Examen pour avis des crédits de la mission « Direction de l'action du gouvernement » pour 2008, programme « Présidence française de l'Union européenne »
La commission des affaires étrangères a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Nicole Ameline, les crédits de la mission « Direction de l'action du gouvernement », programme « Présidence française de l'Union européenne » du projet de loi de finances pour 2008.
a indiqué que, pour la douzième fois depuis le début de la construction européenne, la France allait exercer, au second semestre 2008, la présidence du Conseil de l'Union européenne. La Présidence française est attendue par nos partenaires car elle intervient à un moment stratégique de la construction européenne qui s'apprête à fonctionner selon les nouvelles règles du traité modificatif européen.
Bien que se situant dans la continuité des présidences allemande, portugaise et bientôt slovène, la Présidence française pourrait aussi être une présidence de rupture – dans sa dimension la plus positive – au service d'une Europe nouvelle.
La rapporteure a rappelé que c'est très en amont que se gagne une présidence. A cet égard, l'accord des 27 Etats membres sur le traité simplifié proposé par le Président Nicolas Sarkozy augure bien de notre future présidence. Le Chef de l'Etat, le Premier ministre et les membres du Gouvernement ont d'ores et déjà commencé la tournée des capitales européennes pour présenter aux autorités des différents pays la démarche et les priorités de la présidence française et pour écouter leurs préoccupations et leurs attentes. La rapporteure a alors jugé utile d'associer désormais des parlementaires à ces visites afin d'impliquer pleinement de Parlement français à la préparation de notre présidence.
Considérant que la présidence de l'Union sera un exercice à plein temps, elle a déclaré que les autorités françaises devront être irréprochables en terme d'assiduité et de disponibilité pour contredire notre réputation d'absentéisme tant au Conseil de l'Union qu'au Parlement européen, même si la situation s'est améliorée ces derniers temps.
Analysant les critères d'une présidence réussie, elle a souligné l'importance qu'il y a à faire avancer les dossiers européens déjà ouverts dont nous hériterons de la présidence sortante. Il nous appartiendra en effet de traiter les dossiers européens qui arriveront à maturité législative ou politique au second semestre 2008, à quelques mois de la fin des mandats du Parlement européen et de la Commission, renouvelés en 2009.
Mais la présidence sera également tributaire des aléas liés au calendrier politique européen. Le second semestre 2008 devrait coïncider, pour beaucoup d'Etats membres, avec le processus de ratification du traité modificatif. Cette concomitance pourrait freiner notre capacité d'initiative et nos marges de négociations sur les dossiers en cours d'examen. Un autre aléa est celui relatif à l'imprévisibilité de la situation internationale. Qu'il s'agisse des développements futurs de la crise iranienne, de l'avenir des relations avec la Russie, de l'ouverture des Jeux Olympiques de Pékin ou de l'élection présidentielle aux Etats-Unis, la dimension internationale de la présidence française sera certainement importante.
La rapporteure a ensuite évoqué les priorités politiques de la présidence française, telles qu'elles ont été annoncées par le Président de la République le 27 août dernier devant la Conférence des ambassadeurs. Elles sont au nombre de quatre :
– la maîtrise des migrations ;
– la politique européenne de l'énergie et du développement durable;
– la croissance et l'emploi, par le développement d'une économie de la connaissance et de l'innovation ;
– la relance de la politique européenne de défense.
La rapporteure a souhaité que ces priorités constituent le socle d'un plan d'action en faveur d'une Europe politique qui pourrait se décliner autour de trois objectifs : une Europe humaniste et citoyenne, capable de tempérer les excès de la mondialisation pour contribuer à la mettre au service de l'Homme et non le contraire. C'est là tout l'enjeu d'une Europe qui protège et qui sert de modèle. C'est dans ce cadre qu'il nous appartiendra notamment de définir une politique d'immigration commune au niveau européen. La Présidence française devra également oeuvrer à renforcer la dimension concrète de la citoyenneté européenne. A cet égard, la perspective d'un service civique européen ne doit pas être abandonnée, au motif qu'il serait trop compliqué à mettre en place et trop coûteux. La rapporteure a souhaité que la France donne une impulsion politique à ce projet afin de convaincre ses partenaires d'en accepter au moins le principe.
