La Commission examine, sur le rapport de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, les articles 39 à 55 non rattachés et les articles de récapitulation 35 et état B annexé, 36 et état C annexé, 37 et état D annexé, 38 et état E annexé de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009 (n° 1127).
Nous allons poursuivre l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009.
Les modifications présentées par le Gouvernement au Sénat me conduisent à dire quelques mots de l'organisation de nos débats. L'examen en séance publique des articles non rattachés commençant lundi prochain, le budget sur lequel nous allons voter mercredi devra obligatoirement tenir compte de ces nouvelles hypothèses.
Pas nécessairement, le Conseil constitutionnel ne censurant que les mesures financières nouvelles présentées par le Gouvernement au Sénat. S'il est saisi du projet de loi de finances, le Conseil devra donc apprécier si des corrections ne portant que sur les hypothèses économiques proposées par le Gouvernement, et non sur les dispositions du projet de budget lui-même, constituent des mesures nouvelles.
Mais, au-delà du problème juridique, se pose surtout une question de principe, les amendements du Gouvernement à la première partie du projet de loi de finances modifiant sensiblement ce texte. C'est pourquoi la Conférence des présidents a convenu que les deux ministres exposeront ces modifications avant le début de la discussion, afin que le Rapporteur général, votre Président ainsi que les groupes puissent s'exprimer à ce sujet.
Il aurait certes été préférable que nous examinions à nouveau la première partie du projet de loi de finances, mais une disposition du règlement de l'Assemblée nationale l'interdit : on ne peut revenir sur la première partie telle qu'elle a été votée, sauf pour coordination. C'est pourquoi nous ferons une proposition, Gilles Carrez et moi-même, dans le cadre de la modification du règlement de l'Assemblée qui doit avoir lieu pour tenir compte de la révision de la Constitution.
Cette disposition du règlement ne vaut que dans le cas, ordinaire, où le Parlement examine le même budget du début à la fin de la procédure budgétaire. Or nous sommes dans la situation tout à fait inédite où le Gouvernement change les paramètres du budget au cours de son examen.
C'est ce qui justifie notre proposition de modification du règlement. En tout état de cause, le Gouvernement ne prendra pas le risque constitutionnel de remettre en cause la priorité d'examen des textes financiers par l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement avait annoncé dès le début de l'examen du projet de loi de finances qu'il pourrait être conduit à modifier les hypothèses sur lesquelles le budget est bâti pour tenir compte des chiffres de l'INSEE des trois premiers trimestres.
Concrètement, quand la Commission aura-t-elle connaissance des amendements que le Gouvernement présentera au Sénat ?
Est-on au moins sûr qu'il y aura une déclaration préalable du Gouvernement devant l'Assemblée nationale, et que chaque groupe pourra s'exprimer sur ces ajustements ?
Le Conseil constitutionnel, appliquant la règle de l'examen prioritaire par l'Assemblée nationale, censure les amendements qui n'ont pas été présentés auparavant à l'Assemblée s'il les considère comme des dispositions nouvelles.
Le budget sera déféré au Conseil constitutionnel, ce qui permettra à celui-ci de préciser sa jurisprudence.
SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE IER : AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2009. – CRÉDITS ET DÉCOUVERTS
I. - Crédits des missions
Article 35 : Crédits du budget général :
La Commission adopte l'article 35 sans modification.
Article 36 : Crédits des budgets annexes :
La Commission adopte l'article 36 sans modification.
Article 37 : Crédits des comptes d'affectation spéciale et des comptes de concours financiers :
La Commission adopte l'article 37 sans modification.
II. - Autorisations de découvert
Article 38 : Autorisations de découvert :
La Commission adopte l'article 38 sans modification.
TITRE II : AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2009. - PLAFONDS DES AUTORISATIONS D'EMPLOIS
Article 39 : Plafonds des autorisations d'emplois de l'État :
La Commission adopte l'article 39 sans modification.
Article 40 : Plafond des emplois des opérateurs de l'État :
La Commission adopte l'article 40 sans modification.
TITRE III : REPORTS DE CRÉDITS DE 2008 SUR 2009
Article 41 : Majoration des plafonds de reports de crédits de paiement :
La Commission adopte l'article 41 sans modification.
TITRE IV : DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – Mesures fiscales et budgétaires non rattachées
Article 42 : Aménagements du régime fiscal applicable aux immeubles bâtis situés dans certaines zones protégées (dispositif « Malraux ») :
La Commission est saisie d'un amendement du Rapporteur général de rédaction globale de l'article 42, tendant à convertir l'avantage fiscal du régime dit Malraux en réduction d'impôt, assise sur le montant des dépenses déductibles, retenue dans la limite annuelle de 100 000 euros et dont le taux serait de 25 % en zone de protection de patrimoine architectural, urbain et paysager et de 35 % en secteur sauvegardé.
Cet amendement vise à revoir le dispositif dit « Malraux » relatif aux investissements en secteur sauvegardé ou en zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP). Il reprend les propositions de notre rapport d'information sur les niches fiscales, lequel recommande de transformer en réductions d'impôt tous les dispositifs qui peuvent l'être.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 42 maintient une mesure d'assiette, c'est-à-dire de diminution du revenu imposable par imputation d'un déficit. Cette formule est injuste dans la mesure où elle est plus intéressante pour les contribuables soumis à un taux d'imposition élevé et où elle réduit le revenu pris en compte au titre du bouclier fiscal. Il est en outre très difficile d'évaluer sa portée réelle : le ministère du budget estime la dépense fiscale du « Malraux » à 45 millions d'euros tandis que le ministère de la culture et les professionnels avancent le chiffre de 120 à 150 millions. Nous sommes parvenus à un accord avec le Gouvernement pour passer à une réduction d'impôt tout en retenant le principe du plafonnement.
L'amendement prévoit donc que, sur un montant maximum de 100 000 euros, le taux de la réduction soit de 35 % dans les secteurs sauvegardés et de 25 % dans les ZPPAUP, où les contraintes sont moindres. Le dispositif est cumulable sur trois ans, ce qui peut porter la réduction d'impôt à 105 000 euros au total. Le coût moyen de rénovation d'un logement en secteur sauvegardé étant de 2 000 euros par mètre carré, le plafond retenu correspond à la rénovation de 50 mètres carrés sur un an et de 150 mètres carrés sur trois ans. En tenant compte des subventions de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) dont ces travaux bénéficient souvent, on peut arriver à une surface de plus de 200 mètres carrés. Alors que la mission d'information avait proposé de plafonner l'assiette de la réduction à 45 000 euros, le Gouvernement prévoit une diminution du revenu imposable d'un montant maximum de 140 000 euros. Nous suggérons pour notre part d'établir le plafond à 100 000 euros.
Comme l'adoption de cet amendement ferait tomber les autres amendements à l'article 42, il nous faudra reprendre ceux-ci dans le cadre de l'article 88, car ils comportent de nombreuses propositions intéressantes, notamment la prise en compte de l'interruption des travaux en cas d'événement imprévisible, l'assouplissement de la procédure de déclaration d'utilité publique lorsqu'un document d'urbanisme suffisamment contraignant est applicable, ou le mode de décompte du délai avant la mise en location du bien.
En transformant tous les avantages fiscaux en réductions d'impôt, nous éviterons aussi le problème constitutionnel que nous avons connu pour la loi de finances de 2006 s'agissant du plafond global. Le Conseil constitutionnel avait alors dénoncé un dispositif de plafonnement global inintelligible et imprévisible, les mesures d'assiette et les réductions d'impôt ne pouvant être calculées selon les mêmes modalités.
La survenue de problèmes d'ordre technique, fréquente dans la rénovation des bâtiments anciens, est-elle considérée comme un « événement imprévisible » ?
