M. Éric Raoult attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie sur l'expression et l'organisation de la solidarité nationale à l'égard des familles comoriennes des victimes du crash de l'Airbus A310, qui s'est écrasé le 30 juin 2009. En effet, ces familles qui sont souvent de conditions très modestes, habitant les quartiers populaires, sur La Courneuve, Dugny, Aubervilliers et Sevran (Seine-Saint-Denis) ou sur Marseille et sa région ont été fortement éprouvées par ce drame. Ces familles ont été livrées à elles-mêmes, durant plusieurs jours, et ont été l'objet de désinformation et de manipulation de la part d'élus qui n'ont pas hésité à utiliser leur état de faiblesse pour les monter contre le Gouvernement français. Il aura fallu l'intervention personnelle du Président de la République, puis le déplacement du Premier ministre aux Comores, et enfin le voyage des familles sur place pour ramener la vérité quant à la solidarité effective et efficace des pouvoirs publics de notre pays à l'égard des familles comoriennes concernées. Il est regrettable qu'en agissant de la sorte des responsables politiques aient privilégié inutilement la polémique au détriment du recueillement et du deuil partagé qu'imposaient ces circonstances. Cette attitude a prouvé cependant qu'il était nécessaire de mieux entourer et aider cette communauté comorienne, avec des structures et des méthodes adaptées et renouvelées dans l'avenir. Il conviendrait donc qu'il mène, en concertation avec ses collègues chargés de la ville et des affaires sociales, cette réflexion et propose des pistes d'intervention efficaces. Il lui demande donc de lui indiquer la position du Gouvernement français sur cette suggestion.
1.- La France a su mobiliser extrêmement rapidement des moyens destinés à effectuer des recherches sur la zone de l'accident, afin de retrouver aussi bien l'avion A 310 qui s'était abîmé au large de l'île de Grande-Comore, que d'éventuels survivants ou bien malheureusement les victimes de ce drame. Le très fort vent qui régnait alors sur cette zone a rendu très difficile ces recherches. M. Luc Hallade, ambassadeur de France à Moroni, avait dès l'annonce par les autorités comoriennes de la disparition du vol IY 626 alerté en tout premier lieu le général commandant les forces armées de la zone sud-ouest de l'Océan indien (FAZSOI) à La Réunion, afin que puissent être dépêchés sur place les moyens aériens et maritimes nécessaires. Un bâtiment a également fait route depuis Mayotte afin de participer aux recherches. Des moyens humains importants ont été engagés sous la forme d'équipes mixtes (gendarmerie, armée, Croix Rouge, Secours mondial d'urgence), comprenant des médecins et sauveteurs, des plongeurs, tandis qu'étaient mises en place, avec les autorités comoriennes, une cellule psychologique à l'aéroport international Hahaya et une cellule légiste à Moroni. J'ai pu, dès le 1er juillet, aller sur place superviser les moyens ainsi mobilisés et rencontrer la seule rescapée du drame, Mlle Bahia Bakari, que j'ai pu ramener avec moi, afin qu'elle bénéficie en France d'une prise en charge médicale plus spécialisée dans un centre hospitalier de la région parisienne. Devant le traumatisme particulièrement marqué de la communauté comorienne de France et de la population comorienne, et les problèmes assez complexes induits par le suivi des différents aspects liés à un tel drame, M. François Fillon, Premier ministre, a nommé le 3 juillet, Mme Christine Robichon, ambassadrice des autorités françaises auprès des familles des victimes, qui assure depuis un contact direct et régulier avec l'ensemble des familles endeuillées qui résident en France et avec l'ambassadeur des Comores à Paris. À l'occasion de son déplacement effectué le 11 juillet à Moroni, M. Fillon, a pu exprimer aux autorités et à la population comorienne toute la compassion ainsi que les condoléances du Gouvernement français. Il a annoncé la venue aux Comores des familles des victimes résidant en France pour le 13 juillet, et confirmé que la France, tout comme les autorités comoriennes et les autorités yéménites, souhaitait que toute la lumière soit faite sur les causes de ce dramatique accident. Comme vous le savez, dans le cadre de l'enquête technique, conduite, conformément à la Convention de Chicago, par les Comores, le bureau enquête accident (BEA), mobilisé dès les premiers jours ayant suivi l'accident et associé à l'enquête, a affrété le navire américain « ARES », spécialement équipé pour des recherches en grandes profondeurs et équipé d'un robot télécommandé. Celui-ci a remonté à la surface des dépouilles mortelles ainsi que les deux « enregistreurs de vols » envoyés en France, où l'analyse des données qu'ils contenaient est actuellement menée par les experts français, comoriens et yéménites. Ce dispositif technique a permis de retrouver et de remonter à la surface les restes mortels d'une cinquantaine de victimes de ce drame, qui ont été ramenés à Moroni pour qu'il soit procédé à leur identification, avant toute inhumation. Je précise aussi qu'environ 25 dépouilles mortelles avaient été retrouvées sur les côtes tanzaniennes en juillet : à ce jour, 15 identifications formelles ont été validées par la commission d'identification des corps instituée à Dar Es Salam. Une seconde réunion devrait permettre de nouvelles identifications. 2.