Le Président Pierre Lequiller, après avoir accueilli M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes, comme il est de tradition après chaque Conseil européen, a d'abord appelé l'attention sur le contenu des textes destinés à être discutés au sein de l'Union afin de ne pas polluer les débats sur la ratification du traité de Lisbonne, qu'il a jugée prioritaire, comme cela est arrivé la semaine dernière en Grande-Bretagne avec la directive sur le temps de travail ou comme cela risquerait d'arriver en Irlande – où le référendum sera beaucoup plus difficile qu'on ne le croit – avec tout texte touchant à l'harmonisation fiscale et sociale.
Sur les conclusions du Conseil européen du 14 décembre dernier, il s'est interrogé, d'une part, sur les conditions de la création du Comité des sages, ou groupe de réflexion, et sur le contenu de son mandat ; d'autre part, sur la position européenne – s'il y en a une, car l'Europe semble quelque peu divisée sur ce sujet – à propos du Kosovo.
, revenant sur la création du groupe de réflexion, dont l'objet est de réfléchir à l'avenir de l'Europe à l'horizon 2020, s'est étonné que la question des frontières de l'Union – sujet dont l'impact a été grand sur le dernier référendum en France – ne figure pas explicitement dans son mandat, tandis que la révision des politiques actuelles en est clairement exclue.
Il s'est ensuite demandé, sachant que les pays de l'Union européenne ratifieront le traité de Lisbonne par la voie parlementaire, à l'exception de l'Irlande, ce qu'il adviendrait de l'avenir du traité simplifié si ce dernier pays – où le non semble l'emporter à ce stade – ou encore le Royaume-Uni – où même la voie parlementaire suscite quelques inquiétudes – s'opposaient à la ratification.
a souligné en préambule l'importance du dernier Conseil européen ainsi que la proclamation de la Charte des droits fondamentaux et la signature du traité de Lisbonne. Les conclusions du Conseil, plus riches qu'à l'ordinaire, ont porté sur la coopération policière et judiciaire ou encore sur la question des migrations, tous sujets qui ne doivent pas faire oublier l'élargissement prochain de l'espace Schengen à vingt-trois États, dont certains sont déjà membres de la zone euro, et qui seront rejoints par Malte et Chypre à partir du 1er janvier 2008.
En effet, ces pays, comme la plupart de ceux qui adhèrent, ne commettent pas l'erreur de rester en dehors de ce coeur de l'Europe qui est fait de la zone euro et de l'espace Schengen, au risque de passer à côté du processus de construction européenne. C'est un fait politique aussi important que la ratification du traité par les pays ayant rejoint l'Union le plus récemment, qu'il s'agisse de la Hongrie, qui a été la première à le ratifier, de la Slovénie ou de la Pologne. C'est le symbole que, loin d'être un handicap, une Europe à vingt-sept, contrairement aux idées reçues, contribue au renforcement non pas des intérêts de chacun, mais d'une vision commune de l'idéal européen.
Pour ce qui est du groupe de réflexion, voulu, au nom de la France, par le Président de la République, il a pour objet de faire en sorte qu'avant toute avancée l'Europe puisse disposer des conclusions d'une réflexion objective, conduite par des acteurs non engagés, sur l'avenir de l'Europe à l'horizon 2020-2030 et, en particulier, sur la conciliation, qui fait l'originalité du modèle européen, entre la performance économique et la solidarité sociale.
Sur le fond, ce groupe de réflexion a pour vocation d'aborder toutes les évolutions susceptibles de concerner l'Union européenne et de déterminer la meilleure configuration pour cette dernière en termes de stabilité et de dynamique, c'est-à-dire, hors de tout langage diplomatique, ce que doivent être ses frontières. Ce qui lui est demandé, de façon sous-jacente et implicite, c'est d'imaginer toutes les évolutions possibles de nos relations avec nos grands partenaires et avec nos voisins, de même que les perspectives d'adhésion, d'association et d'accord bilatéral, en examinant le meilleur choix possible. Il devra remettre ses conclusions en 2010, c'est-à-dire le temps de faire en sorte que soient passés, d'une part, le processus de ratification et, d'autre part, le renouvellement du Parlement européen et de la Commission.
