Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les conséquences, pour les petites communes rurales, de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques dite « loi sur l'eau » qui a redéfini les obligations d'entretien des cours d'eau non domaniaux. En remplaçant l'obligation de curage par celle « d'entretien conformément à l'article L. 215-14 », le nouvel article L. 215-2 du code de l'environnement a substitué pour les propriétaires riverains, une obligation de résultats à l'obligation antérieure de moyen, avec pour objectif de « maintenir le cours d'eau dans son profil d'équilibre, permettre l'écoulement naturel des eaux et contribuer à son bon état écologique ou, le cas échéant, à son bon potentiel écologique, notamment par enlèvement des embâcles, débris et atterrissements, flottants ou non, par élagage ou recépage de la végétation des rives ». Or, dans les petites communes rurales, l'entretien des cours d'eau est souvent réalisé dans le cadre d'opérations groupées qu'elles prennent en charge, en vertu de l'article L. 215-15 du code de l'environnement ou des usages locaux visés à l'article L. 215-15-1 du code de l'environnement. Depuis la loi sur l'eau, l'action des communes entraîne fréquemment des conflits avec les services de police de l'eau, voire des menaces de poursuites juridictionnelles. D'une part, il est souvent difficile, dans la pratique, de distinguer les cours d'eau des fossés qui eux ne relèvent pas du même régime d'obligations. D'autre part, dans de nombreuses communes rurales les opérations traditionnelles de curage des cours d'eau se trouvent contestées au nom de la lutte contre les inondations susceptibles de se produire en aval, sans que leurs nouvelles obligations d'entretien soient clairement précisées en termes d'actions et sans qu'il soit tenu compte des effets sur les propriétés immédiatement riveraines des cours d'eau laissés sans curage. Elle lui demande de bien vouloir lui indiquer comment ces petites communes rurales doivent concilier leurs compétences traditionnelles visées par les articles L. 215-15 et L. 215-15-1 du code de l'environnement et les nouvelles obligations découlant des articles L. 215-2 et L. 215-14 du même code, afin d'éviter la multiplication de ce type de contentieux, et s'il ne serait pas opportun d'introduire davantage de souplesse dans l'application des dispositions susmentionnées.
La loi sur l'eau et les milieux aquatiques de 2006 a effectivement remplacé l'obligation de curage des cours d'eau par les riverains, prévue à l'article L. 215-14 du code de l'environnement, par une obligation d'entretien régulier, en précisant de manière restrictive les moyens de l'assurer et en encadrant cette obligation par un principe global visant à contribuer au bon état écologique du cours d'eau. Le but de cette modification était bien de mettre fin à la pratique systématique du curage comme seule technique d'entretien de cours d'eau, compte tenu des dégâts très importants provoqués par cette pratique sur les milieux aquatiques, sans que la nécessité n'en soit à chaque fois démontrée. Les cours d'eau ne se réduisent pas à des évacuateurs d'eau, ni à des drains. Ils constituent avant tout des milieux naturels dont les fonctionnalités, lorsqu'elles sont respectées, rendent de nombreux services gratuits à la société et pour lesquels la directive-cadre européenne sur l'eau de 2000, nous impose l'atteinte du bon état écologique. Le mécanisme du transport sédimentaire constitue à la fois une de ces fonctionnalités naturelles essentielles et un des paramètres majeurs permettant d'atteindre le bon état écologique. Un curage systématique impacte négativement ce mécanisme. Il est donc justifié que l'obligation d'entretien du lit mineur, que la loi impose au riverain alors qu'il n'est pas en mesure d'établir un diagnostic à la bonne échelle de cours d'eau qui lui permettrait de savoir quand agir ou non, n'exige plus de curage systématique et se limite à une surveillance régulière de la végétation et de la formation d'embâcles potentiellement dangereux, et à des actions légères, ciblées, n'impactant pas le fonctionnement global du cours d'eau ni les milieux. Pour les mêmes raisons, cette loi de 2006 a également créé l'article L. 215-15 du code de l'environnement, qui fixe un cadre à la prise en charge volontaire de l'entretien des cours d'eau par les collectivités territoriales. Ce cadre est précisé par l'arrêté du 30 mai 2008 fixant les prescriptions générales des travaux d'entretien soumis à la police de l'eau. Cette prise en charge doit être menée dans le cadre d'un plan de gestion pluriannuel établi à une échelle hydrographique cohérente, permettant d'effectuer un diagnostic sédimentaire pertinent. Ce diagnostic permettra de définir les interventions réellement nécessaires et adaptées. Une opération de curage peut être prévue dans ce cadre si elle est justifiée. Le plan de gestion étant soumis à la police de l'eau, il devra contribuer, comme l'entretien du riverain, à l'atteinte du bon état écologique. Les dispositions des articles L. 215-14 et L. 215-15 du code de l'environnement sont donc cohérentes, visent le même objectif et ne sont pas inconciliables. Un guide sur le transport sédimentaire est en cours de préparation et devrait être publié avant cet automne. Il explique le fonctionnement de ce mécanisme, son importance tant pour la prévention des inondations que pour la diversité biologique, et les techniques actuelles permettant de le restaurer. Il contient également une partie juridique qui expose les textes législatifs ou réglementaires faisant référence à l'entretien, au curage, au profil du cours d'eau, au régime des eaux ou au transport des sédiments, sous l'éclairage des définitions techniques des termes utilisés. Il devrait permettre de mieux faire comprendre l'esprit des textes et leurs objectifs. En zone rurale, ces dispositions semblent plus complexes à mettre en oeuvre, mais ne sont pas injustifiées pour autant. En dehors de la confusion possible entre cours d'eau et fossés drainants ou évacuateurs des eaux de drainage, le maintien de l'écoulement normal des eaux dans les cours d'eau à pente quasi nulle et vitesses lentes est régulièrement contrarié par l'accumulation de fines due au lessivage des sols du bassin versant. Le colmatage du lit par ces fines, éventuellement polluées, est préjudiciable à l'écoulement des eaux comme aux milieux eutrophisés. Ces accumulations ne proviennent pas du mécanisme de transport sédimentaire du cours d'eau. Le curage est, dans ce cas, effectivement indispensable, et ni l'article L. 215-14 ni l'article L. 215-15 précités ne l'interdisent. Ce curage ne doit pas, pour autant, être réalisé sans précaution, ni sans réflexion préalable sur la technique la moins préjudiciable pour les milieux. Il ne doit conduire ni à un calibrage systématique en « u » du lit, ni à approfondir celui-ci ou l'élargir. Par ailleurs, si dans ces cas bien précis il est difficile momentanément de trouver une autre solution que le curage pour assurer l'écoulement des eaux, la seule solution durable répondant à ce problème est la réduction du phénomène de lessivage des sols, par des pratiques agricoles adaptées, et la mise en place de zones tampons au droit des berges capables d'empêcher l'arrivée des fines dans la rivière.
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