crédits de médicalisation des EHPAD pour 2012 seront également notifiés dans les tout prochains jours.
Je remercie Mme Valérie Rosso-Debord pour son appui. Oui, la réforme de la dépendance continue, et le taux de progression de l'ONDAM médico-social en direction des personnes âgées – 6,3 % – est particulièrement éloquent, sans compter les 50 millions d'euros destinés aux services à domicile qui figurent dans le projet de loi de finances.
Madame Pinville, j'ai entamé une série d'entretiens avec les partenaires sociaux pour faire le point sur leurs souhaits en matière de réforme du congé parental ; cela se fait bien sûr en parfaite coordination avec le ministre du travail.
La France est souvent citée en exemple pour l'offre d'accueil des jeunes enfants. La convention d'objectifs et de gestion 2009-2012 entre l'État et la CNAF prévoit la création de 100 000 places d'accueil collectif – cela représente un effort exceptionnel de 1,3 milliard d'euros. Les premiers chiffres montrent que cet objectif est accessible : plus de 40 300 places ont été créées en deux ans, et nous atteindrons l'objectif fixé. L'objectif est aussi de 100 000 places pour l'accueil individuel, et cet engagement sera tenu. En 2009, 21 200 solutions nettes ont été trouvées, et 20 708 en en 2010. Nous ne baissons pas la garde.
Je rappelle enfin que la base mensuelle de calcul des allocations familiales sera revalorisée de 2,3%, ce qui représente un effort de 630 millions d'euros au bénéfice des familles.
Chers collègues, je reste saisi de onze demandes de parole, que l'horaire m'interdira de satisfaire. Puisqu'il est prévu que les ministres soient à nouveau parmi nous mercredi prochain pour évoquer la mise en oeuvre de la loi de financement pour 2011, je vous propose de reporter ces interventions à ce jour, exception étant faite pour Jean Bardet, qui m'a fait savoir qu'il sera empêché la semaine prochaine.
Je vous remercie. Le dossier médical partagé (DMP) a un double intérêt – médical bien sûr, mais aussi économique, puisque l'on estime que sa généralisation permettrait de réduire d'un tiers les examens radiologiques et biologiques. La loi « Hôpital, patients, santé et territoire » a prévu que ces informations puissent être stockées sur support amovible. On semble pourtant continuer de privilégier un système centralisé qui ne suscite pas l'enthousiasme au sein de la communauté médicale et qui vient d'être abandonné en Angleterre. Quel est l'état d'avancement des décrets relatifs au DMP sur support amovible qui devaient être publiés le 12 octobre au plus tard et qu'en sera-t-il de l'expérimentation prévue pour s'engager avant fin décembre ?
Monsieur Bardet, l'idée d'un dossier médical partagé stocké sur clef USB suscite toujours la même réticence car la question de la protection du secret médical continue de se poser. À titre personnel, je ne suis toujours pas entièrement convaincu. En vérité, si les choses étaient à refaire, je pencherais en faveur d'un système beaucoup plus souple que celui en faveur duquel je me suis laissé convaincre par les experts. Les décrets prévus ne seront pas prêts à la date prévue mais ils le seront pour la fin de l'année. La base retenue pour le DMP – le volontariat – est sans doute la plus prometteuse mais encore une fois, je ne suis pas encore tout à fait sûr qu'un système plus simple et plus souple ne serait pas tout aussi adapté.
Je saisis l'occasion pour dire un mot des déremboursements, question sur laquelle nous gagnons en maturité. Je puis vous annoncer que l'arrêté qui emporte le déremboursement de 26 médicaments vient d'être signé, et qu'une nouvelle liste de 38 médicaments suivra. Je n'attends pas d'économies de ces déremboursements, car il y aura sans doute des reports de prescriptions, mais je me félicite que la nouvelle méthode que j'appelais de mes voeux depuis janvier se mette en place. Lorsque la Cour des comptes ou des experts appellent au déremboursement de médicaments à service médical rendu insuffisant, tout le monde applaudit, mais quand le Gouvernement le fait, des clameurs s'élèvent ! Mieux vaut pourtant rembourser des médicaments efficaces que d'autres qui ne le sont pas. Mais la mesure conduit à une difficile modification des habitudes. Aussi s'appliquera-t-elle le 1erdécembre prochain, ce qui donnera à la Haute Autorité de santé le temps de formuler des recommandations de prescriptions alternatives.
Je vous remercie. Comme nous en sommes convenus, la suite de cette audition aura lieu mercredi prochain à 11 h 30.
La séance est levée à quatorze heures quarante.