Concernant sa composition, trois membres ont déjà été désignés : le président, Felipe Gonzalez, ancien président du gouvernement espagnol, européen convaincu et respecté ; et deux vice-présidents, Mme Vaira Vike-Freiberga, ancienne présidente lettone, qui représente la sensibilité nouvelle de l'Europe, et M. Jorma Ollila, président de Nokia et également membre de la Table ronde européenne des industriels, dont la nomination a été soutenue par la France et qui est très concerné par l'Europe du futur et sa compétitivité.
Il appartiendra à ces trois personnes de faire des propositions au Conseil européen pour les membres restants, sachant que le chiffre de neuf membres au total peut être entendu comme comprenant ou non les trois déjà désignés. La nomination définitive des neuf ou des douze membres interviendra en tout état de cause sous présidence française, des contacts bilatéraux pouvant d'ores et déjà être entrepris par le bureau avec les différentes institutions associées : Commission, Parlement européen, et, bien sûr, Parlement français qui ne peut qu'être encouragé à auditionner ces trois premiers membres sur leurs projets.
Ce groupe de réflexion a été très bien accueilli par nos partenaires, qui savaient que sa création était l'une des conditions à l'ouverture de nouveaux chapitres avec la Turquie et qui ressentaient également la nécessité d'une réflexion, une fois acquises la restauration de la paix et l'instauration d'une monnaie unique pour une majorité des États, sur la politique extérieure, sur la défense, sur l'environnement et sur les différents défis de l'Europe du futur, aux fins d'imaginer ce qui cimentera l'Union européenne dans les prochaines décennies.
Abordant la question du Kosovo, question la plus délicate à traiter pour l'Union européenne, M. Jean-Pierre Jouyet a d'abord souligné que si cette dernière se retrouvait dans une impasse, confrontée à un nouveau drame dans les Balkans en début d'année, l'agenda européen ne comporterait alors plus que ce sujet. Le Conseil européen a cependant montré non pas une Europe divisée, mais une Europe unie sur des points essentiels.
Le premier point d'accord porte sur le refus du statu quo. Prenant acte du fait que la troïka, en dépit notamment des efforts du représentant allemand de l'Union européenne, M. Ischinger, n'a pas abouti à une solution pacifique et que, dans ces conditions, le divorce entre les Kosovars et les Serbes allait probablement être consommé, le Conseil a estimé, puisque le statu quo était impossible, qu'il fallait se préparer à aller de l'avant face à une situation qui, elle, allait être dynamique.
Le deuxième point d'accord a trait à la nécessité, dans les mois qui restent, de faire ultimement preuve de la plus grande imagination afin que les deux parties puissent sauver la face. Si l'on sait que, pour les Kosovars, cela signifie l'indépendance, il convient de faire en sorte que la Serbie, quel qu'ait été le passé – sachant qu'il lui est toujours demandé de coopérer avec le Tribunal pénal international – ne soit pas humiliée. Il faut se donner le temps, même si l'échéance du 10 décembre est passée et si les chances sont minces en raison de la radicalisation des positions : les récentes manifestations à Mitrovitsa montrent que, quelles que soient les générations et le soutien apporté par l'Europe aux jeunes démocrates, le nationalisme reste un ciment fort chez les Serbes.
Le troisième point d'accord peut se résumer par la formule « être d'accord pour ne pas être d'accord » : si, dans quelques mois, après les élections présidentielles serbes, l'indépendance du Kosovo est proclamée, la majorité des États la reconnaîtra, mais pas l'Espagne, la Bulgarie, la Grèce, la Roumanie, sans oublier Chypre qui, pour des raisons évidentes, sera l'un des États membres les plus durs à convaincre. Il n'y aura en effet pas de reconnaissance concomitante, simultanée de l'indépendance du Kosovo. Elle sera étalée dans le temps, ce qui ne signifie pas qu'il y ait désaccord, mais il faudra bien prendre acte de la sensibilité des différents États membres par rapport à cet événement.
Le quatrième point concerne la mise en place, dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense, d'une force civile de stabilisation européenne afin que l'État de droit soit le mieux possible respecté au Kosovo. Cette force devra s'assurer de la sécurité des minorités – on compte 80 000 Serbes au Kosovo –, de la fourniture de l'eau et de l'électricité depuis la partie serbe, de la sécurité aux frontières et de la constitution d'une police et d'un appareil judiciaire, permettant ainsi au Kosovo d'être un État démocratique et multiethnique.