Par ailleurs, il existe de grandes différences entre les secteurs sauvegardés, qui recouvrent généralement les véritables secteurs historiques, et les ZPPAUP. Les coûts de restauration n'étant pas les mêmes, je me demande ce qui justifie la faiblesse de l'écart entre les deux taux.
Cet amendement va dans le sens des conclusions de la mission d'information.
Je considère moi aussi qu'il faudrait un écart plus important entre les taux – 20 % et 35 %, par exemple.
Je remercie notre Rapporteur général pour ses propositions. Le dispositif « Malraux » ne pouvait en effet rester en l'état, mais je rappelle qu'il n'est nullement en cause dans l'accroissement de la dépense fiscale puisque son coût – 50 millions d'euros par an – n'a pas varié depuis longtemps.
Je ne cache pas que j'aurais préféré un plafond plus élevé. Pour les opérations les plus lourdes, le système du plafonnement global risque d'aboutir à des arbitrages avec d'autres niches. Les contribuables auront tôt fait de s'apercevoir que 120 000 euros d'investissements en « Girardin industriel » leur rapporteront une réduction de 40 000 euros alors qu'il leur faudra débourser 250 000 euros pour obtenir le même avantage en « Malraux ».
La prise en compte des événements imprévus en cours d'opération est un point important car plus le secteur est ancien, plus les découvertes peuvent être nombreuses.
En revanche, je ne suis pas d'accord avec mes collègues concernant la différence entre secteur sauvegardé et ZPPAUP. Certaines communes n'ont pas une densité patrimoniale suffisante pour se lancer dans les démarches très lourdes que suppose la création d'un secteur sauvegardé. Les ZPPAUP, plus souples, sont mieux adaptées aux petites villes ou aux villages, mais les contraintes de restauration qu'elles impliquent peuvent être les mêmes. À mon sens, l'écart entre les taux de réduction devrait plutôt être diminué.
L'assouplissement de la condition relative à la déclaration d'utilité publique est une bonne chose. Je suggère que cette exigence soit abandonnée dès lors que le règlement du secteur sauvegardé est publié.
Je me réjouis également de voir les conclusions de la mission d'information reprises par notre Rapporteur général. J'aurais cependant préféré que l'on s'en tienne au plafond de 45 000 euros proposé par la mission car, contrairement à ce qui se passe dans d'autres systèmes, la rénovation apporte de la valeur ajoutée au patrimoine du bénéficiaire.
Comme M. Michel Bouvard, j'estime injustifiée la différence de traitement entre secteur sauvegardé et ZPPAUP. Pourquoi ne pas retenir un taux unique de 30 % ?
Je trouve pour ma part le plafond de 100 000 euros insuffisant au regard travaux qui restent à réaliser dans les quartiers historiques.
La différence de nature entre les secteurs sauvegardés et les ZPPAUP n'est pas considérable. Mais, comme il est plus facile de constituer une ZPPAUP, c'est cette formule qui sera amenée à se développer. Il ne faut pas entraver cette évolution en fixant deux taux différents.
Il me semble que la formule proposée par le Rapporteur général constitue un progrès et qu'elle est relativement équilibrée, même si nous sommes quelques-uns à trouver le plafond un peu élevé. Le courrier que nous avons reçu de la part de responsables municipaux de tous bords montre un réel intérêt pour ce dispositif.
On compte 550 ZPPAUP pour seulement 99 secteurs sauvegardés. Si l'on veut accroître la différenciation, peut-être pourrait-on, sans pénaliser les premières, porter le taux applicable aux seconds de 35 à 40 %. La démarche du plafonnement global exige de maintenir une certaine équité entre les niches les plus importantes. Nous nous sommes en particulier engagés auprès de nos collègues de l'outre-mer à ne pas créer de niches plus avantageuses en métropole. Or le plafond du dispositif « Girardin industriel » est précisément de 40 000 euros.
Pour ce qui est de la définition des événements « imprévisibles », un amendement de MM. Michel Bouvard et Jean-Pierre Gorges fait référence aux « cas de force majeure ou découvertes fortuites ».
Par ailleurs, le plafond de 35 000 euros est sensiblement supérieur à celui que nous avions finalement fixé dans le PLF pour 2006 et qui s'élevait implicitement à 32 000 euros pour un contribuable consacrant la moitié de son plafond global à une opération Malraux. Il faut aussi savoir que 90 % des investisseurs du dispositif « Malraux » imputent sur leur revenu global un déficit inférieur ou égal à 77 000 euros. Le nouveau système leur sera plus favorable. Le passage d'une réduction d'assiette à une réduction d'impôt encouragera également les gros investissements puisque le plafonnement global peut être fixé, par exemple, à 10 % du revenu et que, dans le dispositif de réduction d'assiette, ce revenu se trouve minoré. Enfin, on peut imaginer un report de l'imputation de l'avantage fiscal au-delà de la durée des trois ans dans le cas d'opérations exceptionnellement longues.
Je ne peux souscrire au raisonnement selon lequel on pourrait porter le taux à 40 % pour arriver au même plafond que celui de la défiscalisation outre-mer. Dans le cas qui nous occupe, il y a constitution d'un patrimoine.
L'ensemble des travaux de réhabilitation. Par ailleurs, on prend en compte les commerces, mais on n'ajoute pas les propriétaires occupants, pour des raisons budgétaires.
Qu'on soit en secteur sauvegardé ou en ZPPAUP, le coût de réhabilitation des bâtiments est le même. Je ne vois donc pas pourquoi introduire une différence, source de complexité. Jusqu'à présent, le régime fiscal était unique, et personne ne trouvait cela injuste.
Entre les souhaits des uns et des autres, la proposition du Rapporteur général représente un certain équilibre. Rapprocher davantage ce dispositif de celui applicable aux investissements outre-mer serait ajouter des difficultés. Je suis donc plutôt pour en rester là, sous réserve de sous-amendements, issus de certains amendements, qui devront être retravaillés avec le Rapporteur général d'ici à notre réunion dans le cadre de l'article 88.
La Commission adopte l'amendement du Rapporteur général.
En conséquence, les onze amendements présentés par M. Michel Bouvard, deux amendements présentés par M. Charles de Courson et un amendement présenté par M. Jérôme Cahuzac deviennent sans objet.
Article additionnel après l'article 42 : Mise sous conditions des avantages fiscaux afférents aux monuments historiques :
La Commission est saisie d'un amendement du Rapporteur général, qui tend à insérer un article additionnel plafonnant à 200 000 euros l'avantage fiscal dont bénéficient les propriétaires de monuments historiques classés, inscrits ou agréés non ouverts au public, et conditionnant le bénéfice du régime dérogatoire d'imputation propre aux monuments historiques à un engagement de conservation pendant quinze ans et à l'absence de mise en copropriété sauf agrément spécifique.
Cet amendement reprend les propositions de la mission d'information. Le plafond, applicable sauf cas particuliers de monuments historiques qu'il est impossible ou inutile d'ouvrir au public, est deux fois plus élevé que celui retenu pour le dispositif Malraux. Par ailleurs, sont exclus du champ de l'avantage fiscal les achats en copropriété, aujourd'hui proposés par des cabinets de défiscalisation, sauf si cette mise en copropriété a fait l'objet d'un agrément. Quant à l'engagement de conservation, il vaut, bien entendu, sous réserve des accidents de la vie.
Sur ce sujet, la mission est en désaccord avec le Gouvernement, lequel considère en effet que le propriétaire d'un monument historique non ouvert au public doit bénéficier de l'avantage fiscal sans plafond car il entretient le patrimoine et, en quelque sorte, se substitue à l'action publique défaillante.
L'inconvénient, c'est qu'il faut donc la sortir du mécanisme de plafonnement global des niches fiscales. J'aurais préféré un dispositif de réduction d'impôt.
