Chers collègues, je vous informe que nous avons reçu, en application de l'article 12 de la LOLF, trois projets de décret portant transfert de crédits. Ces documents sont à votre disposition.
J'ai le plaisir de souhaiter en votre nom la bienvenue à M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes, et à M. Georges-François Hirsch, directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles au ministère de la Culture et de la communication.
Sur proposition de notre rapporteur spécial, M. Richard Dell'Agnola, la Commission a souhaité faire le point sur la politique de l'État dans le domaine du spectacle vivant. Les enjeux budgétaires paraissent comparativement modestes, puisque le périmètre de l'enquête n'a englobé que – si l'on peut dire – 350 millions d'euros en 2008. Mais ces crédits, qui représentent au demeurant une part significative des subventions du ministère, ont un fort effet de levier. L'intervention de l'État est déterminante dans la vie de très nombreuses troupes et salles de spectacle, ce qui lui donne une influence et une visibilité exceptionnelle.
Se pose en conséquence la question de la prévisibilité de l'action de l'État et du cadre contractuel de ses interventions.
Dans un autre domaine relevant du même ministère, celui de la communication, l'État a des interlocuteurs peu nombreux et puissants, avec lesquels la procédure du contrat d'objectifs et de moyens s'impose et a fait ses preuves. Mais, dans un secteur où les parties prenantes sont nombreuses et ont un fort enracinement local, une méthode d'intervention rationnelle est plus difficile à définir et à appliquer. L'État est-il parvenu à une méthode satisfaisante ? Non, répond clairement le rapport de la Cour. Permettez-moi de citer la lettre de transmission de M. Philippe Séguin : « Le rapport met en évidence la complexité, la fragmentation et simultanément la rigidité d'un dispositif de soutien à la création élaboré par strates successives depuis un demi-siècle. »
Le rapport souligne certes des progrès récents, mais il reste que cette situation n'est pas le gage d'une politique satisfaisante et qu'en tout état de cause elle est dommageable pour le contrôle de la représentation nationale, pour l'information des citoyens et pour l'action des artistes et organisateurs de spectacle.
Après que M. Richard Dell'Agnola, notre rapporteur spécial, aura rappelé pourquoi nous avons demandé à la Cour des comptes – que je remercie pour le panorama très complet qu'elle nous livre – de procéder à cette enquête, nous vous écouterons avec intérêt, monsieur le président, nous en exposer les principales conclusions. Ensuite, les remarques et les questions de notre rapporteur spécial nous permettront d'engager le dialogue avec M. Georges-François Hirsch sur les pistes d'amélioration de la politique du spectacle vivant, pour ce qui concerne notamment la clarification des critères d'attribution des aides, leur prévisibilité et leur contrôle dans un cadre contractuel.
Vous serez certainement amené, monsieur le directeur, à évoquer la réflexion en cours sur un sujet sensible : le rôle respectif de l'État et des collectivités territoriales. En effet, après les Entretiens de Valois dont, vu du Parlement, les conclusions n'apparaissent pas clairement, la concertation se poursuit à ce propos dans le cadre des conférences du spectacle vivant en régions.
Nous souhaitions évaluer de manière urgente la politique de l'État en matière de spectacle vivant ; nous devions pour cela être en mesure de mieux appréhender l'empilement historique des structures et des aides, ainsi qu'un certain manque de transparence et diverses insuffisances. Aussi nous a-t-il paru souhaitable qu'au terme des Entretiens de Valois, qui visaient à dégager de nouvelles pistes dans les relations entre l'État et les acteurs du spectacle vivant, la Cour des comptes enquête à ce sujet.
Le président Didier Migaud l'a rappelé, l'étude réalisée par la Cour porte sur quelque 350 millions d'euros. Si la somme est relativement modeste, ces subventions représentent 44 % des dépenses d'intervention de la mission Culture; leur taux de déconcentration, sans cesse croissant, s'est établi à 84 % en 2008. Mais, pour mieux situer le rôle du ministère en faveur du spectacle vivant, il convient de rapporter ces 350 millions de subventions aux 2,9 milliards d'euros de dépenses effectuées dans le même cadre par les collectivités territoriales, qui jouent donc un rôle éminent en ce domaine.
Une plus grande transparence devrait prévaloir dans l'action du ministère et il serait bon de comprendre quelles rigidités empêchent une diffusion satisfaisante du spectacle vivant sur l'ensemble du territoire.
Au regard de la somme en jeu – moins de 300 millions d'euros –, le sujet peut sembler d'importance modeste sur le plan financier, mais ce n'est pas parce que les montants sont faibles que les choses sont simples. Le spectacle vivant est un domaine compliqué parce qu'un nombre considérable d'équipes et de lieux se trouvent être les bénéficiaires potentiels ou réels d'aides de l'État. Je mettrai l'accent sur ce qui constitue l'essentiel du contenu de notre rapport.