Le dernier point d'accord est de tout faire pour donner une perspective européenne à la Serbie dans les meilleurs délais, à condition qu'elle coopère à la recherche des criminels de guerre et à leur comparution devant le tribunal pénal international.
Pour le reste, compte tenu du potentiel de ce pays, de son indéniable appartenance à l'espace européen, de son développement économique et des sacrifices que les Serbes devront faire, sachant ce que le Kosovo représente pour eux, il convient de donner des perspectives européennes à brève échéance à la Serbie en respectant bien entendu les étapes nécessaires à l'adhésion à l'Union européenne et en finalisant l'accord de stabilisation et d'association. Il faut tendre la main à ce pays pour bien lui montrer qu'il existe la même perspective européenne pour lui que pour les autres États occidentaux des Balkans.
De même, il convient de maintenir le dialogue avec la Russie, dont la position sur le Kosovo reste extrêmement ferme, de façon à éviter, ce qui est la principale difficulté, que ce qui peut arriver dans cette région ne dégénère dans d'autres parties des Balkans, comme la Bosnie, dans d'autres parties d'Europe centrale, comme la Moldavie et avec les minorités hongroise et roumaine, et dans les territoires gelés de républiques d'Asie centrale de l'ex-Union soviétique.
Concernant la révision constitutionnelle, si l'on en connaît la nature, son ampleur dépend de la décision que le Conseil constitutionnel doit faire connaître avant la fin du mois de décembre. La ratification devrait intervenir au tout début du mois de février par la voie parlementaire, avec convocation du Parlement en Congrès après examen du projet de révision constitutionnelle par chacune des assemblées d'ici à la fin du mois de janvier au plus tard.
Quant à la ratification par les autres pays, le processus devrait se dérouler assez rapidement dans les pays d'Europe centrale et orientale, à l'exception de la République tchèque pour des raisons, plus tactiques que de fond, concernant sa présidence future. Pour ce qui est des autres pays, outre le référendum irlandais, qui n'est pas évident, un autre pourrait avoir lieu au Portugal, mais le texte à ratifier étant le traité de Lisbonne, cela ne devrait pas soulever de difficultés.
Dans le cas où une difficulté apparaîtrait, un Conseil européen se réunirait afin d'examiner la situation et de voir si elle est réparable. Ceux qui se seront mis en marge le resteront, faute de pouvoir revenir sur leur choix. Des pays attendent ce traité depuis trop longtemps et l'Europe en a besoin. Ce n'est qu'un instrument et non une idéologie et puisque ce sont des politiques qui devront être bâties à partir de ce traité, chacun devra prendre ses responsabilités à la suite du Conseil européen qui se réunira pour tenir compte des opinions émises par les différents parlements ou par les Irlandais.
, après avoir souligné que le terme « groupe de réflexion » était préférable à celui de « comité des sages pour l'Europe », qui est, selon lui, un oxymore, a regretté que le secrétaire d'État soit passé rapidement sur la déclaration de l'Union européenne sur la mondialisation, car la mondialisation et son village planétaire ont mis un terme à une certaine conception intégriste, exclusive de la construction européenne. Aussi conviendrait-il que le groupe de réflexion puisse comporter des personnalités un peu plus en prise avec les réalités que les idéologues de l'eurobéatitude.
Il a considéré par ailleurs qu'acquiescer à l'indépendance du Kosovo, c'est allumer une mèche. L'Europe crée ainsi les conditions d'un irrédentisme qui polluera la vie européenne et celle des Balkans, d'autant que, contrairement à ce qu'estiment les plus hautes autorités de l'État, s'il y a une question qui intéresse la Russie, c'est bien celle de l'identité slave. De même que l'on ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment, il vaut mieux une cote mal taillée que créer l'irréparable. Aussi militera-t-il pour le statu quo soit conservé.
s'est interrogé pour sa part sur ce qui se passerait dans le cas où un pays ne ratifierait pas le traité simplifié, sachant cependant que l'on peut être plutôt confiant pour l'Irlande, notamment avec la mobilisation du Forum civique.
Il a souligné, par ailleurs, l'importance du groupe de réflexion, tout en se demandant si ses réflexions, notamment sur la question des frontières, n'allaient pas interférer bien avant la remise de ses conclusions en 2010, notamment lors des échéances européennes de 2009.
