M. Michel Sainte-Marie attire l'attention de M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur les discriminations inscrites dans la loi. Le Sénat vient d'adopter la proposition de loi visant à supprimer les conditions de nationalité qui restreignent l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions libérales ou privées. Ce texte est particulièrement important car il souligne le fait que, outre les discriminations inscrites dans la loi en raison de la nationalité, la prolifération de discriminations illégales à l'égard d'individus, indépendamment de leur nationalité française persistent. Le contexte économique, social et culturel dans lequel se situe le processus d'insertion des non-Européens ou assimilés, est un phénomène complexe pour la société française. Aujourd'hui, et malgré la lutte de différents acteurs pour faire reconnaître l'égalité des droits des étrangers non européens ou considérés comme tels, des différenciations et des discriminations se maintiennent, voire se multiplient. À cela, les discriminations légales apportent une évidente caution. Comme cela a été souligné a de nombreuses reprises, les discriminations légales tendent à légitimer, aux yeux des employeurs, la discrimination que ceux-ci opèrent entre Français et ceux considérés socialement comme étrangers dans nombre de professions ; ils légitiment une forme de normalisation des discriminations à l'encontre de l'étranger. En effet, en interdisant l'accès à la fonction publique aux étrangers, la loi légitime les discriminations légales dans le secteur privé et les textes de loi favorisent une légitimation implicite de la banalisation des discriminations illicites. En effet, si la loi trace des frontières sur le marché du travail, si elle autorise les employeurs, au premier rang desquels l'État, à discriminer radicalement entre Français et étrangers dans nombre de professions, elle entretient et légitime l'idée qu'il est normal d'opérer les discriminations à l'encontre de l'étranger sur le marché du travail, et finalement à l'encontre de celui que l'on peut distinguer de l'étranger, celui qui est perçu comme étranger, du fait de son origine, de sa couleur de peau, de son apparence physique, de la consonance de son nom, etc. Aussi il lui demande, sur cette question précise, quelle sera la position du Gouvernement.
Le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a pris connaissance avec intérêt de la question relative à l'accès des travailleurs étrangers à la fonction publique. Le statut général des fonctionnaires interdit toute distinction, directe ou indirecte, entre les agents publics « en raison de leurs opinions, de leur origine, de leur âge, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie ou à une race » (cf. art. 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires). L'article 5 bis de cette même loi prescrit toute discrimination en raison de la nationalité, en ouvrant la fonction publique française aux ressortissants communautaires dans les mêmes conditions que pour les nationaux, conformément aux prescriptions du droit communautaire. S'agissant des ressortissants extracommunautaires, si ces derniers ne peuvent avoir la qualité de fonctionnaire, ils peuvent être recrutés en qualité d'agents non titulaires, dans les conditions de droit commun et sans qu'aucune discrimination ne s'opère dans les conditions de recrutement de ces agents en fonction de leur nationalité. Le recrutement des étrangers non communautaires par contrat se pratique de la même manière dans d'autres pays européens tels que le Danemark, l'Espagne ou encore la Belgique. Le droit communautaire, en effet, n'impose nullement aux États membres de l'Union européenne d'ouvrir leur marché du travail aux ressortissants extracommunautaires dans les mêmes conditions que pour les ressortissants communautaires. Il est rappelé que les contractuels représentent aujourd'hui 15 à 20 % de l'emploi public suivant les secteurs considérés et que les évolutions récentes du droit de la fonction publique ont renforcé sensiblement les garanties offertes à cette catégorie d'agents publics. Il en est ainsi des dispositions de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, qui permet à des contractuels reconduits sur leur contrat au-delà d'une durée de six ans de bénéficier d'un CDI, ce qui garantit la stabilité de leur relation d'emploi avec leur administration d'appartenance. Un décret n° 2007-338 du 12 mars 2007 a, par ailleurs, fait bénéficier à ces catégories d'agents de nouvelles garanties en matière de rémunération, de mobilité et de représentation collective. En outre, les ressortissants extracommunautaires peuvent être recrutés librement dans le secteur de l'enseignement supérieur et de la recherche ou dans le secteur médical. Les lois n° 76-1288 du 31 décembre 1976 et n° 80-1040 du 23 décembre 1980 permettent par exemple le recrutement de médecins et de dentistes étrangers dans les hôpitaux publics. Pour toutes ces raisons, une modification du droit applicable à la fonction publique française en matière d'ouverture aux ressortissants d'États extérieurs à l'Union européenne n'est pas d'actualité.
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