Ainsi que vous l'avez souligné, il convient de mettre en regard les quelque 300 millions de subventions provenant du ministère de la culture et la dépense, grossièrement estimée à 2,9 milliards d'euros, des collectivités territoriales dans le même domaine. Étant donné ce rapport de un à dix au moins, il nous a paru impossible d'enquêter sans nous rendre dans quatre régions. Nous avons choisi les régions Bretagne, Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes, et Poitou-Charentes – dans un souci d'équilibre qui ne vous échappera pas. Les quatre directions régionales des affaires culturelles (DRAC) considérées dispensent ensemble 70 millions d'euros de crédits d'intervention, soit un quart des crédits gérés à ce titre au sein des directions régionales, le reste étant géré par la direction centrale. Outre les directeurs régionaux, nos enquêteurs ont rencontré deux agences régionales du spectacle vivant et les responsables de six lieux ou équipes artistiques. Je ne prétends pas que nous ayons pu ainsi connaître intimement le spectacle vivant, mais je tenais à souligner que nous n'avons pas mené un travail exclusivement parisien ni bureaucratique.
Le rapport étudie successivement la stratégie de l'État et son cadre, les critères d'attribution des subventions, la multiplicité des sources de financement. Nous soulignons enfin les difficultés dans l'évaluation des résultats – si ce n'est une absence complète d'évaluation. Il faut dire qu'en cette matière la chose est particulièrement compliquée.
Le premier constat est que l'État a, depuis longtemps, une stratégie claire qui a permis de développer de manière remarquable l'offre culturelle sur tout le territoire au cours des trois ou quatre dernières décennies. Ses objectifs, repris dans le projet annuel de performances, consistent à soutenir la création, favoriser la diffusion des oeuvres et donner des bases économiques et professionnelles solides à un secteur dont l'économie se caractérise par de faibles besoins de trésorerie, mais aussi par des coûts fixes élevés et d'importants aléas.
Cette politique a permis l'existence d'une offre abondante et désormais bien répartie sur tout le territoire national, puisque toutes les régions, à l'exception de la Picardie, sont dotées d'un centre dramatique national, et que les deux tiers des départements accueillent une scène nationale. La pratique professionnelle s'est développée : entre 1994 et 2004, la population des comédiens a doublé pour atteindre 25 000 personnes réparties au sein de 1 500 compagnies, et la France comptait 25 000 musiciens professionnels en l'an 2000, soit quatre fois plus qu'en 1980.
Les subventions accordées par l'État visent à soutenir soit des structures, c'est-à-dire des lieux de représentation, soit des compagnies. L'aide aux structures, qui représente 70 % des crédits, est distribuée par le biais de onze labels établis par l'État, dont quatre seulement sont encadrés par des textes juridiques contraignants. Les aides aux équipes comptent donc pour 30 % des crédits, dont près d'un cinquième est attribué directement par l'administration centrale, le reste l'étant par les DRAC.
Le rapport met ensuite en évidence la complexité, la fragmentation et simultanément la rigidité d'un dispositif de soutien à la création élaboré par strates successives depuis cinquante ans. Il faut distinguer la manière dont les choses se passent à l'administration centrale, d'une part, et dans les DRAC, d'autre part.
La direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles du ministère de la Culture et de la communication attribue des aides à des équipes indépendantes. Ces aides sont de deux catégories. Des subventions, dont le montant s'est établi à 4,8 millions d'euros en 2008, sont d'abord versées à d'anciens directeurs d'institutions dramatiques et chorégraphiques. Ils reçoivent cette aide à la création à dater de leur sortie de fonctions et jusqu'à la fin de leur activité professionnelle. Ce dispositif a pour objectif de permettre aux anciens directeurs de poursuivre leur activité créatrice avec leur compagnie, et aussi de réintégrer le régime d'assurance sociale des artistes. En 2008, une trentaine de metteurs en scène et de chorégraphes bénéficiaient de ce mécanisme, dont il convient de souligner qu'il est réservé aux artistes reconnus. Par ailleurs, six ensembles musicaux distingués pour leur rayonnement bénéficient chacun d'une subvention récurrente, pour un montant total de 3 millions d'euros en 2008. La direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles a engagé une réforme qui prévoit des modalités progressives de réduction des aides d'État aux directeurs sortis d'institutions.
Outre ces aides directes discrétionnaires, d'autres aides sont attribuées par l'administration centrale avec l'intervention de commissions nationales. Nous observons que le fonctionnement de ces commissions est perfectible mais, surtout, qu'elles ne sont pas toujours consultées. Ainsi, en 2008, en matière de commandes musicales, alors que 58 dossiers avaient été retenus sur 128 présentés, 22 autres commandes ont été passées sans que la commission compétente ait été consultée.
La direction cherche aujourd'hui à se recentrer sur sa fonction de pilotage en transférant à des opérateurs nationaux la responsabilité d'attribuer les aides qui ne peuvent pas être déconcentrées car le nombre de bénéficiaires potentiels dans chaque région est très faible. C'est ainsi que l'attribution de l'aide à la création d'oeuvres dramatiques sera transférée au Centre national du théâtre.