Enfin, il a fait part de ses inquiétudes concernant le Kosovo, s'interrogeant sur la façon dont la question aurait été traitée si le Haut représentant pour les affaires étrangères prévu par le traité simplifié avait d'ores et déjà été mis en place.
a estimé quelque peu singulière, au regard de la Suède, du Danemark et du Royaume-Uni, qui ont des monnaies fortes et stables, la réflexion de M. le secrétaire d'État selon laquelle hors la zone euro il n'y aurait point de salut. De même ne faut-il peut-être pas jeter la pierre à ceux qui, anciens comme nouveaux membres, se posent des questions sur l'harmonisation des politiques, économique, fiscale et sociale, faute d'avoir donné nous-mêmes le bon exemple en la matière.
Partageant totalement la réflexion de M. Jacques Myard sur le Kosovo, il a demandé, car tout engagement de la France en la matière serait grave, si notre pays peut aller jusqu'à reconnaître une proclamation unilatérale de l'indépendance du Kosovo, se félicitant pour sa part qu'une reconnaissance par l'Europe au niveau global ne soit pas envisagée.
a tout d'abord noté que M. Jacques Myard lui-même considère que la coopération européenne est nécessaire. A aucun moment, quant à lui, il ne l'a envisagée comme étant exclusive : il s'agit de construire un ensemble intégré avec des coopérations aussi renforcées que possible de manière à peser sur les plans économique, diplomatique et militaire, ce qui sera possible dans le cadre du traité simplifié.
Il ne faut pas avoir la religion des sondages mais, globalement, la perception de la construction européenne dans le contexte de la mondialisation est beaucoup plus favorable aujourd'hui que naguère : l'Europe apporte plus de sécurité, elle permet de lutter plus efficacement contre le terrorisme et elle favorise la recherche et l'innovation. C'est tout le sens du retour de la France sur la scène européenne initié par le Président de la République.
La composition du groupe de réflexion sera quant à elle variée sur le plan des nationalités avec, d'ores et déjà, un Finlandais et une Lettone, mais également sur le plan des personnalités, avec des intellectuels et des politiques.
En cas de non-ratification, il ne sera pas possible de procéder comme en 2005 en accordant à certains États de nouvelles dérogations. M. Gordon Brown, en l'occurrence, devra assumer ses prises de position, quelles que soient ses difficultés sur le plan intérieur. Le Conseil européen, alors, se réunira et avisera. Quoi qu'il en soit, la situation est bien différente, et pour la France, et pour les Pays-Bas, car il ne s'agit pas cette fois d'un traité constitutionnel.
Le processus de nomination au sein du groupe de réflexion ne sera pas achevé avant la présidence française de l'Union de manière à ne pas interférer avec la ratification parlementaire en Grande-Bretagne. En outre, le groupe de réflexion n'engagera en rien le Conseil européen et les questions institutionnelles ou financières n'y seront pas débattues. Les prises de parole se feront à titre individuel.
Le règlement du statut du Kosovo est le dernier acte de la dislocation de la Yougoslavie, le pire ayant déjà eu lieu en Croatie, en Bosnie et au Kosovo lui-même, avec 100 000 morts. Le statu quo serait en l'occurrence explosif : les Albanais, qui représentent 95 % de la population du Kosovo, sont impatients ; l'exode de la minorité serbe se perpétue ; il n'est pas possible de conserver ce « trou noir » au coeur de l'Europe. Enfin, les Russes doivent savoir que la situation du Kosovo est traitée comme un cas sui generis : il n'est pas question que cela constitue un précédent à l'endroit de quelque minorité que ce soit.
Le problème kosovar aurait pu être réglé de manière beaucoup plus efficace voilà dix ans si des conditions européennes optimales avaient été réunies, en particulier sur le plan diplomatique. Il convient également de noter que la politique de défense et de sécurité européenne s'est construite à partir de l'expérience des Balkans. La crédibilité du Haut représentant à venir dépendra aussi de l'action européenne en la matière. Le dialogue avec les Russes constitue un impératif mais l'Europe doit en même temps prendre ses responsabilités en assurant la stabilisation du Kosovo tout en tendant la main aux Serbes, si inquiétante que soit la situation.
a estimé que la situation au Kosovo pourrait évoluer favorablement, la solution qui se dessine étant selon lui incontournable. Pour quiconque connaît la région un tant soit peu, il apparaît inimaginable que cette province soit gouvernée par Belgrade. En revanche, les négociations entre l'Union européenne et la Serbie seront fondamentales, les Serbes devant y trouver leur intérêt.
