Crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances pour 2008
La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Philippe Cochet, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances pour 2008.
a indiqué que l'examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » donnait à la Commission l'occasion d'aborder des questions dont elle discutait rarement. En effet, si, au cours des années précédentes, elle s'est penchée sur la question de l'asile par le biais de la subvention à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (l'OFPRA), jusqu'ici inscrite sur la mission « Action extérieure de l'Etat », elle n'examinait auparavant ni les moyens destinés à l'accueil des demandeurs d'asile et des réfugiés, ni la politique d'immigration et d'intégration de manière plus générale.
La création de la mission « Immigration, asile et intégration » est la conséquence de la nomination, en mai dernier, d'un ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, conformément à l'engagement pris par le Chef de l'Etat au cours de la campagne électorale. Trois programmes dépendent du nouveau ministre : celui consacré au codéveloppement figure dans la mission « Aide publique au développement », qui sera commentée devant la Commission par Mme Henriette Martinez dans quelques jours ; la mission « Immigration, asile et intégration » regroupe les deux autres : le programme Immigration et asile et le programme Intégration et accès à la nationalité française.
Avant de présenter successivement ces deux programmes, le rapporteur a souligné le défi que constituait pour le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement la création d'une nouvelle administration centrale. Pour ce faire, la mission lui affecte 609 ETPT (équivalents temps plein travaillé), qui constituent une masse salariale de 31,5 millions d'euros : si 120 emplois sont créés, pour couvrir les besoins de son cabinet et des services à compétence transversale et à vocation internationale qui feront partie de son administration, tous les autres emplois sont transférés depuis d'autres ministères, avec les services auxquels ils appartiennent :
– 140 ETPT proviennent du ministère des affaires étrangères et européennes, principalement du service des étrangers en France ;
– 110 ETPT sont issus du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, pour l'essentiel de la sous-direction des étrangers et de la circulation transfrontière ;
– 239 ETPT, proviennent du ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité, la plupart étant affectée à l'actuelle direction de la population et des migrations.
Dans les tout prochains jours, un projet d'organisation de la nouvelle administration centrale sera transmis au ministre : elle sera vraisemblablement structurée autour de trois pôles (immigration, asile, intégration et naturalisation). Les services actuellement situés à Nantes y resteront, les autres seront installés dans un bâtiment qui n'a pas encore été trouvé, avec les personnels du siège de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM).
La mission comporte aussi les moyens de fonctionnement nécessaires à ces personnels et les crédits (13 millions d'euros d'autorisation d'engagement et 5,6 millions d'euros de crédits de paiement) destinés aux applications GREGOIRE, PRENAT et TRINAT, destinées la première au suivi administratif des étrangers, les secondes à l'acquisition de la nationalité française. L'ensemble de ces crédits de fonctionnement et de personnels est principalement réparti entre les actions supports de chacun des deux programmes.
Pour ce qui est des autres dépenses, le programme Immigration et asile comporte des crédits liés à la demande d'asile et des crédits nécessaires à l'exécution des mesures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière.
Les dépenses liées à l'asile sont :
– la subvention à l'OFPRA, qui est fixée à 43 millions d'euros, contre 45,5 millions d'euros en loi de finances pour 2007, sa diminution étant la conséquence de la baisse de la demande d'asile, qui devrait se poursuivre à hauteur de 10 % en 2008 ;
– le financement d'actions d'accompagnement des demandeurs d'asile, pour 5,3 millions d'euros ;
– la prise en charge du fonctionnement des centres d'accueil des demandeurs d'asile (les CADA), à hauteur de 192,9 millions d'euros : ces moyens sont en hausse pour tenir compte de l'augmentation du nombre de places, qui atteindra 20 410 fin 2007, contre 5 282 au 1er janvier 2001 ;
– le financement de l'hébergement d'urgence, pour les étrangers qui attendent une place en CADA ou n'y ont pas droit; les 3 510 places devraient coûter 35,3 millions d'euros ;
– l'abondement de l'allocation temporaire d'attente, à hauteur de 28 millions d'euros : cette prévision de dépenses me semble un peu optimiste car elle repose sur une poursuite de la baisse des demandes d'asile de 10 %, mais aussi sur une réduction des délais de traitement des demandes de près de 4 mois, ce qui sera difficile à réaliser.