Dans les régions, le paysage de l'offre artistique est fortement modelé par l'histoire. Dans le Nord-Pas-de-Calais par exemple, les collectivités territoriales ont investi le domaine du spectacle vivant depuis les années quatre-vingt pour en faire un élément d'attractivité de leur territoire. Les chiffres traduisent ce dynamisme : la région compte ainsi sept scènes nationales contre cinq en Rhône-Alpes, mais une seule scène conventionnée, contre dix en Rhône-Alpes.
Nous avons aussi observé que les aides accordées localement par les DRAC ne sont pas toujours parfaitement connues par l'échelon central. Ainsi, la DRAC de Bretagne a choisi d'accorder des aides à des scènes de territoire, donnant ainsi en quelque sorte un label d'État au niveau régional dans des communes d'au moins 15 000 habitants. De même, en Poitou-Charentes, six théâtres de ville, par ailleurs soutenus par la région, bénéficient de subventions de la DRAC.
L'enquête a par ailleurs mis en évidence le fait que les DRAC ont des stratégies de subventions croisées. L'État aide ainsi, à hauteur de 1 million d'euros, l'Opéra de Lille, lequel achète lui-même pour 700 000 euros de spectacles à l'ensemble Le Concert d'Astrée, alors que cet ensemble musical est lui-même subventionné par l'État à hauteur de 200 000 euros. Interrogée sur les raisons de ce financement croisé, la DRAC fait valoir que réduire la subvention accordée à l'Opéra diminuerait l'autonomie de programmation de la structure et que, inversement, augmenter la subvention de l'Opéra au détriment de l'ensemble musical affaiblirait l'équipe artistique.
Sur le plan local, l'attribution des aides repose sur des conseillers sectoriels du spectacle vivant, compétents mais dont l'ancienneté est parfois grande – certains sont en place depuis vingt ans. Ils sont aidés dans leurs choix par des commissions consultatives d'experts indépendants, dont les avis ne sont pas publics, même si leurs critères d'exigence artistique sont connus. Nous avons souligné les faiblesses de ce dispositif et indiqué quelques pistes d'amélioration. Le ministère s'est déclaré favorable à ce que la sélection des projets se fasse en fonction de critères objectifs préalablement annoncés ; à ce que le vote des experts sur les composantes de l'évaluation artistique soit connu ; à ce que les commissions émettent un « avis artistique global et synthétisé » qui pourrait être communiqué aux demandeurs, alors qu'aujourd'hui les choses se passent par le biais d'entretiens personnels.
Il ne faut pas déduire de ce que je viens de rappeler qu'il n'y aurait pas de sélectivité des aides accordées par l'État : la sélectivité est avérée. Ainsi, en Rhône-Alpes, 101 compagnies et 45 structures sont aidées sur un total de 650 compagnies et 300 lieux, soit une proportion de 15 %. En Poitou-Charentes, seules 6 % des équipes artistiques bénéficient d'une aide de l'État. Il ne faut donc pas sous-estimer l'effet sélectif du mécanisme, même si son objectivité et sa transparence pourraient, à l'évidence, être améliorées.
La Cour a également observé que, pour des raisons qui tiennent à la qualité des hommes et à la singularité de ce métier, l'État éprouve de grandes difficultés à appliquer les règles de renouvellement des mandats des directeurs de centres dramatiques nationaux. Alors que la durée maximale de présence est normalement limitée à trois mandats, soit neuf ans, plusieurs directeurs sont en place depuis dix ans, voire quinze ans.
Autre constat, déjà signalé : le ministère de la Culture et de la communication n'a pas de vision précise et complète des dépenses des collectivités territoriales en matière de spectacle vivant. Les liens avec l'État sont peu formalisés et l'enquête n'a pas fait apparaître qu'il y ait eu un partage des rôles entre l'État et les collectivités locales, alors même que le cofinancement est la règle, puisque la part de l'État représente moins du tiers des subventions publiques accordées. Dans les quatre DRAC étudiées, 94 % des compagnies dramatiques aidées par l'État reçoivent aussi des financements de la région, 72 % en reçoivent d'un département et 62 % de la commune. La même remarque vaut, à quelque chose près, pour les compagnies chorégraphiques et pour les ensembles musicaux.
Notre dernier constat est celui de l'incertitude quant aux résultats de cette politique, incertitude que les Entretiens de Valois ont parfaitement mise en évidence en suggérant la création d'un observatoire du spectacle vivant. Actuellement, il est difficile de concilier les objectifs assignés à la politique du spectacle vivant, qui sont parfois contradictoires. Inciter à une création de qualité peut pénaliser l'effort de diffusion et de restructuration si l'État préfère aider les projets plutôt que les structures. Si l'on souhaite privilégier une politique de structuration et de professionnalisation, il faut être plus sélectif et donc aider moins de projets.
Pour ce qui est de l'objectif de fréquentation du public, le rapport fait apparaître que, si les crédits ont augmenté d'environ 20 % entre 1997 et 2007, la fréquentation n'a augmenté que de 1 % pendant la même période.
Pour finir, je mettrai l'accent sur trois recommandations que la Cour soumet à votre réflexion.
