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Délégation pour l’union européenne

Séance du 1er avril 2008 à 11h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • PAC
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  • danemark
  • délégation
  • etat
  • étrangère

La séance

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Le Président Pierre Lequiller s'est déclaré heureux d'accueillir les membres de la Commission des affaires européennes du Folketinget pour une réunion conjointe, dans la perspective de la présidence française de l'Union.

Conformément à l'engagement du Président de la République pendant sa campagne électorale, la France a ratifié le traité de Lisbonne par voie parlementaire. Elle a été l'un des premiers pays à l'avoir fait. Pour cela, un changement de la Constitution a été nécessaire. L'Assemblée nationale et le Sénat ayant voté la révision constitutionnelle en termes identiques, le Parlement s'est réuni en Congrès, puis a ratifié le texte du traité à une très large majorité. Il a demandé des précisions sur la ratification par le Danemark du traité de Lisbonne, sur le contrôle des affaires européennes par le parlement et sur le contrôle de subsidiarité. Il a souhaité également des éléments sur le projet du Danemark de renoncer aux dérogations permanentes dont il bénéficie, en particulier dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice.

PermalienSvend Auken, Président de la Commission des affaires européennes du Folketinget, social-démocrate

, a remercié le Président Pierre Lequiller et les membres de la Délégation pour l'Union européenne de leur accueil. Il a présenté les membres de la délégation danoise : Mmes Yildiz Akdogan, sociale-démocrate, Lone Dybkjær, parti social-libéral, Anne Grete Holmsgaard, parti socialiste populaire, Helle Sjelle, parti populaire conservateur et M. Erling Bonnesen, parti libéral.

La procédure établie au Danemark il y 35 ans fait sans doute un peu peur. En effet, elle oblige tous les ministres, avant chaque Conseil, à obtenir du Parlement un mandat de négociation. Avec le nouveau mode de décision triangulaire qui impliquera la présidence du Conseil, le Parlement européen et la Commission, cette procédure sera amenée à évoluer. La plupart des lois étant d'origine européenne, il est en effet nécessaire d'asseoir la légitimité de la coopération entre les Etats membres. Dans cette perspective, les expériences de leurs partenaires sont utiles afin qu'ils puissent s'adapter au traité de Lisbonne. Ayant eu comme la France une expérience difficile, le Danemark ratifiera ce traité le 24 avril prochain sans référendum.

S'agissant des dérogations permanentes dont bénéficie le Danemark, en particulier en matière d'espace de liberté, de sécurité et de justice, un référendum est en voie de préparation pour l'automne. Ces dérogations avaient été introduites après le premier « non » danois au Traité de Maastricht. La question de leur maintien se pose à présent et l'avis des Danois sera demandé.

Il a par ailleurs souhaité avoir des précisions sur la façon dont le Parlement français exerce son contrôle sur le Gouvernement en matière européenne.

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que la procédure en vigueur en France, très différente de la procédure danoise, s'explique par la primauté donnée, dans la Constitution française, à l'exécutif sur le législatif. La Constitution de 1958 a été établie en réaction à la IVe République. La procédure française de contrôle en matière européenne n'est pas contraignante pour le Gouvernement. Cependant, les avis sous forme de résolutions des Délégations pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale et du Sénat, dans la mesure où ils sont adoptés le plus souvent à une forte majorité, voire à l'unanimité, ont incontestablement une force politique.

S'agissant de l'application du contrôle de subsidiarité, la Délégation pour l'Union européenne a commencé à travailler dans les conditions du traité de Lisbonne, M. José Manuel Barroso ayant adressé directement tous les textes européens aux parlements nationaux, sans passer par l'intermédiaire des gouvernements. A l'heure actuelle, les deux procédures, sur la subsidiarité et sur le fond, coexistent, deux exemplaires des textes arrivant en provenance à la fois de la Commission européenne et du Gouvernement. Il sera nécessaire à l'avenir de clarifier ces règles. Cela pourra se faire dans le cadre du projet de réforme constitutionnelle. Les propositions élaborées par le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la VeRépublique prônent, en effet, un renforcement du rôle du Parlement en matière européenne qui se traduira, notamment, par la transformation de la Délégation pour l'Union européenne en un Comité chargé des affaires européennes. En outre, des résolutions pourront être adoptées sur tous les textes européens, et non plus seulement sur ceux à caractère législatif au sens de l'article 34 de la Constitution française.