Puis elle a présenté l'objectif d'une Europe innovante et compétitive dans le cadre de la mise en oeuvre de la « Stratégie de Lisbonne ». C'est en étant plus compétitive et en faisant de l'innovation le moteur de sa croissance, que l'Europe sera en mesure de préserver son modèle social. Il est également de la responsabilité des Européens – et donc de la Présidence de l'Union – de s'engager sur la voie d'une croissance durable, respectueuse de notre environnement et responsable vis-à-vis des générations futures. Dans l'élan du « Grenelle » de l'environnement, la France peut faire de l'Union européenne un exemple mondial en matière protection de l'environnement.
Le troisième objectif viserait à oeuvrer en faveur d'une Europe plus présente et plus influence dans le monde. Qu'il s'agisse des relations avec les pays émergents et avec la Russie, ou de l'indispensable rapprochement avec l'Afrique, la feuille de route de la Présidence française est particulièrement riche et de nombreux sommets sont programmés avec les pays tiers, notamment avec la Chine. Dans le domaine de la politique de défense, la Présidence française devra s'attacher à définir la juste articulation entre l'Union européenne et l'OTAN en oeuvrant à équilibrer ces deux piliers d'une même politique de défense.
La rapporteure a ensuite présenté le dispositif budgétaire et abordé les questions matérielles que soulève l'organisation de notre présidence.
La mise en place d'un dispositif institutionnel et budgétaire ambitieux exprime clairement la volonté politique de faire de ce rendez-vous majeur l'occasion de réconcilier les Français avec l'Europe. En terme d'organisation et de financement, la présidence française s'appuiera sur un dispositif interministériel coordonné par un secrétariat général que dirige l'Ambassadeur Claude Blanchemaison.
La préparation de la présidence française implique la mobilisation de l'ensemble de notre appareil politique, diplomatique et administratif et la mise en place de circuits de confiance au sein de l'État. Ceci suppose une définition claire des rôles et une parfaite coordination entre les nombreux acteurs d'une présidence qui se prépare à la fois à Paris et à Bruxelles, à travers notre Représentation permanente auprès de l'Union européenne.
Le décret instituant ce Secrétariat Général de la Présidence française de l'Union européenne lui confère un rôle d'organisation et de coordination qui le rend principalement compétent sur les aspects matériels de la présidence française (prise en charge de la logistique des différentes manifestations, gestion des marchés publics, communication). Il n'intervient ni dans l'élaboration de la stratégie politique de la présidence, ni dans la définition au fond des positions.
S'agissant des aspects budgétaires, dans un souci de transparence, et suivant en cela les recommandations de la Cour des Comptes qui avait été sévère sur notre précédente présidence de 2000, le Gouvernement a souhaité regrouper l'ensemble des dépenses occasionnées par la Présidence française au sein d'un programme budgétaire spécifique. C'est là un gage de vérité, de sincérité budgétaire et de transparence. L'enveloppe globale, en crédits d'engagements, est fixée à 190 millions d'euros répartis ainsi : 120 millions d'euros en crédits de paiement pour 2008 et le solde pour 2009.
Ce programme 306 se décompose en trois actions :
– Les activités obligatoires et traditionnelles de la Présidence, pour un montant de 89 millions d'euros ;
– Les manifestations correspondant à l'initiative propre de la Présidence française, pour un montant de 82 millions d'euros ;
– Les dépenses interministérielles pour un montant de 19 millions d'euros. Il s'agit notamment du financement du secrétariat général de la Présidence française et des frais de communication.