La première porte sur la stratégie de l'État. Depuis quelques années, le ministère a dit vouloir réorienter sa stratégie pour favoriser la diffusion d'une part, le renforcement de l'économie du secteur d'autre part. Mais nous avons constaté que cette orientation peine à se traduire dans les répartitions budgétaires ; ainsi, l'aide aux structures chargées de la diffusion était en recul sur la période 2005-2008. Il nous paraît nécessaire que l'État repense son rôle pour tirer les conséquences du soutien croissant des collectivités territoriales et qu'il recentre ses interventions sur l'objectif qualitatif d'innovation et de diversité de la création, en favorisant la diffusion.
La création d'un dispositif national indépendant d'observation et d'évaluation du spectacle vivant dont les travaux fourniraient les éléments de référence indispensables à la rationalisation de la carte des labels doit se faire sans délai. Ce serait un levier utile pour une politique de labellisation. J'appelle votre attention sur ce sujet compliqué. En France, un artiste qui cherche une subvention commence par la demander à l'échelon local, avant de réitérer sa demande à l'échelon départemental et régional, l'aide de l'État représentant en quelque sorte une consécration. Il serait souhaitable de découpler le label, par lequel on reconnaîtrait la qualité artistique, du financement. Toutefois, ayant entendu les quatre DRAC et m'adressant à des élus, j'observe que l'opération, qui paraît simple dans son principe, est difficile à mettre en oeuvre compte tenu de l'attachement manifeste à l'idée que, lorsque l'État apporte un label, il ne doit pas se contenter de n'apporter que cela.
Deuxième recommandation : renforcer la lisibilité et la transparence de l'action à l'égard de la représentation nationale. La présentation des dispositifs d'aide dans les projets annuels de performances et dans les rapports annuels de performances est en effet très complexe, ventilée en catégories de dépenses peu explicites, dont le périmètre est instable dans le temps. Il est parfois difficile, en dépit des efforts du rapporteur spécial, de rapprocher les données budgétaires des éléments figurant dans les réponses aux questions parlementaires, et nous y avons passé beaucoup de temps. Enfin, il serait utile que les documents budgétaires comme les réponses aux questionnaires budgétaires comportent davantage d'éléments de contexte, de nature à mieux éclairer le débat public sur les enjeux liés aux aides de l'État au spectacle vivant.
La troisième recommandation, probablement la plus importante, porte sur le financement partagé entre l'État et les collectivités locales de la politique publique du spectacle vivant. Lors de son audition par la Cour, le directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles a souligné que deux éléments pouvaient permettre d'espérer une évolution. Ainsi, la situation financière plus difficile des collectivités locales pourrait être l'occasion de réfléchir à une meilleure allocation des ressources par les différents financeurs publics. Mais cela suppose, dans le prolongement des Entretiens de Valois, l'installation des conférences régionales du spectacle vivant, lieux d'élaboration des objectifs de cette politique partagée. C'est là un des moyens permettant de favoriser la rationalisation de la carte des labels du spectacle vivant.
J'indique pour conclure qu'au cours de la contradiction conduite avec le ministère de la Culture et de la communication, deux enjeux connexes non négligeables ont été mis en évidence. Le premier a trait à la formation des artistes : il a été souligné que le développement de filières qualifiantes dans l'enseignement supérieur favoriserait la structuration de ce secteur professionnel. Le second concerne le devenir du régime d'assurance chômage propre aux artistes. L'attractivité du régime des intermittents contribue évidemment au développement de l'offre de spectacles, ce qui entraîne l'augmentation corrélative des demandes de subventions publiques ; lors des Entretiens de Valois, la directrice des Affaires culturelles de la Ville de Paris avait souligné que, pour un jeune artiste, créer une compagnie était le moyen le plus rapide de trouver une activité professionnelle.
Je vous remercie, monsieur le président, d'avoir rappelé devant nous les observations de la Cour, qui mettent en évidence ce que nous pressentions : il faut en effet réorienter les crédits, favoriser la diffusion et assurer une plus grande lisibilité de l'action de l'État. Ces nécessités sont désormais reconnues, y compris, crois-je savoir, par le directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, qui nous le dira sans doute lui-même en répondant à nos questions.
La première de mes questions porte sur la répartition des crédits en régions. La Cour des comptes note que, si l'offre de spectacle vivant est aujourd'hui abondante et territorialement mieux répartie qu'il y a vingt ans, les crédits de l'État sont principalement absorbés par les grands organismes, réseaux et institutions conventionnés, installés dans les principales villes de chaque région, si bien que « les DRAC peinent à dégager des moyens pour l'aménagement et le renforcement du tissu culturel de l'ensemble du territoire régional ». Comment mieux équilibrer l'effort financier entre les grandes structures des métropoles et le tissu culturel régional ?
Dans un autre domaine, le renforcement de la diffusion est aujourd'hui défini comme un objectif prioritaire, mais sa traduction budgétaire n'est pas encore assurée. Quelles dispositions compte prendre le ministère pour lui donner plus d'efficacité ?
