Syrie : convention fiscale
La commission a examiné, sur le rapport de M. François Loncle, le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République arabe syrienne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (n° 299).
a indiqué que ce projet de loi vise à approuver une convention, signée le 17 juillet 1998 entre la France et la Syrie, accompagnée d'un protocole et complétée par un échange de lettres en date du 16 décembre 2004. Ce texte, conçu sur le modèle de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), s'efforce d'éviter la double imposition et de prévenir l'évasion fiscale.
La France est liée à de nombreux autres Etats par des accords similaires. Dans un contexte d'augmentation des échanges, tant financiers que commerciaux, il est en effet de la plus haute importance que les services fiscaux nationaux puissent coopérer selon des règles juridiques claires et prévisibles.
La France a signé et ratifié des conventions fiscales de non double imposition de ce type avec la plupart des pays du Proche-Orient, comme la Jordanie, Israël ou la Libye. La signature de la convention de 1998 avec la Syrie participe donc d'un mouvement d'uniformisation du cadre juridique des activités économiques et financières dans cette région du monde et vise à mettre fin à la situation particulière de la Syrie du point de vue fiscal.
A l'heure actuelle, trois accords bilatéraux comportent des dispositions en matière fiscale, mais leur portée est limitée à certains types d'activités économiques, principalement les activités du secteur culturel et les transports. A l'inverse, la convention de 1998 à caractère général concerne tous les types de revenus, des personnes physiques et morales.
Il s'agit de favoriser la poursuite d'activités sur le territoire de l'un des deux Etats par des particuliers ou des sociétés de l'autre Etat, tout en évitant que les mécanismes ainsi créés ne soient détournés de leur but d'origine pour servir d'instruments d'évasion fiscale.
Très classiquement, l'accord précise les impôts concernés (impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires) et les modalités d'élimination de la double imposition par exonération ou crédit d'impôt.
L'accord franco-syrien, sera en vigueur pendant cinq ans, deux mois après réception des instruments de ratification de chaque Etat.
Ainsi, c'est moins par son texte que par son contexte qu'il convient de distinguer la convention du 17 juillet 1998 des autres accords de ce type, déjà existants.
Singulièrement détériorées depuis l'assassinat de Rafiq Hariri, et la position d'extrême fermeté adoptée par le Président Jacques Chirac suite à cet événement, les relations politiques entre la France et la Syrie se sont encore dégradées, depuis l'annonce faite par le Président de la République, en décembre 2007, que les liens entre nos deux pays ne sauraient être raffermis tant qu'une issue ne serait pas trouvée au processus électoral présidentiel au Liban.
De toute évidence, cette détérioration a eu des conséquences économiques importantes. La position commerciale de la France en Syrie s'est très nettement dégradée entre 2006 et 2007, puisque le résultat de nos échanges est passé d'un excédent d'environ 90 millions d'euros à un déficit de plus de 200 millions. Une telle évolution s'est doublée d'une réduction importante du volume de nos échanges, lesquels ont baissé d'environ 10 %.
Les produits français sont délaissés par les consommateurs syriens, et les entreprises françaises hésitent à investir en Syrie, craignant que l'état des relations bilatérales ne leur permette pas d'exercer sereinement leur activité. Dans le même temps, les exportateurs russes, ukrainiens, asiatiques, ainsi que ceux de certains pays européens, dont l'Allemagne, accroissent leurs parts de marché.
Cette situation est d'autant plus préoccupante que l'évolution économique de la Syrie pourrait rendre les spécialisations du commerce français avec ce pays inadaptées. Les autorités syriennes ont en effet décidé de multiplier par deux, d'ici huit ans, la capacité nationale de raffinage, afin de réduire la dépendance vis-à-vis des industries étrangères. Or, le poste principal des exportations françaises en Syrie est celui des produits pétroliers raffinés.
La ratification de la convention de 1998 pourrait donc offrir un signal positif aux agents économiques français désireux de développer leurs activités en Syrie. Deux entreprises spécialisées dans les produits agro-alimentaires ont dores et déjà pris pied dans ce pays, et l'ouverture récente du marché des produits médicaux aux importations pourrait offrir de nombreuses opportunités dans un secteur où certaines entreprises françaises sont fort compétitives.