Ce budget est sensiblement supérieur à celui des deux précédentes présidences françaises de 1995 (14,1 millions d'euros) et de 2000 (56,9 millions d'euros). Mais ces comparaisons sont trompeuses, pour au moins deux raisons : la première est que l'Union européenne compte désormais 27 Etats membres contre 15 en 1995 et en 2000. Les frais logistiques liés à l'organisation des réunions politiques et administratives sont de ce fait sans commune mesure avec ce qu'ils étaient auparavant. La seconde raison tient au fait que la présentation du budget de la présidence dans un format « LOLF » entraîne un effet d'optique à la hausse dans la mesure où l'ensemble des crédits de la présidence sont désormais consolidés. L'exigence d'une comptabilité analytique pour chacune des manifestations prévues est un gage incontestable de rigueur budgétaire.
Quant à la comparaison avec les budgets des présidences récemment exercées par nos partenaires, elle révèle des différences sensibles selon la taille des pays : environ 80 millions d'euros pour les « petits » pays, mais près de 200 millions d'euros pour la présidence allemande de l'Union, dont chacun reconnaît le succès et le professionnalisme.Faisant état de sa rencontre avec le Vice Chancelier allemand, M. Franz Müntefering, elle a souligné le « retour sur investissement » que procure l'exercice d'une présidence de l'Union, et l'impact positif pour nos entreprises.
Puis la rapporteure a souhaité faire de la présidence française un rendez-vous majeur pour réconcilier les Français avec l'Europe. Notre présidence devra s'ouvrir sur la société française, au-delà du cercle restreint des élites politiques et administratives. Il faudra en faire une présidence citoyenne et parlementaire.
Des réunions fréquentes sont prévues avec les associations, les organisations syndicales, les ONG, les entreprises et les représentants des collectivités locales sur les grands sujets de la Présidence. Elle a alors demandé que le Conseil économique et social soit pleinement associé à la préparation et au déroulement de la Présidence. Un effort particulier devra également être fait autour de la communication. Dans ce domaine, il faudra éviter l'écueil d'une communication trop institutionnelle, comme cela semble malheureusement être le cas. Il est au contraire nécessaire de faire preuve d'audace et d'imagination pour réussir à toucher celles et ceux que l'Europe indiffère. Il faut aller à la rencontre des Français là où il n'est pas habituel de parler d'Europe, en particulier dans les banlieues.
La rapporteure a ensuite plaidé en faveur d'une véritable association du Parlement, qui ne saurait se limiter à une simple information de la Représentation nationale. Chaque parlementaire devra être, sur le terrain, le relais de la présidence française. Elle a ainsi suggéré de demander au Gouvernement qu'il mette à la disposition de chaque parlementaire un kit d'information sur la présidence française. L'existence de ce kit devrait aider les députés à organiser des réunions publiques dans leur circonscription.
D'autres pistes mériteraient également d'être explorées, comme la possibilité pour des parlementaires de faire partie de la délégation française lors de certaines réunions informelles du Conseil de l'Union européenne. Par ailleurs, une signalétique « Présidence française » pourrait être installée au Palais Bourbon pour d'informer les députés en temps réel, grâce aux nouvelles technologies, de l'agenda de la présidence française. Enfin, si un « Comité d'orientation de la présidence française » venait à être créé par le Gouvernement il va de soi que des parlementaires devraient y siéger.
La Présidence française doit également ouvrir la voie à une plus grande ouverture européenne du travail parlementaire. La perspective de l'entrée en vigueur du Traité modificatif, qui contient de nouveaux droits pour les parlements nationaux – s'agissant notamment du contrôle du respect du principe de subsidiarité – doit permettre de franchir un nouveau seuil institutionnel et politique, alors que le comité présidé par M. Edouard Balladur vient de remettre son rapport au Président de la République. Elle a alors salué l'engagement européen du Président Axel Poniatowski et de M. Pierre Lequiller, Président de la Délégation pour l'Union européenne.
Elle a insisté sur le fait que c'est dès à présent que se prennent les décisions qui feront le succès de l'organisation de notre présidence. Tout en confirmant le retour de la France en Europe, la Présidence française devra également permettre le retour de l'Europe en France.