D'autre part, la direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles envisage de réformer le dispositif d'aides déconcentrées aux équipes artistiques en alignant l'ensemble des disciplines sur le modèle de dispositif en vigueur pour le théâtre. Quelles seraient les modalités d'une telle réforme ?
Pourriez-vous, monsieur Hirsch, préciser l'état d'avancement et l'objectif de la réforme des commissions consultatives nationales ? La Cour signale des doublons dans les aides en certains domaines.
Elle évoque également le difficile problème de la valeur ajoutée de l'action de l'État, et dénonce l'empilement des relations contractuelles ainsi que la faible lisibilité des subventions. L'action de l'État doit-elle se concentrer sur la diffusion interrégionale, sur la diffusion internationale ? Comme le souligne la Cour, il faut mesurer l'efficacité de cette action.
Enfin, monsieur le directeur, je vous saurai gré de préciser les avantages de l'« avis labellisant », qui permettrait de reconnaître la qualité d'une démarche artistique sans impliquer obligatoirement un financement. Où en est la réflexion de la direction à ce sujet ?
Le rapport de la Cour sur la politique du spectacle vivant, dont j'observe qu'il est particulièrement critique, m'a beaucoup intéressé. Bien des élus remarquent comme moi que, si le ministère de la Culture est désormais très déconcentré, il semble ne pas avoir perçu le mouvement de décentralisation engagé au début des années quatre-vingt. Dans un domaine qui, financièrement, est largement l'apanage des collectivités territoriales, il continue à se vouloir prescripteur et prétend détenir le monopole des valeurs et du bon goût. Il y a là une sorte de fixisme, comme si le ministère, probablement toujours impressionné par l'ombre tutélaire d'André Malraux, son fondateur, n'avait pas pris la mesure de l'évolution de notre pays.
Mes constatations rejoignent celles de la Cour : la disproportion du financement du spectacle vivant est telle entre l'État et les collectivités territoriales que l'on peut légitimement s'interroger sur le bien-fondé du maintien de structures aussi lourdes que le sont les DRAC, dont les directeurs aux idées très arrêtées prennent, pas toujours dans une parfaite transparence, des décisions discrétionnaires. Dans le contexte que nous connaissons, faut-il maintenir un ministère comme celui-là ?
Chaque fois que j'entends évoquer ce genre de constat, je tremble pour les territoires ruraux. Pourtant, je le répète régulièrement, il n'y a pas de développement économique dans les déserts culturels. On voit dans le Limousin, combien, au nom de la rentabilité mesurée par le montant de l'aide rapportée au spectateur, il serait dommageable de pénaliser les territoires ruraux dont les habitants ont droit, autant que les autres, à une offre culturelle de qualité.
Les compagnies et les équipes indépendantes redoutent que la redistribution des responsabilités et des compétences entre l'État et les collectivités territoriales ne remette en cause les financements. Comment garantir, dans un tel contexte, la pluralité de l'offre et la stabilité des partenariats au service de la création et de l'éducation ?
Si les subventions croisées sont amenées à disparaître, le spectacle vivant sera plongé dans l'incertitude. En outre, la suppression de la clause de compétence générale des collectivités, dont on parle de plus en plus, pourrait faire disparaître les aides accordées, disons par les départements, et qui ne se retrouveraient pas forcément aux échelons subsistants, comme la région ou l'État. Enfin, les troupes ont besoin de visibilité à moyen terme pour pouvoir monter des projets. Elles risquent d'être à leur tour victimes des incertitudes que vont connaître les collectivités locales en matière de financement. Un mauvais portage de la part de l'État et un portage affaibli de la part des collectivités locales ne risquent-ils pas d'avoir des conséquences néfastes pour le monde de la culture ?
Nous nous interrogeons beaucoup sur les critères objectifs de qualité des spectacles et lieux qui sont soutenus année après année par les DRAC, au détriment de toute innovation provenant du niveau infrarégional. Quel est donc le rôle de l'État dans les régions ? François Goulard n'a-t-il pas raison de suggérer de passer aussi les DRAC au crible de la RGPP de façon qu'elles contribuent à une meilleure diffusion de la culture dans nos territoires ?
Le rapport souligne qu'il est très difficile de savoir quelle est la contribution exacte des collectivités territoriales à la politique culturelle. Les statistiques ne prennent en compte que les lieux et les spectacles qui bénéficient des subventions de la DRAC et des régions. Or le moment me paraît particulièrement judicieux pour informer le Gouvernement sur le rôle des collectivités dans tous les domaines, y compris culturel, car il n'a pas une conscience claire de ce qui se passe sur le terrain, ni des conséquences de ce qu'il propose.
Les moyens financiers vont manquer, ce qui se répercutera sur l'organisation d'événements culturels et sur le soutien aux troupes. Dans ce contexte, quelle fiscalité l'État va-t-il appliquer au secteur culturel, lui qui, non content d'ignorer superbement ce que les collectivités font sur le terrain, menace ce secteur de taxations supplémentaires, ce qui lui retirerait encore des moyens financiers ? Les collectivités alimenteraient ainsi les caisses de l'État en contribuant à l'essor culturel.