Par ailleurs, nous avions dit dans notre rapport que tout avantage fiscal devait avoir une contrepartie d'intérêt général, laquelle nous paraissait être, dans le cas des monuments historiques, l'ouverture au public. Le plafonnement de l'avantage est un assouplissement de notre position initiale.
Même lorsque les monuments ne sont pas ouverts à la visite, il y a un intérêt collectif à ce qu'ils soient entretenus. On en voit trop souvent qui tombent en ruine parce que leurs propriétaires n'ont pas les moyens de faire les travaux nécessaires ; c'est une perte pour le patrimoine de notre pays.
Votre raisonnement pourrait être appliqué à n'importe quel bien immobilier, monsieur Goulard !
Il faudrait régler aussi le problème des parcs et jardins, auxquels le régime des monuments historiques a été appliqué…
L'avantage fiscal dont bénéficie le propriétaire d'un monument historique est aussi la contrepartie des contraintes qu'il subit, en particulier le fait qu'il lui faut demander des autorisations pour entreprendre de travaux, lesquels sont en outre plus chers.
Les personnes que nous avons auditionnées ont parlé d'un différentiel de coût de 30 à 40 %.
Le plafond étant élevé, sans doute faudra-t-il préciser dans l'exposé sommaire les contreparties exigées du propriétaire – y compris la réalisation des travaux imposés par l'architecte des monuments historiques, qui coûtent plus cher.
La Commission adopte cet amendement.
En conséquence, deviennent sans objet deux amendements présentés par le président Didier Migaud et tendant, pour l'un, à instaurer un engagement de conservation du bien et d'ouverture au public pendant dix ans et, pour l'autre, à priver du bénéfice du dispositif les immeubles mis en copropriété depuis moins de cinq ans, ainsi qu'un amendement de M. Jérôme Cahuzac conditionnant le bénéfice de l'imputation dérogatoire des déficits à une ouverture au public de dix ans et l'interdisant aux immeubles nouvellement mis en coproriété.
Article 43 : Plafonnement des réductions d'impôt obtenues au titre des investissements réalisés outre-mer :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Gaël Yanno, appliquant à la réduction d'impôt prise en compte pour le calcul du plafond de 40 000 euros un abattement représentatif de la part rétrocédée et donnant au contribuable la possibilité d'opter pour un plafonnement à 15 % du revenu imposable.
Cet amendement rédigé avec nos collègues de l'outre-mer a fait l'objet d'un consensus. Le Gouvernement ne tenait pas compte de la rétrocession, laquelle représente 60 % de l'avantage fiscal. Nous avons obtenu son accord pour que le plafond de 40 000 euros soit net de rétrocession. Sur un investissement de 200 000 euros, la réduction d'impôt de 50 % s'élèvera à 100 000 euros, 40 000 restant définitivement acquis au contribuable. Afin de continuer à attirer les gros investisseurs et de maintenir un avantage relatif au bénéfice de l'investissement outre-mer – lequel a la particularité de ne pas apporter de patrimoine à l'investisseur, le bien étant cédé à l'exploitant à l'issue de son amortissement –, nous leur laissons la possibilité de calculer le plafond en pourcentage du revenu, mais dans ce cas la rétrocession est incluse.
Néanmoins, pour le plafonnement global, il faudra raisonner en net de rétrocession – et donc retenir non plus 15 % du revenu brut, mais 40 % de cette somme.
Sur ce sujet, nous sommes arrivés à un large accord. Il faudra cependant procéder à une évaluation, et peut-être serons-nous amenés à modifier les niveaux à la baisse, eu égard au contexte budgétaire. Mais ce système, beaucoup plus lisible, est un réel progrès. L'engagement pris de préserver la dépense fiscale consacrée à l'outre-mer a été respecté.
Le dispositif perdra son intérêt pour nombre de ménages, parmi les plus fortunés. Pour continuer à lever l'épargne des couches moyennes supérieures, il convient en parallèle d'abaisser les seuils d'appel public à l'épargne.
Avec le plafonnement des niches, un investissement qui nécessitait l'apport de vingt ou trente contribuables devra demain être financé par plus de cent contribuables. Il faudra donc passer par des procédures lourdes d'appel public à l'épargne. Le Gouvernement est d'accord pour créer une mesure spécifique, qui serait introduite soit dans le projet de LODEOM – loi pour le développement économique de l'outre-mer –, soit dans une ordonnance relative aux marchés financiers.
Les appels publics à l'épargne sur des produits à risque sont dangereux car la fascination pour des avantages fiscaux conduit à négliger la nature de l'investissement.
Il s'agira d'éviter la procédure d'appel public à l'épargne en remontant le seuil du nombre d'investisseurs.
Cet amendement comporte plusieurs mesures. Celle relative à la rétrocession, que réclamaient vivement nos collègues de l'outre-mer, me semble légitime. Mais il faut rester vigilant.
Les montages des SNC – sociétés en nom collectif – sont maintenant très sophistiqués. Le particulier qui investit est protégé contre tout recours de la banque. Il n'encourt qu'un risque très limité, qui porte sur la reprise de l'agrément par le ministère. Le mécanisme consiste en fait en l'achat d'une réduction d'impôt, avec une rentabilité de l'ordre de 30 % après rémunération du cabinet de défiscalisation. L'avantage fiscal n'est pas lié à la mise de fonds du particulier mais au montant de l'investissement, lequel est emprunté aux deux tiers, voire aux trois quarts par la SNC : pour un investissement de 200, l'investisseur débourse 60 et bénéficie en contrepartie d'une réduction d'impôt de 100.
Ces opérations suivent des paramètres économiques intangibles : l'allocation du bien et le prix de revente. Il n'est pas impossible que les intermédiaires demandent, demain, beaucoup plus. L'équilibre économique des opérations dépend de la valeur de revente.
Dans tous les montages pratiquement, la revente des équipements ne rapporte presque rien car la rétrocession de 60 % joue davantage à la baisse sur le prix de cession que sur le montant des loyers. Les plaquettes des défiscalisateurs ne décrivent pas cette machinerie : elles indiquent simplement que vous bénéficierez de 130 de réduction d'impôt dans un an si vous investissez 100 aujourd'hui.
Je note que vous nous proposez d'adopter un dispositif fiscal permanent pour des montages très évolutifs.
La Commission adopte cet amendement.
Elle adopte ensuite l'article 43 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 43 : Transformation de la déductibilité des souscriptions au capital des Sofipêches en réduction d'impôt :
La Commission est saisie d'un amendement du Rapporteur général, qui tend à introduire, après l'article 43, un article additionnel visant à convertir en réduction d'impôt au taux de 40 % l'avantage fiscal lié à la souscription au capital de sociétés agréées de financement de la pêche artisanale.
Il s'agit d'une mesure de conversion aux incidences très limitées, puisque ses bénéficiaires sont actuellement au nombre de vingt et un, pour une dépense fiscale inférieure à 500 000 euros. En loi de finances pour 2006, lorsque le Gouvernement avait introduit le plafonnement global, il avait oublié les Sofipêches.
La Commission adopte cet amendement.
Article additionnel après l'article 43 : Transformation de la déductibilité des versements aux comptes épargne – codéveloppement en réduction d'impôt :
La Commission examine un amendement du Rapporteur général, tendant à convertir en réduction d'impôt au taux de 40 % l'avantage fiscal lié aux sommes versées sur un compte épargne codéveloppement.
Un étranger venu travailler en France peut bénéficier d'une réduction d'impôt s'il place de l'argent sur un compte épargne utilisé pour le développement de son pays d'origine.
Cela a-t-il un rapport avec le récent dispositif Lefebvre adopté dans la première partie du projet de loi de finances ?