Le contrôle de subsidiarité est instruit par la Délégation. Ainsi, un avis sur la directive sur le service postal a donné lieu à des réserves. Des tests de subsidiarité sont régulièrement accomplis dans le cadre de la COSAC.

Le Président Svend Auken a souhaité savoir dans quelles conditions les ministres sont entendus par la Délégation pour l'Union européenne et si les avis sont rendus par écrit.

Le Président Pierre Lequiller a précisé que le contrôle sur les ministres n'a pas la même teneur qu'au Danemark et que leurs auditions n'ont pas pour objet de définir un mandat de négociation. Cependant, les auditions des ministres sont régulières. Ainsi M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, est entendu après chaque Conseil européen.

Le Président Svend Auken a précisé que le contrôle opéré par le parlement danois sur le gouvernement n'a pas pour effet de réduire les marges d'initiative des ministres mais leur donne une plus grande influence politique et une meilleure connaissance et compréhension des dossiers dont ils se saisissent ainsi en amont.

Cette procédure donne également aux ministres la liberté de négocier mais aussi de comprendre les contraintes politiques des autres ministres européens et elle représente au total une bonne expérience.

Le Président Pierre Lequiller a déclaré étudier avec soin le fonctionnement de la Commission danoise et considéré qu'il serait possible, sans systématisation, de soumettre des propositions de résolution comme celle annoncée sur le bilan de santé de la PAC au ministre dès son adoption par la Délégation. Le rôle de la Délégation peut évoluer dans le cadre de cette réforme constitutionnelle.

Le Gouvernement souhaite également soumettre au Parlement la question du maintien de l'obligation de passer par la voie référendaire pour approuver l'adhésion à l'Union européenne de tout nouveau pays candidat après la Croatie, obligation introduite en mars 2005 à l'article 88-5.

La réforme constitutionnelle devrait renforcer le contrôle de la Délégation sur les textes européens, notamment au regard de la subsidiarité.

Le Président Svend Auken a souligné que la procédure parlementaire danoise d'examen des textes européens avait établi un système de négociation permanente et reposait sur une tradition de consensus.

PermalienAnne Grete Holmsgaard

a demandé comment la Délégation travaillait sur la gestion des grands dossiers européens comme celui sur les mesures climatiques que la France souhaite conclure avant la fin 2008 et s'est enquise de la position de la Délégation sur les OGM alors que la presse fait état de désaccords sur ce sujet.

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

a rappelé que les questions climatiques étaient un sujet transversal qui concernait la Délégation mais aussi toutes les commissions de l'Assemblée nationale.

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que la Délégation était le seul organe de l'Assemblée nationale fondé sur le principe de la double appartenance, permettant de réaliser un travail transversal dans les meilleures conditions, et que les six commissions permanentes étaient représentées à travers les membres de la Délégation participant à la présente réunion.

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

a déclaré qu'il avait pu observer, en sa qualité d'ancien ministre de l'agriculture, combien le sujet controversé des OGM pouvait être reçu et traité de manière différente dans les divers Etats membres de l'Union européenne. Il suscite un débat intense en Italie, en Autriche, en France, alors qu'il n'en produit aucun au Royaume-Uni et qu'on en parle peu en Espagne, en Allemagne, au Danemark, en Suède ou en Europe centrale. L'intensité des débats sur ce sujet ne suit pas un axe nord-sud ou est-ouest et a des causes assez irrationnelles.