Au-delà de ces considérations, le rapporteur a exprimé son sentiment personnel en estimant que le dialogue avec la Syrie n'aurait pas dû être interrompu, et devrait en tout cas être repris. Il n'est nul besoin d'insister trop longuement sur l'importance stratégique de ce pays, aux frontières de l'Irak, de l'Iran, et du Liban. Il a considéré que la Syrie ne pourrait pas être amenée à jouer un rôle stabilisateur dans la région si les pays occidentaux, et la France au premier chef, choisissaient de la tenir au ban des Nations.
Renouer le dialogue ne signifie pas, bien sûr, cautionner tous les agissements du régime, à l'intérieur comme à l'extérieur de ses frontières. Au contraire, les relations avec la Syrie exigent que soit maintenue une grande vigilance, à tous points de vue.
En tout état de cause, la stabilité du Proche Orient ne pourra être assurée sans que l'un des pays ayant vocation à peser sur les équilibres de la région ne soit associé aux démarches conduites de l'extérieur pour établir et garantir la paix.
La France veut croire encore en une issue positive aux conflits qui ensanglantent, depuis trop longtemps, l'un des plus éminents berceaux culturels de l'humanité. Pour se donner les moyens de son ambition, elle se doit d'assumer, à nouveau, ses responsabilités.
Le rapporteur a conclu en déclarant qu'aussi utile qu'elle soit, la convention du 17 juillet 1998, complétée par un échange de lettres du 16 décembre 2004, ne saurait remplacer une décision politique. Renforçant la sécurité juridique des relations économiques entre nos deux pays, elle permettra aux acteurs économiques de poursuivre leur activité dans de meilleures conditions. Rappelant une nouvelle fois qu'une reprise du dialogue entre la France et la Syrie lui paraissait nécessaire, M. François Loncle, rapporteur, a invité les membres de la commission à se prononcer en faveur de ce projet de loi.
a rappelé que les relations avec la Syrie avaient toujours été compliquées, bien qu'elles soient importantes, et très étroites notamment dans le domaine culturel, comme le prouve l'importance de l'usage du français. Si le Parlement français fait un geste en direction de ce pays, le Parlement syrien a-t-il également prévu de ratifier la convention visant à l'élimination de la double imposition et à éviter l'évasion fiscale ?
, a indiqué que l'entrée en vigueur des accords internationaux ne donnait pas toujours lieu à une procédure parlementaire. S'agissant de la convention franco-syrienne, le Président Bachar El-Assad a promulgué le 24 mai 2005 la loi, votée par l'Assemblée du peuple, ratifiant l'accord du 17 juillet 1998 et l'échange de lettres de 2004.
a affirmé que le pouvoir exécutif avait sans doute raison de desserrer quelque peu les liens entre la France et la Syrie, au vu de l'attitude adoptée par cette dernière et de la nécessité de préserver une certaine stabilité au Liban. Toutefois, les députés bénéficiant d'une totale liberté de parole, l'envoi en Syrie d'une délégation parlementaire devrait être envisagée en vue d'une reprise du dialogue. Une telle décision serait conforme à la volonté française de garantir la paix dans la région. Elle irait également dans le sens des intérêts de la France, puisque l'enseignement du français dès le primaire a été réintroduit en Syrie.
Le Président Axel Poniatowski a indiqué qu'il partageait l'idée d'une reprise de dialogue avec la Syrie et a pris acte de la demande de M. Myard.
a précisé que le président syrien Bachar El-Assad menait des actions vigoureuses contre les extrémistes islamistes. Au-delà des relations avec les autorités, il convient surtout de raffermir les liens avec le peuple syrien, dont les valeurs ne sont pas si éloignées des nôtres.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 299).
Propriété intellectuelle : approbation d'un traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes et approbation d'un traité sur le droit d'auteur
La commission a examiné, sur le rapport de M. Jacques Remiller, le projet de loi autorisant la ratification du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (n° 352) et le projet de loi autorisant la ratification du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur le droit d'auteur (n° 353).
a indiqué que les deux traités Internet conclus dans le cadre de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) visent à adapter le régime juridique du droit d'auteur aux évolutions technologiques.Le progrès technique, en même temps qu'il facilite la diffusion des oeuvres – mais trop souvent au moyen de la transgression des règles relatives à la protection du droit d'auteur – s'accompagne aussi de nouvelles possibilités de cryptage et de marquage qui permettent de limiter le nombre de copies ou d'en suivre le cheminement sur Internet.