Les dépenses liées aux mesures d'éloignement sont :
– les frais de billetterie d'avion, de train ou de bateau, estimés à 39,6 millions d'euros en 2008, pour un objectif de 26 000 reconduites à la frontière ;
– les dépenses induites par le fonctionnement des centres de rétention administrative, qui devraient compter 2 290 places fin 2008, contre 1 099 fin 2004, qui permettent leur fonctionnement hôtelier, pour 27,6 millions d'euros, la prise en charge sanitaire en leur sein, pour plus de 8 millions d'euros, et l'accompagnement social des personnes retenue, assurée par la Cimade pour près de 3,9 millions d'euros de crédits de paiement.
Le programme Intégration et accès à la nationalité française est essentiellement un programme « social ».
Il comporte la subvention à l'ANAEM, qui sera de 44,6 millions d'euros en 2008. Ce montant est en baisse de 2 millions d'euros par rapport à 2007 mais le projet de loi de finances prévoit d'augmenter la taxe sur les attestations d'accueil, ce qui entraînera une recette supplémentaire de l'ordre de 4 millions d'euros pour l'ANAEM, à laquelle elle est affectée. L'ANAEM aura donc les moyens de poursuivre la signature et l'exécution des contrats d'accueil et d'intégration (95 693 CAI ont été signés en 2006) et de faire face à ses nouvelles missions issues du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, en particulier le CAI famille et la réalisation des tests de connaissance de la langue française et des valeurs de la République dans le pays d'origine des personnes demandant à venir en France pour des raisons familiales.
L'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSE), qui a été créée par la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, bénéficiera d'une subvention totale de 106 millions d'euros (dont 99 millions d'euros pour des dépenses d'intervention), soit 6 millions d'euros de moins qu'en 2007, mais, dans le même temps, la subvention que lui accorde le ministère du logement de la ville augmentera de 56 millions d'euros, ce qui lui permettra de continuer à soutenir les actions d'environ 4 800 organismes et associations intervenant dans le domaines de l'accès à la langue française, de l'exercice de la citoyenneté, de l'acquisition de la nationalité et de l'accès à l'emploi et au logement.
Enfin, le programme Intégration et accès à la nationalité française finance les dispositifs d'aide aux personnes qui ont obtenu le statut de réfugiés ou la protection subsidiaire. Ce soutien passe par la mise à disposition d'un hébergement dans les centres provisoires d'hébergement, qui offrent 1 083 places, pour un coût de plus de 12 millions d'euros, et par différents systèmes d'aides d'urgence, pour suivre des études, en faveur de l'accès à l'emploi ou au logement. Ce dernier aspect, qui est essentiel, bénéficiera de 2 millions d'euros supplémentaires de crédits d'Etat en 2008 (contre 1,5 million d'euros au total en 2007) et de cofinancements provenance du Fonds européen pour les réfugiés à hauteur aussi de près de 2 millions d'euros.
Cette mission ne regroupe pas la totalité des crédits en lien avec la politique d'immigration, d'asile et d'intégration, car certains d'entre eux, notamment des crédits de personnels, sont partagés avec d'autres missions. En 2009, un document de politique transversale devrait en rendre compte.
La rapporteur a conclu que, pour sa première année d'existence, la mission « Immigration, asile et intégration » apparaissait donc en mesure de faire face aux dépenses qui lui incombaient. Il a rappelé que la création d'un ministère aux compétences entièrement nouvelles était rare et insisté sur le fait que son administration centrale serait un état-major resserré, chargé d'assurer la coordination des politiques d'immigration, d'asile et d'intégration.
Le président Axel Poniatowski a souligné la relative modestie des crédits affectés à ce nouveau ministère et demandé si les fonctionnaires restaient rattachés à leurs ministères d'origine.
a rappelé que la vocation première de ce ministère est la coordination et le pilotage de la politique d'immigration. Il a indiqué que plusieurs questions doivent encore être tranchées au premier rang desquelles la localisation même du ministère ainsi que l'organisation de son fonctionnement. Les personnels seront affectés à la nouvelle structure ministérielle, ainsi que les crédits correspondants, mais ils continueront à être gérés par leurs ministères d'origine, en application de conventions de délégation de gestion.
Après avoir félicité le rapporteur, M. Gérard Voisin a regretté l'insertion dans le document budgétaire d'un tract émanant des personnels d'une usine de l'Imprimerie nationale.
Le président Axel Poniatowski et le rapporteur ont à leur tour fait part de leur étonnement face à ce procédé.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » pour 2008.
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