En conclusion, la rapporteure a recommandé d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » au sein duquel figure le budget de la présidence française de l'Union européenne.
Conformément aux conclusions de la rapporteure, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du gouvernement, Présidence française de l'Union européenne » pour 2008.
Le Président Axel Poniatowski a remercié la rapporteure tant pour sa présentation précise et argumentée que pour les propositions qu'elle a émises. Avec des coûts équivalents à la présidence allemande, la majeure partie du budget consacré à la présidence française de l'Union européenne sera consacrée à l'organisation de diverses manifestations. Quelles sont-elles, en dehors des deux conseils européens qui auront lieu au cours de cette période ? Par ailleurs, quelles leçons tirer de la présidence allemande, dont chacun reconnaît qu'elle a été un succès ?
a indiqué que les frais de représentation d'une présidence couvraient les conseils européens à proprement parler mais aussi les sommets de l'Union avec des pays tiers. Elle a indiqué qu'au cours de la présidence française des sommets étaient prévus entre l'Union européenne et l'Association des nations du sud-est asiatique (Asean), la Chine, l'Inde, la Corée du Sud, la Russie et l'Ukraine. En plus de ces événements, entre cent et deux cents manifestations seront organisées en France, certaines par les autorités publiques quand d'autres bénéficieront du label « Présidence française de l'Union européenne ».
La personnalité de la chancelière Angela Merkel a été un facteur important de succès de la présidence allemande, très professionnelle et surtout préparée très en amont puisque le programme était parfaitement défini au premier jour de la présidence.
a demandé si l'idée d'un service civique européen, séduisante a priori mais difficile à mettre en oeuvre, était réalisable à l'heure actuelle.
, a rappelé qu'en effet cette idée de service civique européen n'était pas nouvelle et avait déjà fait l'objet de nombreuses études. La présidence française pourrait lui donner une ampleur particulière en en promouvant plus largement les fondements humanistes. Le programme Erasmus, les actions humanitaires sont autant de références possibles qui permettent d'imaginer la mise en place d'un service civique européen. Il faut réfléchir à la possibilité d'offrir à une classe d'âge l'opportunité d'effectuer des stages professionnels en Europe.
Conformément aux conclusions de la rapporteure, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du gouvernement, Présidence française de l'Union européenne » pour 2008.
Examen pour avis des crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2008
La commission des affaires étrangères a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Jacques Guillet, les crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2008.
Pour le sixième examen consécutif des crédits de l'écologie et du développement durable, M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur, a précisé que, cette année, une approche transversale avait été privilégiée, intégrant les aspects énergétiques, en raison du caractère indissociable des questions liées au climat et à l'énergie ainsi que de la mise en place d'un nouveau ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables (MEDAD).
En 2008, les crédits de ce ministère, inscrits dans la mission « écologie, développement et aménagement durables » s'élèveront à 10,1 milliards d'euros en crédits de paiement, ce qui représente, en réalité, la moitié du budget de ce nouveau ministère auquel d'autres ressources sont affectées. Au sein de cette mission, 4,3 milliards d'euros sont consacrés au programme « soutien et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables » qui regroupe notamment les crédits alloués à l'action internationale et européenne. Ces crédits s'élèveront, en 2008, à un peu plus de 4 millions d'euros en crédit de paiement, soit une quasi stabilité par rapport à l'année dernière. Une partie des moyens sont destinés à défendre les positions et les intérêts français dans les organismes multilatéraux et au sein de l'Union européenne, à participer aux actions d'aide au développement de la France, et à organiser la présence du ministère dans le dispositif international et communautaire en développant les échanges. Ils sont également destinés à soutenir les entreprises françaises à l'exportation, uniquement sur des projets d'efficacité énergétique ou de développement de technologies sobres en carbone. Par ailleurs, environ 120 équivalents temps plein travaillés (ETPT) sont affectés à cette action.