Grâce aux nouvelles technologies et au développement des réseaux d'utilisateur à utilisateur (peer-to-peer), il devient désormais possible de partager gratuitement des fichiers numériques entre un nombre quasiment illimité d'utilisateurs anonymes.
Le rapporteur a estimé que ces traités représentaient une étape importante sur la voie de la modernisation du système international du droit d'auteur, marquant ainsi l'entrée de ce système dans l'ère numérique.
– Le traité sur le droit d'auteur protège les oeuvres littéraires et artistiques telles que les livres, les programmes d'ordinateur, les oeuvres musicales, les oeuvres photographiques, les peintures, les sculptures et les films. Il actualise et complète la Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques adoptée en 1886 et dont la dernière révision datait de 1971.
– Le traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes protège les droits des producteurs de phonogrammes ou d'enregistrements sonores (disques, cassettes, disques compacts) ainsi que les droits des artistes interprètes ou exécutants dont les interprétations ou exécutions sont fixées sous la forme d'enregistrements sonores. Ce traité actualise et complète la Convention de Rome adoptée en 1961.
Ces traités garantissent que les titulaires de ces droits continueront à bénéficier d'une protection appropriée et efficace lorsque leurs oeuvres sont diffusées sur Internet.
Le rapporteur a souligné la nécessité de recourir à des procédés techniques efficaces pour assurer une protection appropriée du droit d'auteur. Ces procédés, qualifiés de DRM (Digital Rights Management), visent à empêcher techniquement la reproduction numérique illégale d'oeuvres protégées par le droit d'auteur.
Au-delà des mesures techniques, les traités Internet de l'OMPI protègent également l'information sur le régime des droits. Ils interdisent en effet la modification ou la suppression délibérée des informations qui permettent d'identifier l'oeuvre, son créateur, l'artiste interprète et de déterminer les modalités et conditions de son utilisation. L'efficacité de ces mesures de protection du droit d'auteur ne saurait être assurée sans la mise en place de sanctions destinées à empêcher leur contournement. Les traités de l'OMPI imposent ainsi aux Parties contractantes de prévoir des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques qui sont mises en oeuvre par les titulaires de droits.
Mais les traités accordent en même temps aux Etats la possibilité d'apporter des limitations et exceptions au droit d'auteur. Il s'agit ainsi de protéger les intérêts autres que ceux des titulaires de droits tels que les intérêts du grand public ou de personnes justifiant de besoins particuliers. Cela n'est toutefois permis que s'il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur. Pour le savoir, il faut procéder à ce qu'on appelle le « test en trois étapes » :
– l'exception doit se limiter à un cas spécial ;
– elle ne doit pas porter atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ;
– elle ne doit pas causer de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'ayant droit.
Dès lors que ces règles sont respectées, il appartient aux Etats de définir eux-mêmes les limitations qu'ils entendent apporter au droit d'auteur.
Le rapporteur a alors indiqué que le droit français était d'ores et déjà en conformité avec les deux traités de l'OMPI. En effet, leurs dispositions sont mises en oeuvre par la directive européenne 2001 sur le droit d'auteur, elle-même transposée, avec retard, par la loi dite DADVSI (droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) du 1er août 2006.
Il a rappelé que la protection du droit d'auteur était une compétence partagée entre l'Union européenne et ses Etats membres et qu'à ce titre, la Commission européenne avait participé à la négociation des deux traités Internet de l'OMPI. Ces traités relèvent ainsi de la catégorie des « accords mixtes » qui sont signés et ratifiés à la fois par la Communauté européenne et par chacun des Etats membres. Etant liée par les traités, la Communauté européenne a adopté la directive de 2001 sur le droit d'auteur qui vise à se conformer aux prescriptions des traités, au même titre que les Etats-Unis ont adopté en 1998, pour les mêmes raisons, le « Digital Millenium Copyright Act »
La directive de 2001 a été transposée en France par la loi DADVSI du 1er août 2006, qui a fait d'une pierre deux coups en rendant notre droit national compatible à la fois à la directive européenne et aux traités de l'OMPI. La loi française prévoit désormais des amendes d'un montant de 300 000 euros ainsi que trois ans de prison pour toute personne éditant un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public, non autorisée, d'oeuvres ou d'objets protégés, et jusqu'à six mois de prison et 30 000 euros d'amende pour toute personne diffusant ou facilitant la diffusion d'un logiciel permettant de casser les mesures techniques de protection. Comme cela est autorisé par les traités OMPI, la loi DADVSI prévoit un certain nombre de limitations et d'exceptions au droit d'auteur, conformément au « test en trois étapes ». C'est notamment le cas des actes de reproduction spécifiques effectués par des bibliothèques accessibles au public, des musées ou par des services d'archive.