Les préventions françaises viennent du fait que notre pays a subi beaucoup de dysfonctionnements en matière sanitaire qui ont frappé l'opinion publique, comme les questions du sang contaminé ou de l'hormone de croissance extractive, et ont créé un grand scepticisme envers la toute puissance de la science et les contrôles de certains organismes de santé publique. Ce trouble de l'opinion publique s'est reflété dans des débats qui traversent les sensibilités de tous les groupes parlementaires assez partagés sur ce sujet.

Le fait que le parlement français l'aborde seulement maintenant alors que cet examen a déjà été fait depuis longtemps ailleurs montre que cette question relève en France de « la théorie psychanalytique de l'acte manqué ».

Toutes les opinions vont s'exprimer dans l'hémicycle, y compris celles des extrémistes des deux bords, ceux, très minoritaires, pour qui tout est parfait et ceux pour lesquels la plus minuscule production d'OGM transformerait « nos poumons en branchies ».

Tout le monde est d'accord sur la recherche relative aux OGM et le principal débat porte sur l'expérimentation en plein champ. L'Allemagne a légiféré depuis longtemps sur ce point en imposant des distances de sécurité et en créant des dispositifs d'indemnisation. Mais même les moins idéologiquement opposés à la science peuvent se poser la question de savoir si notre agriculture française a besoin des OGM. M. Hervé Gaymard a déclaré ne pas en être certain.

Il a ensuite demandé à la délégation danoise quelle était sa position par rapport à la proposition française non seulement de discuter du bilan de santé de la PAC mais de tracer déjà les lignes directrices de la nouvelle PAC, étant entendu que le cadre budgétaire défini en octobre 2002 tient jusqu'en 2013 et qu'une révision des perspectives budgétaires est prévue en 2010. Il serait souhaitable, en effet, de ne pas attendre le dernier jour pour parler de la PAC alors que le monde a changé depuis l'an 2000, avec la hausse des consommations agricoles des pays émergents et l'augmentation des prix des matières premières. Les instruments de la PAC sont devenus obsolètes mais beaucoup d'Etats membres ne veulent pas entendre parler de la nouvelle PAC.

Le Président Svend Auken a rappelé que la France et le Danemark avaient une histoire commune sur la question des OGM car ils avaient constitué avec d'autres Etats membres une minorité de blocage au Conseil « Environnement » dans les années 90, afin d'obtenir un moratoire réel sur les autorisations d'OGM et des règles communes d'étiquetage, de traçabilité et de responsabilité.

Aujourd'hui, il existe au Danemark des règles d'étiquetage, de traçabilité, de responsabilité et d'évaluation scientifique. Une majorité au Parlement s'est opposée aux expérimentations, en raison des pratiques des grands groupes agro-chimiques comme Monsanto sur les gènes marqueurs. Cette situation crée un conflit avec les agriculteurs, qui souhaiteraient cultiver des OGM pour des raisons de compétitivité. Cependant, le débat n'est pas aussi vif qu'en France.

Le Danemark est engagé dans la discussion sur le bilan de la PAC et il est prêt à avoir un débat de fond sur l'avenir de la PAC. Il est en faveur d'une disparition des subventions à la production agricole, qui seraient remplacées par des aides à la recherche, à la production écologique et au développement rural.

Le Président Sven Auken a estimé qu'il convenait de trouver un compromis, à partir d'un examen réfléchi qui évite les réactions viscérales.

PermalienLone Dybkjær

a souhaité que des propositions concrètes soient formulées par la France afin de faire avancer le débat. Elle a indiqué que M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, se rendrait au Danemark le 24 avril prochain et qu'il serait très utile d'ouvrir dès à présent le débat sur l'avenir de la PAC.

L'attitude au Danemark est de vouloir se débarrasser de la PAC en général, dans la mesure où elle soutient l'agriculture la plus forte. Il faut une agriculture plus diversifiée et plus respectueuse de l'environnement.