Si ces moyens restent relativement modestes, ils ne reflètent pas l'intégralité des actions de la France en matière de changement climatique et de préservation de la biodiversité à l'échelle internationale. En réalité, notre action diplomatique utilise depuis quelques années déjà la coopération dans ces domaines comme levier de notre politique étrangère. L'accentuation des risques liés au réchauffement climatique devient une réalité chaque jour plus avérée comme l'illustrent les phénomènes de sécheresse accrue, d'inondations plus fréquentes, de désertification, etc. La situation au Darfour ou dans l'Arctique montre bien que ces phénomènes représentent aujourd'hui des risques réels sur le plan géopolitique. L'attribution récente du Prix Nobel de la paix à l'ancien vice-président Al Gore ainsi qu'aux membres du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) témoigne de cette prise de conscience croissante de l'existence d'un lien étroit entre la préservation de la paix et la lutte contre le changement climatique. De fait, la question climatique a largement figuré en tête de l'ordre du jour international, que ce soit lors du Sommet du G8 de Heiligendamm ou dans l'enceinte des Nations unies, lors de la rencontre de haut niveau organisée par M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations unies, le 24 septembre dernier. Au cours d'une de ces nombreuses rencontres, à Vienne, fin août, un rapport du secrétariat de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques a évalué entre 200 et 210 milliards de dollars le montant des investissements nécessaires pour maintenir, d'ici 2030, les émissions de CO2 à leur niveau actuel. Ces montants considérables militent en faveur du développement des marchés du carbone et, surtout, d'une participation la plus large possible de la communauté internationale aux efforts de réductions des émissions de gaz à effet de serre. A cet égard, la position de deux groupes de pays s'avère déterminante : d'une part, les pays en voie de développement qui ne sont actuellement soumis à aucun engagement contraignant, et, d'autre part, les pays développés encore réticents, au premier rang desquels figurent les États-Unis. Or, certains changements d'attitude sont perceptibles de part et d'autre depuis quelques mois.
En ce qui concerne les Etats-Unis, au-delà des échéances politiques, on observe des évolutions non seulement au niveau des Etats fédérés (Californie, Etats du Nord-Est) et des villes mais également au niveau fédéral. A cet égard, le Rapporteur a précisé qu'à l'occasion d'une visite de travail en France, Mme Barbara Boxer, présidente de la commission de l'environnement du Sénat américain, lui avait indiqué avoir déposé une proposition de loi visant à instaurer, au plan fédéral, un système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre, sur le modèle du système européen qui constituait une référence. Une prise de conscience grandissante se fait donc jour aux Etats-Unis, comme d'ailleurs en Chine qui paie aujourd'hui le choix d'un taux de croissance soutenu au prix d'un important gaspillage des ressources naturelles. On assiste d'ailleurs dans ce pays à l'émergence d'un système embryonnaire d'échanges de quotas entre provinces tandis que les autorités ont fait de l'environnement l'un des priorités du plan quinquennal pour la période 2006-2010. Elles ont par ailleurs institué un système d'évaluation des cadres locaux sur leurs performances environnementales du fait de la vulnérabilité croissante du pays aux conséquences de la dégradation de son environnement (désertification croissante, pollution de l'air, etc.). D'autres pays émergents se montrent également moins réticents aux efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre, notamment le Brésil et, dans une certaine mesure, l'Inde.
Dans ce contexte, le Rapporteur a souligné la nécessité de trouver un consensus pour permettre une participation la plus large possible à un futur accord sur le climat et éviter ainsi toute interruption du régime du protocole de Kyoto en 2012. Certaines pistes sont susceptibles de permettre de progresser dans cette voie notamment en soutenant l'adaptation des pays les plus vulnérables aux changements climatiques, en accélérant les transferts de technologies, en élargissant le champ du « mécanisme de développement propre » (MDP) et en développant de nouveaux instruments financiers. Il importe également de consolider certains acquis importants de Kyoto, notamment le marché du carbone qui est en pleine expansion. D'après la Banque mondiale, le marché international a, en effet, triplé entre 2005 et 2006 pour atteindre 23 milliards d'euros.