Je remercie notre rapporteur spécial de nous offrir l'occasion d'une audition et d'un échange intéressants.
Je commencerai par un rapide préambule sur l'évolution de la réflexion au ministère de la Culture, compte tenu des critiques que je viens d'entendre.
Depuis quelques mois, voire quelques années, les relations entre partenaires s'étaient tendues, souvent par manque de dialogue en amont. C'est la raison pour laquelle nous avons organisé les Entretiens de Valois, dont le principal but était de réunir autour de la même table les professionnels, les collectivités territoriales et l'État, pour instaurer un « trialogue » qui n'avait jamais existé sous cette forme. Un an et demi plus tard, après 450 réunions, nous avons appris à travailler ensemble et avons élaboré toute une série de préconisations. Aujourd'hui, il est acquis que l'État, les collectivités territoriales et les professionnels doivent travailler ensemble et il a été mis fin à l'opposition permanente entre les professionnels et l'État, mais aussi entre l'État et les collectivités, qui lui réclament de l'argent mais veulent qu'il les laisse tranquilles. Les professionnels sont entrés dans la boucle de la responsabilité collective.
Nous ne parlons plus, monsieur Goulard, d'État prescripteur, mais d'État partenaire. C'est l'expression – et elle est importante politiquement – que j'ai utilisée dès les premières réunions car il est clair que doit s'instaurer, entre les collectivités locales qui financent une part considérable de la politique culturelle et l'État, un partenariat. L'État souhaite, premièrement, mieux définir les règles qui président à l'attribution de subventions ou de labels, et, deuxièmement, s'entendre avec les collectivités pour savoir qui fera quoi et qui paiera quoi dans les années à venir. Enfin, il a paru nécessaire d'amorcer la réflexion plus en amont, pour éviter des décisions prises un peu à la va-vite.
Pour ce faire, Mme Christine Albanel a relancé le Conseil des collectivités pour le développement culturel. Par ailleurs, conformément aux recommandations des Entretiens de Valois, nous avons mis en place des conférences du spectacle vivant en région. Elles sont destinées à établir en amont une concertation entre l'État et les collectivités, au besoin par le biais d'une contractualisation pluriannelle dans le respect du cadre législatif. Une fois qu'ils se sont mis d'accord, les professionnels leur soumettent leurs projets pour donner corps à la politique culturelle. Au départ, ces conférences suscitaient de la condescendance, en particulier au sein des DRAC qui les considéraient comme une « usine à gaz » de plus. Maintenant que nous en sommes à une dizaine de conférences, les parties concernées sont demandeuses de ce dialogue qui se déroule, après une séance plénière qui règle les problèmes fondamentaux d'organisation, au sein de groupes thématiques. Dans un an, nous aurons une idée plus précise de ce que pourrait être une nouvelle répartition des responsabilités, sur le plan tant financier que culturel. Si nous ne réfléchissons pas en amont, les choses se passent mal. Mais l'État et les collectivités ont des intérêts en commun, et les professionnels ont aussi leur part de responsabilité dans cette politique.
Pour éviter que les grandes institutions ne soient trop avantagées par rapport aux compagnies indépendantes ou conventionnées, nous avons, dans le cadre des Entretiens de Valois, écrit ou réécrit toutes les règles du jeu des labels, y compris pour les compagnies indépendantes. Nous disposons désormais d'un « tableau de bord » pour mesurer les évolutions budgétaires et artistiques des institutions en région. Les indicateurs que nous avons définis commencent à remonter au ministère. Une des raisons de cette clarification était le rééquilibrage entre les compagnies indépendantes et les compagnies conventionnées. Nous avons fait obligation aux scènes nationales, aux centres dramatiques nationaux (CDN) et aux centres chorégraphiques nationaux (CCN) d'accueillir régulièrement des compagnies ou des artistes qui disposent donc dorénavant de créneaux dans la programmation des grandes institutions.
Par ailleurs, il est impératif de mieux diffuser les spectacles, car on produit beaucoup mais on ne diffuse pas assez.
Dans un cadre budgétaire contraint, nous avons la nécessité absolue de maintenir les aides de l'État et des collectivités en évitant les écueils du saupoudrage et de la reconduite systématique. Nous devons donc cesser d'élargir constamment le périmètre d'intervention, ce qui signifie que, si l'on décide d'aider tel ou tel projet ou label, il faut renoncer à tel ou tel autre. Cet environnement nous oblige à retrouver des marges de manoeuvre pour diffuser et produire mieux. Autrement dit, il ne doit plus être possible que deux maisons d'opéra, distantes de 300 kilomètres, jouent le même week-end deux productions différentes d'une même oeuvre – Carmen, par exemple, avec un coût important de production pour chacune de ces maisons d'opéra. A contrario, il faut encourager dix-sept maisons d'opéra à s'unir pour produire un spectacle qui sera représenté soixante-quinze fois, ce qui permettra de mieux répartir et de mieux amortir les coûts, l'ego de tel ou tel dût-il en souffrir. Il importe d'avoir davantage la main sur l'organisation, les plannings et les budgets. Nous demanderons également des projections sur trois ans concernant le budget, la fréquentation, le montage et le financement des productions, l'accueil des compagnies enfin.