Non. Cette mesure intéressante a été adoptée l'an dernier. Mais elle ne fonctionne pas, aucun compte n'ayant été ouvert.
La Commission adopte cet amendement.
Après l'article 43 :
La Commission examine un amendement de M. François Scellier, tendant à transformer le régime d'amortissement fiscal dit « Robien-Borloo » en un dispositif de réduction d'impôt étalé sur neuf ans.
Je propose une réduction d'impôt de 16 % pour le « Robien » et de 25 % pour le « Borloo », avec un plafonnement de 30 000 euros. L'avenir de la filière logement est préoccupant. La baisse d'attractivité de l'investissement locatif est patente et le système d'amortissement est surtout avantageux pour ceux qui paient beaucoup d'impôts. Le mécanisme de réduction serait plus équitable et compenserait la baisse d'attractivité constatée.
Les classes moyennes qui se lancent dans des investissements de ce type ont généralement pour souci de préparer leur retraite ou de prévoir une éventuelle situation de dépendance. Or la mesure actuelle ne les encourage pas à investir.
Avec l'augmentation des taux d'intérêt et l'accroissement du prix de l'immobilier, les dispositifs existants ne sont plus intéressants pour les couches moyennes de la population : ils le sont uniquement pour les contribuables dont le taux marginal d'imposition est de 40 %, c'est-à-dire pour à peine plus du quart des investisseurs. Il faut rendre le système moins attractif pour ces derniers et le rendre à nouveau attractif pour les couches moyennes.
Avez-vous pu vérifier que le calibrage proposé se traduira par un coût moyen inchangé à 20 %, monsieur le Rapporteur général ?
Le Gouvernement a pris conscience de la nécessité d'agir sur l'ensemble des segments du logement, et pas uniquement sur le logement locatif social. La réduction d'impôt devra être attractive. Je pense que ce Gouvernement nous proposera de retravailler ce sujet à l'occasion de l'élaboration de la loi relative à la relance du logement, pour une adoption définitive dans le cadre du collectif budgétaire.
Je ne souhaite pas que nous adoptions cet amendement aujourd'hui. Je propose à François Scellier de le redéposer au titre de l'article 88, afin que nous puissions en débattre avec le Gouvernement. Nous pourrons ensuite travailler à la rédaction du nouveau dispositif, qui pourrait même faire l'objet d'un amendement de François Scellier au collectif budgétaire.
Je partage la circonspection du Rapporteur général. Outre la crise immobilière, il convient d'analyser la nature de l'offre de logement, au regard de ses conséquences sociales et de l'occupation de l'espace – c'est le sujet d'un article du Monde d'aujourd'hui. Je me suis élevé à plusieurs reprises contre le dispositif dit « Robien ». Il serait précipité d'adopter une mesure dès à présent car le logement mérite un vrai débat.
Les mêmes mauvais exemples sont toujours cités. Il n'en demeure pas moins que le « Robien » répond à de très gros besoins en logements en Île-de-France. Je reconnais volontiers que des opérations ont été conduites dans des zones où la demande n'existait pas. Il va de soi que l'avantage fiscal au titre du Robien en zone C sera supprimé ou atténué. Notre collègue Michel Piron, rapporteur de la loi relative à la relance du logement, poursuit la réflexion de son côté. Quant au volet fiscal, il prendra sa place dans le collectif budgétaire.
Pour ne pas mettre la Commission en difficulté, je vais retirer mon amendement. Il y a lieu de cantonner l'avantage fiscal dans certaines zones, mais le dispositif n'en présente pas moins un grand intérêt. Il est statistiquement prouvé que la restriction de l'aide à l'investissement locatif des particuliers a toujours des répercussions sur l'ensemble de la chaîne du logement, et le moment serait mal choisi pour prendre un tel risque.
M. François Scellier retire son amendement.
Article 44 : Réforme du régime de la location meublée :
La Commission est saisie d'un amendement du Rapporteur général, tendant à ne pas prendre en compte le résultat imposable de la location meublée dans les revenus auxquels sont comparées les recettes de cette activité pour l'appréciation du critère de professionnalité.
Pour être considéré comme loueur en meublé professionnel, il suffit actuellement soit de tirer de cette activité des recettes au moins égales à 23 000 euros par an, soit d'en tirer des recettes atteignant au moins la moitié de son revenu professionnel. Le dispositif est extrêmement avantageux car les loueurs professionnels sont soumis à l'impôt sur le BIC – bénéfice industriel et commercial –, ce qui leur permet d'amortir la totalité du bien et de déduire les intérêts d'emprunt. Les déficits sont très importants, en particulier les premières années, et une dérogation à la règle générale dite de « tunnellisation » permet de les imputer sans plafonnement sur son revenu global.
Le Gouvernement a décidé de plafonner ce dispositif, mais, ce faisant, il a été extrêmement loin puisque les deux conditions de l'appréciation du critère de professionnalité deviendraient cumulatives, ce qui éliminerait des dizaines de milliers d'investisseurs, notamment des commerçants et artisans.
Il a reconnu qu'il ne pouvait laisser l'article 44 en l'état. Un avantage spécifique doit être maintenu pour des investissements d'intérêt général – résidences avec services pour personnes âgées ou handicapées, résidences étudiantes, voire résidences de tourisme. L'imputation du déficit sur le revenu global serait remplacée par une réduction d'impôt. D'après les professionnels que j'ai consultés, la réduction d'impôt pourrait être de 5 % du montant de l'investissement et limitée à 25 000 euros.
Mon premier amendement a pour but d'éviter qu'un contribuable ne puisse, pour l'appréciation du critère de professionnalité, diminuer artificiellement ses revenus à hauteur du déficit.
La Commission adopte cet amendement.
La Commission est saisie de deux amendements du Rapporteur général :
– le premier tendant à créer, au bénéfice des loueurs non professionnels, une réduction d'impôt égale à 5 % du montant des investissements destinés aux résidences pour les personnes âgées et dépendantes et les étudiants, cette réduction d'impôt étant plafonnée à 25 000 euros par an ;
– le second tendant à interdire aux loueurs non professionnels d'imputer un déficit sur leur revenu global.
Ayant imposé aux investisseurs la règle du cumul, le Gouvernement a souhaité leur accorder une compensation : s'ils doivent quitter le statut de meublés professionnels, ils peuvent conserver le régime des BIC, avec en outre la possibilité d'une « détunnellisation » partielle à hauteur du montant retenu pour les revenus fonciers, soit 10 700 euros.
En bref, quelqu'un qui a investi dans les dispositifs de Robien et Borloo n'a droit qu'à un amortissement partiel – 65 % de la valeur du bien – alors que le régime des loueurs meublés non professionnels, donc des bénéfices industriels et commerciaux, lui permet d'amortir la totalité de son investissement. En outre, il peut déduire la totalité des intérêts de son emprunt et conserve l'imputation de 10 700 euros sur son revenu global. Il y a donc une incohérence entre ces deux dispositifs, c'est pourquoi je vous propose de conserver la « tunnellisation ».
Aujourd'hui, si 50 % des résidences de tourisme sont réalisées sous le régime des meublés non professionnels, c'est que le régime des bénéfices industriels et commerciaux permet de déduire les intérêts. C'est d'ailleurs l'argument du Gouvernement pour nous dissuader de faire une exception pour les résidences de tourisme.
La « détunnellisation » de 10 700 euros est beaucoup plus avantageuse que l'investissement locatif, puisqu'elle accorde le même droit d'imputation sur le revenu global – jusqu'à 10 700 euros de déficit – mais également celui d'amortir la totalité du bien et d'imputer la totalité des intérêts, et cela sans plafonnement des loyers ni des ressources du locataire. En revanche, il convient de conserver, pour certaines résidences avec service, une incitation spécifique sous la forme de réduction d'impôt.