Le Rapporteur a ensuite insisté sur le fait que l'action de la France en faveur de l'environnement s'inscrivait résolument dans le cadre européen. L'Union européenne a mis en place des mécanismes originaux, comme le marché européen du carbone, auxquels la France participe pleinement et dont elle cherchera à accroître l'efficacité lorsqu'elle assurera la présidence de l'Union. Le Président de la République a précisé qu'il demandera que les quotas d'émission, échangés sur le marché du carbone, soient fixés par secteur et non par Etat et que leur allocation fasse l'objet d'une vente aux enchères. Il s'agit ainsi de marquer notre attachement au système de prix institué dans le cadre du protocole de Kyoto, qui offre l'avantage d'intégrer dans les décisions économiques l'externalité négative que représentent les émissions de dioxyde de carbone. Le Président a également souhaité que l'Europe examine la possibilité de taxer les produits importés de pays qui ne respectent pas le protocole de Kyoto ainsi que la création d'une TVA à taux réduit sur tous les produits écologiques qui respectent le climat et la biodiversité. L'objectif est de lutter contre le « dumping environnemental » tout en affichant notre détermination, et celle de l'Europe, à changer durablement les modes de production et de consommation.
Au-delà de la dimension européenne, le Rapporteur a souligné l'importance d'une démarche mondiale. Les défis écologiques actuels ignorent, en effet, les frontières et appellent une réponse collective des Etats. La France est convaincue de l'importance d'une approche multilatérale dans ce domaine, comme l'atteste son soutien actif à la création d'une Organisation mondiale de l'environnement passant, dans un premier temps, par un renforcement puis une transformation du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). Il a également mis l'accent sur la nécessité d'une approche transversale, permettant de prendre en compte d'autres politiques publiques dans le domaine des transports ou de l'énergie, par exemple. Sur ce point, on ne peut que se féliciter de la création du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, le MEDAD. Ce nouveau ministère intègre, en effet, de manière tout à fait inédite, la conduite de différentes politiques en matière de transports, d'énergie, d'équipement, d'urbanisme et d'environnement afin d'apporter une réponse globale aux défis écologiques. Il s'agit là d'une structure qui n'a pas d'équivalent chez nos principaux partenaires européens ou membres de l'OCDE. De la même manière, il faut saluer la publication d'un nouveau Document de politique transversale (DPT) qui décrit l'ensemble des politiques de l'Etat concourant à la lutte contre le changement climatique. Ce document évalue les moyens budgétaires consacrés à la lutte contre le changement climatique en 2007 à 2,9 milliards d'euros en crédit de paiement (CP) et 3 milliards d'euros en autorisation d'engagement (AE). Pour 2008, ces moyens seront significativement renforcés pour atteindre 3,1 milliards d'euros en CP et près de 3,4 milliards d'euros en AE. Plus globalement, cette approche transversale tend à se généraliser comme en témoigne l'adoption, par le Conseil européen de mars dernier, d'une approche intégrée « énergie – climat ». Il s'agit ainsi de prendre simultanément en compte des problématiques qui sont effectivement liées : les effets du changement climatique, la dépendance croissante à l'égard des importations et la hausse des prix de l'énergie. Il a estimé que la France devra soutenir cette approche lorsqu'elle assurera la présidence de l'Union européenne, en proposant, par exemple, une conférence internationale sur l'efficacité énergétique.
Enfin, le Rapporteur a mis l'accent sur l'importance des investissements que requérait la dynamique du développement durable. Face à l'immensité des besoins, le récent Prix Nobel de la Paix, Al Gore, a appelé à la mise en place d'un « plan Marshall » à l'échelle de la planète. Cet appel a été entendu puisque la première phase du « Grenelle de l'environnement » s'achève par l'engagement d'un milliard d'euros sur quatre ans pour les énergies et les moteurs du futur, la biodiversité et la santé environnementale. Cette mesure démontre que la politique environnementale ne s'appuie pas uniquement sur des dispositifs fiscaux de taxation mais, au contraire, sur une gamme étendue d'instruments allant des mécanismes de marché à l'investissement public dans la recherche. Telle est d'ailleurs l'approche qui est privilégiée au niveau européen et que la France ne manquera de soutenir au second semestre 2008, lors de sa présidence de l'Union européenne.