Il a considéré que la mondialisation aurait des incidences sur le processus de construction de l'Union européenne et que ce serait une erreur historique et stratégique de maltraiter la Turquie. Il faut ouvrir à la négociation le plus grand nombre possible de chapitres de manière à pouvoir accueillir ce grand pays. L'Europe, telle quelle a été conçue initialement, sera trop petite face à la constitution et à l'émergence de grands blocs régionaux.
L'élargissement de l'espace Schengen, qu'il faudra sécuriser et contrôler sur les plans terrestre, aérien et maritime, constitue par ailleurs une occasion pour poser les vraies bases d'une défense européenne. En effet, ce n'est pas l'addition des différentes forces nationales, si coordonnées soient-elles, qui assurera la sécurité de l'Europe. Il faut espérer que la présidence française de l'Union permettra d'affirmer une position forte dans ce domaine : il est temps d'envisager l'hypothèse d'une quasi-fusion des systèmes de défense aériens.
s'est déclarée également inquiète quant à la situation du Kosovo et des Balkans, mais elle a insisté, en tant que présidente du groupe d'amitié France-Chypre, sur la question chypriote. En effet, il ne faut pas laisser un « trou noir » en Europe, ni en son centre, ni à l'est. Chypre étant membre de l'Union européenne, sa situation politique est une affaire intérieure. La présidence française est une occasion à ne pas manquer afin de la régler dans les meilleures conditions. L'Europe est une grande famille qui accueille chacun de ses enfants, lesquels doivent être aimés d'un même amour. Comment parvenir à l'unification de ce pays ?
s'est élevé contre la ratification du traité par la voie parlementaire, car la France doit respecter les grands principes démocratiques : seul un référendum peut éventuellement dénouer ce qu'un autre référendum a noué, d'autant que le texte proposé ne diffère guère de celui de 2005. Être profondément Européen, c'est vouloir donner à l'Europe les moyens d'une juste construction. En outre, il n'existe pas de consensus européen en faveur de la voie parlementaire, l'Irlande organisant un référendum. Tout n'est donc pas joué.
La reconnaissance de l'indépendance du Kosovo soulèvera de surcroît un certain nombre de problèmes, la France ayant entretenu des relations multiséculaires avec la Serbie. Il faut comprendre la souffrance des Serbes, contraints de perdre une partie de leur territoire. Que serait l'état d'esprit des Français s'ils devaient céder l'une de leur province ? Sans doute aurait-il été possible de procéder autrement.
Il a comme M. Jean-Michel Boucheron considéré que l'Europe ne pouvait pas rester enfermée dans ses frontières actuelles. La Turquie est un grand pays laïque dont la situation est stratégique. Pourquoi l'Azerbaïdjan, la Géorgie et l'Arménie sont-ils considérés comme faisant partie de l'Europe et pas la Turquie ?
Enfin, il faut effectivement se poser des questions sur la place de l'Europe dans le contexte de la mondialisation.
s'est déclaré optimiste quant à la possibilité d'un recours au référendum compte tenu des réserves d'un certain nombre de députés et de sénateurs quant à la voie de ratification parlementaire. La démocratie française s'honorerait de laisser au peuple français la liberté de choisir.
M. Jean-Pierre Jouyet semble considérer que l'Europe est un modèle. Or les Anglais, par exemple, n'en sont pas convaincus, pas plus d'ailleurs que les Français, avec une libéralisation tous azimuts et une remise en cause du code du travail. Si le modèle européen impose aux entreprises de délocaliser dans la zone dollar, faut-il poursuivre la construction européenne ? Si le traité est voté, qu'en sera-t-il des services publics et des communautés locales ?