Le dispositif antérieur, favorable aux investisseurs, a permis un certain nombre de rénovations, notamment dans les villages du type VVF. Qu'en sera-t-il si cet amendement est adopté ?
L'amendement va dans le bon sens, mais il faudra bien traiter la question des résidences de tourisme.
La « tunnellisation » s'applique aux revenus fonciers, sauf à la somme de 10 700 euros. Est-ce cohérent ?
Oui, puisque les BIC offrent des possibilités bien supérieures en matière de création du déficit.
Peut-être, mais dans le régime foncier, on a le droit d'imputer l'ensemble des investissements sur les revenus fonciers dès la première année, sans pouvoir toutefois les reporter, à part 10 700 euros par an, sur les autres revenus.
En matière d'investissement locatif, l'effet d'aubaine a supplanté toute autre considération, de sorte que nous risquons de voir se multiplier les friches touristiques. Je peux en témoigner, en tant que président d'une petite station de ski : les dispositifs fiscaux de type « Demessine » ont totalement perturbé le marché, l'offre étant devenue supérieure à la demande.
Le Gouvernement ne souhaite pas intégrer les résidences de tourisme au dispositif. J'ai tenté de le faire évoluer. Le Gouvernement nous oppose que les résidences de tourisme peuvent être financées grâce au régime des loueurs meublés non professionnels, et que des friches touristiques commencent à se développer.
Il est nécessaire de mettre en place un dispositif pour les résidences de tourisme. Il y a deux enjeux. Dans certaines zones, de façon limitée, il s'agit de réaliser de nouvelles constructions – j'ai d'ailleurs déposé un certain nombre d'amendements, certains en collaboration avec Michelle Demessine, en vue de faciliter ces constructions, mais aussi de mieux encadrer le dispositif actuel. Par ailleurs, le ministre du budget Éric Woerth a pris des dispositions réglementaires en ce sens. Certains investisseurs se sont engagés sur des loyers trop élevés. De plus, en cas de défaillance, le gestionnaire de la résidence peut quitter le bail sans que le propriétaire du lot puisse négocier. Nous avons donc prévu d'encadrer le dispositif.
Mais l'enjeu le plus important est de faciliter la réhabilitation du parc existant. Nous avons besoin pour cela et du régime des loueurs meublés professionnels, et du dispositif destiné aux résidences de tourisme. C'est un enjeu considérable, car les constructions des années 1970 ne sont plus adaptées aux attentes de la clientèle.
Les nouvelles exigences environnementales exigent également des aménagements ponctuels. Laisser le tourisme en dehors de cette approche serait une catastrophe économique, d'autant que dans notre pays, la majorité du parc d'hébergement locatif touristique est en résidences de tourisme. Or, la réhabilitation est un véritable échec.
Je partage totalement le point de vue de Michel Bouvard : nous ne devons pas exclure les résidences de tourisme du dispositif.
Je vous propose d'adopter mon amendement modifié pour intégrer les résidences de tourisme classées. S'agissant des réhabilitations, elles posent peut-être un problème plus général, qui concerne aussi les résidences pour les personnes âgées et dépendantes et les étudiants : je vous propose de travailler à un sous-amendement au titre de l'article 88.
Il ne s'agit pas de freiner la réalisation d'opérations immobilières, mais de réduire les excès des produits défiscalisés.
La Commission adopte l'amendement du Rapporteur général ainsi complété ; M. Jérôme Cahuzac retire un amendement de même objet. La Commission adopte également le second amendement du Rapporteur général rétablissant la « tunnelisation ».
La Commission adopte l'article 44 ainsi modifié.
Après l'article 44 :
La Commission est saisie de deux amendements du président Didier Migaud tendant à instaurer un impôt minimum alternatif qui serait égal à la différence entre l'impôt effectivement payé majoré de 20 000 euros et celui que produirait l'application d'un barème spécifique minoré du revenu pris en compte pour le calcul du droit à restitution au titre du bouclier fiscal.
Le plafonnement global des niches fiscales va dans le sens d'une plus grande justice fiscale, et, à ce titre, les propositions du Rapporteur général constituent un réel progrès par rapport à la situation existante, même si les seuils qui ont été fixés permettront toujours à certains contribuables d'échapper à l'impôt.
Cet amendement vise à remédier à cet inconvénient en créant un impôt minimum alternatif, selon un barème propre à corriger les défauts de la progressivité actuelle de l'impôt sur le revenu – nonobstant un abattement de 20 000 euros. Autrefois envisagée par Pierre Méhaignerie et Charles de Courson, cette disposition a le mérite de conjuguer justice fiscale et efficacité, étant entendu que certaines niches fiscales présentent un intérêt économique.
Si ce dispositif est adopté, il faudra naturellement actualiser régulièrement les seuils, sous peine d'en subir les effets pervers, comme aux États-Unis, où le dispositif n'avait pas été actualisé.
Notre réflexion s'est développée à trois niveaux. Les deux premiers, le plafonnement des niches fiscales prises une à une et leur plafonnement global, font l'objet d'un consensus. Quant à la création d'un impôt minimal, je n'y suis pas favorable, essentiellement pour des raisons politiques : nos concitoyens risquent de croire que désormais chaque Français paiera l'impôt sur le revenu ! En revanche, le plafonnement des niches est beaucoup plus populaire, car il est perçu comme ne visant que les revenus les plus élevés.
L'impôt minimal consiste à intégrer dans un barème idéal tous les avantages fiscaux, y compris ceux liés à des situations subies, tandis que le plafonnement global ne concerne que les dépenses fiscales choisies par les contribuables. C'est donc un dispositif mieux ciblé.
J'ai lancé naguère l'idée d'impôt minimum alternatif, mais j'y ai renoncé depuis : cela suppose de définir un impôt « pur », ce qui contraindrait à reconstituer les revenus avant déductions et cotisations, à redéfinir un nouveau barème, à réduire les avantages fiscaux supérieurs aux 20 000 euros du différentiel et à résoudre le problème de la pluriannualité. C'est s'engager dans une entreprise démesurée. En raison de l'incroyable complexité de l'impôt sur le revenu et de la sédimentation des dispositifs, l'approche que va nous proposer le Rapporteur général – le plafonnement global des niches – me paraît plus opérationnelle. Je rappelle que l'Alternative Minimum Tax, aux États-Unis, a totalement dérivé, au point que 25 % des contribuables l'acquittent aujourd'hui.
Les 5 000 personnes qui perçoivent les revenus les plus élevés se voient appliquer un taux moyen d'imposition sur le revenu de 36 %, tandis que le taux pour les 100 personnes les plus riches est de 25 %. L'impôt sur le revenu est donc bien devenu un impôt régressif et non plus progressif. L'effet combiné des niches, fussent-elles plafonnées, et du bouclier fiscal, souhaité par la majorité, aboutit à un système qui n'est pas juste. J'entends bien vos critiques sur l'impôt minimum, mais que proposez-vous pour rendre à nouveau l'impôt progressif ? Avec le dispositif de plafonnement global, 95 % de ceux qui défiscalisent aujourd'hui continueront de le faire.
Ce débat montre bien que notre fiscalité est à bout de souffle, de plus en plus opaque, de moins en moins progressive et efficace. Le plafonnement analytique des niches et leur plafonnement global constituent un progrès incontestable, mais ne résolvent pas les problèmes de justice fiscale.
Nous ne pourrons pas faire l'économie d'une réflexion sur notre fiscalité directe. C'est là tout l'objet de cet amendement, dont je connais par avance le sort. J'entends les arguments politiques du Rapporteur général. Ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu et ceux qui ne bénéficient pas de niches fiscales ne sont pas concernés, mais je reconnais que la pédagogie dont aurait à faire preuve la majorité n'est pas des plus évidentes.