Mme Lone Dybkjær a ensuite interrogé le Président Pierre Lequiller sur le rôle de la France dans le développement d'une politique étrangère européenne et sur la préparation de l'entrée en vigueur des dispositions du traité de Lisbonne relatives à la politique étrangère. Elle a estimé qu'il serait très positif que l'Union européenne parle d'une seule voix, notamment par rapport aux Etats-Unis, même si cela n'est pas toujours facile, comme l'ont montré les désaccords sur l'intervention en Irak.

Le Président Pierre Lequiller a indiqué qu'il avait été membre de la Convention sur l'avenir de l'Europe et qu'il avait alors défendu l'idée de créer un poste de ministre des affaires étrangères européen. Dans le traité de Lisbonne, à la suite d'une demande du Royaume-Uni et des Pays-Bas, la dénomination a changé puisqu'il est prévu de nommer un Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui s'appuiera sur un service européen pour l'action extérieure. Il sera membre de la Commission et du Conseil, ce qui lui donnera un poids beaucoup plus important que l'actuel Haut représentant pour la PESC.

Il est regrettable que lors de la crise irakienne, aucun dialogue n'ait eu lieu entre les Etats membres. On peut espérer que les nouvelles dispositions du traité de Lisbonne (Haut représentant, service pour l'action extérieure, présidence stable du Conseil européen) permettent d'avancer sur des positions plus convergentes. Il n'y aura pas de positions communes systématiques car pour les questions diplomatiques majeures et les conflits, l'unanimité est nécessaire.

La politique étrangère est indissociable de la défense européenne, qui est une des priorités de la présidence française. Disposer d'une défense européenne renforcerait le poids international de l'Union européenne. Celui-ci est encore trop faible, comme le montre la situation au Proche Orient : l'Union verse des aides très importantes mais les décisions sont prises à Washington. En matière de défense, le traité de Lisbonne crée une possibilité de coopération structurée permanente permettant à certains Etats membres d'aller plus vite et plus loin.

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que la question du calendrier des nominations se posait et s'est dit favorable à ce qu'elles interviennent dès janvier 2009. Cette question devra être examinée au deuxième semestre 2008. Certains souhaitent retarder les nominations afin de parvenir à un accord global sur les noms du président du Conseil européen, du Haut représentant, mais aussi des présidents de la Commission et du Parlement européen. En tout état de cause, il faudra attendre toutes les ratifications du traité de Lisbonne, notamment celles du Royaume-Uni, de l'Irlande et de la Pologne.

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

a indiqué que, pour avoir une politique étrangère européenne, il faudrait au préalable que les Etats membres manifestent la volonté de voir l'Europe s'affirmer comme puissance, avec une capacité de décision indépendante. Or beaucoup d'Etats membres ne sont pas prêts pour cela, car ils sont engagés historiquement dans des relations privilégiées avec des pays tiers, en particulier avec les Etats-Unis.

Il a mentionné qu'il rejoignait la position du Président Lequiller : la question de la défense est indissociable de celle de la politique étrangère européenne. Mais les Européens sont-ils prêts à assurer eux-mêmes leur défense et à y mettre les moyens nécessaires ?

PermalienLone Dybkjær

a demandé si, dans la mesure où la France a annoncé sa volonté de se rapprocher de l'OTAN, la question n'est pas celle d'un « socle européen » dans l'OTAN plutôt que celle d'une « politique européenne de défense ».

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

a précisé que l'idée n'est pas forcément de se séparer des Etats-Unis, mais d'établir une défense commune avec les Etats-Unis avec deux piliers égaux de part et d'autre de l'Atlantique : la défense des Etats-Unis sera un pilier, la défense européenne l'autre pilier. Poser comme préalable l'entrée dans l'OTAN, c'est se placer en situation de dépendance par rapport au système existant.

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que le Président de la République a annoncé que « la France réintègrera l'OTAN mais seulement une fois que la défense européenne fonctionnera ». Celle-ci pourra fonctionner parfois indépendamment de l'action de l'OTAN. La France a déjà commencé à réintégrer les organes politiques de l'OTAN mais pas encore le volet militaire. Le Président Sarkozy a présenté cette position aussi bien devant le Congrès américain que devant le parlement britannique, et son discours y a été très bien reçu.