Enfin, le débat doit se poursuivre publiquement s'agissant des frontières de l'Europe, notamment dans le cadre de la présidence française.
a considéré que l'élargissement de l'Europe est d'ores et déjà suffisamment important, comme l'attestent les difficultés qu'ont les Européens à se mettre d'accord. Il s'est dit opposé à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne et a indiqué qu'il n'a d'ailleurs jamais été question d'y faire entrer l'Azerbaïdjan, la Géorgie ou l'Arménie.
a insisté sur la continuité de la politique française dans les Balkans, notamment, au Kosovo. L'Europe doit faire preuve en la matière de doigté et de retenue. Il est également indispensable qu'elle dialogue avec la Russie et veille, au premier chef, à ne pas humilier ni provoquer la Serbie. M. Jean-Michel Boucheron a raison de considérer que l'Europe, à cette occasion, doit démontrer sa crédibilité en matière de sécurité et de défense. Il convient par ailleurs de souligner son rôle positif, notamment au Monténégro.
Il est exact que la mondialisation change la donne en Europe et que le problème du nombre d'États membres ne se pose pas de la même façon qu'il y a quinze ans. L'espace Schengen s'étend tout de même sur 3,5 millions de kilomètres carrés ! Les coopérations policières, militaires et judiciaires sont importantes. Sans doute est-il possible, à ce propos, de réfléchir à la mise en commun d'un certain nombre de forces.
S'agissant des États, il faut distinguer, par exemple, les républiques d'Asie centrale et des pays tels que l'Ukraine ou la Moldavie. Des accords d'association existent déjà, mais comment procéder à l'avenir ? Le groupe de réflexion devra aussi se poser ces questions-là.
La reconnaissance de Chypre par la Turquie est une condition de son adhésion à l'Europe. Or le rapport de la Commission européenne est assez critique sur le manque d'efforts de la Turquie en la matière. Pour des raisons de principe, la France a toujours mis en avant la reconnaissance de l'intégrité de tous les États membres de l'Union dans la politique européenne. Enfin, il conviendra d'examiner, après les élections présidentielles chypriotes, les conditions de reprise du processus de négociation sous l'égide de l'ONU. Le cas du Kosovo étant spécifique, sa situation n'implique pas la reconnaissance de la partition de Chypre.
Six chapitres de négociations seront ouverts d'ici la fin de 2008 avec la Turquie, laquelle doit aider l'Europe à l'aider. La situation de M. Erdogan n'est certes pas facile, mais il doit notamment envoyer des signaux à l'Europe en matière de droits de l'homme.
C'est une faute de ne pas être membre de la zone euro : les Danois vont s'efforcer d'y revenir, M. Rasmussen ayant décidé d'organiser un référendum à ce sujet. Les Anglais font quant à eux une erreur stratégique et monétaire et risquent de demeurer à la marge. Néanmoins, les niveaux de changes ne sont pas satisfaisants ; à cet égard le diagnostic français est de plus en plus partagé. Quoi qu'il en soit, la résolution de ce problème est beaucoup plus technique que politique.
Les parlements pourront débattre des voies parlementaire ou référendaire de ratification, mais le référendum ne constitue pas le nec plus ultra de la démocratie, sachant qu'il comporte peu ou prou des éléments plébiscitaires. En outre, il faut croire dans la démocratie représentative, surtout lorsqu'il s'agit d'engagements internationaux. Si le référendum sur la décentralisation a été perdu en 1969, cela n'a pas empêché le vote de nombreuses lois dans les années suivantes.
La ratification parlementaire participe du retour de la France en Europe et il faut rappeler que le traité constitutionnel avait été accepté par dix-huit partenaires européens, y compris par voie référendaire. Le nouveau traité, de surcroît, n'est pas constitutionnel et le protocole sur les services publics et sociaux d'intérêt général, sur les groupements communaux en constitue un élément essentiel. La voie parlementaire semble en l'occurrence la plus sage.
Des rencontres sont prévues en début d'année entre Mme Angela Merkel et MM. Brown et Sarkozy sur les questions de stabilité financière. Depuis sept mois, des progrès ont été accomplis, notamment s'agissant de la formation, de la réciprocité dans les échanges économiques internationaux, de la stratégie de croissance et d'emploi dite « de Lisbonne » et de l'« inclusion active », c'est-à-dire de l'insertion active des chômeurs sur le marché du travail. Un agenda social sera élaboré dans le cadre des présidences slovène et française. Le modèle social et économique européen est désormais mieux protégé, le « tout libéral » ne présentant évidemment pas que des avantages.
Le Président Pierre Lequiller, a remercié M. le secrétaire d'État en son nom personnel et aux noms de Mme Martine Aurillac et de M. Axel Poniatowski pour ses réponses précises et sa force de conviction.