Le rapporteur a toutefois souligné que l'adoption de la loi DADVSI n'avait pas mis un terme au débat public sur la rémunération du droit d'auteur dans l'ère numérique. Il a évoqué les conclusions de la mission confiée à M. Denis Olivennes, alors Président-Directeur Général de la FNAC, visant « explorer les voies pour lutter contre la contrefaçon numérique et les moyens de développer une offre culturelle numérisée attractive ». Le rapport rendu public le 23 novembre 2007 propose un certain nombre de pistes de réflexion tendant au développement de l'offre légale d'oeuvres sur Internet, parallèlement à la réduction de l'offre illégale. Il préconise l'envoi aux présumés pirates informatiques de courriers électroniques d'avertissement puis, en cas de violation persistante, la suspension pure et simple de leur abonnement à Internet, au moins pendant une courte période. Ces mesures répressives seraient pilotées par une autorité indépendante, qui pourrait être l'Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT) créée par la loi DADVSI.
La présentation du rapport Olivennes s'est accompagnée de la signature, au Palais de l'Elysée, d'un accord interprofessionnel pour le développement et la protection des oeuvres et programmes culturels sur les nouveaux réseaux. Dans le cadre de cet accord, les pouvoirs publics se sont engagés à soumettre au Parlement les textes législatifs nécessaires à sa mise en oeuvre. Un projet de loi est actuellement en cours de finalisation et pourrait être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale dès le mois de mai prochain.
En conclusion, le rapporteur a recommandé l'adoption des deux projets de loi visant à autoriser la ratification des traités Internet de l'OMPI.
a affirmé que le texte examiné s'inscrivait dans le droit fil des conventions précédentes, notamment celle de Berne relative à la protection des oeuvres littéraires et artistique. Il a estimé qu'il n'y avait pas lieu de distinguer le débat sur la propriété intellectuelle d'autres débats sur le droit de propriété. Le piratage doit en effet être appréhendé pour ce qu'il est, c'est-à-dire un vol, ni plus ni moins. Puis il a contesté la compétence de la Commission européenne, qui a pris des initiatives en la matière alors qu'elle n'y était autorisée en aucune manière.
, a précisé que par son arrêt « Phil Collins », rendu en 1993, la Cour de Justice des Communautés européennes avait considéré que le droit d'auteur et les droits voisins entraient bien dans champ d'application du traité de Rome instituant les communautés européennes.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté les projets de loi (n° 352 et 353).
France - Gabon : gestion concertée des flux migratoires et codéveloppement
La commission a examiné, sur le rapport de M. Patrick Balkany, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement (n° 729).
, a souligné que le présent accord entre la France et le Gabon, signé le 5 juillet dernier, représentait le premier accord conclu dans le cadre de la nouvelle politique de gestion concertée de l'immigration, mise en oeuvre sous l'impulsion du Président de la République.