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

a considéré qu'il importe de clairement faire une distinction entre le traité de l'Atlantique Nord, notamment son article 5, et l'OTAN elle-même. La France est toujours signataire du traité, et elle a été présente au moment des crises comme la crise des missiles de Cuba. La question de l'organisation militaire intégrée est différente.

Il faut absolument que l'Europe veuille être européenne et ce, pas seulement en matière militaire. Au sein de l'Union européenne, on voit bien, dans tous les domaines et notamment dans les négociations de l'OMC, que certains Etats membres estiment que l'Europe n'a pas à avoir une volonté autonome. Il ne s'agit pas de le leur reprocher, mais la France estime en revanche que l'Europe doit avoir une voix et défendre des valeurs au plan mondial. Le débat sur « l'Europe-puissance » et « l'Europe-sujet » est souvent présent dans les débats européens. M. Hervé Gaymard s'est déclaré en conséquence assez sceptique sur la construction d'une vraie politique étrangère européenne.

Le Président Svend Auken, se basant sur son expérience dans les domaines de l'environnement et de l'énergie, s'est félicité de ce que la France et le Danemark ont sur ces questions exprimé des valeurs communes allant dans le sens d'une voix européenne unique et indépendante. Mais en pratique, la France pense beaucoup à la France quand on parle de l'Europe. Ce n'est pas un reproche, mais le constat de l'existence d'une longue tradition : en France, on est européen tant que cela sert la France mais pas plus loin. D'où l'inquiétude ressentie au Danemark face à un modèle français consistant à mettre en avant les « grands » pays au lieu de traiter les vingt-sept Etats de la même façon. Une certaine inquiétude existe en Europe vis-à-vis de la France. Le Président Sarkozy, lorsqu'il était ministre de l'intérieur, n'avait-il pas prôné une démarche de rapprochement avec les autres « grands » pays ? L'inquiétude des « petits » pays comme la République tchèque et le Danemark est réelle.

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

a déclaré que le Président Svend Auken avait raison d'évoquer la perception négative que suscite en Europe la posture nationaliste de la France, que les Allemands appellent « sogenannte grosse Nation » (la prétendue grande nation). Cette posture vient de très loin et a été illustrée encore récemment par les propos de l'ancien Président de la République concernant, par exemple, l'achat d'avions américains par la Pologne, ou encore par la déclaration du Président Sarkozy alors qu'il était ministre de l'intérieur, selon laquelle les grands Etats de l'Union devraient pouvoir déterminer les décisions essentielles.

Tout en estimant que de nombreux défauts restent à corriger, M. Hervé Gaymard a fait valoir que l'Europe ne subissait pas le nationalisme français. La France souhaite que l'Union parvienne – dans le cadre de la mondialisation – à la masse critique nécessaire pour être en mesure de parler avec les Etats-Unis, la Chine ou l'Inde. Il a considéré qu'il incombe à l'Europe, continent qui a su faire la paix, de s'affirmer non plus seulement comme une zone commerciale de libre échange mais comme un acteur capable de projeter sa puissance dans le monde actuel.

Rappelant qu'il connaissait bien, à titre personnel, le Danemark, M. Hervé Gaymard a pu constater qu'il y existait également un nationalisme et que si la France adoptait une posture nationaliste identique à celle du Danemark, la France serait perçue encore plus négativement. Il en résulte, à son avis, que la critique doit être formulée des deux côtés.

Le Président Pierre Lequiller, considérant que le mérite des rencontres parlementaires résidait dans le fait de parler avec franchise, a tenu à préciser que la déclaration faite par le Président Sarkozy lorsqu'il était ministre de l'intérieur ne correspond plus à la politique qu'il veut promouvoir. Celle-ci attache certes toujours de l'importance à la coopération franco-allemande, mais elle n'est pas exclusive du développement des relations avec tous les autres pays de l'Union et, en particulier, les pays d'Europe centrale et orientale. En tout état de cause, la coopération franco-allemande ne doit pas avoir pour effet d'amoindrir la place et le rôle des pays de l'Union faiblement peuplés.