La commission rejette les deux amendements du Président.
Article additionnel après l'article 44 : Plafonnement global de certains avantages fiscaux propres à l'impôt sur les revenus :
La Commission est saisie d'un amendement du Rapporteur général tendant à plafonner à un montant égal à 10 % du revenu imposable majoré de 25 000 euros la somme globale d'avantages fiscaux retirés par un contribuable.
Cet amendement reprend l'assiette du plafonnement global prévu par la loi de finances pour 2006, mais annulé par le Conseil constitutionnel en raison de son inintelligibilité et de son imprévisibilité.
Nous avons donc retenu les niches qui relèvent du choix du contribuable – investissement locatif, avantage Madelin, investissement outre-mer, emploi à domicile – et non celles qui relèvent d'une situation « subie » – installation d'équipements en raison d'un handicap, versement d'une prestation compensatoire à la suite d'un divorce, etc.
Nous avons également exclu du dispositif les avantages fiscaux applicables à la fois à une société et à une entreprise individuelle, pour ne pas défavoriser cette dernière.
En revanche, il convenait d'inclure deux dispositifs créés depuis 2005 : la réduction d'impôt au titre de travaux de conservation ou de restauration d'objets classés et le crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt supportés pour l'acquisition ou la construction de l'habitation principale.
Sachant que le plafond global ne peut être inférieur au plus élevé des plafonds individuels – 40 000 euros après restitution – mais qu'il convient aussi de raisonner en pourcentage du revenu, nous vous proposons de prévoir un plafonnement global correspondant à 25 000 euros plus 10 % du revenu.
Un dispositif alternatif, qui permettrait d'opter entre une somme plafond – 50 000 euros – et un pourcentage du revenu brut – 10 ou 15 % –, instituerait une discontinuité en créant une « zone grise » de contribuables dont le plafond serait fixe alors que leur cotisation d'impôt augmenterait.
La solution retenue a été testée. Il s'agit d'un dispositif très puissant de réintégration de l'impôt. Les très gros revenus, qui se voient appliquer un taux marginal de 40 %, pouvaient défiscaliser la totalité ; désormais, ils ne pourront plus défiscaliser que 10 % de leurs revenus : ce dispositif permet donc de réintégrer les trois quarts de l'impôt dû. Cela pourrait concerner 3 000 contribuables, pour un produit attendu, y compris l'effet des mesures de plafonnement dispositif par dispositif, de l'ordre de 200 millions d'euros. L'impôt redevient progressif.
Je ne comprends pas le raisonnement qui consiste à relier bouclier fiscal et plafonnement global – deux concepts très différents – au point de proposer un amendement visant à réintégrer la majoration d'impôts dans le bouclier afin que celui-ci n'efface pas la perte de l'avantage fiscal due au plafonnement. Il y a peut-être quinze ou vingt personnes qui à la fois bénéficient du bouclier fiscal et défiscalisent au point d'être concernées par le plafonnement global.
Il peut s'agir de personnes qui bénéficient du dispositif Malraux. Le Président a soulevé le fait qu'il n'était pas normal de minorer le revenu pris au dénominateur à hauteur des défiscalisations d'assiette, mais puisque nous venons de transformer cet avantage en réduction d'impôt, l'amendement du Président présenté en première partie est, par construction, satisfait.
Le dispositif que je préconise, d'une grande simplicité, prévoit que le bouclier fiscal s'applique aux revenus réels, non minorés. C'est un principe que les contribuables saisiraient parfaitement et qui contribuerait à légitimer le bouclier fiscal. Vous avez tort de ne pas aller jusqu'au bout !
L'équité fiscale est une notion chère à notre pays. Mais la crise actuelle pourrait être la pire que nous ayons jamais connue et conduire au tapis 20 % de nos entreprises avant le mois d'avril. Déjà les chefs d'entreprises, devant la baisse des commandes, craignent de voir fondre leur trésorerie et leurs fonds propres et d'aucuns songent à fermer et partir. Cela n'est encore qu'une hypothèse, mais si nous devions voir un million de personnes perdre leur travail, l'intérêt national n'exigerait-il pas alors de traiter de façon exceptionnelle les niches concernant le renforcement des fonds propres des entreprises ?
Nous devons conserver toute notre capacité à attirer les capitaux et les talents. Ce sont ceux qui gagnent plusieurs millions d'euros par an qui nous aideront à sortir de la crise.
Le clivage gauche-droite et nos antiennes sur le capital doivent s'effacer devant le sauvetage de notre économie, de l'emploi marchand, du niveau de vie, qui dépendent, je le rappelle, des entreprises. C'est un tsunami qui nous attend !
Je suis d'accord sur le principe du dispositif proposé par le Rapporteur général. Mais tracer la ligne de partage entre les situations « subies » et les avantages relevant d'un choix me semble quelque peu hasardeux, s'agissant par exemple de l'épargne retraite ou des dons.
Mais soyons pragmatiques : ne rêvons pas à un système parfait, qui, s'il existait, risquerait d'être invalidé par le Conseil constitutionnel. Commençons avec ce dispositif, quitte à le compléter les prochaines années.
Le Président souhaitait que les avantages retraite soient inclus dans le champ, mais il lui a été répondu qu'il s'agissait d'une situation subie, tout le monde étant appelé à vieillir. Les dons ne figurent pas non plus dans l'assiette car on estime qu'ils sont consentis à fonds perdus.
Monsieur Fourgous, le débat n'est pas entre le capital et le travail. Nous avons été très nombreux sur nos bancs à dénoncer l'absence d'une politique de l'offre et nous avons signalé, dès 2007, la baisse de la capacité d'autofinancement, l'écroulement de l'investissement et la grande difficulté des entreprises à obtenir des concours bancaires. Nous sommes au moins aussi sensibles que vous au sort des entreprises, mais c'est à vous d'adopter des dispositions qui leur soient favorables. Or je constate, à regret, que les dispositifs mis en place ne fonctionnent pas.
Il est indéniable que certains avantages fiscaux relèvent d'une situation subie, mais pour d'autres, l'interprétation est plus litigieuse. Il est difficile de nettoyer le code des impôts et je salue le travail remarquable du Rapporteur général à cet égard.
Le produit fiscal – 200 millions – que ce dispositif permettra de préserver est de 60 millions inférieur au coût du bouclier fiscal.
L'exemple d'un revenu d'un million d'euros a certes été judicieusement choisi, mais regardons plutôt du côté des mille plus hauts revenus, supérieurs à 2,5 millions : pour eux la défiscalisation peut s'élever jusqu'à 295 000 euros : cet étrange dispositif, qui rapporte de l'argent à l'État pour des revenus inférieurs, ne changera en l'occurrence rien pour eux.
Notre discussion a lieu dans un moment crucial et, si nous entendons les arguments invoqués à propos du bouclier fiscal, la question de la participation de chacun à l'effort collectif n'en demeure pas moins posée. En tout état de cause, il m'aurait paru plus judicieux de retenir la proposition du président Migaud relative à l'impôt minimum.
Je tiens tout de même à souligner que la défiscalisation implique pour le contribuable de participer également à l'effort national, quoique sur un mode différent. En outre, elle contribue également à soutenir les classes moyennes, par exemple en favorisant le développement des emplois à domicile. Enfin, elle permet à l'État de réaliser des économies, comme dans le cadre des dispositifs « Malraux » ou relatifs aux DOM-TOM et à la création d'entreprises.
De plus, dans le contexte que nous connaissons, il importe de donner un signal fort visant à renforcer les fonds propres des PME. J'ai ainsi constaté dans le cadre de la mission parlementaire dédiée à cette question combien l'amorçage, en particulier, était délicat pour les jeunes entreprises et j'ai déposé un amendement visant à modifier le plafond du dispositif « Madelin » afin d'essayer d'améliorer leur situation.