A titre préliminaire, le rapporteur a souhaité évoquer le contexte dans lequel l'accord s'inscrivait dans la mesure où une attention croissante était portée au lien entre migrations et développement et où cette problématique serait au coeur de la présidence française de l'Union européenne, au cours du second semestre 2008. Si la question migratoire est inséparable de préoccupations de sécurité, de contrôle des frontières et de maîtrise des flux migratoires, elle est également liée aux préoccupations de développement. Les actions des travailleurs migrants résidant dans les pays industrialisés en faveur de leur pays d'origine apparaissent, en effet, comme une contribution majeure à leur développement. A cet égard, il a précisé que le volume des transferts de fonds des migrants vers leur pays d'origine avait été évalué, par la Banque mondiale en 2005, à 232 milliards de dollars, soit nettement plus de deux fois les chiffres de l'aide publique au développement. Ces volumes, ainsi que les compétences acquises par les migrants dans leur pays d'accueil, conduisent naturellement à prendre davantage en considération le rôle des diasporas comme acteurs du développement des pays dont elles sont originaires. Cette dimension nouvelle a été pleinement intégrée au niveau européen, lors de la conférence ministérielle qui s'est tenue à Rabat, en juillet 2006. Cette rencontre a, en effet, institué un partenariat novateur entre l'Union européenne et l'Afrique sur deux aspects essentiels : d'une part, il s'agissait de la première démarche associant les pays d'origine, de transit et de destination des migrations autour des routes migratoires qui relient l'Afrique et l'Europe ; d'autre part, pour la première fois, les politiques de développement et de co-développement, l'organisation des migrations légales et la lutte contre l'immigration irrégulière étaient prises en compte simultanément.
Le rapporteur a indiqué que, dans le prolongement de la conférence de Rabat et des réflexions entamées au niveau international, la France s'était engagée, sous l'impulsion du Président de la République, dans une démarche innovante qui envisageait la question migratoire sous deux angles : d'une part, l'apport des migrants installés en France à l'économie de leur pays d'origine ; d'autre part, la régulation des flux migratoires par des mécanismes de réadmission et d'aide au retour. Les accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement constituent l'un des instruments de cette nouvelle politique. Ces accords intègrent, en effet, des préoccupations de contrôle des frontières et de maîtrise des flux migratoires à une stratégie plus générale de soutien à des actions conduites par les migrants dans les domaines de la santé, de la formation et du développement économique. Il s'agit de faciliter la circulation des personnes, d'encourager une migration temporaire et le retour des populations qualifiées dans les pays d'origine, de manière à favoriser le développement économique, non seulement à travers des transferts de fonds, mais surtout grâce à la formation et à l'expérience acquise. En 2007, quatre accords de ce type ont été négociés dont le présent texte avec le Gabon.
Puis, le rapporteur a déclaré que le présent accord comprenait trois orientations principales : tout d'abord, favoriser la mobilité des personnes ; ensuite, renforcer la coopération en matière de lutte contre l'immigration irrégulière ; enfin, soutenir les actions de codéveloppement en faveur du Gabon.
En premier lieu, cet accord facilite la mobilité des personnes en élargissant les possibilités d'obtention de visas de circulation pour des motifs économiques, professionnels, médicaux ou familiaux. Il organise, par ailleurs, les conditions dans lesquelles les étudiants gabonais peuvent compléter leur formation par une première expérience professionnelle, en autorisant la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour de neuf mois, renouvelable une fois, pour les étudiants ayant achevé avec succès leur cycle d'études. Au terme de cette période, l'étudiant pourvu d'un emploi ou d'une promesse d'embauche, peut séjourner en France sans que lui soit opposée la situation de l'emploi, si son activité professionnelle est en lien avec sa formation et sa rémunération au moins égale à une fois et demi le SMIC. Enfin, l'accord prévoit la délivrance d'autorisations temporaires permettant de travailler dans certaines professions, énumérées dans une annexe, pour lesquelles la situation de l'emploi sur le territoire ne sera pas prise en compte. Ces autorisations temporaires peuvent également être délivrées pour un complément de formation en entreprise sur la base d'un contrat de travail d'une durée inférieure à douze mois. L'accord ouvre également la possibilité de délivrer la carte « compétences et talents » aux ressortissants gabonais ayant un profil et un projet utiles à notre pays ainsi qu'au Gabon. Le rapporteur a rappelé que, pour éviter tout phénomène de pillage des cerveaux, cette carte, instituée par la loi du 24 juillet 2006 sur l'immigration et l'intégration, ne peut être renouvelée qu'une fois. Après 6 ans de séjour en France, le titulaire de la carte « compétences et talents » doit retourner dans son pays d'origine, pour le faire bénéficier de l'expérience acquise en France.
