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Éric Raoult
Question N° 87460 au Ministère de l'Outre-mer / Outre-mer


Question soumise le 7 septembre 2010

M. Éric Raoult attire l'attention de Mme la ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l'outre-mer, sur la nécessité de mener une lutte sans merci contre la miconia. En effet, cette plante verte se développe de manière endémique et finit par étouffer la diversité végétale de la forêt polynésienne. La prolifération de cette plante mériterait d'être vivement combattue par les pouvoirs publics et les collectivités car la miconia menace les autres espèces végétales de nombreuses îles en Polynésie. Il est donc nécessaire de placer l'éradication de ce végétal en priorité indispensable pour les îles du Pacifique, notamment en Polynésie française. Il lui demande donc de lui préciser quelles sont les actions qu'elle compte promouvoir en ce domaine.

Réponse émise le 26 juillet 2011

L'espèce Miconia calvescens a été introduite à Tahiti en 1937 en tant que plante ornementale. Son expansion représente une véritable catastrophe écologique. L'espèce occupe actuellement plus des deux tiers de l'île (soit près de 80 000 ha), touchant principalement les zones humides, entre le niveau de la mer jusqu'à environ 1 400 m d'altitude dans les zones où la pluviométrie lui est favorable (plus de 2 000 mm/an), et notamment la zone dite de forêts de nuages, qui rassemble plus de 56 % des espèces endémiques de la flore polynésienne. D'autres îles ont été aussi contaminées, suite à des introductions accidentelles (terre contaminée, graines, etc.), telles que Moorea (plus de 25 % de l'île envahie, avec plus de 2 000 ha), Raiatea 2,5 % (500 ha), Tahaa (15 ha) ou encore Nuku Hiva. D'abord classée espèce nuisible en 1990, elle a été déclarée espèce envahissante menaçant la biodiversité de la Polynésie française en 1998 (arrêtés n° 290 CM du 14 mars 1990, n° 244 CM du 12 février 1998 et n° 65 CM du 23 janvier 2006). Face à ce fléau, diverses mesures ont été prises en faveur de la sauvegarde et de la protection de l'environnement, et plus particulièrement du patrimoine naturel de la Polynésie française. Un programme de lutte biologique contre le Miconia a été engagé par le Gouvernement polynésien (délégation à la recherche) en 1997, en collaboration avec le département d'agriculture et l'université de Hawaï. Ce programme a permis, dans un premier temps, de dresser la liste des plantes introduites, envahissantes, dont Miconia calvescens, et d'en inscrire les plus dangereuses sur la liste des espèces menaçant la biodiversité de la Polynésie française (arrêté n° 244/CM du 12 février 1998). Dans un second temps, il a conduit à l'identification d'un ennemi naturel, le champignon pathogène Colletotrichum gloeosporiodes forma specialis miconiae ou Cgm, ne s'attaquant qu'à Miconia. En avril 2000, le Cgm a été introduit dans une première zone test de Tahiti, vers 620-640 m d'altitude, dans une zone très envahie et très humide (l'eau est un facteur essentiel à la reproduction de ce champignon), puis, en octobre 2002, dans une seconde zone-test au dessus du lac Vaihiria. En février 2004, il a été constaté la dissémination dans toute l'île, depuis ces zones-test, du Cgm, sans intervention humaine. Le suivi scientifique, initié en 2005 avec l'installation de 8 stations d'étude sur 4 sites de Tahiti (mont Marau, mont Aorai, pic Vert, et mont Atara) s'est poursuivi en 2007 et 2009, avec l'installation de 3 stations d'étude supplémentaires. Les derniers rapports techniques issus de ce suivi ont montré qu'il n'y avait pas de perte apparente d'efficacité du Cgm entre 2007 et 2010 et qu'il n'y avait pas non plus de variations intra-annuelles (entre les saisons sèches et humides) du taux d'efficacité du Cgm. Toutes les populations de Miconia sont désormais infectées entre 10 et 1 150 m d'altitude, y compris les plants isolés en forêt naturelle humide de montagne (supérieur à 900 m d'altitude). Face à ces résultats encourageants, il convenait de maîtriser la culture de la souche pour disposer sur place, en, Polynésie de quantités suffisantes de Cgm pour lutter contre les invasions dans les autres îles. À cet effet, une étudiante de l'institut Louis-Malardé et le chargé de recherche de la délégation à la recherche polynésienne ont été formés par le département de l'agriculture d'Hawaï. Le champignon cultivé en laboratoire à l'institut Louis-Malardé a été ainsi introduit, en mars 2004, dans deux zones test, à Raiatea : vallées d'Uturaerae et de Tetooroa (après deux mois, la quasi-totalité des feuilles sur les plantules traitées présentait des dégâts foliaires). En juin 2006, le Cgm a été introduit en renforcement de la lutte manuelle et chimique sur Nuku Hiva, sur deux des quatre zones infestées (deux pouvant être contrôlées par arrachage manuel), situées sur des pentes très fortes (voire des falaises inaccessibles) et dans des vallons abrupts. La délégation à la recherche du Gouvernement polynésien poursuit le suivi scientifique de la lutte biologique contre le Miconia, avec pour principal objectif d'évaluer le succès de ce programme sur le long terme, une phase très souvent négligée en lutte biologique.

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