PermalienPhoto de Thierry Mariani

rappelant que le Président Sarkozy souhaitait mettre en oeuvre un pacte européen en matière d'immigration, a souhaité savoir quel accueil le Danemark lui réservait. Il a également demandé quelles étaient les évolutions de la législation danoise en ce qui concerne le regroupement familial, qui est l'une des plus restrictives de l'Union, puisqu'elle exige, entre autres, que les époux d'un couple soient âgés de plus de 24 ans.

Le Président Svend Auken a d'abord fait valoir que le thème du regroupement familial était une source d'immigration importante au Danemark et suscitait de très vives controverses, du fait des situations parfois grotesques créées par la législation actuelle. Par exemple, une femme mariée à un citoyen américain peut être contrainte de vivre en Suède tout en travaillant au Danemark. Il a fait observer que la majorité gouvernementale actuelle jugeait nécessaire d'apporter des limitations au regroupement familial, même s'il devait en résulter des problèmes qui, jusqu'à présent, ne sont pas encore résolus de manière satisfaisante. C'est pourquoi, dans ce contexte, il lui est apparu opportun qu'un dialogue puisse être entamé au sein de l'Union européenne, d'autant qu'au Danemark renaissent des points de vue qu'il a qualifiés d'ethnocentristes. L'un des partis soutenant la majorité gouvernementale est à dominante xénophobe, dont le gouvernement doit prendre en compte néanmoins les positions. Dès lors, le Danemark est confronté à une situation dans laquelle il serait nécessaire de faire émerger un consensus au niveau de l'Union et auquel l'idée du Président Sarkozy de pacte européen pourrait contribuer utilement. Pour autant, le Président Svend Auken a déclaré que si des règles générales étaient mises en place, le gouvernement danois y trouverait, certes, de l'intérêt, mais pourrait être contraint, comme le gouvernement du Royaume-Uni, de demander des exemptions, puisqu'il appartiendrait au Danemark de décider si, sur telle ou telle règle, il accepte d'y être lié.

PermalienHelle Sjelle

a rappelé que les élections de l'automne dernier, dont est issu le gouvernement actuel, ont fait apparaître une opinion majoritaire favorable à une politique d'immigration plus restrictive. Elle a toutefois considéré qu'il était important, compte tenu des vives controverses qui existent actuellement au Danemark, de trouver des solutions qui permettent à son pays de rester un Etat qu'elle a qualifié de décent.

PermalienLone Dybkjaer

a constaté que certaines personnes telles que sa collègue, Mme Anne Grete Holmsgaard, espéraient une initiative de l'Union qui permettrait au Danemark de revenir sur la bonne voie. De son point de vue, elle a estimé que la France pourrait exercer une pression extrêmement utile afin que les débats en matière d'immigration deviennent plus nuancés au Danemark.

En réponse à M. Hervé Gaymard, elle a convenu que la posture nationaliste du Danemark n'est pas jugée par les Danois eux-mêmes comme dangereuse car elle vient d'un petit pays. Ce qui ne leur permet pas de se rendre compte que des mesures qu'ils acceptent ne le seraient pas en France, par exemple en ce qui concerne le traitement des demandeurs d'asile ou le regroupement familial.

Mme Lone Dybkjaer a exprimé le souhait que la présidence française prévoie des discussions en matière de politique étrangère et d'immigration au sein de la COSAC, estimant que ces thèmes suscitaient davantage de passion et d'intérêt que la question de la subsidiarité.

Le Président Pierre Lequiller, après avoir remercié les intervenants de la délégation danoise, a déclaré de nouveau que l'immigration sera à l'agenda de la présidence française et sera l'un des thèmes sur lesquels des avancées pourront être vraisemblablement constatées, tout comme, selon lui, la politique européenne de défense et de sécurité. Il a également ajouté qu'il réfléchissait à l'inscription de la question de l'immigration à l'ordre du jour de la COSAC.