- Bien évidemment, Mme Robichon, qui est en relation permanente avec les familles des victimes du vol IY 626, est soucieuse que soient respectés leurs droits à la restitution des dépouilles et à l'inhumation de celles-ci dans des lieux choisis par elles. L'hypothèse d'un lieu d'inhumation collectif, avancée par certaines autorités comoriennes, suppose avant tout l'accord des familles. L'ambassadrice veille également à ce que la question de l'indemnisation des familles des victimes soit traitée de façon transparente. Elle agit pour cela en liaison avec les autorités comoriennes (et notamment l'ambassadeur des Comores à Paris), Yéménites, la compagnie Yemenia et ses assureurs, sans oublier, bien sûr, dans ce dossier complexe le ministère de la justice et les autorités judiciaires françaises. Je rappelle en effet qu'une procédure d'information a été ouverte par le parquet du tribunal de grande instance (TGI) de Bobigny et que plusieurs familles de victimes ont également engagé une action judiciaire civile au TGI de Paris. Il me paraît également important de souligner la mobilisation du TGI de Paris pour prononcer, par jugement, le décès des disparus du vol IY 626 et celle du service central de l'état civil du ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) pour établir les actes de décès des victimes de nationalité française, ainsi que ceux des victimes comoriennes qui étaient domiciliées en France. Ainsi, il est en effet difficile d'affirmer comme on a pu l'entendre ici et là que notre pays n'a pas, dans cette douloureuse affaire, été solidaire de nos amis comoriens et particulièrement de la communauté comorienne vivant en France, ni que la France n'a pas pris la mesure des problèmes à résoudre : bien au contraire, les autorités comoriennes ont à diverses reprises tenu à remercier la France pour toute l'énergie et les moyens déployés dans cette triste circonstance. En outre, les autorités de Mayotte ont pu elles-mêmes donner l'exemple d'une solidarité active. 3.- S'agissant des « structures et des méthodes adaptées et renouvelées dans l'avenir » pour mieux entourer et aider cette communauté comorienne résidant en France, nous devons tout d'abord constater que ce drame a permis à l'opinion française de mieux connaître et reconnaître la diaspora comorienne présente dans notre Hexagone : environ 200 000 personnes (vivant principalement à Marseille, en région parisienne, à Lyon, à Dunkerque), mobilisées au sein d'un réseau associatif assez dense de 353 entités, dont la coordination est toujours difficile, mais qui génèrent des flux financiers vers leurs familles restées dans l'archipel des Comores estimés annuellement à 72 millions de $, soit 24 % du PIB de l'Union des Comores et plus de deux fois le montant actuel de l'aide bilatérale française à ce pays. La Coordination démocratique des Comores (CODECO, surtout présente en région parisienne) le Haut Conseil franco-comorien (HCFC), qui regrouperait 70 associations sur tout le territoire, ou bien la Fédération des associations comoriennes de France, pêchent par une représentativité limitée. Ces tristes évènements ont rappelé, y compris à elle-même, la force de cette diaspora, décidée semble-t-il à peser un peu plus dans la vie politique des Comores et qui ne manque pas une occasion de rappeler son attachement à la mère patrie, certes, mais aussi à la francophonie et aux liens multiformes existants entre nos deux pays. À cet égard, il serait sûrement utile de réfléchir à une restructuration du réseau associatif de la diaspora comorienne, qui permette de dégager quelques interlocuteurs représentatifs afin de rendre plus efficace le dialogue que le Gouvernement français souhaite entretenir avec elle. À l'occasion du drame aérien, des carences sont apparues, des ébauches de regroupement et de structuration ont été tentées. Nous souhaitons que ces efforts se poursuivent et aboutissent. Je me dois de rappeler ici que la France et l'Union des Comores ont signé le 10 avril 2006 une convention de développement pour la réalisation d'un programme de codéveloppement (PCUC - 2 millions d'euros), à l'instar de ceux existant avec le Mali et le Sénégal. Transféré du MAEE au ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire le 1er janvier 2008, ce programme vient de faire l'objet d'une évaluation interne et de s'engager dans une deuxième phase, ayant après la parenthèse constituée par la crise d'Anjouan, en 2008 - utilisé 46 % des engagements financiers initiaux. Aux côtés des programmes engagés aux Comores par l'Agence française de développement (AFD), cette deuxième phase du PCUC (prolongée jusqu'en fin 2010) doit fournir l'occasion de mieux travailler avec les associations de la diaspora, avec des organismes comme la CODECO, le HCFC, que la cellule relais animée par le groupe de recherche et de réalisation pour le développement rural (GRDR) doit pouvoir mieux mobiliser. Un effort supplémentaire aussi doit concerner la valorisation des compétences d'experts de haut niveau de la diaspora, notamment dans les domaines touchant la santé publique, la recherche universitaire, l'ingénierie en matière de ressources en eau ou de travaux publics, ou même le développement des réseaux de microcrédit. Je ne saurais, bien sûr, passer sous silence la mise en lumière, par le drame du vol IY 626, de l'enclavement aérien des Comores : les autorités comoriennes, aussi bien que les organisations de la diaspora, nous ont fait part de leurs préoccupations à cet égard. Comme annoncé par le Premier ministre, lors de sa visite à Moroni, nous nous sommes pleinement engagés pour veiller en liaison avec les professionnels du domaine à ce que quantitativement et qualitativement la desserte aérienne de l'archipel des Comores soit rapidement améliorée. Des pistes concrètes ont d'ores et déjà été identifiées. Je ne verrai pour ma part que des avantages à ce que toutes ces questions puissent être examinées dans un cadre paritaire en France sous des formes adaptées, soit au niveau national (avec le HCFC, la CODECO, la Fédération des associations comoriennes de France, dont une meilleure représentativité doit être recherchée), soit au niveau local, dans les principales régions d'implantations : je salue les efforts déjà engagés dans ce sens par les collectivités territoriales françaises concernées et je souhaite qu'elles puissent poursuivre leurs actions, en intégrant notamment des besoins en formation spécifiques identifiés parmi les associations de la diaspora comorienne de France.
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