La réduction d'impôt sur la fortune visant à favoriser l'investissement des PME s'est révélée très efficace. Alors que la dépense fiscale s'élevait à 180 millions dans le cadre du dispositif Madelin, elle est désormais, après un an, de 620 millions au titre de la réduction d'ISF. En outre, s'il est sans doute possible d'aider au développement de l'amorçage, je m'interroge sur la méthode : comment, dans un même budget, plafonner un certain nombre d'avantages et en « déplafonner » d'autres ? Le collectif budgétaire serait un support plus adéquat. J'ajoute que la réduction d'impôt Madelin étant égale à 25 % du montant du versement et limitée à 40 000 euros par an pour un couple, nous disposons d'une petite marge.
Enfin, je rappelle qu'au moment de la grande crise de 1929, Roosevelt a augmenté fortement les impôts des plus hauts revenus - c'est également ce que M. Obama s'apprête à faire, de même que les gouvernements anglais et allemands. Si l'on veut que l'État solidaire intervienne, il faut qu'il en ait les moyens.
Il n'est en rien contradictoire de veiller à la fois à plafonner les niches et à mieux les flécher, notamment afin de favoriser l'amorçage.
En sa sagesse, le Nouveau Centre n'est favorable ni à une baisse ni à une hausse des prélèvements obligatoires. Dans la loi de programmation, leur taux, d'ailleurs, demeure fixé à 43,2 % et je m'en réjouis car il convient d'améliorer l'état de nos finances publiques avant de songer à baisser les impôts.
Par ailleurs, quid de la rétroactivité potentielle de plafonnement global, en particulier en ce qui concerne les avantages pluriannuels ?
Il ne sera pas tenu compte dans le calcul du plafond des avantages résultant d'opérations engagées avant le 1er janvier 2009.
Le montant de 200 millions évoluera donc mais à quelle hauteur ? De plus, comment les investisseurs se comporteront-ils, en particulier dans les DOM-TOM d'où proviendra l'essentiel des économies réalisées ? Quid, donc, de la substituabilité ?
En l'occurrence, elle sera limitée compte tenu des montants énormes de la défiscalisation prévue par l'article 199 undecies B. Ce sont des impôts supplémentaires qui, en grande partie, seront perçus.
Quid d'éventuelles migrations fiscales même si l'impôt sur le revenu, dans notre pays, n'est pas aussi lourd que certains le prétendent ?
Je n'y crois pas : d'une part, notre réforme de l'impôt sur le revenu nous permet désormais d'être compétitifs – taux marginal de 40 %, intégration dans le barème des 20 % d'abattement. Un quart de la baisse de l'impôt sur le revenu a ainsi concerné les 100 000 plus hauts revenus. D'autre part, seul un petit nombre de contribuables très fortunés pratiquent une défiscalisation outrancière. En outre, selon une étude demandée par M. Migaud en 1998, les départs pour raisons fiscales – un par jour à ce moment-là - étaient motivés par la conjonction de l'ISF et de l'IR. Il est vrai que, s'ils sont bien moins nombreux à quitter notre pays aujourd'hui, nous ne savons pas pour autant ce qu'il en est d'éventuels retours.
Si je salue l'honnêteté de M. le Rapporteur général – notre système d'imposition est en effet très compétitif - je répète que le surcroît d'imposition escompté ne concerne pas les bénéficiaires du bouclier fiscal.
Le bouclier fiscal ne s'applique pas qu'au seul revenu mais à la CSG, à l'ISF, aux impôts locaux, aux prélèvements sociaux, etc. Le problème demeure d'ailleurs de savoir quel devrait être son contenu exact.
Ne pourrait-on pas réaliser une étude précise sur ces contribuables qui quittent encore notre pays ?
M. Piketty en a déjà rendu une fort intéressante voilà deux ans.
La Commission adopte l'amendement du Rapporteur général relatif au plafonnement global.
Elle rejette ensuite deux amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant à plafonner globalement respectivement la réduction du revenu imposable et la réduction d'impôt.
Article additionnel après l'article 44 : Limitation du bénéfice de la demi-part attribuée aux personnes vivant seules et ayant élevé des enfants :
La Commission examine deux amendements de M. Charles de Courson tendant à limiter le bénéfice de la demi-part attribuée après le départ des enfants aux personnes qui ont élevé seules des enfants pendant au moins dix années, selon le premier amendement, et pendant au moins cinq années selon le second, à aligner le plafond de l'avantage fiscal en résultant à 855 euros et à le réduire progressivement pour les bénéficiaires actuels du dispositif perdant cette demi-part supplémentaire du fait de la réforme proposée.
Le droit fiscal récompense les ruptures d'union alors qu'il devrait être neutre s'agissant de la situation maritale de chacun. L'objet de ces deux amendements est de mettre fin à cette anomalie fiscale en cessant progressivement d'accorder le bénéfice de la demi-part aux contribuables qui n'ont pas élevé seuls leurs enfants et de le limiter à ceux qui ont élevé seuls ces enfants pendant au moins dix ou cinq ans – ce dernier délai ayant d'ailleurs recueilli l'accord de nos collègues de gauche.
L'idée du Gouvernement est plutôt de supprimer totalement l'avantage – avec une sortie en biseau –, une fois le dernier enfant parti du foyer fiscal. En attendant, je propose d'adopter l'amendement prévoyant un délai de cinq années. Il n'est que temps, depuis 1996, de lancer, de façon douce, le débat sur la pertinence de ce dispositif.
Après que M. Charles de Courson a retiré le premier amendement, la Commission adopte le second qui instaure le délai de cinq années.
Après l'article 44 :
La Commission rejette un amendement de M. Charles de Courson visant à réduire l'avantage fiscal octroyé aux contribuables domiciliés dans les départements d'outre-mer.
Elle est ensuite saisie de deux amendements de M. Nicolas Forissier tendant à quintupler le plafond de la réduction d'impôt sur le revenu pour les personnes physiques souscrivant au capital des PME en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion.
Cet amendement, qui vise à modifier le dispositif Madelin, avait été adopté par la Commission lors de l'examen du projet de loi de modernisation de l'économie, mais retiré en séance à la demande du Gouvernement afin qu'il soit plutôt présenté en loi de finances.
Il tend à flécher davantage le dispositif en direction des petites entreprises en phase d'amorçage et de démarrage en portant les plafonds annuels des versements ouvrant droit à la réduction d'impôt sur le revenu à 100 000 euros pour une personne seule et à 200 000 euros pour un couple au lieu de respectivement 20 000 et 40 000 euros aujourd'hui. La réduction d'impôt correspondante, située à 25 %, passerait donc dans le même temps de 5 000 ou 10 000 euros à 25 000 ou 50 000 euros.
Il s'agit à la fois d'augmenter le nombre des business angels – les investisseurs providentiels – et de concentrer l'avantage fiscal sur l'entreprise au moment où, une fois constituée, elle a besoin des premiers 400 000 ou 500 000 euros nécessaires pour se développer, par exemple à l'exportation. C'est en effet à ce moment de sa vie que la PME a des difficultés pour trouver des investisseurs, et non lorsqu'elle est bien assise : le secteur bancaire ou les fonds d'investissement sont alors là pour répondre à ses besoins de recapitalisation.
Le dispositif actuel continuerait à s'appliquer, mais il serait « dopé » dans le cas d'investissement spécifique dans les PME en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion. Je parle là de petites entreprises au sens communautaire du terme, c'est-à-dire des entreprises comptant moins de 250 salariés – en l'occurrence moins de 50 salariés, précision qui pourrait d'ailleurs faire l'objet d'un sous-amendement – et moins de 10 millions d'euros de total de bilan.