Nous souhaitons réformer l'aide déconcentrée aux équipes artistiques. D'ailleurs, toutes les commissions vont être réorganisées sur de nouvelles bases. À cette occasion, nous serons obligés, pour nous conformer aux recommandations de la Cour des comptes, de procéder à une cotation des dossiers selon des critères objectifs et de rédiger des comptes rendus des décisions sous une forme préalablement définie.
Enfin, je conviens que, quels que soient leurs talents, les conseillers des DRAC doivent être plus mobiles. On ne peut pas rester vingt ou vingt-cinq ans au même poste sans nouer des amitiés, comme des inimitiés. Pour ce qui concerne les relations entre les DRAC et l'administration centrale, il faut savoir qu'elles ne sont pas toujours simples. Vous n'ignorez pas que nous envoyons chaque année aux DRAC une directive nationale d'orientation (DNO) qui constitue pour elles une feuille de route. Elles s'en servent tantôt comme levier pour appuyer leur propre politique de gestion des crédits déconcentrés, tantôt comme repoussoir en accusant l'administration centrale du pire. Au préalable, les conférences budgétaires n'ont pas toujours été très sereines, mais les choses sont en voie d'amélioration.
Quant à la valeur ajoutée de l'action de l'État, monsieur le rapporteur spécial, elle est faible en termes strictement financiers, mais, comme le rappelait le président Picq, l'État, c'est l'État. Et même les collectivités territoriales, même les élus, souhaitent avoir un label national. La question de savoir si ce label doit rester synonyme de financement national sera posée dans le cadre des conférences du spectacle vivant en région et du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel.
Le président Picq a parlé de la mobilité des directeurs des centres dramatiques nationaux à qui il arrive de rester en poste au-delà de trois mandats successifs. Il est souvent difficile d'avoir des discussions rationnelles avec les artistes, mais nous essayons. Cela nous demande du courage politique, mais il arrive que notre effort soit contrebalancé par des pressions locales. En tout cas, ce n'est pas si simple.
La fiscalité doit s'adapter et nous sommes en grande discussion avec Bercy, en particulier à propos de la TVA sur les subventions et de la taxe sur les salaires. Des poursuites ont été engagées contre certaines institutions. Nous nous efforçons d'arranger les choses, même si ce n'est pas facile. M. Woerth et Mme Lagarde ont été saisis, et nous espérons trouver une solution dans les mois qui viennent.
Le travail que nous avons mené a eu le mérite de remettre en cause les certitudes que nous avions au départ. Comme je vous l'ai dit en commençant, ce n'est pas parce que les sommes en jeu sont faibles que les choses sont simples, au contraire, notamment parce que les bénéficiaires sont très nombreux.
Premièrement, il faut relativiser l'enjeu. Mais, en recevant les représentants des quatre DRAC dont j'ai parlé, nous avons été frappés de la dimension très sensible de la question. Derrière la floraison culturelle, se profile un enjeu social et politique très important. Et, s'il y a une chose qui a changé dans notre pays en trente ans, c'est bien que la décentralisation culturelle est devenue une réalité.
Deuxièmement, monsieur Goulard, vingt-huit ans de décentralisation, c'est à la fois beaucoup et peu. Entre le système très centralisé qui a caractérisé les quatre premières Républiques et une bonne moitié de la cinquième, et la décentralisation complète qui prévaut en Allemagne, par exemple, nous sommes à la croisée des chemins, à devoir penser et mettre en oeuvre une politique culturelle partagée. Et rien n'interdit d'être plus optimiste parce que la crise peut être l'occasion de réfléchir à un meilleur partage des rôles entre l'État et les collectivités territoriales, ni d'être inventif.
Monsieur Bartolone, vous avez insisté sur l'inquiétude que suscitait chez les artistes la conjugaison d'une réduction de l'effort de l'État et de la contraction des budgets locaux. La tentation existe de donner davantage de visibilité à des compagnies qui prennent des risques par le biais du conventionnement, avec l'inconvénient de rendre plus difficile le renouvellement des artistes. Il y a ainsi un paradoxe à vouloir renouveler les équipes et à donner une plus grande visibilité à des équipes solides.
Troisièmement, pour répondre aux députés des régions moins favorisées, assurément, l'une des responsabilités de l'État est de veiller à l'égalité des chances et d'éviter que les écarts ne se creusent entre les régions riches et les régions pauvres. De ce point de vue, le partage entre la « labellisation » et la répartition de l'effort est un enjeu commun à l'État et aux collectivités locales.
Enfin, pour sortir d'une approche pessimiste focalisée sur la réduction des budgets publics, on peut considérer l'avantage qu'il y a à avoir une République décentralisée, même si le mouvement n'est pas achevé. Puisque les grands bénéficiaires ont plusieurs sources de financement, ils sont aujourd'hui moins vulnérables à une contraction brutale de tel ou tel budget public.