En second lieu, le présent accord contient des dispositions destinées à renforcer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière. Il organise la réadmission, dans le respect de la dignité et des droits fondamentaux, des ressortissants français ou gabonais en situation irrégulière sur le territoire de l'autre partie ainsi que des ressortissants d'Etats tiers ayant séjourné préalablement sur le territoire d'une des parties. Ces mécanismes sont complétés par une offre d'expertise policière par la France comprenant, notamment, une formation des personnels chargés du démantèlement des filières d'immigration clandestine. Au-delà de ces mécanismes, l'accord pose le principe d'un renforcement de la coopération entre les deux pays en matière d'état civil et de lutte contre la fraude documentaire. L'objectif est de renforcer la fiabilité de l'état civil gabonais en mettant à disposition une expertise française dans le domaine de la sécurité des titres. En ce qui concerne la fraude documentaire, la coopération entre les deux parties porte notamment sur la formation de spécialistes et des échanges d'information. Enfin, le présent accord comprend un volet relatif au codéveloppement qui est désormais indissociable des aspects de régulation des flux migratoires. Dans cette perspective, il vise à soutenir les initiatives des Gabonais résidant en France au profit du développement du Gabon. Ce soutien peut se manifester de multiples façons : cofinancement de projets de développement local lancés par des associations de migrants ; accompagnement des initiatives économiques des migrants ; aide aux Gabonais ayant un acquis professionnel ou aux étudiants gabonais résidant en France qui souhaitent développer des projets économiques au Gabon.
Le rapporteur a estimé que cet accord témoignait d'une vision globale des migrations qui intégrait à la fois des préoccupations de sécurité et de maîtrise des flux migratoires et des préoccupations de développement dont les migrants eux-mêmes étaient les acteurs. Il illustre également une volonté d'établir un partenariat équilibré avec certains pays – comme le Gabon – avec lesquels la France souhaite construire des relations privilégiées. C'est la raison pour laquelle il a recommandé l'adoption du projet de loi qui en autorise la ratification.
s'est félicité que l'article 1er de la convention consacre la dispense de visa de court séjour pour les titulaires de passeport diplomatique et l'étende aux titulaires de passeport de service. Indiquant être intervenu pour appuyer des demandes de visa d'un certain nombre de ressortissants de pays africains (en particulier du Cameroun et du Sénégal), il a déploré les difficultés auxquelles il s'est trouvé confronté. Il a notamment jugé très regrettable que de jeunes camerounais, qui devaient participer à un tournoi international de football récemment organisé dans sa circonscription pour la troisième année consécutive, n'aient pas obtenu de visa pour se rendre en France. La nécessaire marge de manoeuvre dont disposent les consuls pour délivrer des visas doit respecter les textes signés et adoptés par la France. S'agissant de l'article 2 de la convention, il a demandé au rapporteur s'il s'agissait d'une application de la loi relative à l'immigration et à l'intégration, votée en 2006 lorsque M. Nicolas Sarkozy était ministre de l'Intérieur.
a fait état de difficultés similaires pour la délivrance de visas à des ressortissants sénégalais devant se rendre en France dans le cadre d'un festival folklorique. Les décisions d'octroi ou de refus sont laissées au bon vouloir des consuls.
Le rapporteur a souscrit à l'observation de son collègue M. François Rochebloine, reconnaissant l'insistance dont il faut parfois faire preuve auprès des consuls pour qu'ils délivrent un visa. Il alors précisé que la carte de séjour « compétences et talents » visée à l'article 3 de la convention comprenait bien les sportifs. Ce qu'il faut, c'est faciliter la libre circulation des ressortissants qui ne posent pas de problèmes et mieux surveiller les personnes indésirables. En effet, une partie de l'immigration clandestine se nourrit d'étrangers arrivés régulièrement sur le sol français, munis d'un visa de court séjour, mais qui ne repartent pas de notre territoire. Evoquant ensuite les flux migratoires entre le Gabon et la France, il a mentionné la présence de 8 200 ressortissants gabonais sur le sol français. Puis il a indiqué que sur les 200 000 étrangers qui s'installent chaque année en France, 60 % sont d'origine africaine, tandis que 100 000 étudiants africains poursuivent actuellement leurs études dans notre pays.
Le Président Axel Poniatowski a précisé qu'il existait trois autres accords internationaux du même type que celui conclu avec le Gabon et qui concernent le Bénin, le Congo Brazzaville et le Sénégal. En autorisant la ratification de la présente convention avec le Gabon, il s'agit de permettre l'entrée en vigueur du premier de ces accords.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (n° 729).
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