Le Rapporteur a conclu que ces différents aspects attestaient d'un effort important de mise en cohérence des politiques publiques et d'intégration de la problématique environnementale à tous les niveaux d'action de l'Etat. C'est pourquoi, il a recommandé l'adoption des crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » pour 2008.
Le Président Axel Poniatowski a remercié le rapporteur pour la qualité de son exposé qui reflète sa grande compétence sur les sujets liés à la politique énergétique et au développement durable. Il l'a alors interrogé sur les obligations qui incombent aux grands Etats, en particulier la Chine et les Etats-Unis qui sont les deux principaux pays pollueurs en matière d'émission de gaz à effet de serre. Or, pour des raisons différentes, ni l'un ni l'autre ne sont soumis aux obligations du Protocole de Kyoto. S'agissant de la Chine, en passe de devenir le premier pays pollueur, est-il prévu de l'intégrer dans les discussions de l'après Kyoto ? Alors qu'aux Etats-Unis, plusieurs Etats fédérés ont pris des mesures de réduction de leurs gaz à effet de serre, connaît-on le niveau total de ces réductions et peut-on le rapprocher de ce qu'aurait été l'obligation des Etats-Unis s'ils avaient ratifié le Protocole de Kyoto ?
En réponse, le rapporteur a précisé que pour la Chine, qui sera en 2009 le premier pays émetteur de C02, l'objectif des négociations en cours sur la période post 2012 vise à l'intégrer dans le dispositif global en faisant en sorte que ce pays s'engage sur un objectif de réduction des gaz à effet de serre. La conférence de Bali qui doit se réunir en décembre ne devrait être, de l'avis général, qu'une étape intermédiaire qui pourrait à première vue décevoir l'opinion publique. Mais il s'agit d'avancer progressivement afin de parvenir à un consensus. Les autorités chinoises ne sont pas hostiles par principe à ce que l'on détermine un objectif de réduction d'émissions. Toutefois, elles ne veulent pas d'un objectif global mais d'un objectif per capita, c'est-à-dire par habitant. Les discussions sont en cours, mais l'espoir d'aboutir prochainement – fin 2008 ou début 2009 – est réel car il n'est pas envisageable de laisser la Chine de côté si l'on veut vraiment parvenir à un accord global. L'approche de ce pays évolue sur les questions de climat mais aussi d'énergie, en particulier au regard de leur présence en Afrique, où une évolution de la politique chinoise est perceptible.
En ce qui concerne les Etats-Unis, la loi de 2006 votée par le Congrès californien sous l'impulsion du Gouverneur M. Arnold Schwarzenegger a pour objectif de retrouver en 2020 le niveau des émissions de gaz à effet de serre de 1990 ; il s'agit finalement d'un objectif similaire à celui prévu par le Protocole de Kyoto. Les initiatives « locales » ne sont qu'un début, et il existe une réelle volonté de la part de l'ensemble des acteurs américains de déterminer des objectifs clairs, y compris de la part des entreprises qui y voient leur intérêt notamment en matière d'innovation technologique. Il existe d'ailleurs à Chicago, depuis de nombreuses années, un marché d'échange de quotas. Au niveau fédéral, la politique américaine se limite toutefois à l'aide aux bio-carburants, ce qui pose le problème de l'explosion du cours du maïs qui a quadruplé ces dernières années, du fait de l'obligation d'intégrer 30 % de mais dans l'essence. Ce qui s'apparente à une aide aux fermiers américains n'est pas sans poser de difficultés, en particulier au Mexique, mais également dans le reste du monde.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » pour 2008.
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