Au moment où nous commémorons le cinquantième anniversaire de la mort de Gérard Philipe, n'oubliez pas, monsieur le directeur, que vous êtes en quelque sorte le continuateur de Mme Jeanne Laurent, qui a illuminé notre vie culturelle.
Pour que l'État devienne un partenaire, qu'il commence par être en accord avec lui-même ! Il arrive, s'agissant du financement d'un festival, que la position du ministère de la Culture ne soit pas cohérente avec celle d'un autre ministère, celui des Affaires étrangères, par exemple.
Vous avez enfin déclaré que les conseillers des DRAC restaient trop longtemps en place. Il faudrait vous intéresser également aux inspecteurs généraux qui traînent derrière eux autant, sinon plus, de haines recuites que les conseillers. Il faudrait faire parler la poudre !
Ma question porte sur la régulation de l'accès aux professions artistiques dont les Entretiens de Valois et le rapport de la Cour des comptes ont montré qu'il est si facile que cela complique la maîtrise des crédits et perturbe la politique de soutien au spectacle vivant dans les territoires. Les rapports ont même établi que, si le nombre de spectacles progressait dans le pays depuis une quinzaine d'années, celui des spectateurs ne suivait pas toujours. Des pistes sont-elles évoquées pour remédier à cette situation ?
Les compagnies sont incitées à avoir 20 % de ressources propres. Mais ce ratio n'est pas toujours vérifié et, quand il ne l'est pas, il n'y a pas de conséquence sur le contrat.
Monsieur Rodet, je n'ignore pas l'existence de Jeanne Laurent, vous vous en doutez. Nous sommes dans le droit fil de l'esprit de décentralisation qu'elle a insufflé, tout en utilisant des outils plus modernes. Mme Trautmann, quand elle était ministre de la Culture, avait instauré une charte culturelle des services publics qu'il faut relire régulièrement, parce qu'elle le mérite. L'État, avez-vous dit, retire d'une main ce qu'il a donné de l'autre. Vous faites sans doute allusion aux Francofolies. Puis-je vous rappeler que, l'année dernière, quand le ministère des Affaires étrangères a retiré 35 000 euros de subvention à cette manifestation, le ministère de la Culture les a aussitôt compensés ? Je reconnais que la situation n'était pas idéale, mais l'État a fait son devoir et tenu ses engagements.
En ce qui concerne les inspecteurs généraux, je ne me prononcerai pas. La poudre, il y aurait tellement d'endroits où on pourrait la faire parler…
Monsieur Hénart, vous avez eu raison d'aborder le sujet de la professionnalisation et de la structuration des professions du spectacle vivant. Nous y avons beaucoup réfléchi dans le cadre des Entretiens de Valois et avons tracé quelques pistes de réflexion, en particulier un label de qualification pour professionnaliser et structurer les entreprises. Ce label serait, pour elles, la condition sine qua non pour obtenir des subventions de l'État ou des collectivités. Nous sommes en train d'essayer de le mettre en place.
Nous nous préoccupons des ressources propres qui font désormais partie des critères de performance – même si d'aucuns contestent cette expression. Elles figurent dans la batterie d'indicateurs qui seront suivis par l'Observatoire national du spectacle vivant et qui serviront à attribuer les subventions. Les régions ont déjà leur observatoire régional. Il est normal que nous ayons un observatoire national qui sera un outil simple et transparent. Il centralisera les mêmes indicateurs calculés d'après des données homogènes, pour que chacun puisse s'y retrouver.
M. Hénart a raison de revenir sur le sujet. Le Premier président de la Cour des comptes a d'ailleurs insisté sur cet enjeu dans la lettre qui accompagne notre rapport. En effet, le régime de l'intermittence, qui est attractif, contribue au développement de l'offre de spectacles et, corrélativement, à la demande de subventions, qui a une dimension sociale.
Sur ce point, je serai plus abrupt que le président Picq. L'intermittence sert souvent à produire des spectacles alors que ce n'est pas son but. Dans un an et demi, nous renégocierons les annexes VIII et X. Il faut y réfléchir dès aujourd'hui avec les professionnels, même si le ministère de la Culture n'est pas directement partie prenante. Le système doit être impérativement réformé, pour limiter les débordements et fixer des règles plus claires.
Je soumettrai deux idées au petit groupe de travail que j'ai mis en place : premièrement, redéfinir le périmètre des annexes VIII et X car je trouve inconséquent que l'événementiel soit inclus dedans. C'est la porte ouverte au « n'importe quoi » : un peintre en bâtiment qui repeint un stand à la Foire de Paris peut devenir intermittent du spectacle, et le rester ; un chauffeur livreur qui suit une tournée de Johnny Halliday aussi. Deuxièmement, il est indispensable de donner la souplesse nécessaire au passage entre l'annexe IV, c'est-à-dire l'intérim, et l'annexe VIII dont dépendent les techniciens. Il faut ménager des passerelles dans les deux sens entre les deux régimes car une trop grande rigidité de l'annexe VIII n'est pas une bonne chose.
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