Ce serait là un moyen de renforcer en fonds propres les petites entreprises, qui se heurtent actuellement au credit crunch. C'est en effet à l'amorçage que les risques sont les plus grands, et les seuls à même de prendre un risque, ce sont justement les business angels, ces cadres supérieurs ou ces personnes qui ont vendu leur entreprise et souhaitent investir dans le développement d'une autre, au lieu de faire simplement des placements ou de la déductibilité fiscale de confort.
Il convient d'autant plus de développer le nombre des investisseurs providentiels – on n'en compte en France que 4 000 ou 6 000 contre 40 000 en Grande-Bretagne et 400 000 aux États-Unis – dont l'intervention – toutes les études le montrent – permet de créer énormément d'emplois.
En outre, le dispositif ne coûterait rien car il s'appliquerait pour 95 % à la même population qui aujourd'hui défiscalise dans d'autres domaines, mais qui, devant l'attractivité de la mesure, flécherait sa défiscalisation vers la création et le développement d'entreprises plutôt que vers le patrimoine ou la location meublée.
Je ne peux qu'être favorable à une amélioration du dispositif Madelin en faveur des entreprises en phase d'amorçage. L'amendement soulève cependant plusieurs problèmes.
D'une part, la multiplication par cinq du plafond annuel de versements aboutirait pour un ménage à une réduction d'impôt de 50 000 euros, soit une somme très supérieure au plafond examiné précédemment. Un doublement du plafond me paraîtrait plus raisonnable, soit 20 000 euros de réduction d'impôt pour un ménage. Un minimum de cohérence est nécessaire entre les différents plafonds.
D'autre part, le dispositif Madelin n'a jamais été notifié à la Commission européenne. Dès lors que l'on modifie substantiellement ce mécanisme très ancien, il faudra alors le notifier à Bruxelles sans savoir ce que sera sa réaction.
Enfin l'amendement, tel qu'il est rédigé, conduirait toutes les entreprises en phase d'amorçage à être éligibles, y compris par exemple un commerce de textile, alors que nous avons tous plutôt à l'esprit les JEI, les jeunes entreprises innovantes.
Un commerçant en textile peut déjà bénéficier du dispositif Madelin qui plafonne la réduction d'impôt à 5 000 ou 10 000 euros. La mesure que je propose s'adresse aux PME au sens communautaire du terme – ce qui devrait éviter tout problème en la matière avec la Commission européenne –, et oriente la défiscalisation de sommes élevées en direction d'entreprises innovantes en développement qui ont besoin de capitaux importants.
S'il faut en tout cas se caler sur les 40 000 euros de réduction d'impôt pour investissement productif dans les DOM-TOM, je suis prêt, pour ma part, à multiplier par quatre et non plus par cinq les plafonds de versements actuels, soit 80 000 et 160 000 euros.
C'est oublier que, contrairement à l'outre-mer, cette mesure comporte une contrepartie patrimoniale.
La mesure proposée est séduisante, mais vaine. Nous n'avons plus en effet les moyens de créer une dépense fiscale supplémentaire. Si le Gouvernement et sa majorité estiment que le choix des entreprises est prioritaire aujourd'hui – ce que je ne suis pas loin de penser – qu'ils réorientent alors la dépense fiscale actuelle vers les entreprises !
Le choix doit rester à l'initiative de chaque contribuable. En outre, contrairement aux autres niches, celle-ci implique de courir un vrai risque. On peut donc très bien permettre d'investir davantage en la matière.
L'argument soulevé par le Rapporteur général concernant la réaction de la Commission de Bruxelles ne devrait pas poser de problème puisque l'amendement porte sur les PME au sens communautaire du terme.
Le problème est que le dispositif proposé porte sur les entreprises innovantes de moins de 50 salariés, ce que ne sous-entend pas la notion communautaire de PME de moins de 250 salariés. La cible n'est pas la même.
Dans sa notion d'entreprise communautaire, Bruxelles prend en tout cas en compte les différentes phases d'amorçage, de démarrage et d'expansion. L'idée de soutenir les entreprises de moins de 50 salariés – comme je le proposais par un sous-amendement – et de moins de 10 millions d'euros de total de bilan, en phase d'amorçage, n'est pas contradictoire avec cette notion.
S'agissant par ailleurs de la multiplication par cinq des plafonds annuels de versements, j'ai bien compris l'argument de M. le Rapporteur général, et je ne serai pas défavorable également, le dispositif Madelin n'ayant pas été réévalué depuis des années, à un doublement.
À condition que la mesure ne porte que sur le segment amorçage et non sur l'ensemble du dispositif Madelin.
Quant à la réévaluation, les possibilités de report ont été améliorées en 2007.
Il est toujours surprenant de voir limiter l'utilisation d'un dispositif avantageux. Souvent, c'est l'État qui est là pour faire marcher l'économie.
Or voilà que ce sont des particuliers qui, avec le très bon dispositif proposé, prendront des risques : il y a vraiment une contradiction à vouloir le limiter.
À condition de préciser la cible visée et de prévoir un plafond de réduction d'impôt moins important, je serais prêt à accepter l'amendement.
Entre une multiplication par deux ou par cinq de l'avantage fiscal, peut-être la Commission pourrait-elle accepter un triplement, en raison de la prise de risque de l'investisseur ? Faute de rattrapage depuis quinze ans, cet avantage a dû perdre au moins 40 % de sa valeur.
Ainsi que l'a fait remarquer Mme Arlette Grosskost, il y a une vraie prise de risque, y compris au regard des investissements dans les DOM-TOM.
Quant aux choix que M. Cahuzac nous demande de faire, j'estime pour ma part qu'il n'y a pas à choisir puisque la population de contribuables concernée est la même, à savoir celle qui défiscalise déjà. C'est d'ailleurs pourquoi j'estime que le coût fiscal de la mesure serait marginal voire inexistant.
S'agissant de l'ISF évoqué incidemment par Gilles Carrez, si certaines possibilités d'investissement ont quelque peu détourné l'objectif initial du dispositif Madelin, nombre de personnes qui ne payent pas cet impôt ont tout de même envie d'être des investisseurs providentiels. Tout argument selon lequel la mesure permettrait surtout de ne pas payer d'ISF n'est donc pas recevable.
Je ne sais par ailleurs si le quintuplement de l'avantage est excessif. En tout cas, j'ai compris qu'il ne fallait pas dépasser, dans le cadre d'un équilibre général, les 40 000 euros de réduction d'impôt prévus pour l'investissement productif outre-mer. On peut s'en tenir à cette ligne raisonnable. Après tout, défiscaliser pour des petites entreprises qui vont créer de l'emploi vaut autant que défiscaliser dans les DOM-TOM. Le problème avant tout est en effet de trouver une incitation suffisamment forte pour drainer des investisseurs providentiels vers les PME.
Je reviens sur l'argument selon lequel il faudrait notifier la mesure à la Commission européenne si le dispositif Madelin est par trop changé. Il n'y aura pas besoin de notification si le plafond de 40 000 euros est retenu, puisqu'il ne correspondrait alors qu'à une réactualisation du dispositif sur quinze ans.
Reste le problème de la cible. Une pizzeria en phase d'amorçage à La Châtre pourrait être éligible alors que cela ne semble pas être.
Il est possible que le Gouvernement soit ouvert à la mesure proposée sous réserve que le dispositif Madelin ne risque pas une obligation de notification et que la cible soit bien définie. Aussi, je propose à M. Forissier de réexaminer ensemble son amendement et de le déposer ultérieurement.
Il faut bien encadrer la mesure si l'on ne veut pas louper la cible, comme cela est arrivé dans les DOM-TOM.
M. Nicolas Forissier retire ses deux amendements.